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Titre du blog : lettres de la campagne
Auteur : sorel
Date de création : 17-05-2008
 
posté le 13-02-2009 à 11:57:18

Ezra Pound le magnifique.

C'était dans les années 50. Le peintre René Laubiès, chantre des aubes orientales et du ciel qui se meurt à chaque crépuscule, traduisait les Cantos d'Ezra Pound. On en a publié un dans le numéro 2 de "Sens Plastique" (avril 1959). Et l'éditeur Pierre Jean Oswald fait une édition restée confidentielle d'une poignée de ces textes magnifiques et sans doute déconcertants au premier abord, tant ils vont contre toutes les habitudes et les conventions de la poésie. Ce sont des débordements verbaux, entraînant comme un fleuve, dans son cours tumultueux, mots et images, et langues diverses, un raz de marée faisant s'entrechoquer trouvailles verbales et pragmatisme. On a pu parler de polyphonie universelle. Une pensée savante et vagabonde, qui court, saute, franchit les obstacles, bravant les interdits. Tel l'oiseau sautant d'un poteau télégraphique à un autre et qui, chaque fois, ferait crépiter, tel un buisson d'électricité, les charges et la force d'un courant qu'un formidable court-circuit agite.
On se laisse entraîner dans ce déluge, et même mal armé pour affronter toutes les langues (qui n'ont pas de secret pour l'auteur), on se laisse capter, séduire, tête bouleversée par tant de vitalité verbale.
On apprend que Pound, ici et là, à Venise (sa ville de prédilection, il y finira ses jours), Londres (il y fait éclater sa vitalité adolescente), Paris (il milite pour Joyce, les troubadours, Vivaldi, le moyen-âge), va de découvertes à combats pour faire reconnaître ceux en qui il croit car, contrairement à tant de créateurs, il n'a pas l'égoïsme de sa seule pensée. Il tend la main à tous ceux qu'il croise et attirent sa sympathie.