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lettres de la campagne

posté le 17-09-2010 à 10:48:33

Cazals et lez grosses têtes.

Est-ce une manière futile ( encore qu'évidente ) de noter que si F.Cazals n'est pas aux première loges de l'histoire littéraire "fin de siècle", c'est qu'il est dans les coulisses. Il participe plus de la vie des cabarets (et leur réelle dimension littéraire) que des antichambres d'éditeurs. On le voit aussi dans les cafés dont le rôle est si important alors. Il aura croisé les fortes têtes de son époque (d'où Jarry), celles qui situent une pensée, une vision du monde, et apportent quelque chose à l'évolution des idées et à la manière de les formuler.
C'est un homme curieux, ouvert, et qui devait avoir du charme puisque Verlaine, toujours à l'affût d'un amour possible, se prend à l'aimer. En retour, Cazals voue au poête une véritable vénération. Il devient un extraordinaire témoin de Lélian dans sa terrible dérive et son chute finale. A son chevet, dans les hôpitaux, les hôtels sordides, il est présent, un crayon à la main, et nous a laissé une formidable iconographie de celui qui entrait déjà dans la légende. Avec Gustave Lerouge, (un autre personnage de second plan mais essentiel pour comprendre l'époque - Cendrars avait une grande admiration pour lui), il va donner un  précieux témoignage de première main sur la mort du poète. Beaucoup de choses encore à glaner sur son destin. On va s'y employer.

 


Commentaires

 

1. saintsonge  le 17-09-2010 à 12:18:55  (site)

Du nom d'une bastide dans le Quercy, il dût avoir forte corpulence, non ?... Du moins, d'un torse velu (?) plaisant à Verlaine ...? Une caresse sur ce torse eût donné d'autres poèmes en Ivresse de "Fêtes galantes" - tiens, je m'en ferai bien un titre de poème sur mon blog, je trouve intuitif : en ivresse de "Fêtes Galantes" ; qu'en pensez-vous ?

2. saintsonge  le 17-09-2010 à 13:02:47  (site)

Excusez, je n'ai pas attendu votre réponse... Ce titre m'inspira, le mien, et le poème, promis donc, par effet cosmique, je viens de l'écrire, je le publierai demain (ne pas inonder les pages du jour), je l'ai conçu dans l'instant , fenêtre ouverte de ma chambre-océan sur la cour ensoleillé, vous pourrez le découvrir, demain, dès l'aube, dirait le Caodaiste Hugo !... "demain , dès l'aube"... :
En ivresse de "fêtes galantes"..., donc.
Oui, écrit, comme ça pense, au fil de l'onde de l'inspir (ation)...

3. saintsonge  le 17-09-2010 à 13:03:35  (site)

LIRE : la cour ensoleillée

4. sorel  le 20-09-2010 à 10:32:02

Un moment d'absence, et je découvre l'idée du poème, Cazals en serait bien étonné.

5. saintsonge  le 20-09-2010 à 11:07:32  (site)

Oui, je suppose, aussi "étonné" que moi l'ayant composé au fil de l'onde de l'écriture - sans rien concevoir ni préparé, puisque ne connaissant pas votre article, cela est venu d'un seul jet ; merci de votre appréciation.., de ce fait...

 
 
 
posté le 16-09-2010 à 10:17:21

Le photogaphe de village.

L'arrivée du photographe.

On a annoncé l'arrivée du photographe. Il venait de la ville, c'était, dans le village, un événement. De sa voiture il a extrait tout un matériel lourd et encombrant. Son aide, (un futur grand artiste dans le domaine de la photographie) aura procédé à un repérage des lieux, des monuments, des singularités architecturales qu'il fallait retenir. De porte en porte, de bouche à oreille, la chose avait été rapportée et chacun s'interrogeait, se demandant s'il aurait les honneurs d'un cliché. Dans la rue, c'était un peu comme un rassemblement  de curieux, d'oisifs, qui se passaient des informations qu'ils inventaient pour se donner de l'importance. Certains allaient (les plus audacieux) jusqu'à prétendre connaître le photographe et avoir vu son atelier en ville. D'ailleurs en y allait en couple pour se faire "tirer le portrait", entre une colonne pseudo-antique et un paysage de parc avec fontaines et statues blanchâtres, en fond, peint sur une toile. Chacun avait mis ses plus beaux habits et le cliché entrerait dans l'album familial pour le souvenir, et plus tard le montrer aux enfants.
Le temps d'installation terminé, le photographe a choisi la rue principale où se trouvent la plupart des commerces et l'activité du village.
Ce sont là, posées un peu au hasard, au fil du temps, des façades à l'ornement varié, et portant fiers les enseignes qui distinguent l'activité de chacun.
Alors, à l'instant où le photographe a appuyé sur le bouton magique qui mettait dans la boite ce morceau de réalité bien cadrée, les passants se sont figés chacun dans son rôle.
Par une bizarrerie du hasard ils sont bien à leur place comme l'aurait sans doute voulu un peintre qui aurait choisi de décrire l'ambiance de la rue.


 


Commentaires

 

1. saintsonge  le 16-09-2010 à 10:34:35  (site)

Votre coin ?..
Narcisse eût-il aimé qu'il existât en son temps, pour un meilleur reflet ?

2. sorel  le 16-09-2010 à 11:31:07  (site)

si l'on veut j'y suis né, y fréquente l'école communale. Bien éloigné depuis, mais garde au coeur un souvenir ému. Savez vous que c'est là que Joe Bousquet reçu la balle qui devait le blesser à vie. Max Ernst m'en avait parlé.

