posté le 11-01-2010 à 10:58:33
La tour de Montlhéry et ses souterrains.
L'état de ruine convient bien aux monuments que nous abandonne l'Histoire et qui, dans leur fonction première, avaient tout pour nous déplaire. Images agressives de la guerre de l'enfermement, de la violence Parce qu'inutile, sinon aux forces de l'imaginaire, une ruine se pare de tous les charmes que l'on reconnaît aux propositions du paysage du moment qu'il donne une juste mesure des forces de la vie et de la mort dont il est le cadre nécessaire. D'où l'attrait de Nicolas Poussin qui sait si admirablement dresser un décor de synthèse. La Tour de Montlhéry m'est familière.
Elle s'encadre dans le haute fenêtre du dortoir où elle se dresse comme un fantôme alors que l'heure est au silence, et que les lits alignés avec leur couverture blanche évoquent quelque reposoir moins pieux qu'agité de désirs refoulés.
Fière, solitaire, égarée dans un ciel qui décline ses rites nocturnes, elle nous entraîne dans ses replis secrets. Sous elle, comme les racines d'un arbre fabuleux, courent des galeries, des souterrains, des parcours clandestins tracés par quelque Dédale médiéval. On s'y est risqué un jour, en dépit des barrières municipales qui interdisent l'accès jugé dangereux (Chutes de pierre). De même, chez mon grand-père fort amateur de vieilles pierres, il y avait des départs de galeries que l'on disait reliant ce qui avait été la ruine d'un couvent, à quelqu'autre établissement religieux dont la région était abondamment pourvue.
Une ruine renvoie à une autre, sa soeur ou sa complice. Le sol est farci de parcours hasardeux où l'on avance à tâtons, et qui furent des chemins de stratégie.
Les âmes inquiètes aiment s'y perdre, comme l'envers du cheminement buissonnier.