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Titre du blog : lettres de la campagne
Auteur : sorel
Date de création : 17-05-2008
 
posté le 06-10-2010 à 11:34:02

Un orage chez Violette Leduc.

Un orage typographique chez Violette Leduc.

C'est venu comme un orage.
C'est un orage.
Dans la tête, alors qu'elle est disponible, ouverte au plaisir de s'épanouir dans le déferlement des mots (déferlement donne une vision de hâte, de brusques avalanches dans la typographie, alors il vaut mieux dire, déroulement), comme lorsqu'on feuillette un livre d'images - ce petit frisson intime qu'on se fabrique quand on lit avec la modestie du spectateur qui s'est glissé dans la salle de cinéma pour se laisser aller au plaisir de voir.
Il en est de même avec les mots. Ils défilent. Assemblés ils composent un paysage (parfois un objet), une situation dans laquelle on tente de se faire une place.
La découverte des mots c'est un peu une invitation au voyage.
Revenons à l'écran.
C'est une page de bonne typographie, d'un livre édité par Gallimard (1970) : "La Folie en tête", auteur Violette Leduc.
Elle conte ses tribulations de jeune auteur. Angoisses, joies fugitives, vertiges. Page 110. Fixez la masse typographique. Elle est compacte. Soudain apparaît une longue fissure qui déchire le texte. C'est un peu la méthode de Léonard de Vinci : regardez avec obstination une tache sur un mur, il en sortira une figure.
Alors, soudainement, la zébrure blanche compte plus que le texte dans lequel elle fait son chemin. Parce que le vide qu'elle construit avec la hâte de l'orage, cette blessure rendue à l'évidence au point de nous retenir, ce vide là, va nous engloutir.
Raisonnable, on s'y glisserait avec précaution comme, lorsqu'au cours d'une promenade, on découvre quelque fissure dans le sol : tranchée en ébauche ou éboulis discret.
Mais lorsque l'imaginaire s'y risque sans précaution comme dans le vertige d'une chute, on s'y perd. De s'y abandonner donne le perfide plaisir d'être déjà un autre et surtout hors de soi (ne serait-ce pas la chute d'Alice, vers le pays des merveilles ?) hors de ses limites charnelles, d'une prison familière.
Dans l'indécision des formes qui sont déjà celles du rêve dont on a perdu des pans entiers au réveil. Habite-t-on durablement un rêve. Ce serait la nostalgie.
On tente d'en reconstruire, approximativement, l'édifice, le peuplant des fantômes qu'on y avait rencontré. et que l'on ne veut pas perdre totalement.
De même on s'est éloigné du texte blessé par cette sinuosité du blanc du papier où il n'a pas su colmater cette étrange blessure, et, de nous y précipiter nous a tourné la tête.
Il sera difficile de retrouver son chemin après ce doux vertige et la masse sombre du texte sanglé dans sa belle lisibilité en corps 12 ressemble alors à un mur.
Parviendrons nous à le franchir ?

photo Michel Flégon.

 

Commentaires

Saint-songe le 09-10-2010 à 18:06:35
lire : interroger (ah mon étourderie, mon étourderie - sois sage, ô mon étourderie, etc...)
Saint-songe le 09-10-2010 à 18:03:52
OUI, j'aurais dû faire psy-quelque chose, j'ai toujours, j'aime toujours interrogé l'âme humaine, la mienne en premier (comme tout psy avant d'exercer), qui me montre ce qu'un enfant ne peut pas voir... Je ne suis saint que dans le songe, monsieur mon ami (plus que savant aussi), je vous l'ai dit, à d'aucuns aussi, via mon blog éponyme (je m'étais choisi Bertrand Sénéchal, Bertrand

Debarbantane, Florian de la Meyre, à "joué" mon Pessoa quand je n'avais que 20 ans - ah l'ambition, ah l'honorable vocatif des vocations, que le pseudo, n'est-il pas , Sieur Sorel ? J'optai pour l'actuel Songe...Oui, Psy, ça me va comme un gant de femme à motif rouge et vert, que j'ai, que je me mets, quelquefois, pour ...dessiner (ou écrire) - chut !!!
sorel le 09-10-2010 à 10:55:58
Pas mal la traduction digne d'un psychiatre cultivé (ils le sont). Mais ce n'était qu'une modeste observation furtive en cours de lecture. Beau temps, même dans les têtes.
Saint-songe le 06-10-2010 à 13:15:33
Illustre "bâtarde" (je porte ce titre dans mon prénom, avez-vous vu ?) J'ai lu une partie de son oeuvre dans le plat pays (qui est le mien, aussi, monsieur Brel), inutile de vous dire, que natif entre Arras et Douai, elle remua mes tripes de gamin en culotte courte !...Cette "masse, ...., compacte.... longue fissure qui déchire le texte", c'est sa vulve blessée me suis-je dit, son "origine du monde" qui saigne de ses "autofictions"... Ai-je tort ?

Le bonjour sous ciel bleu ensoleillé, pas de vent...