http://sorel.vefblog.net/

  VEF Blog

lettres de la campagne

posté le 15-10-2010 à 14:24:41

Cocteau et l'Opium.

Enfant d'une bourgeoisie cultivée mais conservatrice, Cocteau se lance dans la modernité avec la fougue d'une adolescence bercée par les muses et attachée à de précoces succès.
Il ne pouvait échapper au prestige de la drogue qui entrait, en ces années là, dans le registre du pittoresque comme l'attrait de l'Orient, les recherches de l'insolite et le goût de s'extraire du quotidien dans ce qu'il pouvait avoir de banal et de convenu. Phénomène de mode presque, et en faveur dans un milieu qui paradoxalement se retranchait dans ses territoires d'élection (le Boeuf sur le toit) et se donnait volontiers en spectacle. Les oscillations de sa pensée, de ses foucades, de ses découvertes font l'objet de constats où chacun jouait son rôle, Cocteau passant avec une désinvolture teintée de snobisme, de la drogue à la religion (l'étape Jacques Maritain). Pourtant, s'il se conforme à une certaine donnée du rôle du poète qu'il veut jouer Cocteau sait le faire toujours avec un génie propre. Il est partout, il est là où il convient d'être, il n'y est jamais médiocre, et souvent ces étapes nourrissent son oeuvre, la font évoluer.

 


Commentaires

 

1. Saintsonge  le 15-10-2010 à 14:45:15  (site)

C'est bien l'effet de " l 'opium " recherché par Cocteau, que celui de changer d'espace-lieu, symbolisé par ce fait que je retrouve ici ce que je lus, hier, sous l'emblème de votre "soleil"... Allez ailleurs, voilà le narcotrope du voyage intérieur, si je puis user , à l'instant, sous l'effet d'un inspir, le doux néologisme moins dévastateur du système neurovégétatif...
Vaste ciel bleu automnal, air plus frais, peu de vent, pas un nuage, donc, à l'horizon, quand il faisait grise mine, tout le matin... Belle randonnée sur la Pointe du Raz (de Sein) , hier, tout le tantôt... Sentier aussi scabreux surplombant les précipices... L ' "opium" me fut la peur d'une chute...

 
 
 
posté le 15-10-2010 à 14:21:06

L'arbre de Soutine.

A l'arbre, son frère quand il le contemplait, Soutine infligeait ses propres tourments.
Cette manière de croître en circonvolutions ardentes, de conquérir son espace par des à-coups bizarres, ce frémissement dans les  sommets exposés aux caprices du vent, cette rugosité d'une chair sombre et desséchée hostile au contact de la main, et jusqu'à l'ombre qu'il dispensait au milieu d'une place de village comme un ancêtre grognon, raisonnant ses rancoeurs, instaurait un règne du végétal qui n'aurait pas été frappé par la grâce  mais marqué par quelque calamité des origines.
L'arbre du péché qui est à l'origine de notre malédiction était-il de cette nature, ou, bien au contraire, trop séduisant, il fut, lui aussi, condamné à l'aigreur de sa condition. Soutine voyait la nature en fusion, en perpétuelle métamorphose, comme si la matière s'interdisait le repos et courait toujours devant elle, vers une nouvelle résolution. Torturé par l'ouragan, l'arbre de la forêt se brise, et cadavre cloué au sol, se livre à l'activité féroce et fébrile d'une peuplade minuscule qui travaille à la métamorphose de la matière ;  dressé comme une flamme figée au milieu des maisons, il est le fantôme d'une histoire qui nous échappe, et qu'il tente de nous traduire. Mais, bien sûr, il s'agit là d'un arbre vu par Soutine. Un autre le voit fraternel, bienveillant et non convulsif. A moins que ce ne soit les convulsions du plaisir. L'arbre écrit alors dans sa silhouette la dynamique de sa croissance et son plaisir à l'état permanent de sa croissance et de sa réception des saisons.
C'est celui sous lequel on aime à se recueillir, et se livrer à d'innocentes activités. Mais rêver y est encore la meilleure manière d'honorer sa présence et sa protection.

 


Commentaires

 

1. Saintsonge  le 15-10-2010 à 14:34:33  (site)

S'il n'est généalogique, l' arbre de Soutine, je le vois bien rouge-sang !
L'arbre torturé est signé Van Gogh, s'il n'est igné....
Le mien semble déraciné (au passage du vent du destin ?)
Petit rappel ici du bonjour du peintre René Quéré...

2. sorel  le 16-10-2010 à 12:21:13

oui j'ai bien reçu votre message et le souvenir du peintre quéré. Ne lui dites pas, je ne me souviens pas de lui, mais je vais chercher dans mes archives si j'ai écrit quelque chose sur lui... Merci pour votre attention. J'ai eu de réactions à votre propos sur soleildanslatete, en commentaire à votre dessin. Vous êtes repéré !

3. Saintsonge  le 16-10-2010 à 18:32:22  (site)

Soyez certain de ma discrétion puisque, lui, a gardé vos articles (il m'a dit un grand bien de votre façon d'aller à l'essentiel, ce que j'apprécie moi-même, ici, d'ailleurs !),
"repéré", oh, je le voudrais bien d'un éditeur qui publierait ainsi tout mon blog, ce dont encore ma naïveté d'enthousiasme et d'émerveillement rêve, on ne sait jamais puisque votre billet-sur-moi (comme on dit "auvers-sur-oise) commence par cet anonymat du petit "on" (on, me suis-je dit, vous lisant, qui sait, ce petit "on", un éditeur charmé, une parisienne sortie des sous-bois, un illustre écrivain, autre que Monsieur Sorel J.J L ?..Qui ? J'ai su pour cette fée -qui me drague ? -, quant à ce Gaetan, qui a su ma "blessure", porte-voix des bloggeurs, il m'est inconnu...)
C'est le grand été par ici, du pays de Perros !

 
 
 
posté le 14-10-2010 à 11:15:18

entracte

Je rencontre quelques difficultés pour atteindre mon blog par la voie habituelle. Je serai donc absent quelques temps. On peut aller sur soleildanslatete.centerblog.net qui est le parallèle de celui-ci
 


Commentaires

 

1. Saintsonge  le 14-10-2010 à 11:21:25

J'ai des soucis avec le mien, il s'éteint tout à coup, sans prévenir , me sucrant tout mon travail en cours !! Je vous ai mis un mot en 4 ème commentaire de votre article sur mon dessin (sur ma rencontre avac René quéré, l'avez-vous lu ?)

 
 
 
posté le 12-10-2010 à 16:59:10

Le clinquant des bracelets chez Gustave Moreau.

Les corps, chez Gustave Moreau, sont androgynes. La parure, seule,  distingue les sexes, encore que de jeunes hommes aiment à orner leur torse avantageusement bombé ou pétri dans la douceur de chairs admirables, des fanfreluches qui font les princesses et les distinguent de leurs servantes.
Au poids de l'ornement s'accuse la perversité du modèle. Comme si le bijou était la décoration du mal. Il s'allie au corps, l'entoure, le contourne, l'enferme, l'épouse comme les tissus luxueux qui s'effilochent, s'entrouvrent, pour mettre en scène la gestuelle qui situe géographiquement, historiquement, la page contée d'un pinceau aussi minutieux que celui d'un orfèvre et de celui-ci tenant le goût du détail, la minutie des liens qui composent un ensemble aussi complexe qu'irréaliste.
L'offre de la nudité brute n'est qu'un regard fruste et vulgaire de la femme dont Courbet se fera éventuellement  le maître, alors que Moreau  met la sensualité dans l'ornement, la magnifie dans les ensembles et suggère toujours d'étranges rapports entre les personnages qu'il dispose dans un monde de fastes et d'outrances architecturales. Une nature de catastrophe, venue des fonds de la peinture primitive (montagnes  brumeuses, silhouettes de villes accrochées aux faîtes des sommets) mais électrisée par une fièvre qui parcourt toute la scène.
Tout y est mouvements, danse, avancée sur l'espace du spectacle qu'investissent les figures d'une sorte de Crazy Horse à l'antique, aux couleurs byzantines.
Salomé domine ce monde de provocation corporelle, de déhanchements lascifs, de poses effrontées. Faisant glisser le désir de l'homme dans la macabre machination d'un pari pour provoquer la mort (Saint Jean Baptiste).
Sexualité et mort dessinent le carré d'un spectacle crépusculaire que les peintres "fin de siècle" vont peupler de créatures capiteuses, démoniaques et perdues.
C'est "la déité symbolique de l'indestructible luxure, la déesse de l'immortelle hystérie, la Beauté maudite" affirme J.K.Huysmans, grand connaisseur des choses du sexe au voisinage du bénitier.
Car la diabolisation de la femme est bien la conséquence du discours violemment castrateur que tient une Eglise effarouchée par la plus timide cheville qui surgit de dessous les frous-frous des crinolines.
On passe rapidement de la sacristie et de ses crucifixions démonstratives (tant aimées par Huysmans) aux boudoirs sulfureux où dominent des Sphinges enveloppées de fourrures, au visage fermé, au regard lointain, comme les rêve le peintre Stuck. Une divinité couchée conserve-t-elle la dignité de son rang ou n'invite-t-elle pas déjà le servant au péché.
C'est le thème récurrent de "La Tentation de Saint Antoine" sur lequel Gustave
Flaubert a peiné toute sa vie durant. La femme est l'enjeu du drame vécu par le saint. Elle est la figure descendue des hauteurs confuses de l'imaginaire pour troubler une figure suppliante qui ne vénère plus une vierge en majesté mais une femme secouée par la luxure. Félicien Rops en tire des scènes gaillardes, d'un humour qui tient de la Salle de Garde mais conduit le bal qui tourne les têtes de l'époque.

 


Commentaires

 

1. Saintsonge  le 12-10-2010 à 19:12:07  (site)

Bienheureux d'être placé entre l'androgynie de l'androgénie des G. Moreau et "bâtardise" violentée de V. Leduc , des "parents" plus subtils que "terribles"...Tout de suite, l'ayant vue, j'ai adoré le symbolisme de l' Apparition, l'avant "Cri" du Munch...
Ce fut bien l'été, ce jour-ci , trop chaud pour Octobre... "Le monde est une foret de signes"...(Rilke)

2. sorel  le 14-10-2010 à 11:12:41  (site)

quelques difficultés à "atteindre" mon blog d'où une absence momentanée, mon incompétence en informatique me bloque; mais je vais tenter plusieurs chemins dont celui-ci qui m'a conduit jusqu'à votre commentaire.