3. saintsonge  le 17-09-2010 à 12:13:38  (site)

Oui, bien sûr, je comprends tout à fait votre ressenti "communal"... La nostalgie me ramène vers un bac à sable de maternelle, et d'une échelle dont je ne voulais monter les barreaux (voyez, la difficulté sociale démarre tôt , celle des "réussites" aux échelons !), puis de Madame Milon à qui, en CM1, j'offris des bouquets de pensées (les fleurs) et du lilas (rouge et blanc) que ma mère me faisait remettre (ah, les premières amours de mères de substitution , elles commencent tôt aussi !) Pour ce village, vous l'évoquâtes dans un autre billet sur ledit auteur, je crois, car je ne le sus pas...d'avant ! J'aime beaucoup ces "cartes" à l'ancienne, elles sont très chères chez les bouquinistes de Lille (quand j'y retourne) et d'ici, Douarnenez-Tréboul (quand ils viennent sur les marchés, les Lundis, mercredis-samedis) ; sur Quimper, ce sont les enveloppes "premier jour" que je déniche, pour un prix moindre... Peut-être y verrai-je un de ces quatre matin une estampille "Sorel , Le Blog..." ?... Max Ersnt, en ami, ah quelle veine , tout de même (je ne suis pas d'un naturel envieux, non jamais, or là, hum, bon , je fais vivre le proverbe : c'est l'exception qui confirme la règle !!) Ah M. E, conversez avec lui, ah quelle barraka ! Ici, je m'ennuie...de ne pas évoluer dans les discutationes !...

 
 
 
posté le 14-09-2010 à 22:09:51

Dada s'affiche.

L'éclosion (l'explosion) des revues dada, juste après la première guerre mondiale, a été un fantastique laboratoire de recherches graphiques, un creuset d'inventions, d'audace, qui n'a jamais été égalé.
On sait combien la place du mot dans l'espace de la page aura été, depuis longtemps, une préoccupation dont on a déjà des témoignages au moyen-âge.
De Rabelais à Laurence Sterne, l'idée reprise que la page est un terrain visuel sur lequel la position du mot, les rythmes de la phrase dans leur aspect graphique, entrent pour beaucoup dans le sens à donner, moins effet esthétique (même s'il l'atteint) que nécessité dans l'expression.
Et s'impose l'angoisse de Mallarmé, jouant du blanc du papier pour forcer le sens des mots.
Ce que Mallarmé fait au nom d'une recherche poétique, dada le fait au nom du choc visuel que cultive aussi une affiche. D'ailleurs le poème rejoint le tract. Il y a une sorte d'urgence à laquelle il faut répondre, comme un écho des transformations radicales du paysage industriel, de la montée en puissance de cette modernité qui veut secouer les lenteurs, les paresses du texte, pour lui donner le plein feu (comme le néon) de sa force propre.

 


 
 
posté le 14-09-2010 à 10:34:08

Max Ernst un jeu d'enfant.

Au coeur même de l'oeuvre de Max Ernst et comme un frisson propre à réveiller la conscience, se glisse une dose d'humour qui se magnifie dans la peinture à travers de véritables icônes, devenues oeuvres de référence, et trouve, dans la part strictement graphique, une liberté de ton, une finesse, une grâce aérienne qui réinvente un monde malicieux entre Gulliver et  Lewis Carroll.
Ernst a bien traversé le miroir et exploré les zones où l'incroyable prend corps, sans rien perdre de son caractère insolite, avec d'inévitables clins d'oeil pour connaisseur et complice.
Illustrateur, il réinvente le texte autant qu'il l'accompagne, propose une lecture parallèle et riche de nouvelles perspectives. Il s'appuie sur une grand curiosité de techniques qu'il réhabilite et qui souvent sont du domaine de l'enfance, ce qui donne à son oeuvre sa véritable dimension qui est d'enchanter.
C'est l'histoire du magicien qui transforme le plomb en or. Voici des recettes de la cuisine picturale qui entre ses mains réveillent de vieux thèmes de légendes, des apparitions saugrenues ou stupéfiantes. Même le quotidien, l'anecdote, trouvent avec lui une nouvelle dimension (ses collages) . Mais le voici mêlant les techniques, ajoutant des apports de cette alchimie intime et farceuse et c'est tout un monde qui nous arrache aux tristes pesanteurs de la réalité, frôle tous les domaines de la pensée ( n'évitant pas, au besoin le domaine de la philosophie).
Il maintient ce qu'il y a d'enfance préservée en chacun, et lui donne de nouveaux sujets d'étonnement.

 


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1. saintsonge  le 14-09-2010 à 10:46:57  (site)

Il est un joyeux drille, c'est vrai....

 
 
 
posté le 13-09-2010 à 16:47:04

Le Grand Jeu s'expose.

Mouvement purement parisien (bien qu'il se soit diffusé à travers le monde et donné de la culture une vision planétaire) le Surréalisme va rencontrer dans Le Grand Jeu (mouvement provincial, né à Reims) un concourent si sérieux et redoutable que Breton va en prendre ombrage. Sont connues les luttes intestines qui secouent les tenants des deux groupes et modifient sensiblement l'ordre des alliances qui s'étaient créées.
Outre la revue qui selon  l'usage permettait à la fois la définition, la diffusion et la dynamique des collaborations de ses membres  : Roger Vailland, René Daumal, Roger-Gilbert Lecomte, Maurice Henry,  Arthur Harfaux, Pierre Minet, Joseph Sima, André Delons (le cousin de Jacqueline Lamba, la future compagne de Breton) le groupe organise des manifestations, et celle présentée rue Bonaparte en 1929 souligne la cohésion peinture-poésie qui est toujours au coeur de ce type d'aventure intellectuelle.
La Grand Jeu résultait de la rencontre au lycée de Reims de ses trois principaux protagonistes (Daumal, Vailland, Roger-Gilbert Lecomte). C'était le groupe des "phrères simplistes", "afin de retrouver la simplicité de l'enfance et ses possibilités extrasensorielles" .  Le titre choisi est un clin d'oeil à Jarry et à la pataphysique. En progressant, et sous l'effet de la drogue considérée comme un instrument de connaissance, la philosophie des poètes liés par la révolte et l'humour va passer au stade plus périlleux de la recherche d'une "métaphysique expérimentale"
Une déviance qui fissure l'unité première, et entraîne Daumal dans la mouvance (fort contestée, c'est elle qui a tué Katherine Mansfield) du "mage" Georges Gurdjieff.

