posté le 19-06-2008 à 11:23:22
Encore Gaston Chaissac.
Puisqu'il est question de "lettres" dirais-je assez combien j'ai regretté de n'avoir jamais rencontré Gaston Chaissac. Une rencontre ratée (tout comme pour Blaise Cendrars) alors que celles de Samuel Beckett ou d'Henri Michaux relèvent de l'échec. Avec le premier parce que j'étais intimidé (allez savoir pourquoi ?). Elle s'est bornée à quelques pas, rue Jacob, à commenter les vitrines de quelques antiquaires et d'évoquer Nathalie Barney (qui vivait au 20 de la rue) et dont Beckett n'avait manifestement rien à dire, tant elle est loin de son univers. Avec Michaux c'est plus subtil et un rien pervers. Il avait assisté à la présentation de presse du film que Charles Chaboud (en fait, la fille de Pierre Schaeffer prendra le relais du tournage) avait programmé pour TF1, en partant du "Complexe de Pompéi", un modeste petit essai sur la mémoire et la fascination des ruines que j'avais alors commis et qu'avait gentiment publié Sophie Horay.
Michaux, cinglant, un rien méprisant, m'assurant que l'ouvrage avait été bien utile pour caler le pied boiteux d'une commode chez lui. Sans doute une galéjade, il me fallait la prendre pour telle, mais la flèche m'a blessé. Sans rien gommer de l'intense admiration que j'ai pour lui.
Chaissac donc. Il reviendra constamment dans le déploiement des mots qui constituent la matière même de mes "lettres". J'admire sa verve, son sens du ridicule, son acuité de vision devant les petites choses de la vie, les personnes. C'est une sorte de Saint-Simon des petites gens, de la campagne. Des portraits impitoyables et cependant jamais méchants. Une approche si directe de la vie, débarrassée de tout préjugé. Une aubaine pour qui veut traduire la vie et la pensée de ceux qui n'ont pas accès au verbe dans toutes ses subtilités. Encore qu'il faudrait revoir nos propres préjugés. Ce sont parfois les propos "bruts" de ceux qui ne revendiquent pas la culture (un fond de commerce pour gens avertis ?) qui parfois visent au plus près le sens de la vie.
Commentaires
c'est la plaisanterie de base, entre écrivains