posté le 22-11-2009 à 11:03:28
Lecture d'enfance.
C'est encore Proust qui le remarque (dans "Contre Sainte-Beuve" ) les lectures d'enfance gravent, à tout jamais, l'objet livre qui en aura été le médium.
Qui n'a pas rêvé, avec une pointe de mélancolie, sur les belles reliures (d'ordinaire rouges) qui enchâssaient les contes de fées, les récits de voyage à travers lesquels, tout jeune encore, on découvrait le monde.
Si la tradition veut que la Bibliothèque rose soit réservée aux filles (et la verte aux garçons) on doit aussi compter sur le hasard des découvertes que l'on peut faire dans la bibliothèque familiale où figurent les livres de l' enfance de nos parents. La Bibliothèque rose peut ainsi, par le jeu du hasard, tomber entre les mains d'un petit garçon. La littérature, même "enfantine", n'a pas de sexe, ou on doit voir là les séquelles d'une notion largement dépassée et qui ne fut pas sans risque. Doit-on déterminer les centres d'intérêt d'un enfant, en le guidant dans des genres qui ne correspondent pas nécessairement à ses goûts les plus profonds. Les Contes de fée sont, après tout, pour tout le monde (et même les adultes). Alors gloire aux charmants volumes de la collection reliée en rouge, avec les beaux "fers" décoratifs et, surtout, les illustrations qui accompagnent (et scandent) le texte.
La magie de l'image peut jouer en toute indépendance, et on peut,à partir d'elle, reconstruire tout un monde, totalement à soi, à sa ressemblance.
En tout cas, Proust le fait bien remarquer, le livre de la découverte de la lecture est précieux de la virginité même de notre regard devant ce qu'il nous révèle. Et jusqu'à sa matérialité qui porte tout ce qui entoure la lecture, et même des odeurs. Un enfermement sensuel et sensitif si fort qu'il demeure en nous et nous renvoie au delà du temps, dans nos premiers rêves.
Commentaires
mes "découvertes" livresques furent , en effet, des ouvrages à couverture rouge (ceux que vous dîtes, et surtout, la collection "tout l'univers"), puis un mur "de pléiades" vu chez une directrice d'école où j'allais, les mercredis, faire les dictées tandis que ma mère, aussi ignare que celle de Camus, faisait le ménage (chez mes parents, encore aujourd'hui : aucun livre, ni journaux, rien...)
Comment un devenir d'écrivain, en ce cas, sinon par la vie intérieure doublée d'une curiosité et d'un itinéraire chaotique ?..