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Titre du blog : lettres de la campagne
Auteur : sorel
Date de création : 17-05-2008
 
posté le 28-04-2010 à 13:29:37

Pascin, les draps froissés.

La force de Pascin, son originalité, c'est d'avoir tourné le dos aux idées  esthétiques qui gouvernent sa génération et situent les artistes dans une logique historique qui lui est étrangère, sans doute indifférente.
Peindre, au début du XX° siècle, c'est militer pour une idée de progrès, et chanter la modernité. Trouver une grammaire nouvelle, briser les formes, tourner le dos à la tradition.
Ce militantisme l'indiffère, et plutôt que de s'inscrire dans une "école", un courant, il progresse dans son art en suivant ses instincts, sa sensibilité, et nous offre une sorte de journal de sa vie intime.
On l'aura comparé à Toulouse-Lautrec en raison de ses sujets (filles, bordels) ce qui est une manière un peu rapide et propre à fausser sa propre vision du monde qu'il aborde. Toulouse-Lautrec le fait d'une manière frontale, avec quelque chose de crâne dans le graphisme, une main qui se plaît à des raccourcis aux effets décoratifs, dans une sorte d'éclat chromatique qui le rapproche du décorateur, de l'affichiste (qu'il aura été superbement). On est loin de la manière de Pascin, toute en ondes sensuelles, en profondeur de champ pour aller dénicher les intimités d'un décor souvent glauque, dans un climat de draps froissés, où l'on à l'impression de surgir en voyeur, en indiscret. Son amour de la femme est si intense, et si "visible" qu'il parvient à nous suggérer cette fameuse "odeur" qui est  celle de la chair en émoi.
Mêmes sujets, mais relevant d'un tempérament différent, et dans un contexte esthétique lui aussi en forte variation. Toulouse-Lautrec, comme ses amis les Impressionnistes (si bien qu'on le confond avec eux), lutte contre l'académisme régnant, Pascin n'a pas à s'insurger contre le poids de cet académisme qui aura été vaincu par ses prédécesseurs, mais il participe d'un climat de liberté des moeurs qui s'affiche sans complexe, et, tout au plus fera-t-il, la nique au bourgeois, dernier bastion de la tradition allant au fond des niches à plaisir où se dilue une société qui a perdu ses illusions et se raccroche au plaisir avec une note de désenchantement.

 

Commentaires

Saintsonge le 28-04-2010 à 13:42:43
Cela rejoint aussi quelques postures crayonnées ...érotico-sensuelles

d'Anne-Louis Girodet de Roucy-Trioson (sympathique, donc !)