 


Commentaires

 

1. saintsonge  le 13-09-2010 à 18:00:28  (site)

Suite des Haschichins ? Précuseurs des Michaldiens ?..Adoubeurs Balzaciens ?.. N'est-ce pas de cette période que furent jeter en l'air, avant de les ramasser pour les compiler comme ils vinrent, les feuillets de poèmes des Epaves du ciel, à ce que j'ai cru savoir dans ma jeunesse (toujours présente), de cet initiateur des trouvailles surréalistes qu'est Reverdy, style "le monde rentre dans un sac", itinéraire spirituel s'il en est, du reste, en conscience pré-logique du subsconcient de la surréalité que Breton trouva d'ailleurs chez votre favori L'autre-et-amont, affirmant que "l'esprit est mûr pour autre chose que les bénigmes joies qu'en général il s'accorde", soit justement, comme saut de l'ange, ce fameux "Grand Jeu" :
- "Faites-vous apporter de quoi écrire... Placez-vous dans l'état le plus passif, ou réceptif, que vous pourrez... Ecrivez vite sans sujet préconçu... La première phrase viendra toute seule, tant il est vrai qu'à chaque seconde il est une phrase étrangère à notre pensée consciente qui ne demande qu'à s'extérioriser...."
Fut-ce bien cela "le grand jeu" ? (du petit "je" , ce "moi haïssable" de chacun ....) Bien à votre subtil esprit.

2. sorel  le 14-09-2010 à 10:30:55

Ouf, quelle envolée. Tactiquement le Grand Jeu me semble plus près des extravagances ésotériques que de la recherche poétique somme tout bien innocente encore qu'elle mette plus l'esprit que le corps en danger. Bonne journée marine.

 
 
 
posté le 10-09-2010 à 11:38:09

Valentin et les mots.

Histoire de Valentin  (2).

Le mot cherche l'action. C'est le surréaliste (de la première heure) Maxime Alexandre (à redécouvrir) qui l'assure et formule ainsi une des raisons d'écrire.
Pourtant, écrire ce n'est pas décrire l'action sinon se substituant à elle. C'est l'incarner.
Avec Lautréamont nous avons à faire à un poète en chambre. L'enfermement le définissant, son oeuvre est l'ouverture sur le monde. Chahutée, grandiloquente, outrancière pour ne pas dire à la dimension d'une épopée baroque. Epopée de l'âme ?
Non, épopée des nerfs, de l'imaginaire.
Imaginons, justement, l'homme au travail. Dans sa chambre d'hôtel, 7 faubourg Montmartre. La rue est à la turbulence. La vie s'y presse, s'y écoule, s'y précipite comme le plomb fondu dans la rigole de l'industrie qui le maîtrise.
Encore à s'interroger, est-ce- que l'on peut maîtriser la rue ?
C'est l'avenir de la société qui s'y fait, s'y formule, dans le tobu-bohu des voix, des cris, des gestes qui façonnent une foule, qui sont le plus naturel de ses élans.
Cette rumeur (cette clameur) monte jusqu'à sa chambre, comme la brise de la mer vient bousculer les rêves des marins.
Et Lautréamont de dire :  "je te salue vieil océan".

Lautréamont à la tâche.
A en croire Philippe Soupault il mettait ses phrases à l'épreuve de la musique (en tapant sur un piano des accords virils). Sa préférence le portait à la musique militaire. C'est à dire celle qui conduit le soldat à l'assaut. A sa mort. Avec des éclats  qui sont ceux de la bravoure, peut-être de la vantardise.
Je vois assez bien l'ancien combattant qui aura remisé ses médailles au fond d'un placard, avec les lettres d'amour de sa jeune fiancée, se poster au bord de la cheminée, main sur le manteau de pierre comme sur un char d'assaut, et débitant avec force vantardise les faits et méfaits de son aventure militaire. Il y a toujours du hâbleur dans l'ancien combattant. Il fait frissonner sur sa poitrine ses médailles quand il défile la torse bombé.
Lautréamont ne pouvait être insensible à cette dimension du verbe qui va chercher ses notes les plus hautes, les plus osées dans cet espace où la mort menace.
Il mettait sa vie  en péril, et l'avait mise au point de mourir.
Les mots peuvent tuer.