 
 
 
posté le 11-10-2010 à 14:23:14

Un dessin, comme une fleur sur le chemin.

On l'a déniché sur un blog à la constance des mots pour mieux dire son émotion. C'est Saint Songe (sur Overblog) : bertrandelporte-yaoo.fr.over-blog
Mots et dessins se répondent. L'exercice a le pouvoir de saisir au plus près l'émotion. Ce n'est pas un jeu de miroir (une complaisance) mais une exigence pour retenir ce qui échappe : ici aux mots, là à l'image. Mariage intime et discret cependant pour vagabonder au fil de la pensée comme on vagabonde en esprit, et sans savoir retenir cette splendide floraison qui est un peu aussi celle des rêves.
Alors on ose balbutier, tenter une approche comme on aborde un objet précieux, peut-être on cueille une fleur. Avec cette délicatesse qui est moins celle du respect (il va de soi) que de l'amour. Dire sa pensée c'est violer celle des autres. Alors on prend des précautions, on hésite, on murmure.
Tout débordement des mots pour le dessin c'est comme un arrêt sur le chemin, un temps de précaution devant une découverte, une hésitation, un doute.
On habite le chemin que l'on trace, on habite aussi mieux l'écriture qui s'échappe des rigueurs qu'on exige d'elle. Parce qu'on y est entier. Fragile mais sans le fard des conventions. Exposé comme aux intempéries qu'est le regard de l'autre.

 


Commentaires

 

1. Saintsonge  le 11-10-2010 à 16:15:18  (site)

Surprise lunaire (ce Lundi), c'est un honneur pour moi, j'en ai si peu, humblement flatté à faire trembler l'émotion du Lotus (s'il doit être nommé ladite"fleur" - Proustienne, elle eût été cattleya -) ; j'en laisse mon Kerouac, du coup, à vous lire (l'effet m'intimide, c'est comme de me regarder en un miroir qui me renverrait un visage inconnu de moi...) Grandement MeRCI..
"La sagesse est le savoir de l'être qui est en accord avec lui-même , les autres, avec son corps et ses ardeurs. C'est la science du bonheur, la réalisation intérieure fondée sur une connaissance de soi et du monde, accompagnée d'un bonheur absolu..." dont celui qui vous me faîtes... Vraiment, je vous remercie...
Vos lecteurs placeront d'eux-mêmes le petit " h " manquant à Yahoo..
Je vous reçois par très très beau temps, j'en ai plus chaud en-corps !
Tiens, quelque part, Perros est heureux pour moi, aussi...

2. Saintsonge  le 11-10-2010 à 16:35:43  (site)

Tremblé de l'émotion , lire : - que vous me faîtes....

3. Saintsonge  le 11-10-2010 à 16:53:16  (site)

J'ajoute encore que faire partie de tous vos honorables invités m'émeut, à fortiori..., qui me ravit !

4. Saintsonge  le 14-10-2010 à 09:21:51

Je viens de rencontrer, à 8 h 30, le peintre René Quéré qui vous transmets son bon souvenir de la Galerie des Orfèvres, Place Dauphine, année 70, son bon souvenir et des vœux de bonne santé, nous avons longuement discuté au sujet de "la résistance artistique" que nous faisons lui et moi, très enchanté pour moi du don que vous me fîtes ici, René a habité au 16 de la rue Treiz an Douric où je "résiste", au 7...
Notre rencontre, à l'étal des poissonniers à qui je disais bonjour, m'a semblé aussi telle une grâce... Voilà , j'espère que ce mot d'ajout sera lu par vous.... René s'est fait opéré de l'œil, (gauche, je crois), il y a longtemps... Sa femme est en chimio... Ses enfants, quoiqu'artistes, ne comprennent pas sa démarche picturale quasi Cézanienne, je pense...

 
 
 
posté le 11-10-2010 à 14:20:03

Un dessin, comme une fleur sur ;e ch

 


 
 
posté le 10-10-2010 à 14:51:48

Violette Leduc : un livre, une souffrance.

Un livre, une souffrance. C'est au bord du gouffre de sa vie (pour survivre) qu'écrit Violette Leduc. Jamais, sinon dans un Journal (mais le rythme du temps l'étire et la souffrance s'y dilue) on atteint d'aussi près l'insondable du coeur. C'est l'approche maladroite (mais si inspirée et baroque dans les termes et les mots) de cette souffrance qui conduit un être qui se croit laid (l'est-il vraiment ?) et qui donne aux mots (à l'écriture) le pouvoir de l'en sortir.
Violette Leduc partage son mal à vivre avec ceux qui l'approchent, dont elle quête l'amour. On passe du souvenir de Maurice Sachs (on le rencontre dans d'autres livres) à Jean Cocteau, dans sa campagne de Milly la Forêt, mais quelle déchéance que ce vieillard s'endormant après le repas, ou encore le Jacques Guérin si froid dans son luxe et son immense curiosité pour "le monde des lettres". Il saura reconnaître le  talent (et qui dit mieux que le talent) de celle qui lui a confié un texte brûlant : "L'Affamée" et Jean Jacques Pauvert prêtera son nom pour l'éditer luxueusement. Mais deux figures sortent du tableau (comme les donateurs dans les scènes religieuses médiévales), l'éprouvant Jean Genet qui la maltraite, figure énigmatique et créant cette distance qui nous éloigne des statues de dieux barbares, et Simone de Beauvoir, comme une aînée bienveillante qui vous guide dans vos appétits et vous console par sa seule présence. Pour égayer le quotidien dont elle appuie la pesante présence, surgissent des gamins boutonneux, épris de lettres et s'ennuyant dans leurs lycées de provinces (mais que de vocations littéraires sont nées dans cet étouffoir où la prose scintillante d'André Breton, les énigmes de René Char ou les facéties exotiques d'Henri Michaux sont comme une sorte de bréviaire).
Un livre, une souffrance. Ecrire serait-il un long calvaire et toute oeuvre un Golgota!   
.

 


Commentaires

 

1. Saintsonge  le 10-10-2010 à 16:40:53  (site)

C'est justement crier son mal-être ou son bon-heur qu'écrire / crier l'impasse généalogique dans laquelle on a été placé :
- Bâtard(e), non voulu(e), rejeté(e), honni(e), banni(e)
On chasse l'amour justement, n'en récoltant que des miettes, ce que connut la recluse de la rue Paul Bert, surtout quand on écrit sans obtenir aucun succès, même soutenue par "la" Simone - qui lui biffa des passages trop crus à ses yeux blessés du "deuxième sexe" !
C'est le genre de livre que j'ai perdu (par mégarde, ou inconsciemment ?), il y a dans ma ville natale, juste à l'oblique de la gare un café où j'allais tout le temps de ma jeunesse estudiantine, puis quand je travaillais, puis accompagné d'un soutien amical, un café au nom Leducien : Au Faucon !!! étonnant, non ?
Bonne fin de dimanche, 22°c plombent l'automne ici (les pôles ont bien décalé leur magnétisme) : un retour de l'été comme il y a retour d'âge ; des baigneurs septuagénaires , des plagistes de nouveau, des promeneurs et des chahuts d'enfants, des surfeurs, des voileux, mais moi sur le banc à lire "Le rouleau original" de Kerouac ! Il n'y a plus de saison, mon bon ami ! Interne-t-on "la folie" humaine, qui fait chavirer tous les calculs de Dieu ? Je ne sais plus repérer le bon rythme régulier des saisons, l'équateur a bien varié son écliptique !

 
 
 
posté le 09-10-2010 à 15:52:55

Le Misérable Miracle.

On y avait rencontré Thomas de Quincy, on y rencontre Baudelaire (qui d'ailleurs rend hommage à son prédécesseur) la fumerie d'opium c'est la boudoir de toutes les évasions, des nonchalances du corps tandis que l'esprit libéré de sa prison charnelle vagabonde, s'invente de si merveilleuses contrées où errer.
C'était alors le propre des poètes de chanter la drogue. On n'y voyait pas de mal, on lui accordait le pouvoir d'aider à créer. Henri Michaux qui s'y est risqué est de son côté fortement sceptique. Il parle du Misérable miracle.
Alors la société abandonne les drogués à leur triste sort. A l'infernale  cérémonie (fort coûteuse) qui brise leur vie. La drogue a perdu de sa superbe et de ses savoureuses séductions pour n'être plus qu'une brutale fuite en avant. Suicidaire.

 


Commentaires

 

1. Saint-songe  le 09-10-2010 à 17:51:28

Abîme de la pensée dans l'impensé
La Mescaline enseigne (en saigne) ;
La Nuit Remue ;

Oui, les addictions modernes sont inhumainement déplorable, et le sexe peut en être une autant que la téléphonie

Tout mon bonjour sous le ciel gris, je suis abstème...

2. Saint-songe  le 09-10-2010 à 17:52:58

lire : déplorables

 
 
 
posté le 09-10-2010 à 10:50:13

Madame Hanska dans les meubles de Balzac.

Madame Hanska au salon.

La voici donc l'élue, Balzac avait fixé sa vie sentimentale sur une audacieuse lectrice qui lui avait écrit son admiration. Ainsi s'établissent des intrigues autour des mots, et le livre est le support des voyages les plus riches de l'imaginaire. Pourtant Balzac a risqué une véritable approche en faisant un périlleux voyage dans ce qui était alors la lointaine Russie. La temps faisant son minutieux et lent travail, la femme élue devenue veuve peut convoler en véritable noce civile.
Vaut-elle mieux que le rêve qui la précède ?
Devenue madame (de) Balzac la voici dans ses meubles, ce "palais" conçu par son admirateur à la veille de sa mort. Un déballage de trésors accumulés au cours des ans en se ruinant. Cela fait une maison bourgeoise. Les personnages qui entrent en scène vivent alors en conformité avec le cadre ainsi créé par l'amour, vécu dans l'ordinaire du quotidien. Le comble pour une passion si longue, si riche en mots pour la dire et se substituer à elle. Une silhouette bien de son temps, frileuse mais engoncée dans le confort qu'on lui a préparé. On ne nous l'aurait pas dit, ce serait-on douté que c'était madame Hanska venue du pays des neiges pour se réfugier dans le confort d'un Paris qui sortait à peine du Romantisme et entrait dans le mauvais goût "fin de siècle", avec ses accumulations d'objets, ses tentures lourdes et ses cadres trop dorés. On est entre l'intérieur de la Princesse Mathilde qui fait des mondanités et celui d'une coquette (une cocotte ?) qui se donne des airs bourgeois. La frontières et fragile alors entre celle qui vend son corps et celle qui l'ayant déjà vendu s'enferme dans la dignité. Une dignité feutrée.

