posté le 22-08-2009 à 13:38:02
Le blanc du papier chez Mallarmé.
S'il a relativement peu publié de son vivant, Stéphane Mallarmé a très volontiers composé des maquettes de livres en projet, et apporté à ses manuscrits un soin qui annonce la perfection formelle des poèmes.
Sollicité par Léon Vanier (en 1886), Mallarmé projette de faire "quelque chose de très joli". Il conçoit une maquette "découpant ses poèmes parus dans divers journaux en 1872". Et c'est son ami, voisin et complice Edouard Manet qui doit en assurer l'illustration, d'autant qu'est joint à cet ensemble "Le Corbeau" ce poème légendaire qui le lie durablement à la légende d'Edgar Poe.
Avant de passer en vente (en 1986) la maquette avait fait partie de la collection d'Henri Mondor l'incomparable spécialiste du poète, celui à qui l'on doit tant de détails significatifs sur sa vie et son oeuvre.
Plus que manuscrit, maquette donc, cette étape essentielle entre l'état premier d'un texte (le jet initial) et sa mise en forme définitive, pour une lecture publique, largement partagée. On voit bien Mallarmé attentif plus que tout autre à cette mise en forme. L'existence du poème ne passe pas seulement pas un alignement des mots, mais une orchestration, une occupation des lieux réfléchie où même la blanc du papier prend toute sa valeur.
Mallarmé fait, du blanc du papier, une partie intrinsèque du texte.
Le poème est visible jusque dans son absence.