Titre du blog : lettres de la campagne
Auteur : sorel
Date de création : 17-05-2008
posté le 07-12-2008 à 16:17:09
Léo Larguier, un personnage de Balzac.
Il fallait bien que la culture fusse bien arrimée à la vie quotidienne, en étroite intimité avec ce qu'il y a de plus dérisoire en notre ordinaire. Elle côtoie ce que nous sommes même sans y penser. Chaque pas nous conduit vers un poète, un peintre, un musicien, ceux-là qui nous remuent l'âme. Sans cela autant mourir.
On ne cherche pas leur voisinage, il s'impose, nous ravissant comme la prière élève l'âme du croyant. Leur réalité est notre église. Nous y croisons ceux qui nous nourrissent de leur savoir, de leur génie.
Un souvenir pour situer la chose. Rue Saint Benoit, à Saint Germain des Près. Elle est brève, droite, s'imposant, tranquille, où s'amorcent les vitrines de la librairie La Hune. On y dînait, brièvement, d'un oeuf sur une purée, dans une minuscule salle dominée par une mezzanine qui semblait ne servir à rien. On savait que Marguerite Duras avait vécue dans le voisinage. M'intéressait bien plus celui de Léo Larguier. Je situais sa maison près de ce jardin miniature qui prend ici des proportions de rêve végétal.
On le savait méridional, et de fort accent. Il aurait rencontré lors de son service militaire Cézanne à Aix, et même Germain Nouveau quand ce dernier mendiait aux porches des églises. Apollinaire l'aime bien, il en parle dans ses chroniques de nonchalante mémoire.
Dans les revues médicales qui ont formé ma culture artistique dans les années 50, il était fort présent et passait pour un "chineur" éclairé. On le disait entouré d'objets hétéroclites, quelque chose comme l'antre d'un antiquaire. C'était un personnage de Balzac. Avec ce qu'il y a de maniaque, de forcené dans les traits de son caractère, jusqu'à oublier (ou négliger) le présent. L'amour des choses inertes n'est-ce pas justement le savoir de leur donner une âme.
Commentaires
Un fait étrange de ce membre de l'académie Goncourt :
né et mort un ... 6 décembre (une belle boucle de vie !)
Pour Duras : sur la porte de ma chambre qui ressemble tout à fait à la sienne, j'ai scotché la photo de sa chambre, 5 rue Saint-Benoît, 3ème étage gauche...
pour raisons personnelles il m'est très antipathique
les raisons personnelles ici révélées : silhouette, attitude, tweed, position de la main, fauteuil préféré : on dirait un homme que j'ai épousé il y a trois, quatre ans ... (et n'ai pas revu depuis, ou peut être deux, trois fois) ; cet embonpoint cache mal un mal-être pernicieux