posté le 05-02-2010 à 14:07:09
Georges Bru, un hymne à la chair.
A quoi tient l'espèce de fascination que distille un dessin de Georges Bru, sinon à ce qu'il ne dit pas, disant l'avant d'on ne saura jamais quel drame des êtres et de la connaissance de leur corps. Du corps il est constamment question. En toutes situations, mais plutôt dans une grande solitude. Même quand il s'expose en d'improbables présences, il est fermé sur lui-même et comme noué d'angoisse.
Il fut, au début de la carrière de l'artiste (dans les années 60), placé sous le signe d'un surréalisme attardé, plus complexe en son développement et plutôt joué comme un jeu d'assemblages d'un bizarre blason. C'est en progressant, en gommant les détails, que Bru atteint la force expressive (l'effet de choc) d'un corps abandonné à son sort, à sa puissante laideur de chair et rien que de chair.
On le sait féru de littérature (de la bonne à la populaire) disons de Breton et Mandiargues au roman policier, et cela donne à son travail, si intimiste, une force de concentration qui demande, pour le voir, un soin d'entomologiste. Ne regarde-t-il pas les êtres comme d'étranges (d'inquiétants) animaux.
Il tend vers le minuscule, situe le regard à travers les lunettes d'une savante (et sans doute perverse) connaissance de ce que l'intime sécrète d'horreur. Si son dessin et voluptueux et soyeux (tout les commentateurs le notent), c'est pour mieux nous entraîner vers sa délectable et sadique vision qui ne s'offre aucune respiration. Ne sont-ce pas des scènes arrachées à quelque chambre tiède et nimbée d'une lumière de nulle part. Chambre de supplice plus que d'amour. Et théâtre de cérémonies secrètes.