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Titre du blog : lettres de la campagne
Auteur : sorel
Date de création : 17-05-2008
 
posté le 19-06-2011 à 16:10:33

Topographie parisienne de Modiano

"Au premier étage d'un immeuble nous avons remarqué deux grandes fenêtres éclairées. Nous nous sommes assis sur un banc, en face,  et nous ne pouvons nous empêcher de regarder ces fenêtres. C'était la lampe à abat-jour rouge, tout au fond qui répandant cette lumière sourde....- On devrait sonner à la porte m'a dit Louki, je suis sûre que quelqu'un nous attend".
Qu'on se souvienne : la petite lumière perçue par Nadja, place Dauphine où l'avait entraînée Breton. Car Louki c'est une autre Nadja, errant dans Paris pour finalement s'y suicider.
Partrick Modiano dans  "Dans le café de la jeunesse perdue", propose un itinéraire, celui de Louki personnage énigmatique, attachant, pathétique, dont on voit peu à peu se former l'écart qui l'exclue de la réalité qu'elle aura affronté sous ses phases les plus marginales, dans un Pigalle dont nous est donné avec une précision d'huissier la déclinaison des rues qui vont de la place Clichy à la Place Blanche. En sus de la topographie de Pigalle, Modiano esquisse une théorie passionnante sur les zones neutres (ces trous d'ombre dans la texture de la ville, où rien n'aura présidé à la topographie abandonnée à l'oubli comme les trous noirs dans la stratosphère).
 Dans une écriture volontairement tenue, sobre, qui prend les personnages par la main et nous les rend extraordinairement présents.
Louki au centre d'une intrigue donnée à plusieurs voix qui se croisent, attrapent tous les détails car il y a un côté roman policier dans ce portrait d'un groupe d'intellectuels des années Saint Germain des Près (Adamov, Maurice Raphael).
Et Louki , rendue sublime par son mystère.