 


 
 
posté le 06-10-2010 à 11:34:02

Un orage chez Violette Leduc.

Un orage typographique chez Violette Leduc.

C'est venu comme un orage.
C'est un orage.
Dans la tête, alors qu'elle est disponible, ouverte au plaisir de s'épanouir dans le déferlement des mots (déferlement donne une vision de hâte, de brusques avalanches dans la typographie, alors il vaut mieux dire, déroulement), comme lorsqu'on feuillette un livre d'images - ce petit frisson intime qu'on se fabrique quand on lit avec la modestie du spectateur qui s'est glissé dans la salle de cinéma pour se laisser aller au plaisir de voir.
Il en est de même avec les mots. Ils défilent. Assemblés ils composent un paysage (parfois un objet), une situation dans laquelle on tente de se faire une place.
La découverte des mots c'est un peu une invitation au voyage.
Revenons à l'écran.
C'est une page de bonne typographie, d'un livre édité par Gallimard (1970) : "La Folie en tête", auteur Violette Leduc.
Elle conte ses tribulations de jeune auteur. Angoisses, joies fugitives, vertiges. Page 110. Fixez la masse typographique. Elle est compacte. Soudain apparaît une longue fissure qui déchire le texte. C'est un peu la méthode de Léonard de Vinci : regardez avec obstination une tache sur un mur, il en sortira une figure.
Alors, soudainement, la zébrure blanche compte plus que le texte dans lequel elle fait son chemin. Parce que le vide qu'elle construit avec la hâte de l'orage, cette blessure rendue à l'évidence au point de nous retenir, ce vide là, va nous engloutir.
Raisonnable, on s'y glisserait avec précaution comme, lorsqu'au cours d'une promenade, on découvre quelque fissure dans le sol : tranchée en ébauche ou éboulis discret.
Mais lorsque l'imaginaire s'y risque sans précaution comme dans le vertige d'une chute, on s'y perd. De s'y abandonner donne le perfide plaisir d'être déjà un autre et surtout hors de soi (ne serait-ce pas la chute d'Alice, vers le pays des merveilles ?) hors de ses limites charnelles, d'une prison familière.
Dans l'indécision des formes qui sont déjà celles du rêve dont on a perdu des pans entiers au réveil. Habite-t-on durablement un rêve. Ce serait la nostalgie.
On tente d'en reconstruire, approximativement, l'édifice, le peuplant des fantômes qu'on y avait rencontré. et que l'on ne veut pas perdre totalement.
De même on s'est éloigné du texte blessé par cette sinuosité du blanc du papier où il n'a pas su colmater cette étrange blessure, et, de nous y précipiter nous a tourné la tête.
Il sera difficile de retrouver son chemin après ce doux vertige et la masse sombre du texte sanglé dans sa belle lisibilité en corps 12 ressemble alors à un mur.
Parviendrons nous à le franchir ?

photo Michel Flégon.

 


Commentaires

 

1. Saint-songe  le 06-10-2010 à 13:15:33

Illustre "bâtarde" (je porte ce titre dans mon prénom, avez-vous vu ?) J'ai lu une partie de son oeuvre dans le plat pays (qui est le mien, aussi, monsieur Brel), inutile de vous dire, que natif entre Arras et Douai, elle remua mes tripes de gamin en culotte courte !...Cette "masse, ...., compacte.... longue fissure qui déchire le texte", c'est sa vulve blessée me suis-je dit, son "origine du monde" qui saigne de ses "autofictions"... Ai-je tort ?
Le bonjour sous ciel bleu ensoleillé, pas de vent...

2. sorel  le 09-10-2010 à 10:55:58  (site)

Pas mal la traduction digne d'un psychiatre cultivé (ils le sont). Mais ce n'était qu'une modeste observation furtive en cours de lecture. Beau temps, même dans les têtes.

3. Saint-songe  le 09-10-2010 à 18:03:52

OUI, j'aurais dû faire psy-quelque chose, j'ai toujours, j'aime toujours interrogé l'âme humaine, la mienne en premier (comme tout psy avant d'exercer), qui me montre ce qu'un enfant ne peut pas voir... Je ne suis saint que dans le songe, monsieur mon ami (plus que savant aussi), je vous l'ai dit, à d'aucuns aussi, via mon blog éponyme (je m'étais choisi Bertrand Sénéchal, Bertrand
Debarbantane, Florian de la Meyre, à "joué" mon Pessoa quand je n'avais que 20 ans - ah l'ambition, ah l'honorable vocatif des vocations, que le pseudo, n'est-il pas , Sieur Sorel ? J'optai pour l'actuel Songe...Oui, Psy, ça me va comme un gant de femme à motif rouge et vert, que j'ai, que je me mets, quelquefois, pour ...dessiner (ou écrire) - chut !!!

4. Saint-songe  le 09-10-2010 à 18:06:35

lire : interroger (ah mon étourderie, mon étourderie - sois sage, ô mon étourderie, etc...)

 
 
 
posté le 05-10-2010 à 11:20:51

André Breton entre le Ciel et l'Enfer.

Peut on y voir un signe (pour lui qui les appréciait tant et ne manquait pas de les noter) qu'André Breton habitait au dessus du "Ciel" et de "l'Enfer", deux cabarets qui firent les beaux jours du Montmartre de la godille.
Lieux de fiction forcée à l'extrême et caricaturaux. Dont on imagine mal qu'il appréciait l'esprit, encore que cette envolée vers des extrêmes ne devait pas manquer de sel pour un esprit prompt à fantasmer.  
Il me semble que Villiers de l'Isle Adam (qu'il portait à la célébration) était mort dans un immeuble voisin (à vérifier) et que chaque pas, dans le quartier soulève des fantômes. Ici Théophile Gautier, là Delacroix, et au coin de la rue, Constantin Guys tant aimé des Goncourt, ou encore Gérard de Nerval qui est toujours un peu partout dans Paris, et Toulouse-Lautrec qui balade sa fantaisie cynique, ses amis fêtards, sa gourmandise déviante et franchissant tous les obstacles de la bienséance dans toutes les rues du quartier, entre le Moulin Rouge (voisin) et les bordels abondants alors dans l'endroit.
Breton, piéton inspiré ne pouvait que croiser sur son chemin tous ces fantômes qu'ils surgissent du ciel ou de l'enfer. Aujourd'hui s'est glissé un petit théâtre si petit que de la rue on perçoit la scène où s'agitent des comédiens en répétition. C'est bien le propre de l'endroit de déverser dans la rue les forces de la fiction, et peut-être les lueurs du merveilleux.

 


Commentaires

 

1. Saintsonge  le 05-10-2010 à 11:45:18  (site)

L'espace réel, l'espace imaginaire, l'oeuvre liée à la rue : la narration discontinue qui situe Breton peut le placer , en effet, entre "le ciel" de l'imagination et "l'enfer" de cette vie !!!

 
 
 
posté le 04-10-2010 à 10:27:11

Verlaine dans l'atelier de Carrière.

Si Carrière ne fut pas un intime de Verlaine (ils se seraient vus une seule fois, dans l'atelier de l'artiste de la rue Hégésippe Moreau où le poète devait "poser" pour le peintre) il sait admirablement traduire le caractère pathétique de son modèle, sur le long chemin de sa déchéance. Charles Morice qui est à l'origine de la rencontre se souvient : " Le poète, malade, était à l'hôpital, à l'autre bout de la ville. Tout avait été préparé, Carrière l'attendait. Pas un instant Verlaine ne posa. Durant cette unique séance de quelques heures, il ne cessa d'arpenter l'atelier en parlant haut. Pas un instant Carrière ne cessa de travailler. Verlaine partit, je crois bien sans l'avoir aperçu" pourtant, le peintre saura "voir la vérité du poète, et la dire".
Gustave Geffroy (dont il a fait aussi le portrait), en observateur attentif et pénétrant, avait noté : "Toute la mise en scène savante que (Carrière) donne à la pensée qu'il veut mettre en lumière consiste à isoler son sujet, à l'éloigner de tous les objets qui pourraient attirer l'attention de celui qui regarde. Il  veut aussi assurer à ce sujet le bénéfice de l'intérêt total, il lui donne toute sa place, il n'en fait pas le centre du tableau, il en fait le tableau tout entier";
Plus que tout autre, en raison même de sa nature et de son état, Verlaine pouvait représenter un sujet idéal pour la manière de Carrière toute de souple et évanescente suggestion, et forcée sur le caractère mélancolique de la réalité qu'il scrutait. On l'aura vu dans ses nombreuses compositions basées sur le thème de la maternité. Avec quelque chose de languissant, de souffreteux, définissant la nature humaine. Ce qui l'amène à user d'une touche rapide, évitant le détail anecdotique pour atteindre l'essence même du sentiment qui est le véritable sujet. Il rejoint aussi le monde de Jehan Rictus sans en avoir cependant la gouaille et le caractère parfois provocateur. C'est Steinlen qui prendra en charge la matériel poétique du chantre de la désespérance dont la rue est le cadre naturel.
Carrière est plus feutré. Ce qui le conduit à traiter le paysage dans une gestuelle finement (mais discrètement) colorée. Et déjà d'une étonnante modernité pas son adhésion à l'atmosphère plus qu'à l'architecture des formes. Il exprime une sensation.

 


Commentaires

 

1. Saintsonge  le 06-10-2010 à 06:56:26  (site)

il m'a échappé c'verlain, mon ordi bug gravissim... Plus d'e... programm'qui bug aussi... Ah là là l'informa-tic !!! Plume 'vaut mieux ... Ma main n' Danse plus sur l' clavier
Ça m' en-nuit-grave'...Zut !

 
 
 
posté le 02-10-2010 à 11:29:06

Kirchner, un dessin au lasso.

