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Titre du blog : lettres de la campagne
Auteur : sorel
Date de création : 17-05-2008
 
posté le 07-01-2011 à 09:52:54

Cioran, poison ou potion ?

On ne consomme du Cioran qu'à petites doses comme un médicament qui n'est pas loin d'être un poison (ils le sont tous). De s'immerger dans les mots qu'il manipule avec une science unique de leurs effets (de leur profondeur) c'est risquer de n'en pas revenir. Ou brisé. Décoiffé comme lui-même l'a été après une jeunesse roumaine folle d'exaltation, de choix radicaux, et d'erreurs qui vont peser sur tout son avenir.
Le voilà réfugié (apatride) dans un Paris qui, au delà de l'épreuve douloureuse de l'Occupation, va flamboyer de talents et d'énergie salvatrice, jusque dans l'expression du doute, de la douleur, de l'angoisse, le génie étant d'en faire une matière à réflexion, et forcer ceux qui s'en approchent à revoir le sens à donner à leur vie.
Une poignée de ceux là qui vont bouleverser nos vie étroites (Artaud, Genet, Becket, Sartre, Michaux, Gracq, Bataille, Camus) et Cioran en retrait, mais sulfureux et pourtant très "classique", "faisant le philosophe" distillant les aphorismes qui vont faire leur chemin dans l'esprit de ceux qui les découvrent, les rencontrent, s'en délectent comme d'une drogue.
Mais il faut aborder et lire Ciora "à petites doses". D'entrer dans sa prose comme on pénétrerait dans un roman ou même un  essai habituel, risquerait de nous éloigner de lui, de nous lasser.
On le lit comme le prélat son bréviaire, d'ailleurs il écrit "court", bref, en aphorismes qui demandent qu'on s'y attarde, qu'on s'en imbibe, comme d'une potion qui entre en nous et fait son nid.


 

Commentaires

saintsonge le 07-01-2011 à 14:21:50
PS / Vous avez mangé le "n" dans votre texte à Ciora(n), je constate que j'ai croqué le "s" à ce qu'il faut lire comme étant significatif de plus dans la formule "que je n'ai plus"
saintsonge le 07-01-2011 à 14:19:10
C'est ce quarto que j'avais, c'est celui-là que j'ai donné - "cadeau" empoisonné, en ce cas de votre billet, ou antalgique pour l'acquéreur-receveur ? D'ailleurs, j'ai l'impression de le revoir , ici, "mon" volume biffé de pleins de notes que je n'ai plu - que ne donné-je pas ? - ; Proust nous répond peut-être : "la souffrance est une sorte de besoins de l'organisme de prendre conscience d'un état nouveau qui s'inquiète, de rendre la sensibilité adéquate à cet état".... Voilà, je crains devoir vous dire qu'il me manque, un peu, ce Cioran annoté de ma petite main d'ignorant (que sait-on auprès de ces "génies" ?) Dans le crachin de l'instant breton, ma vive pensée...(quand ce matin, j'étais sur la plage, substance pensante solo, tel un Spinoziste questionnant la "substance étendue", il faisait bien doux, savez-vous, très doux - j'étais en mini pullover d'automne, qui plus est - , si bien que je me dit qu'à changer d'aspect tout le temps comme ça, à nous placer quatre saisons en une journée, le ciel breton a corps de femme (chut , tenez-le vous pour dit , ne le répétez pas !) Ah, j'ai posté mon exemplaire "papier" , photocopié, pour P.. Dhainaut, il y a deux jours...Je l'eusse fait pour vous, si je savais où le joindre.)