posté le 06-08-2009 à 12:10:20
Proust au square.
Celui qui hante les salons les plus huppés (les plus snobs), qui brille par sa conversation, qui adore frôler les jupes des duchesses, n'est en fait qu'un formidable solitaire. Il se traîne dans les stations thermales qui sont le purgatoire de toutes les solitudes. Le voici, emmitouflé comme s'il devait affronter les grands froids, le regard bien posé pour répondre à la demande du photographe. Poseur, jusque dans la manière de s'asseoir pour donner un ton de nonchalance à sa présence. Insolite à y bien réfléchir, la floraison d'un jardin public devait agresser son asthme lattant. Mais n'y-a-t-il pas aussi une once de mélancolie (de désenchantement ?). Familier des squares urbains je connais ces solitudes qui laissent glisser le temps, ne souhaitant même pas de fécondes rencontres, la conversation sur le banc public se résumant, la plupart du temps, en banalités.
Soucieux de préserver sa solitude il a négligé le banc pour traîner une chaise sans doute bien inconfortable sur laquelle il s'est "tassé". Comme une bête traquée.
L'homme des villes, qui en a l'uniforme conventionnel, est ce monument de mots qui crépitent en sa tête, comme autant de feux qui veillent. Que restera-t-il de cet instant de pose dans un jardin de ville d'eau ?