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Titre du blog : lettres de la campagne
Auteur : sorel
Date de création : 17-05-2008
 
posté le 02-04-2010 à 10:37:37

Chez Philippe Chabaneix.

Longtemps, la petite bouquinerie de Philippe Chabaneix, rue de Seine, était l'étape rituelle des amateurs de poésie. Elle tenait du salon littéraire (on y rencontrait de nombreux poètes dans la lignée de leur hôte, en marge d'une modernité partout ailleurs invoquée). Car Philippe Chabaneix était l'unique survivant de ce qui fut l'école (?) des "fantaisistes". En fait, peu école car plutôt réunion d'amis (souvent provinciaux) que Francis Carco avait lié avec la nonchalance aimable qui était de sa nature. La figure dominante en était bien sûr Paul-Jean Toulet, personnage hors normes, qui avait vécu les  belles heures d'un Paris nocturne, entre Wily et Toulouse-Lautrec, les bars marqués par l'anglomanie, et la complicité amicale de Curnonwsky, prince des gastronomes.
Selon le Cahier des Poètes (avril-mai 1913) il s'agissait de Francis Carco, Jean Pellerin, P.J.Toulet, Léon Vérane, Tristan Derême, Tristan Klingsor, Jean Marc Bernard.
A l'épuisement du symbolisme, mais encore séduit pas son délié imaginatif, la poésie hésitait entre l'expérimentation et l'état de révolte (mouvement dada), des rythmes radicalement nouveaux et emprunts de l'esprit de "modernité" qu'elle partagera avec la peinture qui sera sa complice (Cendrars, Morand, Léger, Delaunay, Kandinksy), et l'établissement d'une forme nouvelle d'humanisme. Il en sortira une infinité de personnalités peu promptes à rejoindre un groupe, fut-il nécessaire à l'acquisition d'une plus large audience. L'école des fantaisistes refusera toute théorie et rassemblera plutôt des individualités qu'attirent le contact (fut-il simplement épistolaire) avec des frères d'arme. Ce qui donnait à l'atmosphère de la bouquinerie de Philippe Chabaneix un ton très particulier. Chaleureux et largement ouvert..