 


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1. saintsonge  le 10-09-2010 à 12:25:57  (site)

"Les mots peuvent tuer" , Camus ou Sartre, dans cet écho..., ce me semble.
L'un et l'autre se détestant (sauf l'éloge funèbre final du second pour le premier), ils en usèrent à bon escient ou mal augure...Je méconnaissais l'anecdote du "piano" ( j'use de la voix haute et grave, pour ma part, un clin d'oeil au gueuloir, ici, au 7 de ma rue - pour moi aussi !) Dois-je écirire alors : "je te vénère, Bonne IROISE ?" Et, pour la chambre, un écho de Pascal, aussi....Donc, beaucoup de "monde" en ce billet sur un seul auteur qui mit beaucoup de thèmes en un seul livre : amitiès masculines, beauté, l'océan, le corps, dieu, l'écriture / lecture, les enfants, la famille, l'Humanité, la mer et ses habitants, le sadisme et le vice, pour quelle vertu, sinon la Reine Solitude ? " Reste dans l'ombre, et fournis des élèments à autrui" - "Il n'est pas donné à quiconque d'aborder les extrêmes, soit dans un sens, soit dans un autre...", comme ce Mal d'aurore, une "lanterne rouge, drapeau du vice"...dans son "calme enviable" de la chambre où se trouve Mervyn, qui joue aussi du piano, n'est-il pas ?

2. KAFF  le 10-09-2010 à 13:33:47  (site)

D'accord avec Sorel mais inversement. Comme quoi les mots ne veulent rien dire ! lol

 
 
 
posté le 09-09-2010 à 14:49:01

Valentin découvre Lautréamont.

Valentin travaille sur les Grands Boulevards (heures de bureau), et va, sur le coup de midi, au Bouillon Chartier, 7 faubourg Montmartre. Franchissant le  seuil de l'immeuble, il passe devant la plaque commémorative qui indique que Lautréamont est mort dans cet immeuble, le 24 novembre 1870 (dans une quasi solitude). Ses compagnons souvent l'ignorent et se contentent d'un haussement d'épaules au rappel de ce qui est, pour lui, une date et un lieu de haute tension car il a la mémoire de Lautréamont au plus profond de sa conscience. Sur un cahier (où il colle ces menues choses qui jalonnent l'itinéraire d'une pensée qui se cherche) il note, jour après jour, des remarques concernant l'objet de sa passion (ambitionnant de reconstituer une sorte de Journal), mobilisée à chaque instant par un jeu de coïncidences, ou ces rencontres fortuites (et miraculeuses) dont il a appris grâce à André Breton qu'elles sont comme des sortes de bornes d'un itinéraire secret, parallèle à celui qui conduit notre quotidien.
C'est dans l'incursion parallèle (et cachée) qu'il trouve le meilleur de sa vie, celle qu'il a d'apparence s'étalant dans la grisaille. Non que sortir de l'apparence que l'on donne vous fasse meilleur, et que vous y trouviez une forme particulière de bonheur. Il s'est toujours demandé à quoi celui-ci pouvait ressembler. On lui aura dit qu'il avait la visage d'une femme aimée, de la réussite, et les plus vulgaires assuraient qu'il se trouvait dans le pouvoir ou  l'argent.  Rien de cela ne l'atteignait et l'amour avait été bafoué, s'était égaré du côté de la sexualité dont il était revenu, faisant  sienne la remarque de Mallarmé : "la chair est triste et j'ai lu tous les livres". En ce qui concerne le deuxième élément de cette définitive assertion, il gardait quelque réserve. Sa culture était encore à faire. Il s'y employait avec bonne volonté et ferveur.
Célibataire il pensait à la triste vie de celui-ci quand Huysmans, qui l'avait connue, en parlait, relativement aux problèmes domestique justement.
Il avait définitivement écarté de lui les contraintes qu'assumaient tant de femmes retenues "au foyer" par l'égoïsme de leur conjoint et comme rayées de la vie au profit des casseroles et du balais. Riche, il aurait vécu à l'hôtel (oh ! le luxe d'une suite au Ritz comme mademoiselle Chanel), mais sans doute dans une simplicité de forme qui s'accordait assez bien avec des goûts modestes, une frugalité qui n'était pas de forme mais d'éthique. Avant de se contraindre à un travail sans grâce, mais qui lui laissait quelques loisirs, il avait tâté d'une errance provinciale, le conduisant d'hôtel du Commerce à celui de la Gare, de ville en ville ( une sorte de tourisme flottant) dans une sorte de somnambulisme qui l'aura peu à peu détaché de tout ce qui fait l'armature de la vie d'un citoyen ordinaire. Seulement préoccupé de lui-même, non par égoïsme mais par une sorte de détachement progressif des choses pratiques. Ayant épuisé le petit pécule qui lui avait permis cette fantaisie (ou cette initiation ?) il revient à Paris et trouve un emploi subalterne mais sans pesanteur, dans un de ces bureaux qui pullulent autour de la Bourse et sont, d'ordinaire, ceux des banques et des assurances. Aussi étranger aux besognes qui étaient au programme de son statut d'employé que néanmoins attentif à les mener à bien. Son périmètre d'activité, ainsi que celui de ses loisirs, peu à peu se construisait avec une sorte de logique dans laquelle il avait vu (ou voulu voir) un signe du destin.
Le centre de Paris offre, en effet, un curieux agglomérat de bâtiments dont les fonctions répondent à tous les besoin d'un citoyen (fut-il marginalisé par ses complexes). Du Palais Royal et sa mémoire de débauche qui aura pris un ton un rien nostalgique  jusqu'aux Grands Boulevards avec leur clinquant provocateur, il y avait tous les éléments étayant une vie et, point central, la Bibliothèque Nationale et ses refuges solitaires de culture dont il appréciait spécialement l'attrait. Sa vie n'était après tout qu'une grande bibliothèque en désordre où il puisait à foison des rêves et des fictions d'aventures.
La vie de Valentin avait fini par ressembler à ses rêves, et c'est en découvrant Lautréamont (un voisin dans l'espace du temps), qu'il était entré dans le monde du  cauchemar. Et il s'y complaisait. Non, il y était condamné. Le savait. Avait entrepris d'en noter la progression.