On apprend qu'il fut l'une des victimes (elles sont nombreuses) de l'intolérance et de la stupidité des chemises brunes entendez la règne des nazis. L'art, selon eux, devait exalter la force musculaire de l'homme nouveau. Quelque chose dans le genre monsieur muscle et familles nombreuses, blondes bien évidement.
Alors que lui, Ernst Ludwig Kirchner, dévoilait la face sensible de l'homme et ses angoisses, ses plaisirs (d'où la chair) et ses vertiges. Et pour le dire, le donner à voir, un trait vif, mordant, prompt à tenir dans son élan, un instant de vie (pour défier la mort). Ce n'est pas un art de l'immobilité, mais, bien au contraire, celui qui capte au lasso un geste, un instant, et le dit avec un tremblement dans la main (comme on dit un tremblement dans la voix) sous le coup de l'émotion.
Il se prête volontiers à la confidence, ou, plutôt, en marge du dessin, pour le mieux saisir dans sa spontanéité il le commente, et se laisse aller à la confidence.
Noté, au passage: "mon travail naît de la nostalgie de la solitude", la cherchant comme un espace de bien être pour se mieux connaître.
Bien des mots pour mieux baliser son territoire à une époque (le début du XX° siècle) où l'artiste se cherche, s'affronte au réel au lieu de l'imaginer comme ses aînés. Devant l'adversité de son temps à son égard il est victime de dépressions nerveuses. Malade, il connaît les établissements de repos, et au terme d'une longue errance en lui-même, il se donne la mort (1938). Victime de l'art qui abat ses  soldats quand le monde est en effervescence.
Son trait, si sensible qu'il semble tout le temps s'évader de sa mission, brûle en lui comme un feu qui court le long d'un fil reliant la vie à la bombe qui va l'anéantir, arrache au réel des présences. Cette femme au miroir, à la présence si forte !
Et le miroir pour décupler cette présence (on songe aux expériences en d'identiques jeux de réflexion de Egon Schiele), elle est là, promise à quelle connaissance d'elle-même ?
Se regarder dans un miroir c'est douter de soi.


 


Commentaires

 

1. Saintsonge  le 02-10-2010 à 14:35:18  (site)

Terrible solution d'un incompris que de devoir toujours traverser le "miroir" après s'y être par trop regarder, et, de le traverser, poussé par l'indifférence généralisée, ce, par toutes les époques... Je lui connaissais mieux Schiele - qui s'intéressa aussi à la Vie de Van Gogh - cet "éternel enfant" condamné, emprisonné, accusé de détournement de mineurs (le juge brûla l'une de ses œuvres lors de son jugement, en plein tribunal) ; qui ne se préfigure-t-il pas un destin de "révolté", dès qu'il touche à l'art ? A cette époque où l'expressionnisme allemand altérait davantage les visages afin d'en portraiturer le vif des sentiments - "je voulais regarder les Hommes en colère avec amour pour obliger leurs yeux à me rendre la pareille", dit un de ses poèmes, tout ce qu' Hitler nomma : "dégénérescence de l'art"....
Temps pesamment gris, ce jour.
PS / J'ai trouvé le bug avec mon lien "contact" via mon blog, c'est que je ne me souviens plus de mon mot de passe !!!

 
 
 
posté le 01-10-2010 à 14:59:11

L'atelier d'écriture des Goncourt.

L'atelier d'écriture.
 C'est  au fond de la cour, au 43, rue Saint Georges, dans ce qui fut alors le frétillant quartier des lorettes. D'ailleurs leur voisine en est une, dont ils firent l'un et l'autre, leur maîtresse. Ils ont l'habitude de tout partager, même le rite de l'écriture.
A la même table, avec, au milieu, cette masse de documents dont ils aiment à s'entourer, car ils sont aussi des maniaques du détail vrai, de la minutie jusque dans leur manière d'écrire. On parlera d'un style "artiste". C'est qu'ils finassent sur les mots, choisissent le plus juste (le plus rare ?) et optent pour des tournures précieuses (encore que précises).
Le travail en duo, en dialogue. A ne plus savoir qui "a fait quoi", la finalité justifie que chacun s'efface derrière le couple littéraire qu'ils composent. Encore que Jules ajoute à ses attributions, celle du dessinateur qui atteint de séduisants résultats tant dans la "vérité du dire que l'élégance du faire".
A juger de leur écriture (la seule chose qu'ils n'ont pas en commun) on voit celle de Jules plus libre, légère et aimant sautiller parmi les croquis qu'elle commente. Il y a là le procédé du peintre qui note, dessins et écriture se confondent, se suivent en une coulée heureuse et nette.
Edmond est plus assis dans sa formulation. L'homme de lettres s'affiche sans complexe, et même, parfois, avec une certaine complaisance.

 


Commentaires

 

1. Saintsonge  le 01-10-2010 à 19:04:22  (site)

"S'asseoir" dans l'écriture, trouver l'assise juste, cela "affiche" l'homme de lettres dans sa complexité, en effet...dans cette rare complicité fraternelle de collectionneurs et d'historiens, initiateurs en plus du mouvement "naturaliste" qui, ce jour à douarnenez-tréboul très "grisaille", ils en seraient ravis (quoique non villes vives)... Leur Journal 1851, il me plairait le relire. Dire que leur co-fraternité dans le bonheur fut brisé par....une femme... L'Eden de l ' "écriture artiste " en pâtit-il ?
"Joli petit néant"...."animal mauvais et bête".... (heureusement Colette et d'autres Sand en signèrent le démenti !)
Bonne soirée....moins pluvieuse ....(dans votre "grenier" ?)

 
 
 
posté le 01-10-2010 à 11:46:24

L'écriture flamboyante de Barbey d'Aurevilly.

A la ressemblance de tout son être, sa manière de se vêtir, d'être, de s'afficher, et même à l'exemple de son nom, l'écriture de Barbey d'Aurevilly est flamboyante. Maîtrisée, hautaine, élégamment ourlée, ornée, jeu de banderilles et de rubans, elle est aussi claire et fort lisible. Elle se suffit à elle-même parce qu'elle est le reflet exact du texte qu'elle porte à l'évidence de sa volonté de dominer le lecteur. De l'enjôler.
Ici le graphisme a trouvé son style, il est le dessin qu'il contient et véhicule de pages en pages comme une longue mélopée, chantante, et qui est un peu l'opéra de la graphologie. Certainement pas (tant elle a conscience d'elle-même, qu'elle se théâtralise) en mesure de trahir celui qui s'en pare (s'en empare) et déverse ses flammes ardentes sur la page.
Elle cache probablement (dois-je dire sans doute) ses doutes, ne relève pas du brouillon, elle ne se cherche pas, elle est à la parade. Lustrée, dans le bel uniforme du dandy qui ne mettra pas ses pas dans la boue des dures épreuves qui attendent toute entreprise d'écriture, mais pour nous plaire (oh jeu de la séduction) se donne en spectacle. Elle est comme une portée musicale avec les indications qui précisent les temps forts, les accents. On pourrait la chanter. La mettre  en musique.

 


Commentaires

 

1. Saintsonge  le 01-10-2010 à 12:11:51  (site)

Un seul remède, c'est la foi, nous dit Henry Miller dans "un diable au paradis", et tous les "moi" flamboyants ou non débarrassés
d'une écriture, voire plus..
Votre protégé D'aurevilly : "c'est avoir fait un bien grand pas dans la sagesse que de ne pas avoir besoin de société le soir" (ouf, je suis sauvé ! Et vous ?.......)
La drache précise les grisailles du pays, longues averses après très forte pluie...
Ici, bien à votre journée (mes dessins vous sont-ils bien parvenus par mail , hier ?)

2. sorel  le 01-10-2010 à 15:01:19  (site)

Oui j'ai reçu les dessins, je vous ai laissé un petit message en partant de contact sur votre blog. J'y disais que j'allais tenter d'en faire un bon usage. Merci. Bonne journée.

3. Saintsonge  le 01-10-2010 à 18:20:02  (site)

Ah très bien, tant mieux, je n'avais reçu votre message, avec le lien dont vous dîtes
- s'il ne s'agit de commentaires, je crois que je n'arrive pas à me connecter depuis mon blog à ce lien "contact" -, puisse votre inspiration bien vous "habiter" l'acte d'écrire "sur", en votre atelier de réflexologie...artistique et littéraire...
Merci en à-valoir, déjà, si j'ose et puis dire.
Notre mission est de faire connaître qu'il existe un autre "monde"...

 
 
 
posté le 30-09-2010 à 14:34:58

Raymond Roussel à Biarritz.

La mode était, au XIX° siècle finissant, de se faire construire à Biarritz (comme à Deauville ou Cannes) de splendides villas pour des villégiatures dopées par l'air marin dont on découvrait les vertus. Là, des ducs russes, des milliardaires anglais, des cocottes enrichies, des excentriques fortunés se retrouvaient menant grand train et rivalisant de luxe et de fantaisie dans des défis architecturaux qui ont pris avec le temps ce charme des choses patinées même si leurs prestigieuses vocations primitives ont laissées la place à des entreprises commerciales ou des hôtels.
`Le long d'un boulevard qui serpente en surplombant l'océan s'alignent villas aux noms ravissants qui égrènent les souvenirs de fastes et de fantaisies.
Et voici la villa baptisée Bégonia qui fut celle de la mère de Raymond Roussel.
Construite par Walter André Destailleur, elle est achetée par Marguerite Moreau-Chaslon en 1907. Elle s'appellera alors Villa Chaslon-Roussel. François Caradec, dans la savante biographie de l'écrivain, note qu'elle fut "gratifiée d'un long et disgracieux escalier extérieur enrichi d'une rampe ancienne en fer forgé rouillée par le climat et qui descend directement du balcon en façade du troisième étage au jardin latéral". En raison de la forte déclivité du terrain, le rez-de-chaussée côté rue correspond au troisième étage côté mer. La villa est dotée d'un ascenseur.  Fort soucieuse de son confort, madame Roussel mère avait reléguée la cuisine dans un bâtiment annexe, "le monte-plat de l'office qui jouxte la salle à manger est relié aux cuisines, au moyen d'un chemin de fer miniature souterrain".
Rien d'étonnant à ce que Roussel, devenu écrivain, imagine des univers mécanisés proches de la folie, des  machineries délirantes et l'attrait du théâtre..
De son côté, Michel Leiris (qui avait connu Raymond Roussel en rapport avec son père dans des affaires de bourse), ira faire un pèlerinage et note que l'entrée monumentale de la villa "à triple voûte" évoque quelque grotte mystérieuse.

 


 
 
posté le 30-09-2010 à 11:04:51

Molière chez lui, à Paris.

