posté le 17-11-2009 à 10:51:40
Balzac vu par Proust.
Balzac un temple.
Il est d'usage (j'ai pu le constater) que bien des hommes de bonne culture, par l'âge écartés de la vie active, et sentant leur mort venir, entreprenaient la lecture de l'oeuvre complète de Balzac.
Ils disent : - J'entreprends la lecture de Balzac. Avec cet air résolu de ceux qui s'engagent dans un voyage long et semé d'embûches. Balzac est à lui seul un continent. (C'est aussi un temple !)
Une fois plongé dans ce tumulte de la Comédie humaine, et s'étant fait des amis des personnages qui y font leur chemin, y luttent, s'affrontent ou s'aiment (l'amour n'y est pas de passion aveugle) le lecteur n'en sortira que la tête encore bruissante de ces destins croisés, avec peut-être une nouvelle mesure de sa propre situation parmi les siens, la race humaine.
Mais comment ne pas évoquer au nom de la passion qu'il suscite monsieur de Guermantes.
"Il a tout Balzac dans une reliure en veau doré avec une étiquette de cuir vert, de chez M. Béchet ou Werdet".
Monsieur de Guermantes "court se réfugier au premier, au premier coup de timbre des visiteurs de sa femme et où on lui apporte son sirop et ses biscuits à l'heure du goûter".
Et Proust, qui n'est jamais tendre, de faire un portrait de cet amateur délicieux,, gâteux et un peu naïf.
"Toutefois si M.de Guermantes trouvait charmants, c'est à dire distrayants et sans vérité, les histoires de René de Longueville ou de Félix de Vandenesse,, il appréciait, souvent, par contraste chez Balzac l'exactitude de l'observation : "La vie des avoués", une étude, c'est tout à fait cela ; j'ai eu affaire avec ces gens là ; c'est tout à fait cela, César Birotteau et Les Employés".
Proust souligne le point de vue d'un de ses personnages, la marquise. de Villeparisis : "ce Balzac c'est un mauvais homme. Il n'y a pas de bons sentiments dans ce qu'il écrit, il n'y a pas de bonnes natures. C'est toujours désagréable à lire, il ne voit jamais que le mauvais côté de tout. Toujours le mal...."
La Comédie un temple, mais chargé de toute la contradiction de la nature humaine.