VEF Blog

Titre du blog : lettres de la campagne
Auteur : sorel
Date de création : 17-05-2008
 
posté le 07-04-2009 à 13:51:45

Blaise Cendrars au rythme du chemin de fer.

C'était une révolution dans le monde de la poésie. D'une audace inouïe. Le très jeune Blaise Cendrars demande à Sonia Delaunay de construire, avec lui, un livre qui traduise visuellement l'idée de rythme qu'il avait mis dans les mots du poème : "La Prose du Transibérien". On sentait vibrer la machine qui entraînait le convoi, le bruit scandé des boogies (il en naîtra aussi le boggie-woggie), la fièvre du voyage et cette étrange nostalgie qui s'y mêle. Ce sera un poème emblématique, un livre culte, mythique. Blaise Cendrars, qui aura toujours des rapports étroits et d'amitié avec les peintres (Chagall, Léger, Modigliani, Robert Delaunay) aura été rarement aussi bien inspiré.
Devenue une vénérable vieille dame Sonia Delaunay, dans son vaste et lumineux atelier de la rue Saint Simon, conservait avec émotion les souvenirs de cette collaboration qui lui fut aussi si fertile et l'assurait dans ses propres recherches.  Avec cet accent "russe'" qu'elle n'avait sans doute jamais totalement perdu elle égrenait des anecdotes savoureuses (et parfois vachardes) sur ses contemporains. Elle n'était pas tendre pour Picasso, mais Blaise Cendrars était resté dans un coin de sa mémoire comme une pépite d'or de ses meilleurs souvenirs. Elle déployait avec fierté le magnifique livre qui prenait des allures de somptueux tissus. Ceux-là même qu'elle ornait de rythmes ardents et vifs qui disaient tout l'espoir que l'on portait alors dans la modernité.