Le souvenir de Molière est étroitement lié au plus vieux Paris. Nombreuses sont les maisons du centre qui revendiquent l'honneur d'avoir été celle de sa naissance. (à en croire Francine Mallet, une spécialiste, ce serait au 93 rue Saint Honoré). Certaines, en raison de leur grand âge, s'élèvent sur plusieurs étages de caves voûtées qui remontent au Paris médiéval. C'est bien dans la chair même de la ville que les traces du sublime comédien s'inscrivent.
Dans la voisinage immédiat de l'ancien Couvent des Cordeliers (aujourd'hui l'Ecole de Médecine) s'élevait (jusque dans les années 1900) une double maison qu'habitait Armande Béjard. On est là au coeur du foyer du comédien, dans son intimité. Son théâtre n'était pas loin, il a dû hanter ces rues aujourd'hui bigarrées par une modernité trop indiscrète qui tend à gommer tout souvenir du passé. Rendant celui-ci d'autant plus précieux quand il surgit, comme dans un murmure, et offre d'émouvants lambeaux de ce qu'il fut.
Mais Molière est constamment présent dans ce Paris que les assauts de l'urbanisme a pétri avec rage, taillé à merci, et méconnu. Grâce soit rendue à ces historiens de la ville qui dénichent les documents qui réhabilitent des lieux, les peuplent de ces personnages qui hantent notre mémoire.
Une malice de l'Histoire veut que cette présence de Molière s'accuse mieux encore dans le voisinage de l'école de médecine, lui qui donnait du médecin une image si ridicule. Quant aux Précieuses elles sont encore là, dans quelques Salons mondains qui persistent. Mais Proust est aussi passé par la double porte où la valet préposé à la chose, annonce l'arrivée de l'invité. Lui aussi chargera sur la bêtise des dames qui jouant de leur nom (de leur fortune) se croient en mesure de régir l'opinion publique et imposer leurs caprices.
De Molière à Proust le ligne est tracée, qui dénonce les faiblesses humaines. Le Misanthrope n'est  pas loin.
On pousse quelques pas de là, rue de l'Ecole de Médecine aujourd'hui, et l'on frôle l'ombre de la maison de Marat, autre fantôme dont on peut se flatter d'en sentir la furtive présence.


 


 
 
posté le 29-09-2010 à 10:48:17

Balzac, enfin rue Fortunée.

Encore une chance que la rue porte son nom, fixe le souvenir de sa présence, là. Derrière le haut mur de la fondation on devine une colonnade comme il y en avait au XVIII° siècle dans les jardins de philosophe (et de plaisir). Elle aurait été récupérée par Balzac quand il rêvait de sa maison d'amour (pour l'assez irritante madame Hanska qu'il épousera au terme d'une longue attente et un flopée de lettres d'amour et de folie).
Humour du hasard, ou incongruité, la rue s'appelait rue Fortunée. Un signe du destin, comme il en est tant, que l'on ne perçoit pas toujours et qui, détecté, laisse sans voix.  
Triste histoire que celle de ce forçat de l'écriture, ayant enfin atteint le bout de ses rêves et la fortune derrière laquelle il avait passé son temps à courir, aménageant dans ce "palais" de parvenu pour y agonir. Dans un grand désordre de meuble juste livrés par les déménageurs, d'oeuvres d'art (lui qui les aimait tant) qui n'avaient pas encore trouvées leur place.
Epuisé, l'homme titan va recevoir sur son lit de mort l'hommage ému de Victor Hugo (quel dialogue au bord de la mort !). Se tenant par la main, l'un sentant la mort monter dans le corps de l'autre, ou le contraire, celui qui part, recevant l'ultime décharge de vigueur en signe de reconnaissance.
Il est des morts vulgaires, apaisantes, surprenantes, celle-ci a des allures de mort de légende.

 


Commentaires

 

1. Saint-songe  le 29-09-2010 à 19:59:51

et "rue de la vieille-lanterne" y trouva Nerval... Rue des Petites Eaux, où je me trouve, tout coule lentement, très très lentement, se bouche parfois, retarde tout dans le fier mouvement des grands flots... Je n'y lis pas l'auteur du Lys, car depuis la toute jeunesse, je n'en fis pas mon compagnon de "chevet", perdu dans cette foule de personnages dont quelques uns reviennent , quand ils furent morts, ou apparaissent sans crier gare, à se demander d'où ils pouvaient bien sortir ! Et vous, votre rue vous "parle" ?... Le bonsoir.... dans la fraîcheur ensoleillée d'Ys (sans la vallée)

2. sorel  le 30-09-2010 à 11:08:21  (site)

oui. je suis né rue du Bersault (ou Bersaults) qui à l'oreille évoque le berceau. En fait il s'agit d'une allée recouverte de verdure d'un ancien jardin car la maison était construite sur un ancien rempart. J'ai souvent imaginé ce que pouvait être ce jardin médiéval... Il fait gris, mais la danse des mots ne faiblit pas.

3. Saintsonge  le 30-09-2010 à 15:47:53  (site)

Je constate , en effet, que vous dansez très bien, littérairement s' entend (cent ans ?), et j'en suis ravi, d'ailleurs, cela m'aère l'esprit d'un vent nouveau chaque fois, tant ici, rien ne me dit Littérature ou Poésie pures, rien... Sinon l'écrit(ure)... Bon... Mes finances s'épuisent de même, ça craint... Je crois être semblable à ces Gauguin-Rimbaud fauchés sans ces temps de blé (double sens)... J'ai la Zen attitude... sous le soleil d'après pluie, le Finistère changeant d'humeur céleste aussi vite que celle d'une femme .... Petit vent sur la contrée... Pas de mouette à l'horizon... Mais plein de moustique dans ma chambre-océan (d'où viennent-ils ?)...
Kenavo du site...

4. Saintsonge  le 30-09-2010 à 15:49:27  (site)

PS / j'ai oublié l' 's' à moustique (s)

5. Saintsonge  le 30-09-2010 à 21:00:19  (site)

De plus, à Tournai, les archers, par un jeu local du Bersault, ils "Bersaillaient", tiraient des traits ...

 
 
 
posté le 28-09-2010 à 11:13:47

Paul Eluard donne à voir.

Le titre de "critique d'art" est inapproprié quand écrire sur l'art n'est pas motivé par le souci d'en faire une analyse avec le sentiment d'être en mesure de juger de sa valeur. D'ailleurs, dans la plupart des cas, la critique d'art est assurée par des poètes.       
 Pensons à Baudelaire qui aura été l'un des premiers ( il y a aussi Diderot ), et notons qu'au XX° siècle qui aura été particulièrement riche en la matière, ce sont les poètes qui tiennent la plume (et même souvent le pinceau).
Eluard est de ceux-là. S'il écrit "sur" les peintres c'est en usant de ses armes propres, la poésie, et d'ailleurs c'est souvent sous forme de poème qu'il approche la peinture qu'il  aime. Au point qu'il collabore avec les peintres, créant des livres avec eux (Man Ray, Max Ernst, Valentine Hugo, Dali, Vulliamy, Bellmer) tant texte et illustrations sont un effet de miroir.
Critiquer alors n'est pas porter un jugement mais fraterniser avec l'objet de son attention, de son admiration. Avec le souci de partager.
Mais c'est aussi "donner à voir". C'est sous cette formule (utilisée par Paul Eluard) que quelques "critiques" d'art des années 60, se ralliaient, militant pour des artistes qu'ils aimaient et avec lesquels, souvent, ils travaillaient à la réalisation d'ouvrages de bibliophilie.  
Le caractère fraternel et généreux de  DONNER A VOIR situe bien dans quelle orientation on doit aborder l'oeuvre d'Eluard et celles de tous ceux qui se réfèrent à lui.

 


Commentaires

 

1. Saint-songe  le 28-09-2010 à 20:48:54

Et ainsi savez-vous, comme de juste, que le poète étant "son" critique (d'art), ils ne travaillent jamais ensemble...Tel poète qui comprend, qui analyse, uni à ce "critique", Nietzsche ne lui voue pas une reconnaissance, disant que tout grand poète ne doit rien regarder du tout, surtout pas en "arrière"... Le poète-critique démêle l'écheveau de ce qu'il veut, l'avertissant d'un "ce que tu veux obscurément, le voici clairement : tu veux ceci...", dit de lui-même, critique de son "donner à voir", critique surveillant son achèvement en disant : tu n'es pas arrivé à ce que tu voulais vraiment, et l'as-tu su, d'ailleurs, en commençant ton œuvre, et ce que tu as voulu "rendre" au monde ? Le sens critique : "un poète uni à un critique d'art et travaillant avec lui", jamais ensemble, cependant...puisque critiquer, c'est "examiner, comparer, raisonner, discuter, juger..." pour que nous, lecteurs, nous puissions admirer-voir... L'heureux bonsoir d'ici d'un ciel bleu Fontaine d'un "contre ceux qui ont le goût difficile", ciel ensoleillé excellemment nuageux....En quittant Pococurante, Candide dit à Martin : "Voilà le plus heureux de tous les hommes : car il est au-dessus de tout ce qu'il possède...", ce que je crois que fut Eluard....

 
 
 
posté le 27-09-2010 à 15:41:29

Un Soupir à la Tchekhov.

Il n'est plus que l'ombre de lui-même. Pierres taillées comme par la foudre, au milieu des champs, et une porte sublime, menant au vide, à l'espace qu'elle marque comme d'un sceau magnifique la fragile et tremblante présence. C'était le château (comme il y en avait tant) de Soupir, ravagé par la première guerre mondiale (il est aux pieds du Chemin des Dames).
L'imaginaire que met en route la plus simple image (et la magie des cartes postales anciennes) nous restitue une vie de grande bourgeoisie. Une sorte de version  française du monde de Tchekhov avec ses sentiments blessés, ses amours impossibles, et son exquise politesse.
C'était au temps d'une vie que l'on disait plus facile, mais reposant sur l'abnégation des plus modestes qui se mettaient au service des riches. Une cassure dans la hiérarchie des classes qui avait ses cadres : les lourds décors de tapisserie et de boudoir des appartements parisiens, et ces demeures de campagne, château de carton pâte et de fantaisie avec ses références naïves au moyen-âge.
Le romantisme était passé par là, le style troubadour et l'imaginaire développé par l'inventif Viollet-le-Duc. Chacun voulait son petit Pierrefonds privé. On est entre le merveilleux de la Belle au bois dormant, et les grâces surannées des troubadours. Un château pour cadre d'une histoire d'amour. Chacun doit l'inventer.

