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Titre du blog : lettres de la campagne
Auteur : sorel
Date de création : 17-05-2008
 
posté le 26-03-2010 à 11:17:05

Proust au Weber vu par Léon Daudet.

Léon Daudet (dans ses savoureuses chroniques) le remarque : " Ce n'est plus l'habitude des hommes de lettres et des artistes de se réunir au café comme il y a trente ou quarante ans" (il écrit cela en 1890). Le Salons tenus par des femmes qui font un peu la pluie et le beau temps dans cet univers fermé, jouent le rôle dévolu, du temps des Impressionnistes aux brasseries où ils aimaient se retrouver (comme la Nouvelle Athènes à Pigalle).
Pourtant, et Léon Daudet en fait une description où l'on sent la fibre sentimentale, le Weber, rue Royale, attire encore ceux qui, venus du boulevard tout proche, des théâtres et des salles de rédaction des journaux eux aussi dans le voisinage, se mêlent volontiers aux mondains dont les hôtels du XVIII° arrondissement, exportent la culture au coeur même des mondanités. Proust l'aura compris plus que tout autre et en fera le ferment de son oeuvre.
Un Proust justement, surgissant devant Léon Daudet, dans sa marche de somnambule :  "Vers 7 h 1/2 arrivait chez Weber un jeune homme pâle, aux yeux de biche, suçant ou tripotant une moitié de sa moustache brune et tombante, entouré de lainages comme un bibelot chinois. Il demandait une grappe de raisin, un verre d'eau, et déclarait qu'il venait de se lever, qu'il avait la grippe, qu'il s'allait recoucher, que le bruit lui faisait mal, jetait autour de lui des regards inquiets puis moqueurs,  en fin de compte éclatait d'un rire enchanté et restait. Bientôt sortaient de ses lèvres, proférées sur un ton hésitant et hâtif des remarques d'une extraordinaire nouveauté et des aperçus d'une finesse diabolique. Ses images imprévus voletaient à la cime des choses et des gens, ainsi qu'une musique supérieure, comme on raconte qu'il arrivait à la taverne du Globe, entre les compagnons du divin Shakespeare."

 

Commentaires

Saintsonge le 26-03-2010 à 11:24:58
Jolie prestance au portrait magnifique orné d'un beau texte...

Encourageant pour toute solitude kantienne ou Spinoziste comme de la mienne , en fait, au bout de tout !