posté le 17-06-2008 à 14:00:50
Baudelaire, si proche et pathétique.
Le voici donc, magnifique et sublime, théâtral et pathétique, avec son air de dandy fatigué (ou malade) ayant déjà traversé le miroir. Il a conservé cette intensité du regard qui est le propre des hommes de génie (n'est-ce- pas celui d'un Picasso ?)
Un regard qui est autant porté sur soi (à l'intérieur de soi) que sur le monde extérieur. Un regard d'eau et de feu. La blancheur excessive du col détache la tête du corps, en souligne le volume si plein et dense, où sont vigoureusement dessinés les traits qui disent la personnalité, signent l'individu qui porte "à hauteur de la tête" sa folie intérieure. Celui qui n'affiche rien serait-il une négation d'homme, une simple mécanique coulée dans le moule social pour se confondre avec la masse ?
Baudelaire exhibe et promène sa quête comme une enseigne. On ne s'adresse pas, à un tel homme, comme au simple planton qui nous interdit l'entrée d'un lieu que l'on veut atteindre. Et pourtant il est, d'une certaine manière, à la fois la sentinelle et le coeur de cette citadelle qui nous enseigne les profondeurs du monde (et de notre propre conscience).
C'est pourtant à l'instant où il redevient homme (au niveau de notre propre fragilité) qu'il est le plus pathétique, le plus attachant. Soleil noir de notre modernité, il est le frère sublime de Gérard de Nerval.