Titre du blog : lettres de la campagne
Auteur : sorel
Date de création : 17-05-2008
posté le 01-08-2011 à 15:45:07
Le retour à la matière, la fin de l'art ?
C'était fatal. D'être passée du sujet à la matière pour le dire, la peinture s'emparant des instruments sur lesquels elle s'est édifiée, des matériaux qui la nourrissaient devait immanquablement s'en tenir au matériau pour lui-même. A l'état brut, où l'intervention de l'artiste se résume à un agencement , comme une sorte de metteur en scène organise des objets. Encore que la matière (fut-elle à l'état brut) a une force, un contenu symbolique qui ne peut échapper au regard de celui qui tente d'en pénétrer les secrets. On reviendra toujours à Gaston Bachelard qui a épuisé le sujet.
Sous le label "arte povere" (parce que le mouvement qui le préconisait venait d'Italie) des artistes s'en prennent aux matériaux les plus pauvres (d'où le titre revendiqué) et composent, agencent, distribuent, orchestrent ce qui autrement n'aurait même pas droit de regard.
Une anecdote pour l'illustrer.
C'était dans le cadre du Salon Comparaisons (dans les années 70) L'accrochage terminé le service de nettoyage du musée (art moderne de la ville de Paris) passe dans les salles. Un "technicien de surface" remarque un tas de terre, de cendre, quelque chose qui ressemble à des détritus oubliés sur place. Et, consciencieux, de le balayer. Au vernissage, scandale, un artiste (était-ce Mario Merz ?) constate que son oeuvre avait été écartée. Confusion. Oui, des valeurs. On pouvait gloser à loisir sur cette équivoque.
Pourtant, de faire usage de matériaux pauvres pouvait se justifier, représenter une attitude artistique défendable. Mais n'était-ce pas aussi avouer qu'on avait fait le tour de l'affaire.
Aux origines la matière est élevée au "rang d'oeuvre d'art" sous la main de l'artiste, à terme, c'est la matière qui retrouve son pouvoir.