 


Commentaires

 

1. saintsonge  le 28-09-2010 à 18:17:18  (site)

Et ainsi savez-vous, comme de juste, que le poète étant "son" critique (d'art), ils ne travaillent jamais ensemble...Tel poète qui comprend, qui analyse, uni à ce "critique", NIetzsche ne lui voue pas une reconnaissance, disant que tout grand poète ne doit rien regarder du tout, surtout pas en "arrière"... Le poète-critique démêle l'écheveau de ce qu'il veut, l'avertissant d'un "ce que tu veux obscurèment, le voici clairement : tu veux ceci...", dit de lui-même, critique de son "donner à voir", critique surveillant son achèvement en disant : tu n'es pas arrivé à ce que tu voulais vraiment, et l'as-tu su, d'ailleurs, en commençant ton oeuvre, et ce que tu as voulu "rendre" au monde ? Le sens critique : "un poète uni à un critique d'art et travaillant avec lui", jamais ensemble, cependant...puisque critiquer, c'est "examiner, comparer, raisonner, discuter, juger..." pour que nous, lecteurs, nous puissions admirer-voir... L'heureux bonsoir d'ici d'un ciel bleu Fontaine d'un "contre ceux qui ont le goût difficile", ciel ensoleillé excellement nuageux....En quittant Pococurante, Candide dit à Martin : "Voilà le plus heureux de tous les hommes : car il est au-dessus de tout ce qu'il possède...", ce que je crois que fut Eluard....

2. Saint-songe  le 28-09-2010 à 20:52:45  (site)

Je vous ai recopié le même commentaire sur la page "Eluard"...

 
 
 
posté le 27-09-2010 à 10:03:38

Colette au plus près.

Il est le troisième (et dernier) mari de Colette. Il y eut d'abord Willy (qui l'exploite) Henry de Jouvenel (qui lui donne un vernis social) et ce Maurice Goudeket (qu'elle avait connu par l'intermédiaire de la fantasque Marguerite Moreno) qui veille sur elle jusqu'au terme de son voyage terrien, partageant sa gloire et portant, en quelques pages de souvenirs un très précieux témoignage sur son quotidien.
L'écriture en est élégante, d'un rythme classique fort agréable, et il donne de son modèle, une image pleine de ferveur et  d'admiration épandue en des pages chaleureuses fort précieuses pour approcher une individualité complexe, fort égocentrique, source de toute une oeuvre limitée en ses ambitions mais d'une incroyable pénétration pour les choses simples.
C'est dans la mesure où il s'efface devant elle qu'il atteint cette vérité que nul autre que lui était en mesure de restituer. Trop de souvenirs, de mémoires sont aussi le faire valoir de celui qui les donne. C'est ici un cas assez unique. Et exemplaire.

 


Commentaires

 

1. saintsonge  le 27-09-2010 à 11:44:41  (site)

"Mes apprentissages" - 1936 - nous le révèle fourbe, sûr, et d' Henry Gauthier-Villars (qui lui valut forte dépression ; dans la villa des Monts-Boucons ?), je lui préfère, pour elle, la belle marquise de Morny, dite Missy, aux fabuleux scandales du Moulin-Rouge, elle lui offre d'ailleurs sa villa à Rozven, Bretagne, pour divorcer (ça se dit, pour les amitiés particulières, ce terme ?) en 1911 ; Goudeket, c'est la Provence et Le St'tropez, je crois savoir que les allemands l'emmenèrent en 1941, et "récupéré" par l'écrivaine ... Je déménage autant qu'elle, mais seul, et difficilement.... "Au plus près" des fortes amitiés, aussi : Les Annie de Pène, et sa fille, Germaine Beaumont, Francis Carco et Marguerite Moreno, d'autres plus ou moins influentes... Ah, cette Baronne Colette entrant au journal "Le Matin", aussi ! Quelle vie, n'est-il pas ?... Vie qui la combla d'honneurs, jusqu'au 3/8/54... Oui, grande dame... chatt'oyante, on dira..., en clin d'oeil... Elle vous inspire aussi, je vois... Bonne journée. Beau ciel bleu céruléen ensoleillé, pas de vent, quelques friselis de nimbus... L'été perdure...dans les mots qui délivrent. Ce sont "les vrilles de la vigne : ...j'entends encore le premier chant naïf et effrayé du rossignol pris dans les vrilles de la vigne...."

 
 
 
posté le 26-09-2010 à 11:29:54

André Breton à la plume ardente.

La correspondance des poètes suit souvent le chemin du dessin qui est si proche du mot, sa logique conséquence et comme l'ornement d'une pensée à vif.
André Breton aime "bricoler" les objets, les mots, les formes. Il y a la part du jeu, mais aussi, comme chez Victor Hugo (un maître en la matière), une exploration en profondeur, donnant au dessin le pouvoir de pénétrer la pensée,  d'en extraire l'or comme du limon de la banalité du mot quand on  le secoue  pour tirer de lui l'essentiel et peut-être cette magie qu'il contient et que le dessin scrute, piège, met en valeur.
Théodor Fraenkel, ami de collège, aura droit à des lettres qui sont de véritables "oeuvres de création" où le dessin a sa part. Que ce soit ce visage que l'on dirait surgissant de la nappe fluide d'une eau dormante, ou cette notation échevelée, à la ressemblance de quelque sorcière. Déjà toute une histoire se profile dont on peut varier à l'infini les issues. Plus encore que le rôle donné à l'illustration (qui accompagne, souligne, dialogue avec un texte), on a un texte en soi. Et pour faire bonne mesure, demandons nous s'il n'est pas en soie ? Celle d'une pensée fluide et chatoyante.

 


Commentaires

 

1. saintsonge  le 26-09-2010 à 16:02:06  (site)

C'est en effet la caresse du mot sur la page dessinée, ou l'inverse, le silence parfumé des profondeurs interdites surgissant du dessin, afin d'y apposer les maux du mot maxima-minima.tout décrits in plano.... C'est beau.

 
 
 
posté le 25-09-2010 à 16:24:02

Un monument de la solitude : le livre.

Dans l'inextricable forêt des mots que Proust met en scène une phrase sort de son contexte et se met à scintiller comme une enseigne. C'est
:  les livres sont l'oeuvre de la solitude.
Cela, seul, suffit pour nourrir un regard, une pensée. Un destin.
Toute écriture est une trace. Plus ou moins codée.
Le contenant est un monument. De style et de taille fort divers et chacun ayant ses clefs.
Le découvrir, y pénétrer, c'est violer une solitude qui y est tapie.
Toute solitude se meuble de fantasmes, confine parfois à la folie.
On peut voir, dans l'oeuvre de Lautréamont, (encore qu'on lui prétende quelques mondanités lors de son ultime séjour parisien, mais n'était-ce pas seulement ceux de son banquier -car il n'était pas pauvre- et de ses éventuels éditeurs !) l'expression achevée de ce mal de la solitude qui prépare les livres les plus beaux. Les plus riches et dont la richesse serait en exacte proportion de l'étendue du mal psychique que la solitude peut engendrer.
Faute d'aller dans le monde on se le créé à sa  guise , à son image. Sans doute on est loin des livres qui sont le produit d'une expérience (voyageurs), mais dotés de l'étrange pouvoir de l'imaginaire qui le peuple.
Il est aussi une énigme. Une solitude n'est-elle pas un drame caché, à celui-là même qui l'éprouve, et le livre devient la clef, choisie pour en sortir. S'en sauver.


 


Commentaires

 

1. saintsonge  le 25-09-2010 à 16:54:39  (site)

Acte sexuel pour le moins, que LE LIVRE, de l'art de le lire ou de l'écrire.
Il est évident que j'abonde en plein sens de votre texte, d'autant que la solitude, elle me devient femme-amante-pute-nonne-douceur-aimante-jalouse (du bruit de la ville dont elle voudrait bien en connaître la débauche)-pieuse et reposée, méchante quelquefois (valéry : un homme seul est toujours en mauvaise compagnie)-onaniste-priapique-sage-enlevée (par les fantasmes, justement)- donc, "un drame caché, oui, et je "l'éprouve"...
"Es-tu donc l'auteur ? - Plût à Dieu ! mais j'ai quelquefois comme une illusion que je le suis" (un athénien devant une statue de Phidias) ; femmes, hommes, moines, jeunes et vieux, bêtes, jeune fille, autres mêmes, tout en moi vibre d'insatisfaction et de bonheur, il y a lutte entre ces deux forces contraires.Ah grand dieu, quel attelage !
Chez moi, dans ma chambre-océan, l'Ange de la lecture fait rouler la pierre devant le sépulcre du Livre. Et, de Montesquieu, je vous l'ai dit, je crois :
"Une heure de lecture est un souverain remède contre les dégoûts de la vie"...Ah merci, cher ami, je n'avais presque plus d'argent, en fin de ce mois, et de lire votre article, ça m'en ôte le dégoût de moi de n'être pas plus socialisant /able, (recommandable ?) (aimable ? - Mais, j'aime, pourtant !.. Oui un "monument" que cette solitude !
Père Bertrand sans Abbaye, ni communauté, que quelques blogs amis dont le vôtre, "pour aller dans le monde"...N'aurai-je qu'une vie en virtuel, tout-à-coup, j'y pense... ? Le temps n'est plus aux liseurs, mais alors , quid de l'Umbratilis vita (s'enfermer à l'ombre, comme je fais, et vous sans doute.., plusieurs jours durant, pour ne rien faire que....LIRE ! Isolé dans ce petit monatère isolé, les femmes que j'ai connues me détestèrent pour ça, et la récente Blandine , en sus ! La B. de B de mon blog, puisque vous y êtes passé...Elle était ennemie de la lecture. Choisir entre l'amour, son sexe ou les pages encore à lire, à écrire...Bien voilà, je ne suis pas parti, je ne pète pas de thunes, et...j'ai gardé "ce vice impuni" !!ALORS : "quand je veux lire un bon livre, je le fais"... Ainsi retrouvé-je mon estime. Bien à votre bonne intuition du jour, et Kenavo du site;;. Le Poète est ce critique d'art qui "travaille" avec lui, jamais ensemble. Je donne de l'écriture comme de marcher dans la lecture très impétueusement en avant-monde, ai-je tort ou raison, sieur Sorel et ami ? C'est que nous sommes en...2010. Déjà ? Eh oui....comme dirait Serge Moatti

2. saintsonge  le 25-09-2010 à 16:58:22  (site)

Ah oui, PS / J'aime ce Magritte.
L'homme est-il une bonne poire peinte en pomme-ci ?

 
 
 
posté le 25-09-2010 à 10:36:10

Colette face au Danger.