 


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1. saintsonge  le 09-09-2010 à 14:56:29  (site)

Vous savez qu'on qualifie de "bête fauve" le M. H de Flammarion à la tête qui ne me revient pas, chantre de la littérature d'aujourd' hui qui euphorise l'acte de mourir (et la mort elle-même) ; ma solitude totale est égale à celle de l'auteur de ces autres Chants bien meilleurs !...

 
 
 
posté le 09-09-2010 à 10:07:01

Jean Edelmann la leçon des aînés.

L'histoire de l'art n'est guère indulgente avec une génération d'artistes qui ne se sont pas engouffrés dans la perspective tapageuse des avant-gardes et maintiennent la peinture dans ses limites, tout en marquant (mais sans excès) la réception  de la leçon de leurs aînés (les cubistes). Il en découle une peinture proche de la réalité mais  jamais servile ni victime de sa présence de simple apparence. La peinture analyse le réel, en tire une musique particulière qui est la signature du peintre, la mesure de son regard. En harmonie avec la réflexion quand l'avant-garde prêche le rejet du passé.
Edelmann est au coeur de tout un mouvement qui s'est épanoui  entre l'exemple de Braque, de Villon, et dans le voisinage d'artistes un peu relégués aujourd'hui dans les arrières boutiques de l'histoire, comme André Beaudin, Lapicque, Chastel. Pourtant la poésie, soeur fécondante de la peinture, n'a jamais boudé ces courants qui portent moins l'aventure que l'harmonie du moment, quelque chose qui relève d'une sorte d'épure du regard, avec une dimension humaniste qui lui donne ses chances de survie.

 


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1. saintsonge  le 09-09-2010 à 13:26:51  (site)

J'avoue ne pas le connaître, or a-t-il un lien direct avec le musicien du XVIIIème éponyme, jusque dans le prénom (celui -ci doublé d'un frédéric ?)

2. sorel  le 09-09-2010 à 14:52:23  (site)

Je l'ignore ! De sucroît il y a longtemps que je ne l'ai pas vu. Est-il encore de ce monde. Pour la petite histoire il était le beau frère du patron de chez Grasset (dans les années 60) et l'animateur d'une revue très captivante éditée par la SEITA. Voilà pour les informations.

3. saintsonge  le 10-09-2010 à 07:43:07  (site)

Grand merci du surplus d'info.
Vous savez, par ailleurs, qu'aucun artiste ne meurt...(déjà qu'il leur est difficile de bien "vivre" - ou survivre !)

 
 
 
posté le 07-09-2010 à 11:13:38

Berthe Morisot en son château.

Fille de "bonne famille" Berthe Morisot aurait pu ne faire de la peinture que comme expression de sa bonne éducation ( ce que feront ses deux soeurs peintres amateurs). Elle est poussée par une nécessité, une "rage" de peindre qui témoignent éminemment d'une vocation. Ses rapports avec Fantin-Latour ne font que la maintenir dans la bienséance de son milieu, avec Manet (qui est amoureux d'elle) elle découvre les terribles angoisses de la création et ses parfaites réussites. Jeune (avec ses soeurs) elle se contente du salon familial (à Passy), puis d'un atelier construit dans le jardin. Avec l'achat (une fois mariée avec le frère d'Edouard Manet) du petit château du Mesnil elle dispose enfin d'un lieu qui correspond à sa soif de peinture.
"C'est près de Juziers, dans cette vallée de la Seine où les impressionnistes ont pour la plupart élu domicile, une demeure élégante, de facture classique, avec un toit en ardoises et une façade en pierre blanche, au milieu d'un grand parc. Loin d'être imposant ou sévère, il apparaît au premier coup d'oeil agréable et séduisant, et on devine aussitôt qu'il sera le plus convivial, le plus aimable des refuges. On l'aperçoit du train, en allant de Paris à Giverny, travers la frondaison des arbres" (Dominique Bona).
Des quelques tableaux qu'elle y exécute certains témoignent de la présence de sa fille Julie, qui devient l'axe de sa vie, et son modèle préféré.
Mallarmé, selon son habitude d'écrire ses adresses en forme de petits poèmes, rédige sur une enveloppe qui est un peu le blason de la maison :
"Julie ou Bibi du Mesnil
Rêvant à l'endroit nommé cieux...."

 


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1. saintsonge  le 07-09-2010 à 12:20:45  (site)

Evidemment le célèbre portrait avec ou sans éventail, de Manet, et d'elle, le fameux "berceau"... J'ai sous les yeux, actuellement, mon poche de Bona (sous-titré :Le secret de la femme en noir)...
Vous me donnez l'occasion d'y chasser alors les "papillons" d'une relecture à la japonaise... Ah zut, je suis allé à Giverny, pas vu son château par le train de l'époque.. On le voit si bien que ça ?

 
 
 
posté le 06-09-2010 à 15:42:51

André Breton en quête du merveilleux.

Les rapports d'André Breton avec ses manuscrits témoignent d'une constance de la création, comme en un creuset où viennent se fondre les apports constitutifs du sujet abordé, fut-il de l'ordre de la fiction. Il est à la fois le développement du sujet choisi et le dossier de celui-ci. D'où, dans et autour de l'écriture, les dessins, notations graphiques diverses et collages qui étayent le texte, constituent des annexes, un prolongement de celui-ci.
Arcane XVII illustre significativement cette méthode. Il est aussi le journal d'une aventure amoureuse et par elle justifié. C'est celle de Breton qui perd l'amour de Jacqueline Lamba avec laquelle il s'était réfugié aux USA, fuyant l'occupation en France, et retrouvant l'amour en la personne d'Elisa avec laquelle il entreprend un voyage en Gaspésie. Mais la référence à une lame de tarot montre aussi que Breton s'intéresse alors plus que jamais aux pouvoirs des sciences occultes de l'ésotérisme (intérêt qui ira croissant) et qui situe l'aventure surréaliste dans le voisinage des quêteurs de merveilleux.

