Titre du blog : lettres de la campagne
Auteur : sorel
Date de création : 17-05-2008
posté le 20-12-2010 à 11:13:15
Péladan en gourou.
A quoi (et où) peut mener le souci de s'extraire de la réalité , de prétendre offrir un horizon dégagé de toute banalité, d'exalter des valeurs spirituelles ou strictement cérébrales quand on ne dispose pour y parvenir que du domaine des mots, eux-mêmes prisonniers des habitudes, des préjugés mais qui se révèlent des armes redoutables selon les mains de ceux qui s'en emparent ou les précipitent sous un jour nouveau, des couleurs inédites, une aspiration profonde de l'âme.
La "fin de siècle est pleine de ces aventures qui rejettent le "naturalisme" de Zola et cultivent le mot rare, la pensée sophistiquée, les paradoxes de l'esprit et souvent la provocation pour donner plus de poids à leurs choix.
Si Mallarmé, Rimbaud surent prendre à bras le corps le mot pour lui donner un nouveau sens, les écrivains considérés comme des "décadents" ne disposent que d'un arme trop usée. Ils jouent de la préciosité (Jean Lorrain, les Goncourt), ou dérivent vers des vocations qui atteignent le statut d'homme de lettres et le confondent avec le gourou.
C'est dans le monde des gourous que Joseph Péladan fait son étrange chemin parsemé non seulement de livres, mais d'actions, de provocations qui couvrent même sa façon de s'habiller (entre le prêtre et le mage). Il veut réformer radicalement l'acte d'écrire, le transcender, lui donner une dimension mystique qui n'échappe pas au clinquant du fétichisme, du sulfureux message des sectes et l'alchimie des légendes descendues dans l'espace de la création littéraire.
Le voici "drapé d'un burnous noir en poil de chameau filamenté de fils d'or, en velours vieux bleu, botté de daim et comme Absalon chevelu, la barbe ointe d'huile de cèdre." prêchant la bonne parole, tirant la pensée vers les cimes d'un idéalisme teinté de religiosité, adhérant aux sources de la kabbale (avec Stanisla de Guaïta), entraînant dans son équipée (le salon de la Rose Croix) l'énigmatique Eric Satie (point exempt de malice et un brin farceur, n'est-il pas aussi bientôt dans les coudées fumeuses de dada ? ), et naturellement militant pour la reconnaissance de Wagner en qui toute cette génération (en dépit d'une forte poussé de l'opinion anti-germanique) voit le mage d'une pensée élevée la sauvant d'un quotidien honni. Péladan s'agite dans ce mouvement, milite, fait, de l'écriture, une arme étincelante pour diffuser une pensée ardente, quasi religieuse.
Commentaires
Vous avez pointé juste ce qui avait aussi séduit POL en le "zig zag savant" , le stipulant dans mon manuscrit romanesque en : " - mouvement de sensualité et d'érudition joyeuse" , via sa lettre du 4/12/2007, déjà ! Du plus loin que je remonte, cela doit me venir de ma position demi-trois quarts aile au rugby...(je slalomais entre les jambes des adversaires, tout petit que je fus..., au grand plaisir de mon équipe, et du prof...d'alors !)... ; j'ai poursuivi ainsi dans mes cheminements spirituo-littéraires, car au lieu de courir le jupon à Paris, je furetais parmi nombreux ouvrages, de siècle à siècle... Merci de cette confirmation d'expert... Je continuerai ainsi, jusqu'à la dernière heure, dessins-crobars aidant...
j'aime bien le zig zag (savant) de votre pensée. Oui la spiritualité vous guide, je l'avais remarqué dans votre blog et en était intimidé. Je ne suis qu'un païen pas paillard...
L' Androgyne en quête de son propre Graal ! Celui qui osa prendre nom de Sar Merodak dans cet accoutrement qui me fait d'ailleurs aussitôt penser à...Klimt, habillé ainsi dans son atelier, tête nue, toutefois ! Rosicrucien qui écrivit sous l'égide de Léon Bloy dans le fameux "Chat noir" !... Fasciné par Vinci, j'eus en main (de la BNF, quand j'étais sur Paris) le volume "La philosophie selon les manuscrits de Vinci" (ou quelque titre approchant), en fait, ça m'avait troublé ses recherches ...occultes ! .. D'où ma bifurcation vers la spiritualité pure. N'est pas Sar-truc qui veut !..(ou madame Blavasky !).. Je vous envoie du très beau ciel bleu envahi d'un éclatant soleil pour faire fondre la neige dont me parla, hier soir, la chipie "Poppins"...qui m'invite pour 2011 (utopie, reve, réalité d'un désir ?... La Femme est si changeante que je ne mise sur plus un propos tenu !..) Relire : le "vice suprême" , alors ?