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Titre du blog : lettres de la campagne
Auteur : sorel
Date de création : 17-05-2008
 
posté le 10-10-2009 à 17:19:00

L'atelier d'écriture.

Des rapports entretenus entre un écrivain et son cadre de travail (sinon de vie) dépendra la facture, le style de son oeuvre.
Paul Léautaud remarque (à la fin du "Petit Ami") : "C'est pourtant vrai que certains cadres disposent mieux que d'autres au travail ! Je ne parle pas, bien entendu, de ce travail vulgaire qui consiste à prendre une plume, de l'encre et du papier, et à écrire ce que l'on veut écrire. Pour ce travail là tous les endroits sont bons, même ces affreux cabinet d'auteurs à la mode, encombrés comme des bazars qu'on nous représente dans les photographies de nos contemporains chez eux......"
Léautaud avouant alors écrire dans le désordre parfumé et sensuel d'une chambre de cocotte. Il écrira à la fin de ses jours parmi ses chats et dans une solitude de vieux garçon pas trop soigné.
S'en prenant au cabinet de travail des écrivains de son temps Léautaud dénonce une manière de considérer l'écriture comme un métier. Ce qui n'est pas son cas et tout homme (ou femme) de lettre n'aura pas nécessairement ce goût d'une mise en  scène de son travail.
Il me souvient que Patricia Higsmith écrivait dans sa cuisine (la nuit et  en compagnie d'une bouteille de whisky) sans ce décor conventionnel qui singe la culture. D'ordinaire, écrire n'implique pas nécessairement un cadre convenu. Chacun ira selon ses goûts, son mode de vie. Virginia Woolf écrivait sur une petite table à battant, qu'elle disposait selon son humeur, face au paysage de son jardin, ou dans l'ambiance un peu bousculée son l'imprimerie (la Hogarth Press). Breton préférait la compagnie des tableaux de ses amis, les fétiches océaniens, Mandiargues la vue sur le square de la rue Payenne dans une demie lumière mettant en valeur les figues fantomatiques de Léonor Fini. On sait que Colette ne pouvait écrire que sur du papier bleu, et Simenon préparait soigneusement l'écriture de chacun de ses romans, en disposant papiers, crayons et notes autour de lui comme un artisan qui va réaliser un bel objet. Un livre n'est-il pas aussi, un bel objet.
A en croire les confidences de sa compagne, D.H.Lawrence écrivait sur ses genoux, à l'ombre d'un arbre, dans un contact sensuel avec la nature. René Crevel, fêtard et noctambule, écrivait sur des tables de bistros, au coin  d'un bar, tout comme Antoine Blondin. Marcel Béalu, sur une toute petite table, au fond de sa librairie du quartier latin, en attendant le client. Et n'oublions pas ceux qui écrivent couchés, comme Joe Bousquet, pour raison d'infirmité, ou Proust, pour raison de maladie. Ou encore Anna de Noailles. Par coquetterie ?

 

Commentaires

sorel le 01-04-2010 à 10:58:05
Ce qui est méprisable c'est de passer chez les gens pour les insulter sans laisser sa carte de visite. Mais le savoir-vivre !
Frangidelphe le 29-03-2010 à 01:56:49
Marcel Béalu n'a, ne vous en déplaise, jamais écrit "sur une toute petite table, au fond de sa librairie", "en attendant le client" (!), mais sur le bureau situé à droite du "Pont traversé" qu'on voyait immédiatement en y entrant. Je vous laisse à vos considérations sur René Crevel "fêtard et noctambule" (vous avez omis "pédéraste") ou sur Joe Bousquet qui, dites-vous, écrivait couché "pour raison d'infirmité". Lues par hasard, quelques-unes de vos lignes "postées" le 10 octobre 2009 suffisent à vous rendre irrémédiablement méprisable.

Frangidelphe, mars 2010.