Titre du blog : lettres de la campagne
Auteur : sorel
Date de création : 17-05-2008
posté le 30-09-2010 à 11:04:51
Molière chez lui, à Paris.
Le souvenir de Molière est étroitement lié au plus vieux Paris. Nombreuses sont les maisons du centre qui revendiquent l'honneur d'avoir été celle de sa naissance. (à en croire Francine Mallet, une spécialiste, ce serait au 93 rue Saint Honoré). Certaines, en raison de leur grand âge, s'élèvent sur plusieurs étages de caves voûtées qui remontent au Paris médiéval. C'est bien dans la chair même de la ville que les traces du sublime comédien s'inscrivent.
Dans la voisinage immédiat de l'ancien Couvent des Cordeliers (aujourd'hui l'Ecole de Médecine) s'élevait (jusque dans les années 1900) une double maison qu'habitait Armande Béjard. On est là au coeur du foyer du comédien, dans son intimité. Son théâtre n'était pas loin, il a dû hanter ces rues aujourd'hui bigarrées par une modernité trop indiscrète qui tend à gommer tout souvenir du passé. Rendant celui-ci d'autant plus précieux quand il surgit, comme dans un murmure, et offre d'émouvants lambeaux de ce qu'il fut.
Mais Molière est constamment présent dans ce Paris que les assauts de l'urbanisme a pétri avec rage, taillé à merci, et méconnu. Grâce soit rendue à ces historiens de la ville qui dénichent les documents qui réhabilitent des lieux, les peuplent de ces personnages qui hantent notre mémoire.
Une malice de l'Histoire veut que cette présence de Molière s'accuse mieux encore dans le voisinage de l'école de médecine, lui qui donnait du médecin une image si ridicule. Quant aux Précieuses elles sont encore là, dans quelques Salons mondains qui persistent. Mais Proust est aussi passé par la double porte où la valet préposé à la chose, annonce l'arrivée de l'invité. Lui aussi chargera sur la bêtise des dames qui jouant de leur nom (de leur fortune) se croient en mesure de régir l'opinion publique et imposer leurs caprices.
De Molière à Proust le ligne est tracée, qui dénonce les faiblesses humaines. Le Misanthrope n'est pas loin.
On pousse quelques pas de là, rue de l'Ecole de Médecine aujourd'hui, et l'on frôle l'ombre de la maison de Marat, autre fantôme dont on peut se flatter d'en sentir la furtive présence.