Titre du blog : lettres de la campagne
Auteur : sorel
Date de création : 17-05-2008
posté le 04-01-2009 à 12:57:08
Lautréamont le vampire
La femme n'a pas la part belle dans Les Chants de Maldoror. Et l'image de la cruauté qui en fait la trame, est endossée par l'homme dans sa désolation et comme une arme.
On a pu noter qu'Isidore Ducasse dans sa fureur de lecture s'est approché des "romans terrifiants", cette production littéraire anglaise du XVIII° siècle où domine Ann Radlciffe, qu'il n'a pourtant pas épargné. Elle est, dans Les Poésies, le "spectre toqué". Pourtant Ducasse est friand de cette prose bavarde et imagée qui met en scène l'horreur distillée avec une science exacte des effets d'épouvante.
On lui trouvera des liens encore plus étroits avec Mathurin (le compère des ténèbres), auteur de Melmoth, plusieurs fois traduit en France, en particulier par Marie de Fos, en 1867, chez l'éditeur Lacroix à qui il confiera le soin de publier les Chants de Maldoror (qui, en fait, paraîtront en Belgique, au lendemain de sa mort, chez l'associé de Lacroix : Verboeckhoven) et dont le boutique se trouvait à l'angle du Boulevard Montmartre et de la rue Vivienne, dans le périmêtre étroit dans lequel va se dérouler la vie parisienne de Ducasse.
Des scènes de vampirisme sont dans la logique des Chants de Maldoror. (Chant I°) d'une force terrible et provocatrice. Les commentateurs de Lautréamont mettent sur le compte de son amour blessé pour Georges Dazet, connu dans sa scolarité, l'énergie dévastatrice des Chants. Dazet devenu, dans une version ultime : " le poulpe au regard de soie, le rhinolophe les quatre pattes-nageoires de l'ours marin de l'océan Boréal, le crapaud, monarque des étangs et des marécages, l'acarus sarcopte" ,car on entre là dans l'étrange bestiaire de Ducasse, composé à partir de notations scientifiques outrées par la verve langagière.