VEF Blog

Titre du blog : lettres de la campagne
Auteur : sorel
Date de création : 17-05-2008
 
posté le 24-08-2008 à 16:57:52

Guy Debord et l'errance parisienne.

C'était, dans le petit milieu universitaire qui fréquentait Le Soleil dans la tête, le sujet de bien des conversations. Il était secret, et, furtivement, il était passé, sans décliner son nom, mais on l'avait reconnu, c' était Guy Debord. Un voisin. On distribuait sa revue l'International Situationniste avec ses couvertures aux couleurs métallisées et sa typographie serrée, austère. Elle se trouvait au coeur de bien des "mouvements" actifs de l'époque, entre le lettrisme, la queue du surréalisme et l'activité situationniste qui va naître sous les auspices de personnalités  bien différentes. On y trouvait aussi  bien des égarés du surréalisme comme Max Bucaille que des artisans de l'activité culturelle qui va de Cobra (Asger Jorn) au "mouvement nucléaire" italien (avec Baj en figure de proue). Guy Debord était le moteur d'une action radicale bientôt plus politique que poétique. Le fut-elle, sinon par abus de nouveauté et une sève particulière qui faisait dévier les vieilles notions de l'errance urbaine par exemple. C'était l'aspect qui m'avait le plus touché. Un exemple : Déambuler dans une ville en se fiant au plan d'une autre. Absurde ? Non, significatif qu'il fallait se soumettre à tous les accidents de parcours, les dérives, car telle était l'ambition de ce projet utopique autant qu'apparrement ridicule. C'était, porté à ses zones vertigineuses d'insolite, la manie que nous avions, encore écoliers, de se donner des itinéraires sur la carte lumineuse du Métro parisien. Appuyant au hasard sur l'un des bouton et se soumettant au programme proposé. Que de découvertes alors et de merveilles urbaines. C'est au usant de toutes les ressources de la ville (en l'occurrence Paris), qu'on se réveillait et sortait de nos habitudes.
Guy Debord compose, en partant de cette idée, un livre d'une rare beauté et audace typographique. Les pages striées de dessins, de graphisme, de collages, et distribuant des morceaux de typographie comme des affichettes dans un rythme haché ( Blaise Cendrars, Pierre Albert Birot, les futuristes et les dadaistes avaient déjà expérimenté la chose) réinventent un itinéraire poétique. C'est une sorte de cartographie du rêve, un manuel de l'errance.

 

Commentaires

durireauxlarmes le 29-10-2008 à 01:37:53
Bonsoir,

J'adore cet article. Voir autrement, changer les paramètres, ré-inventer la Vie, bousculer les habitudes pour ne pas se fossiliser, comme les deux étudiants du livre d'Alexandro Jodorovski dans "La danse de la réalité". C'est tout à fait mon délire.

Très cordialement, durireauxlarmes.
ooz le 29-08-2008 à 19:02:39
Ensuite (quand j'étais plus grande) je descendais à Bir-Hakheim, et je traversais la Seine, il fallait que je fasse le tour de la statue équestre, (c'était ça mon jeu du jeudi)
Cybel le 25-08-2008 à 16:56:46
le panneau lumineux au métro Etoile... Je devais descendre à Passy, je n'avais qu'une couleur.

Des gens venaient, appuyaient sur des touches qui faisaient apparaître vert, rouge, bleu. Quel mystère pour moi qui n'osais m'aventurer plus loin que le trajet précalculé par Maman