Des manuscrits qui comportent le matériel de leur développement il y aura beaucoup à dire et la recherche reste ouverte pour en dénicher de curieux.
Pratiquer l'écriture dans ce contexte relève d'une fraîcheur de l'âme, d'une survivance de l'esprit de l'enfance qui colle sur des cahiers les menues choses croisées en un parcours, au titre du souvenir.


 


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1. saintsonge  le 06-09-2010 à 15:47:30  (site)

Un DVD a été conçu sur la vente de tout l'antre du 42, l'avez-vous vu ?...
J'ai toujours aimé nommer
Gars-Poésie, l'auteur de la Gaspésie !

 
 
 
posté le 04-09-2010 à 17:18:06

Renée Dunan au Second rayon.

Il entrait dans l'attrait que pouvaient exercer sur l'esprit mal dégrossi d'un adolescent, dans les années 50, les revues médicales à vocation culturelle (qui étaient abondantes) qu'elles faisaient de nombreuses incursions dans les marges,  les zones d'ombre, vantaient des publications "à ne pas mettre entre toues les mains", le milieu médical ayant la réputation de n'être point trop bégueule. On pouvait piocher des informations nulle par ailleurs dispensées. Et tracer, d'un doigt léger et de mémoire active, une géographie d'un Paris de la débauche et de la luxure qui avait déjà toutes les couleurs attrayantes que lui donnait la littérature. Celle que l'on trouvait localisée dans des arrières boutiques un peu sombres du IX° arrondissement, et en marge des Grands Boulevards en une artère qui semblait avait été créée pour célébrer Jules Laforgue, la rue de la Lune.
Elle était bordée d'établissements qui n'étalaient pas leur marchandise sur la voirie (comme ses voisins du Sentier) mais dispensaient des plaisirs secrets à des amateurs connaisseurs et constituant une sorte de clan avec ses codes, ses repères, ses anthologies de l'érotisme sulfureux où venaient se joindre, par un  effet de fascination réciproque, les amateurs d'hermétisme, ceux d'occultisme, et toute une faune où la culture avait la couleur de l'insolite, de l'effronterie.
Renée Dunan était à son aise dans la profusion de ces publications éditées à "la va-vite" et sans grand soin ( encore qu'elles entrent maintenant dans le secteur de la bibliophilie en passant par la quasi clandestinité qui leur fut affligée.
La rue de la Lune est aujourd'hui silencieuse, souvent bouleversée par des travaux urbains qui rendent la circulation automobile nerveuse et les piétons exposés à de grands dangers. L'église Notre Dame de Bonne Nouvelle est largement ouverte pour les repentis. L'ombre y est plaisante et le silence surprenant dans ce tohu-bohu des Grands boulevards tout proches.

 


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1. saintsonge  le 04-09-2010 à 18:32:50  (site)

C'est la dadaïste érotomane qui rivalise avec Pessoa au sujet des multiples pseudonymes dont je n'ai rien lu (hélas)
un manque à ce niveau de la crapulerie du Grapouillot ?

2. sorel  le 06-09-2010 à 10:40:03

Essayez de trouver des livres de Pessoa, c'est effectivement très passionnant. A bientôt

3. saintsonge  le 07-09-2010 à 07:40:22  (site)

Bien évidemment, je ne vous le citais pas par hasard (quoi qu'un coup de dés....en votre blog, etc...mallarméen), j'avais lu le "gardeur de troupeaux", et, n'oubliez pas que, la mer à une main de mon logis, je le peux citer souvent : "la mer est la religion de la nature " ou, vivant tel Walser, dire : "être poète , c'est ma manière à moi d'être seul" (sans ambition), la bonne journée meilleure....

4. saintsonge  le 07-09-2010 à 07:41:36  (site)

AH OUI, vous avez peut-être confondu, c'est de R. Dunan que je n'avais rien lu.

 
 
 
posté le 03-09-2010 à 22:33:38

Felix Buhot et ses predelles.

Sans avoir participé directement aux manifestations du groupe des impressionnistes Félix Buhot fréquente la plupart de ses membres, ne serait-ce qu'à titre de voisin de tous ceux qui habitaient les environs de la place Pigalle, haut lieu des échanges entres artistes et tout le petit monde de la galanterie qui y musardait, souvent dans l'attente d'être choisi comme modèle. Hommes jeunes et femmes de petite vertu s'appuyaient nonchalamment sur les rebords du bassin central. Entre la profession de modèle et la prostitution les frontières sont fragiles, et souvent franchies.
Buhot tout comme son ami Félix Bracquemont est graveur, ce qui le conduit à l'illustration (en particulier de Barbey d'Aurevilly). Il pratique un travail de surimpression et d'éclatement de l'image, baptisant les marges de ses gravures "symphoniques". Ces ajouts souvent d'une taille vive et précise, rappellent le principe des prédelle de la peinture médiévale.  Il invente là un procédé qui annonce celui du cinématographe avec ses plongées-contre plongées, ses panoramiques et ses gros plans, un rythme de lecture saccadé et dynamique.
Il a donné de Paris (ce Paris que connurent ses amis impressionnistes) des vues d'une savoureuse précision réaliste. Au rythme des saisons.