Importe-t-il plus qu'une action (ou fiction) soit l'essentiel du texte. Ne tient-il pas sa force, sa grâce, son attrait, de la manière même de son écriture, devenue quand l'action fait défaut, l'essentiel.
Et voici Colette dans la mouvement de la déroute générale qui jette sur les routes de France, lors de la dernière guerre, une foule confusément mêlée, moins pittoresque que lamentable (ou pathétique) parce qu'elle signe (dénonce) l'état d'un  pays, sa chute.
Colette  relate une étape chez sa fille (celle aussi d'Henry de Jouvenel). Elle habite le double château de Curemonte, dans un climat de désolation, et des effets de ruine qui inspirent à Colette ses plus admirables pages (dans "Journal à rebours"). Il y a là des notations, des observations, des remarques d'une incroyable finesse de perception et d'un rendu stylistique à la fois très simple et magnifiquement doté du pouvoir de nous ravir du moindre détail donné qui est la réalité que nous ne savons pas voir.
Avec elle la ruine est un grand corps malade, avec sa respiration, ses frissons, le tout signé d'un avertissement qui lui inspire de bien savoureuses réflexions :
DANGER. Une simple planche à demi rongée par le temps et qui met en garde celui qui se risquerait à franchir comme la frontière d'un état de merveilleux. Qu'elle  distille avec gourmandise.

 


Commentaires

 

1. saintsonge  le 25-09-2010 à 11:39:51  (site)

L'enfer, pour elle, serait "La Paix chez les bêtes" - "l'ombre qui grandirait comme un nuage et couvrirait, d'une aile effrayante, cette terrasse, et le pré, et la plaine, et votre maison fragile" - qui est alors ce château double ?...
Macha Méril est venue sur Douarnenez, ceci pour la confidence, elle me dédicaça DUO : "pour Bertrand qui aime Colette comme moi, Macha Méril, 29..06.07", nous avions évoqué un peu cette auteure des Claudine, de la retraite sentimentale (autre débat que ceux de la "retraite" actuelle !)...Ai trouvé sur le marché de Tréboul Chats de colette (Albin Michel, décembre 1949) elle y préface qu' "il n'y a pas de chats ordinaires.Il y a des chats malheureux", moi peut-être, miaulant ici , en Bretagne , chat aux yeux verts - y suis-je pour avoir lu le blé en herbe, dès quinze ans ?... Sur la porte de ma chambre-océan, ai scotché une reproduction de sa main écrivant sur une feuille où s'est allongé un chat qui fixe la pointe du stylo plume.
"enrichie d'un secret et d'un doute, je dormais avec le mot, et je l'emportais sur mon mur (La maison de claudine ; ce château aussi ?)"... Bien à votre journée moins "vagabonde", et merci de cet apport sur l'ingénue libertine...

2. sorel  le 25-09-2010 à 16:21:28

vraiment admiratif devant cette envolée. Le bruit de la mer vous donne des ailes. Bonne journée

3. sorel  le 25-09-2010 à 16:32:12

c'est le château où colette se réfugie pendant la guerre (il appartient à sa fille Colette de Jouvenel) curieusement elle parle de ruine (et si bien) et on trouve ici une bâtisse en parfait état. Que croire ?

4. saintsonge  le 26-09-2010 à 13:07:38  (site)

En plus, vous savez quoi ?.. C'est une seconde "envolée" - je vous avais écrit une réponse encore plus longue, puis je l'ai "postée" , mais en omettant de remplir les cases du haut, si bien qu'on me dit : "pseudo trop court", et tout fut annulé !... Curieux, dans la vie, je réussis toujours mieux les deuxièmes fois..."La seconde", livre de Colette.
Oui,
elle nous interroge "Trois..six...neuf..." car, contrairement à votre pensée, ce n'est pas le château qu'il faut comprendre dans son terme "ruine", mais la vie même de Colette :"que je vive dans un pareil gîte ! que je pense en sortir comme s'il m'enfantait ! que j'y rentre comme si je retournais à un temps d'avant ma naissance..." ELLE mourait donc à soi, dans ce "château", dans son propre "corps-citad'elle", ce qu'elle appelle alors "ruine", c'est son corps, non le château, son corps pour renaître plus vivante que jamais, en contact avec la vie - des bêtes et des gens, femmes et hommes -, la vie qui l'anima - anima / animus -, et, c'était sa matrice "féline", pleine de vie, que ledit château de son enfance, "ruine" parce qu'elle y étouffait, peut-être, et, d'y mourir de joie pour renaître à elle-même, le coeur encore plus léger, pour écrire...
Est-ce la mer proche de ma rue, ou Colette, la réelle inspiratrice de mes commentaires à votre très beau texte, allez deviner ! Les deux sûrement.
"Troix ...six...neuf" fois le bon dimanche, cher ami (des Arts et Lettres dont le vulgum pecus n'a cure) ; Moi, je suis un homme fluide..., retiré du consumérisme à outrance... Le bon dimanche, vraiment ! Ciel bleu, nuage à la Magritte, justement, léger vent frais, et, Perros éternel au bas de ma rue, dans le cimetière-demeure qui surplombe la baie de Douarnenez... Très beau temps.

5. sorel  le 27-09-2010 à 10:09:23  (site)

Parfois l'acuité d'un texte vous laisse sans voix (ou sans savoir quelle voie prendre !) Alors, constat : Je trouve le votre à la hauteur de son sujet. Ruine pour ruine, celle du corps est peut-être la seule que l'on peut dominer. On a chaque jour son jour du patrimoine.

 
 
 
posté le 24-09-2010 à 11:12:05

Rêve de jardin de Valentin.

Un chapitre de la vie de Valentin.

Enfant, il n'avait connu qu'un jardin trop bien "peigné" pour qu'il y trouve quelque plaisir à s'y attarder. On y jouait au croquet en bonne société (le sous-préfet, quelque haut fonctionnaire en goguette), buvait le thé sous un grand tilleul, mais les arbres plantés au bord de pelouses trop bien taillées avaient des allures d'invités trop bien habillés. C'était une manière de damier sur lequel se jouaient les réputations provinciales, se fomentaient les stratégies électorales et peut-être en surplus quelque belle opération commerciale.
 Il rêvait de forêts aux halliers mystérieux, d'allées serpentant parmi des arbres centenaires, et n'avait à sa disposition qu'une nappe de cérémonie où nul rêve ne pouvait éclore. C'est bien après, et après qu'il eut fait l'expérience de la ville et de ses squares fiers de leurs ornements sculptés, qu'il disposa d'un jardin dont tout enfant rêverait qu'il fut sien. On en appréciait l'épaisseur végétale, s'accordait aux capricieux méandres des naissances d'allées qui se perdaient dans des lointains ombreux. Alors, dans le joie toute neuve de s'y attarder, d'y rêvasser, il se posait, au gré de ses fantaisies, en un point d'où il pouvait admirer le développement anarchique des arbres et cette allure presque sauvage qui donne au plus minuscule coin arboré une idée de ce que pouvait être le cadre de quelque conte de fée. Car il attendait toujours les fées, et il savait qu'elles aimaient s'attarder là où la foule ne se presse pas, où le silence n'est interrompu que le chant d'un oiseau ( le soir d'une nuée d'oiseaux chamailleurs). D'en tant aimer l'atmosphère il fomentait le projet d'y finir ses jours sous une simple stèle qui aurait mentionné les dates qui font le grand écart entre sa naissance et sa mort. Il la commanda, laissa le chiffre ultime dans la béance des jours qu'ils lui restaient à vivre. Etait-ce une manière de mieux s'arrimer au lieu dont il se délectait ? Il repensait à l'émotion ressentie lors de ses promenades en quelques lieux où même la mort semblait se vêtir de dignité et défier ses ignominies intimes. Il voulait se construire son Ermenonville privé, sans pour autant se prendre pour Jean-Jacques Rousseau.


 


Commentaires

 

1. saintsonge  le 24-09-2010 à 12:33:43  (site)

Je ne sais si c'est le "sous-préfet ;le grand tilleul (vert du thé), les pelouses trop bien taillées, les forêts aux halliers mystérieux, la nappe de cérémonie, l'attente des fées, la fomentation d'un projet, le chiffre ultime dans la béance des jours, et même cette première ligne de l'enfant - qui - n'avait connu qu'un jardin trop bien "peigné" -", mais votre Valentin - qui vous ressemble bien - a un très bel accent Rimbaldien, ici, dans la rivière du texte où la Belle Ophélia de votre imaginaire glisse dans ses longs voiles phraséo-logiques !... La belle promenade que voilà dans vos souvenirs.... si j'ose dire !

 
 
 
posté le 23-09-2010 à 15:35:28

Les femmes-muses de Max Ernst.

La vie affective (sentimentale) de Max Ernst est jalonnée par des présences féminines fortes, souvent inspiratrices et moteurs de sa démarche d'artiste toujours ouvert à de nouvelles expériences (explorations) sans rien perdre du fond de sa nature profonde, teintée de germanisme et d'un romantisme noir. Après une certaine Louise Strauss (critique d'art), il y aura Gala, vivant alors avec Eluard et qui deviendra la femme de Dali. et furtivement Meret Oppenheim et Leonor Fini (peintres toutes les deux et dans un réel voisinage culturel de Max Ernst) enfin, mais semble-t-il conduit par l'intérêt que représente sa fortune et ses relations, Peggy Guggenheim.
Marie-Berthe Aurenche, contrairement à Léonard Carrington, et Dorothéa Tanning, n'est pas "créatrice", en revanche les témoins lui accordent une force singulière et un attrait qui va jouer aussi sur Soutine dont elle deviendra, à la fin de la vie de celui-ci, la compagne (il ne faudrait pas oublier dans ce dernier cas, la dévouée Gerda Groth-Michaelis dite Garde, qui laissera de pathétiques souvenirs sur Soutine dont elle partage épisodiquement la vie).
Soeur du cinéaste Jean Aurenche, Marie-Berthe trace dans le milieu intellectuel des Années folles, le sillon d'une vie aventureuse, aux choix radicaux, aux engagements passionnels, ce qui fait d'elle, un personnage de légende.

 


Commentaires

 

1. saintsonge  le 23-09-2010 à 19:14:34  (site)

Belle photo , déjà ; sans les femmes-muses, quelle beauté auraient les oeuvres d'art des créateurs ?...

 
 
 
posté le 23-09-2010 à 10:44:39

Kubach-Wilmsen l'archéologie d'une bibliothèque.

