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Titre du blog : lettres de la campagne
Auteur : sorel
Date de création : 17-05-2008
 
posté le 06-12-2010 à 16:42:04

Hundertwasser peint couché.

De grandes choses, souvent, partent de rien. Naissent dans l'innocence d'un moment d'oubli. L'art est l'enfant d'une distraction autant que d'un songe. C'est d'un crayon errant que certains conduisent leur rêve jusqu'aux lointains horizons de l'oeuvre accomplie.
Voici Hundertwasser, sur le sol accroupi, humant cette vaste feuille de papier sur laquelle il va étaler la couleur comme le soleil étale les richesses végétales sur le déroulé tranquille des champs offerts à ses célébrations.
Il prend tout son temps. Se délecte de silence. Il s'évase en lui-même comme en une eau profonde. Ce qui lui donne cet air égaré, fuyant, quand il marche. Il est encore sur ses territoires, projeté parmi nous. Le regard peu assuré, on le croit faux, il n'est qu'absent.
Dans ses vieux vêtements de fakir il a des allures de mendiant hindou. Dans la rue, les passants se retournent et commentent méchamment son étrangeté. J'ai fait quelques pas avec lui, boulevard Saint Germain. Il n'est pas facile de dialoguer avec une sorte de fantôme. On le retrouve mieux, apaisé, souriant, dans son dessin qui s'est embelli entre temps. Sa croissance est semblable à celle du végétal qui chemine doucement sur le sol, l'occupe, et y dessine ses rêves intérieurs. Des rêves venus des profondeurs de la terre.
Et si la forme de l'arbre qui fait danser ses ramures au vent le plus léger, et si cette invasion tranquille du lierre n'étaient que des images immergées d'une riche vie dans les profondeurs de la terre. La mise en éclat de ses chaudes croissances souterraines, cachées aux yeux des distraits, et qui ne s'adressent qu'aux pensifs, à ceux qui savent s'arrêter devant un caillou, une motte de terre, un buisson, et s'enfoncer, par la pensée, dans les profondeurs de cette matière d'aspect ingrat. Sa richesse est bien cachée. Ne la découvre que celui qui la mérite.
Hundertwasser est un jardinier de ses songes. Il fait resurgir sur le papier ses errances rêveuses. Posant, ça et là, des touches vives comme des fleurs dans un parterre si bien nommé.
Peu à peu se forme, à l'étonnement de ses propres yeux, mais la main vive à dénouer les surprises du dessin, une complexe construction qui évoque le cheminement de la marelle. Comme elle se fermant sur ses propres audaces, l'offrant, au final, comme un itinéraire sacré.
Du dessin à l'espace il n'y a que le pas d'un autre rêve, celui de donner un horizon de vie à ceux que lassent les rigueurs fonctionnelles des maisons en série, des banalités du quotidien.
Alors, Hundertwasser a conçu des maisons qui ressemblent à ses peintures, en sont la croissance magique ; une manière de développer des niches pour ces oiseaux égarés que sont les pauvres humains délogés de leur quotidien.
Des maisons qui ressemblent à des nids fabuleux, à des palais de chimère pour des regards gloutons, avides de plaisirs rustiques. Entrer dans l'intimité des sols, d'une nature qui a ses chaleurs subites, ses splendeurs cachées, ses surprises pour plaire aux personnages d'Alice qui s'y trouveraient bien, au delà des miroirs vite franchis quand l'ennui gagne. Car les maisons d'Hundertwasser sont si intimes avec le sol qui les accueille qu'elles semblent en prolonger les reliefs, les fantaisies.
Il dessine à demi couché, au seuil du sommeil qui est le domaine de toutes les libertés. Ses maisons lui ressemblent, elles ont cet air singulier des décors de nos livres d'enfant, cul par dessus tête, le jardin sur le toit pour courir à la hauteur du ciel.
Ne peuvent habiter de telles demeures que ceux qui sortent du bois. Du bois de leurs rêves enfin réalisés.