 


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1. saintsonge  le 03-09-2010 à 23:14:20  (site)

J'aime bien "la neige à Paris"...

2. sorel  le 06-09-2010 à 10:43:00  (site)

Alors vous devez aimer Utrillo, une vision que je trouve d'une admirable sensibilité mais qui a été galvaudée par les boutiquiers de la Butte Montmartre. J'ai sur le bout de la langue le nom d'un peintre qui a fait de beaux paysages de Paris sous la neige (d'une manière plus traditionnelle) dès que je le trouve je vous le communique. A bientôt.

 
 
 
posté le 03-09-2010 à 16:51:42

Gil Wolman et l'art scotch.

Prenez un rouleau de scotch, tirez une portion faisant, en gros, la largeur de la feuille de papier sur laquelle vous la reposerez bientôt, l'ayant préalablement mise en contact avec un journal à l'endroit où vous aurez choisi une phrase (ou un élément de phrase) qui vous plaisait. Arrachez avec vigueur pour entraîner la phrase et la coller enfin sur ce qui sera bientôt, par le jeu de l'accumulation, les superpositions, les jeux graphiques qui restent à votre initiative, un montage qui aura recréé un texte venu du hasard des rencontres.  Se situant entre l'écriture automatique, et le fameux cut-up des poètes de la "beat generation" et participant du principe du collage-assemblage source de toutes les incursions dans l'insolite.
C'est ainsi que travaillait G. Wolman un artiste fécond qui aura traversé l'aventure du lettrisme, dans les années 50 (Isidore Isou, Gabriel Pomerand, Serge Berna, François Dufrène, Jean-Louis Brau)  et qui, à l'époque, était considéré  comme un mouvement prenant historiquement le relais du surréalisme défaillant (en tant que mouvement).
Wolman était un homme curieux, fouineur, un peu rat de bibliothèque ou peut être plus proche du collecteur frénétique de vieux papiers (journaux, publicités, tracts et autres traces dont l'encre était le vecteur). Un manipulateur de mots non dénué de verve et de fantaisie protestataire.  Il avait milité avec Guy Ernest Debord (la figure pensante  majeure de ces années là), la mouvance de Cobra qui menait vers l'internationale lettriste, et c'est dans la médiévale petite rue Git le Coeur dans le voisinage de l'hôtel où Brion Gysin inventait le cut-up, qu'il débuta, passant ensuite chez Valerie Schimdt, l'antre de toutes les avant gardes des années 60.
Importante cette localisation au coeur du Quartier Latin (et de Saint Germain des Près) elle le place au coeur d'une intense activité culturelle reposant sur une remise en question du langage artistique (et poétique ?).
Car Wolman se trouve à cette jonction des formes et des mots qu'inauguraient les recherches typographiques des futuristes, et de dada. Faire éclater la page, la phrase, lui redonner une dynamique qui en bouscule le sens, en dénonce aussi les limites et aspire à une nouvelle dimension, un nouvel espace d'expression.
Wolman n'est pas un artiste se situant dans l'héritage des grands aînés de la peinture (il ne faisait pas de la peinture, mais l'interrogeait ). Il inventait son propre langage.

 


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1. saintsonge  le 03-09-2010 à 19:01:30  (site)

Il me semble en avoir vu sur Paris sans savoir que c'en fut , entre 78 et 81, le temps où je logeais près du Père Lachaise, du moins, à Levallois..., un pas "au-delà" de mon inculture...

 
 
 
posté le 30-08-2010 à 11:27:55

Wols en gravure, violence et douceur.

Du dessin à la gravure, et parce que l'entaille dans le cuivre dépasse le tracé du crayon, une certaine violence s'attache à ce qui, sur le papier, n'aurait été qu'un souffle de la pensée, une furtive rencontre avec le support.
De l'attaquer, d'y faire son sillon, que l'encre comblera comme l'eau dans le lit d'un ruisseau, donne une vie nouvelle à la notation première qui aurait été une simple esquisse, la promesse d'une aventure de l'esprit qui passé au stade de la gravure devient une aventure de la main (la main à charrue évoquée par Rimbaud).
Ce passage vers le dur travail du graveur est l'ultime stade du dessin, sa matérialité rendue par un effet de reflet (ne pas oublier que la gravure est l'inverse du dessin qui s'y est formé).
Pratiquant avec une certaine obstination la gravure (il illustre des textes de Kafka, Paulhan, Lambrichs, Sartre, de Solier), Wols donne à sa  vélocité graphique un ton d'agressivité (de fureur) qui se conjugue étroitement (singulièrement) avec une certaine douceur de la proposition première.
Rejoignant là la vigueur et les effets d'éclaboussure de sa peinture, quand son dessin est tout de légèreté, un envol d'oiseau, le passage furtif de l'insecte sur le miroir de l'eau. Un simple frisson.
Le trait est devenu celui de la blessure (ne dit-on pas entailler le cuivre), le stylet est à la fois le bistouri qui charcute la chair et le socle (de la charrue) qui retourne la terre.
Il retourne l'image échappée de son imaginaire, mais en lui donnant un accent plus brutal.
Une équivoque cependant. Particulière chez Wols qui contredit les conséquences de la technique qu'il utilise, la violence inhérente au procédé de la gravure, à laquelle il  confère au développement graphique une mystérieuse suavité, quelque chose de soyeux, une impression de ouaté non sans y laisser traîner quelque chose de morbide. Une douceur maladive et visionnaire. Et à son habitude l'image qui est résulte procède tout à la fois des spasmes organique qu'un oeil à la force d'un microscope aurait détaillé, et d'une vision cosmique qui s'invente des systèmes solaires inconnus, des trajets d'étoiles, la rumeur lancinante des infinis.