Du livre elles ont la forme. La forme seulement. Leurs feuillets entassés sont une feinte. Une entaille dans la masse, une suite d'entailles. L'illusion est complète. A la mesure humaine et propre à être tenus dans la main, on s'en empare. Surpris alors par le poids. On se souviendra de l'expérience de Marcel Duchamp taillant un morceau de sucre dans du marbre pour juger de l'effet de surprise de ceux qui s'y laissent prendre.
Non pas que la forme seule si habilement reproduite y suffise. C'est qu'ils ont choisi pour l'imposer dans la plénitude de sa matière immuable et somptueuse à la fois, le marbre.
Matériau de la splendeur des palais dont ceux qu'on ne peut plus qu'imaginer dans cet espace d'une Histoire qui a rejoint les mythes et qui, dans leur froideur ostentatoire, rejoignent celle, sombre et inquiétante, du tombeau.
Kubach-Wilmsen (un couple) se sont interdit le pittoresque. Au profit d'une rigueur qui va dans le sens de la durée. Dont celle du discours. Et de sa mise en forme. On ne choisit pas innocemment le marbre pour s'exprimer. On y cherche l'éternité qu'il est le seul à offrir. Et sa gravité aussi. Le marbre est le matériau des oeuvres ambitieuses.
Kubach-Wilmsen composent ainsi une bibliothèque qui est  loin d'être un simple jeu, même s'ils jouent de la surprise qu'elle provoque, et d'une mise à l'échelle propre à enchanter quelque amateur de conte qui trouvera là des allusions aux grands mythes de mondes lointains habités par des géants.
Grands, posés dans le paysage comme un autel incongru, ils atteignent le monumental.
On se retrouve là comme à l'instant sublimé de quelque somptueuse découverte archéologique, dont celle d'une bibliothèque qui refuse de nous livrer son message.
Livres abandonnés comme à la suite d'une chute d'une immense bibliothèque venue de la nuit des temps. Parée du mystère de ce temps inconnu dont il ne reste que ces traces qui ont si souvent des allures de sarcophage.
Comme si dans le silence monumental les livres de Kubach-Wilmsen étaient autant de tombeaux pour un texte mort. Ou interdit.

 


 
 
posté le 22-09-2010 à 10:24:29

Man Ray et Le Ballet mécanique.

Les manuels nous disent que le "Ballet mécanique" est un film de Fernand Léger, typique de sa propre démarche picturale en prise directe avec les problèmes du mouvement. Pourtant Man Ray (entretien avec lui en 1958) affirmait qu'il en était aussi l'auteur et d'une manière qu'il précisait (Revue Actualité, été 1958).
"Dudley Murphy, jeune cinéaste américain fraîchement débarqué à Paris, sa caméra sous le bras, rencontre son compatriote Man Ray qui, tout en peignant, se livre à des expériences photographiques qui l'amènent à traduire, par la pellicule, l'étrange, le stupéfiant, la poésie. Nanti de quelques  pellicules vierges Murtphy commence à tourner sous la direction de Man Ray, dans son atelier et à la foire de Montmartre. Dans l'esprit de Man Ray il fallait que ce film fut fait d'images saisies dans l'immédiat sans idée préconçue. Celles qui étaient prises à l'extérieur étaient choisies en fonction de leur pouvoir d'évocation et de symbolisme qui soit un rappel de Paris, de sa mythologie particulière. Bientôt pourtant les pellicules vinrent à manquer et l'argent pour l'achat de nouvelles ; Murphy offrit alors à Léger de continuer le film et Léger le finança ; ils continuèrent ensemble ce qu'avait commencé Man Ray et dans son esprit, Murphy utilisant ce que ce dernier lui avait appris."
Où est la vérité, et serait-il juste d'associer au générique de Ballet Mécanique le nom de Man Ray qui n'y figure pas ?

 


Commentaires

 

1. saintsonge  le 22-09-2010 à 10:40:30  (site)

La vérité : "un je-ne-sais-quoi qui s'atteint d'aventures" vous dirait Soulages dont le noir ici est moins "outre"...

 
 
 
posté le 21-09-2010 à 10:37:27

Théodor Fraenkel un marginal du surréalisme.

Il apparaît, ici ou là, dans l'intimité qui scelle de sûres amitiés. Dans le voisinage d'André Breton et dans le cadre scolaire du lycée Chaptal. Ils se rencontrent et se lient dans la poésie allant jusqu'à fonder une revue (Le Club des Sophistes) dont, à ma connaissance on ne trouve pas trace, et on peut aussi imaginer que Breton fera des études de médecine pour rester près de son ami. Les voilà tout deux au chevet de Jacques Vaché qui sera tellement frappé par la personnalité de Théodor Fraenkel qu'il en fera le personnage, d'une de ses rares nouvelles (Le sanglant symbole). Cela eut suffit à le faire entrer dans la légende. Mais Fraenkel est plus l'homme des attitudes cinglantes que d'une oeuvre continue et organisée.
Un poème de lui passe dans la fameuse et alors essentielle revue de Pierre Albert Birot (SIC) mais pas sous son nom : il est signé Jean Cocteau. Tout Fraenkel est là, dans la dérision. Il sera de toutes les cérémonies de Dada, montant sur les planches pour interpréter ces piécettes qui relèvent moins du théâtre que de la farce de potache : S'il vous plaît (de Breton et Soupault) au théâtre de l'Oeuvre, Vous m'oublierez (Salle Gaveau) Première aventure céleste de M. Antipyrine et Le Coeur à Gaz de Tristan Tzara (Studio des Champs Elysées). Il aborde aussi le collage, mais nullement dans une visée esthétique (comme Max Ernst) et, certainement pas en plasticien. Mais en pamphlétaire. La photographie détournée à valeur de dessin humoristique.
Entraîné dans les scissions internes qui secouent l'unité du groupe surréaliste, il fera son choix du côté des plus radicaux, jetés aux périphéries du groupe.Il y a là Artaud, Desnos, Masson. Même dans sa vie intime il s'allie à la grande famille surréaliste, en épousant une des filles Maklès, les trois autres étant respectivement la femme d'André Masson, de Georges Bataille et de Jean Piel,
Le surréalisme (et surtout Breton) a toujours aimé les singuliers, les êtres chargés d'une force intérieure qui ne passe pas nécessairement par la création (artistique ou littéraire), elle fonde en revanche une vie d'aventures. Celles de l'esprit (et souvent aussi du coeur).

 


Commentaires

 

1. saintsonge  le 21-09-2010 à 12:29:01  (site)

Etait-il déjà du Cabaret Voltaire ?..Derrière le groupe de Zurich 1916, les fondateurs Ball et Emmy Hennings, puis Huelsenbeck ou Christian Schad ?... Son nom est à lui seul aussi dadaïste que de dire : " Bluku terullaba blaudala loooo " dans ces "jeux de fous dans le vide.....impliqués dans tous les problèmes"... Quelle trace un marginal laisse-t-il en marge de sa vie ? Question, sinon universelle, du moins celle que je me pos(t)e (pensant à tout ce flot humain qui grouille en toutes les mégapoles puisqu'en se croisant / s'évitant, aucun ne connait personne, si bien que notre planète est toute en une Signature dADaIstE.? Non ? Ou ces blogosphères aussi où nous sommes en double impasse : dans la peur de ne jamais exister pour quelqu'un , et dans ce désir de créer pour au moins quelqu'un ( autre je (u) de séduction dada dans nos "happenings" solitaires...., inconnus de tous.....?)
Bonne journée sur-réelle......, déjà, moins duelle, sinon....

2. sorel  le 22-09-2010 à 10:27:17  (site)

Non, rien à voir avec le Cabaret Voltaire. Fraenkel est de dada Paris (avec Ribemont Dessaignes). Par contre c'est le plus ancien ami de Breton (amitié de collège !). Pas d'écrits mais de la vie, devenu personnage de légende. Bonne journée.

3. saintsonge  le 22-09-2010 à 10:35:17  (site)

D'accord.
La meilleure poésie serait donc celle qui n'est pas écrite mais vécue...
La meilleure des amitiés est bien celle des bancs d'école, si elle continue dans la vie....

 
 
 
posté le 20-09-2010 à 10:34:56

Le corps à corps chez Henry Miller.

Il est de la race de ceux qui ont fait Montparnasse ce haut lieu de l'esprit et de la débauche. Moins désinvolte qu'il y paraît. La bohème n'est pas l'indifférence, sinon aux choses du quotidien, mais plutôt une manière de vivre en profondeur sa propre nature. Ce que Miller fait doublement. Dans sa vie, dans son oeuvre. Alors celle-ci se construit sur sa propre expérience de la vie, des autres et de son corps. Important le corps chez Miller. Omniprésent et porté aux limites de sa conscience et du plaisir qui est le chemin de connaissance. On peut être choqué par le ton de ses livres, et justement "Le Tropique du Cancer" écrit (réécrit) travaillé par Miller, que ce soit Villa Seurat (dans le voisinage de Théodor Frankel et d'AnaÏs Nin) ou à Clichy (qui donnera un autre livre) le boulet rouge éclôt.
Oreilles chastes, éloignez vous. Miller nous promène dans le monde du sexe (c'est le sien) sans précaution ni hypocrisie. Pour être franc, certains pages étonnent, choquent, soulèvent le coeur. Aurions nous le coeur trop sensible, trop pudique ?
Nul romantisme en lui, la vérité est charnelle et impudique. L'anatomie effrontée et sans grâce. Pourtant, il y a de l'amour, surtout quand on sait que derrière le livre (et sans elle il n'existerait pas) il y a sa femme June, femme étrange, fantasque, qu'il a dénichée dans un dancing où les filles se font payer pour une danse. On peut avoir des carnets, comme des chèques restaurants, pour avoir le droit de les coller contre son corps, au rythme de la musique, et palper un corps qui se veut désirable.
Miller n'emprunte pas les chemins les plus suaves pour accéder à la femme, mais ceux, abrupts, de la prostitution. Il y trouve la mesure de son désir. Il en rend compte. Avec une verdeur de ton où l'on retrouve l'amateur de Rabelais. L'insolite nouveauté de son oeuvre c'est qu'elle bouscule la bienséance, et l'hypocrisie bourgeoisie qui règne alors. A le lire de plus près on dépasse la flot ardent de la pornographie qui s'affiche et l'on devine le sage (un peu chinois) qui se profile. Le choc camoufle l'essence même de sa quête plus intime et spirituelle. N'a-t-il pas reconnu, sur lui, l'influence des grands philosophes chinois ?

 


Commentaires

 

1. saintsonge  le 20-09-2010 à 11:18:02  (site)

Au moins, il s'est livré corps et âme, et sans pudeur, dans ses livres (on a déjà "jugé" les miens par trop charnels, voyez, les éditeurs frémissent, ces temps-ci !!! POL aussi !)

 
 
 
 

Ajouter un commentaire

Pseudo : Réserve ton pseudo ici
Email :
Site :
Commentaire :

Smileys

 
 
 
Rappel article