 

Commentaires

Saintsonge le 08-12-2010 à 15:30:22
N'ai trouvé à l'instant que votre Piranèse (Belle reliure, 1980...) H.R (épuisé ?)
Saintsonge le 08-12-2010 à 15:21:23
Les "Amazone" sont plus ....attirant(e)s dans leurs choix....et façon de procéder, sous-entendu ou pas, oui, j'irai voir du côté de ces affriolants atours....
Saintsonge le 08-12-2010 à 15:17:39
"FOU", est le mot ! Imaginez : vous n'etes pas reconnu "écrivain" pour....incompétence informatique, Trébouldingue, comme je dis, continuant malgré tout mon texte (qu'ils veulent à tout prix sur PDF...! Car c'est effectivement ça : "technologie moderne" ; le support de l'écrivain, ça n'est quasi plus la page blanche mais la froideur de l'écran diabolique (oui , Duras, la double étrange, il fait ainsi "froid" partout, vraiment partout...) Il faut tout leur mâcher le travail ! Méthode....belge ?.. De plus, j'ai voulu téléphoner à l'éditeur quand une de leur groupe m'alerte : faites pas ça, surtout, malheureux, il a horreur d'un dérangement, supposez que tous "ses" auteur(e)s font pareil ?.. Donc, je peaufine à l'aveugle ce livre...qui devrait paraître début 2011....si mon ordi veut bien !!!) Oui, tout de suite songé à Séraphine dont j'aimais la "folie" créatrice... Heureux de ne m'être pas trompé de référentiel... Tous les enfants ne sont pas "fous", c'est leur pays intérieur qui "dérange" les...grands (les hommes sont pourtant restés de grands ados, non ?) qui ne voient que la surface réelle des choses politico-boursico-mondialistes. Moi, j'aime bien les....enfants.
sorel le 08-12-2010 à 10:34:02
C'est fou cette histoire de pagination. Mais peut-être est-ce en raison des techniques nouvelles, on imprime directement d'après la "prise" informatique .....

Ne vous ruinez pas chez....>>>>Amazone un nom plein de replis imaginaires non ?

Froid partout comme dirait la mère Duras.

A propos de Séraphine de Senlis, pas mal votre remarque il y a du vrai dans le rapprochement. Mais Hundertwasser n'est pas loin de cet art que l'on dit naïf qui est aussi un peu celui des fous (ou des enfants). On s'y perd mais quel délice.
Saintsonge le 07-12-2010 à 23:38:54
N'ai trouvé pour l'heure que votre "univers de Constable"... Nip de Piranèse, quid d' Hubert Robert, j'affinerai, j'affinerai...
Saintsonge le 07-12-2010 à 23:24:43
Quand on aime, on ne compte pas, dit un proverbe...

J'avais acheté par Princeminister six, sept ACR, déjà..., que j ' ai plaisir à re-consulter (parfois, face à la mer, assis sur un muret, c'était l'été)...Donc, furèterai vers leur site (il me faut ce Piranèse, il me faut cet Hubert Robert ! Que ne me faut-il pas encore, c'est que oui, votre liste est longue - une vie de chat vous honore, à mon avis, greffier qu'est le félin ! -, je m'étais gratté le haut du crâne , d'ailleurs... Bon Noel approche aussi, il me faut un cadeau pour moi (qui m'en ferait, sinon ?) A Quimper, ce jour, pour ceux du fiston, Simon... Voilà, un de servi dans la hotte aux générosités...OK, j'ôte mon trouble honteux. Il n'a pas l'air attirant en photo, je ne suis pas Cocteau, non plus...Ou plutôt Radiguet, vu l'âge ... Ces jeux d'horizons couchés, ils me font néanmoins songé à ...Séraphine Louis (ou de Senlis, elle vous dit ?...) , dans la fougue inspirée, je trouve...hormis les motifs, bien sûr... Dites, je n'avance pas dans l'informatisation de mon manuscrit (la pagination ne leur convient pas), je vais attendre autre éditeur, j'ai bien attendu....30 ans, je peux patienter un chouia de plus... Je ris à l'idée de prendre ce luxe... Qu'en dites-vous ?... Bonne nuit neigeuse, à ce que les infos m'ont transmises (non pas la Poppins, qui a...."disparu"..., mais la radio) !
sorel le 07-12-2010 à 10:04:48
Pas de honte surtout. Connaître, c'est beaucoup dire. Rencontré, pour des raisons professionnelles, mais, sans passion. C'était un bonhomme assez peu sympathique. A propos des livres dont vous envisagiez l'achat (surtout ne les prenez que s'ils sont "bon marché"), de toutes manière votre curiosité me touche beaucoup. Oui, je pense qu'on peut les trouver par Priceminister (ou quelque chose d'approchant) ou Amazone. Je sais que j'y ai beaucoup de titres. Bonne journée, dans le froid....
Saintsonge le 06-12-2010 à 22:16:36
Vous le connûtes combien de temps ?

et, d'une ignorance : je le méconnais (honte à moi ?)