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Titre du blog : lettres de la campagne
Auteur : sorel
Date de création : 17-05-2008
 
posté le 21-10-2010 à 12:00:26

Gaston Chaissac et le "mail-art"

Tout artiste, en marge de son oeuvre de peintre, est tenté par l'écriture. Elle est le supplément de sa pensée, une échappée vers des domaines que la pratique et les techniques de son art lui interdisent.
Le cas Chaissac est tout à fait singulier en ceci qu'il offre une autre dimension à  son travail de "plasticien" qu'il n'est que par paresse de langage, car telle n'est pas son ambition, l'urgence de "dire" passant avant toute théorie, les fuyant même.
Une plume sergent major vaut bien le pinceau, et le voilà écrivant à foison, quotidiennement, pour dire ses émois (ses angoisses) conter son village, dresser une sorte de géographie pittoresque, un peu à la manière d'un ethnologue opérant au sein d'une peuplade inconnue, avec une malice, une originalité de vue qui en fait le plus singulier des correspondant en terre vendéenne.
On l'imagine, s'asseyant sur les bancs libérés de la classe où son épouse est institutrice, et retrouvant la patience laborieuse du scripteur maladroit (mais n'est-ce pas une feinte !) pour composer ces lettres si chatoyantes et d'esprit si libre qu'il adresse à ses prestigieux correspondants (dont Paulhan) se posant en une sorte de mémoraliste d'une campagne profonde. Entre l'acidité d'un Jouhandeau et la verdeur d'une marquise de Sévigné. Une écriture qui lui ressemble,  fruste, sans aucun respect des usages, inventant sa propre esthétique. Et jusqu'au support qui défiant les conventions semble les provoquer. Il retrouve (dans l'enveloppe) cette fantaisie (et l'annonce) de ceux qui vont inventer le "mail-art", donnant bien de tracas aux facteurs mais tant de plaisir à celui à qui un tel pli est envoyé !

 

Commentaires

Saintsonge le 21-10-2010 à 13:41:23
Ainsi en fis-je dans mes envois de courriers vers Pierre (Dhainaut ; bien content que vous en ayez souvenir ; y suis souvent allé, quand je gagnais le Nord ; repas ensemble avec Jacqueline, sa fidèle muse et épouse, nous allions sur Furnes goûter quelque glace, ensuite...)

Ici, cela fait penser à Mallarmé : "Les loisirs de la Poste"...genre : "Madame la propriétaire / Du 9 Boulevard Lannes, coin / De verdure ample et solitaire / Dont mon esprit n'est jamais loin..."

Fraîcheur automnale, cette fois , et grisaille, malgré la nuit étoilée !