Titre du blog : lettres de la campagne
Auteur : sorel
Date de création : 17-05-2008
posté le 24-06-2011 à 09:41:09
Verlaine chez lui.
"Chez moi, c'est un marchand de vins. Il y a écrit sur une lanterne : Hôtel. Entrez par la boutique. On vous mènera dans ma cellule qui est un rez-de-chaussée. La rue Moreau donne dans celle de Charenton, à deux pas des Quinze-Vingts. La cour c'est une impasse à droite de la rue Moreau, tout près d'une voûte du chemin de fer de Vincennes." Verlaine décrivant son domicile (à René Ghil) ouvre les portes à tous les observateurs (nombreux) qui viendront le visiter dans ce qui était un infâme taudis.
De nombreuses descriptions nous en sont données
Gustave Kahn : " C'était, cour Saint-François, presque cour des Miracles. Sous le tonnerre intermittent du chemin de fer de Vincennes, à côté des boutiques aux devantures à plein cintre, une petite impasse ; un chantier de bois appuyait contre le viaduc de longs madriers et des échaudages savants de poutres équarries décorait l'horizon d'une petite boutique de marchand vin où je trouvais Verlaine uniment placé devant un verre ; il m'en offrit la rime, car sa plaisanterie était demeurée banvillesque...."
Et E.Raynaud, dans "La mêlée symboliste", d'y aller de son avis : " Sans parquet, sans carrelage, sur la terre battue et boueuse, dans un cabinet sombre que le corridor séparait seul du marchand de vins, près d'une cour encombrée de hardes, de ferrailles et d'une barricade de voitures à bras... où c'était du matin au soir, et du soir au matin, dans ce malencontreux cul-de-sac, un piétinement continuel, une tempête de rumeurs et de cris, de chants, d'appels, d'aboiements, de rires et de disputes"
Dans ce climat éprouvant, dans un concert d'amitiés partagées avec toute une génération d'admirateurs, Verlaine composait les poèmes les plus délicats, les plus subtils, au plus près d'une sensibilité toujours en éveil, comme un frisson de douceur et de mélancolie autour d'un destin malheureux.