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Titre du blog : lettres de la campagne
Auteur : sorel
Date de création : 17-05-2008
 
posté le 13-01-2011 à 10:06:35

Troie, la recherche du merveilleux.

Sur les murs d'un gris sale de la classe d'Histoire il y  avait les photographies prises par le professeur lors de ses séjours annuels sur les sites de l'Histoire des Hellènes. C'était, là, le tremplin de voyages imaginaires dont il était le vaillant pilote. Et point Ulysse pour autant, encore que l'on connaissait sa Pénélope fidèle aux fêtes où chacun s'emparait d'un personnage de la Mythologie grecque, se contentant le plus souvent d'agiter avec conviction le costume censé nous distinguer : qui est Jupiter (même la barbe, si  bien qu'il ressemblait tout autant à Dieu le père que nous honorions chaque matin à la messe basse), Neptune et son trident et Apollon qui n'était pas nécessairement le plus beau de la classe. Ne manquaient que Vénus à laquelle nous aspirions et même Junon.
C'étaient des fêtes sans bacchanales ni satyres, ce qui enlevait beaucoup de leur charme.
Le retour en classe se faisait néanmoins avec plus de conviction et il fallait traduire Homère dans le texte. Ainsi Troie fut-elle de notre quotidien, et ses ruines jamais visitées que par l'imaginaire, plus connues par  nous que les rues chaudes de la ville qui nous étaient normalement interdites.
Vint ensuite la découverte du fameux Schliemann "l'inventeur" de Troie, qui voulait prouver la véracité de ses convictions par la lecture d'Homère. Il fut la raison de notre passion partagée pour l'archéologie et, pour certains, l'amorce de notre vocation.
Henrich Schliemann est, en soi, un étonnant personnage, digne de Blaise Cendrars (curieux qu'il ne l'ait pas engagé dans sa folie biographique), autodidacte, féroce homme d'affaire, qui, débutant comme vendeur ambulant, constituera un telle fortune qu'il pourra financer d'importantes missions de recherches archéologiques, dont celles de Troie et de Mycènes.
Mais sa passion pour l'archéologie n'est pas née dans la sillon scientifique (il ne l'était guère et mal vu par les spécialistes) mais dans un climat particulier qui entoure son enfance, son père lui contant les légendes allemandes du romantisme, entretenant chez lui le goût du merveilleux.
Il se fait le preux chevalier de son amour d'enfance et développe un goût prononcé pour les aventures périlleuses qui relèvent du folklore germanique.
Troie, pour lui, est la ville d'une folle aventure amoureuse, de sang et de larmes, mais menée par des héros. Il veut arracher au sol la mémoire de cette aventure hors-normes.
On a beaucoup critiqué sa fougue, contesté ses conclusions, mais l'homme, dans ses dimensions fantasmatiques, reste un personnage attachant (pourtant d'un moral douteux et point étranger à certaines manipulations et spéculations contestables). Freud se penchera sur son cas. Il illustre pas cette féroce volonté de se plonger dans le passé une compensation à la médiocrité du quotidien qu'il a précocement perçue. Confondant archéologie et recherche du merveilleux.


 

Commentaires

saintsonge le 13-01-2011 à 12:43:37
Cassandre laissa-t-elle tout ça en l'état, sitôt Clytemnestre la trucida ?..La fille de Priam cria atrocement.... Toutes ces pierres churent-elles à son fiel alarmant ?

Nul n'écouta davantage Chryséis, Briséis, et, de la femme, l'homme chuta ainsi que les Dieux qui s'en éprirent : ruine de l'humanité, par èros ...né du Chaos ?...Toute passion est mal-heureuse, non ?. Deuil et mélancolie, signe Freud.... Alain : "ce qui est criminel, c'est l'amour manqué", qui devient un terrain de ruines "merveilleux" à contempler ?...

Le miracle est prévisible.

Crachin breton dans la grisaille filamenteuse.....Trébouliste !