Titre du blog : lettres de la campagne
Auteur : sorel
Date de création : 17-05-2008
posté le 06-08-2011 à 16:42:58
Chaque lieu a son fantôme.
La rue des Alchimistes, située dans l'enceinte du château, a été voulue, en 1587, par Rodolphe II, amateur de sciences occultes et d'alchimie et qui installe là dans son voisinage pour mieux les surveiller ceux qui prétendent (ou ambitionnent) transformer le plomb en or, ou s'attachent à retrouver la pierre philosophale.
C'est Ottla, sa petite soeur, qui trouve pour Franz Kafka une des petites maisons à louer. Maisons miniatures et qui semblent des jouets.
Kafka s'en contente d'abord puis s'enchante du lieu. Il le décrit longuement à Félice Bauer quelques temps après son installation et en vante les charmes.
C'est là qu'il viendra à bout du "Médecin de campagne" et y rédige "Le Gardien du tombeau" et "La Muraille de Chine".
Kafka (on est en 1916) se terre chez lui, n'ayant de contact qu'avec ses deux plus intimes amis, M ax Brod et Oskar Pollak.
On marche lentement dans la rue en pente. S. est à l'écoute de cet air léger qui semble flotter, dans le calme total du lieu, (la saison n'est pas celle du tourisme)
soudain, un homme vêtu comme un petit fonctionnaire, vient à notre rencontre, il semble vouloir nous adresser la parole. Ni S. ni moi ne parlant le tchèque on s'attend à un dialogue chaotique, fait surtout de gesticulation.
De près on découvre un très beau visage, marqué par les ans (ou par la maladie). Il nous dévisage avec insistance, mais sans violence ni agressivité, il murmure, (en anglais), ne vous affolez pas, je suis Kafka, je n'ai jamais quitté ce lieu. Les touristes m'ignorent mais ils se précipitent pour aller voir mes photos et acheter des cartes postales où je suis avec mon chien. Sachez le aussi, tous les lieux sont hantés ainsi, mais les fantômes ne savent pas toujours retrouver leur apparence physique de vivant. Ceux qui y parviennent, ils sont rares, n'en sont pas plus heureux pour autant.
C'est alors que j'avouais à S. une aussi étrange rencontre. Celle de Gérard de Neval qui rôde toujours du côté de la rue Notre Dame de Lorrette.
Chaque lieu a son fantôme.
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Commentaires
Puis Kafka demanda à son ami Max Brod de, surtout, brûler tous ses manuscrits (ouf, il n'en tint pas le voeu formulé !)...
Dites, au bout de ma rue se trouve le cimetière marin où repose G. Perros, ainsi doit-il me "visiter" souvent (son portrait sur mon mur aussi), là où je loge, en invité payant, me plais-je à dire, plus joli que simple locataire...
Le ciel vous tienne en bonne inspiration.