Titre du blog : lettres de la campagne
Auteur : sorel
Date de création : 17-05-2008
posté le 28-11-2008 à 15:47:24
Léautaud pour mémoire.
Première et furtive vision : il est là, menu dans son accoutrement qui lui donne l'air d'un clochard. C'est au bout de la rue de Seine, quand elle frôle l'Institut, dédaigne l'arcade qui conduit vers le Pont des Arts. Il est immobile, pensif, regarde devant lui comme s'il cherchait quelque chose, ou subitement, se disait qu'il avait oublié un objet dont il aurait besoin, alors qu'il porte à bout de bras un lourd cabas d'où jaillissent des poireaux et des carottes qu'il va emmener dans sa retraite de Fontenay aux Roses.
Nous y voici, justement, alors qu'on allait chez l'ami Pierre Descargues qui habite une jolie maison pleine de livre et de sculptures. On s'égare un peu dans ces douces rues de banlieue qui sont restées des rues de village. Soudain, alors qu'on ignorait sa survie ( Léautaud étant mort depuis longtemps), on bute sur la maison aux cent chats, reconnaissable à travers la belle image qu'en a donné J.J.J Rigal dans une gravure ouatée comme une confidence.
Du Quartier Latin à cette bourgade tranquille il y a la juste distance d'une vie dont le quotidien a nourri l'oeuvre littéraire de celui qui n'inventait rien mais voyait tout avec un oeil impitoyable et une sentimentalité de fillette perverse. Celle d'un homme blessé. Le misanthrope de Molière a troqué sa pelisse de théâtre contre le vieux pardessus qui sert de refuge au chat quand il n'est pas l'uniforme créant la silhouette de celui qui en est devenu une légende.