 


 
 
posté le 28-08-2010 à 11:07:18

Marcel Proust critique d'art.

Par son éducation, son milieu, ses premières fréquentations, Marcel Proust est totalement ignorant des avant-gardes. On entretient autour de lui une notion d'esthétique qui respecte la tradition académique et se complaît  plutôt aux grâces fictives de la peinture "pompier" et des exploits d'une technique aboutie.
Lors de la publication de ses premiers écrits (Les Plaisirs et les jours en 1896), il ne trouve rien de mieux que d'en demander l'illustration à Madeleine Lemaire artiste mondaine, "célèbre pour ses roses". Il se maintient dans son milieu, le climat culturel qui l'a formé et auquel, malgré l'audace de ses novations littéraires, il restera fidèle. D'ailleurs quand on envisage de réunir en un volume ses Ecrits sur l'art, on est conduit à confronter  quelques revues de Salon ( qui n'ont rien de bien originale) et des billets mondains parfois  d'une insupportable complaisance, en sa grisant des noms qu'il considère prestigieux et qui seront ceux des personnages de la Recherche. On en est parfois au niveau d'un compte rendu d'une festivité provinciale où l'on note la présence des notables locaux, du sous-préfet à quelque dame de bonnes oeuvres. Rien qui annonce le futur explorateur des vanités humaines qui se croisent dans la Recherche.
La passion qu'il éprouvera pour Ruskin, entraînant la traduction de ses écrits (ne souhaitait-il pas le rencontrer !), va pourtant lui ouvrir de nouveaux horizons.  Mais c'est surtout l'invention d'un nouveau regard,  traduisant sa propre vision du temps,  sa perception si fine et si profonde de l'instant et de la sensation qui en résultera. Elle lui permet de concevoir un nouveau type de peinture ( mais aussi de musique) dont Elstir est le produit. Conçu de toutes pièces, en pratiquant, selon son habitude, un amalgame de plusieurs modèles. Et, plus important encore, sa perception de l'art (la peinture) dans ses rapports intimes avec d'autres arts, dans la perspective exaltée par Baudelaire, sur le jeu des correspondances. Il en découle une lecture très originale, à l'égale de son regard sur l'écoulement du temps et les sensations croisées qu'entraîne toute vision aussi finement analysée.


 


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1. saintsonge  le 28-08-2010 à 11:41:48  (site)

Tiens !.......... Je ne constate que ce jour votre mini-portrait (si c'est vous, vous avez une certaine ressemblance, à ce que je peux en capter, avec....l'éditeur Jean.Marc Roberts, dans la chevelure, sans doute, poivre et sel....) Ah, oui, cela m'échappa-t-il, ce portrait ou venez-vous de le placer ?..
Photo prise : Chambre 414, Grand Hôtel, Cabourg ?
En critique d'art, Proust est-il Nietzschéen ? "là où la vie emmure, l'intelligence perce une issue"....Bon week-end, avec retour de l'été, ici, après deux jours pleins de fortes pluies consécutives ! Dieu avait besoin de nettoyer les âmes humaines et les pays bretons.., d'autres alsaciens souffrirent d'un coup de foudre (Dieu aime-t-il sa création, violemment ?)

 
 
 
posté le 27-08-2010 à 14:50:38

Limbour aux côtés de Dubuffet.

Il reviendra toujours au poète de donner la meilleure introduction à l'art de peindre parce qu'il y voit les intentions du peintre, partageant souvent, avec lui, les affres de la création, hantant son atelier, collaborant aussi à l'édition d'ouvrages où il confronte leurs expressions devenues complémentaires.
Jean Dubuffet, grâce à l'amitié fervente de Jean Paulhan, va multiplier les rencontres fécondantes avec les poètes de sa génération, et recevoir de ceux-ci la complicité et l'hommage qui poussent son oeuvre vers ses meilleurs accomplissements. Elle est de celles qui  progressent dans cette complicité, reflètent cette communion.
Tableau bon levain (à vous de cuire la pâte) est dans la droite ligne de cette alliance heureuse. Georges Limbour (un ami de jeunesse qui aura présenté Dubuffet à Paulhan), qui fera quelques pas dans le sillage du surréalisme sans en perdre ce qui fait l'essentiel de sa personnalité et des enjeux littéraire qu'il défend, sera de ceux qui posèrent les mots en marge de la démarche du peintre, et ici plus qu'en tout autre lieu, le titre disant bien qu'il aborde la peinture moins comme une chose à voir qu'à pétrir, à saisir de l'intérieur. C'est que le cas Dubuffet est exemplaire. Loin de s'aventurer dans le jeu alterné de la fougue et de la réflexion qui calibrent l'évolution de l'abstraction, il ambitionne de réformer les normes de la figuration, en puisant dans d'autres viviers que ceux d'une réalité plus ou moins arrangée aux élans du créateur qui y cherche ses sujets.
Il sera l'un de ceux qui militent pour une révision du patrimoine culturel à ses yeux prisonnier des académismes. Il regardera du côté de l'art de fous, des enfants, et les graffitis, toutes matières jusqu'alors négligées. Ce sera la concept rénovateur de l'art brut. On le voit traiter la matière avec une verve, une force, une jubilation émerveillée, ce que Georges Limbour sait résumer rien que dans le tire de l'ouvrage qu'il lui consacre.

 


 
 
posté le 25-08-2010 à 19:43:13

Marcel Proust et la stratégie littéraire.

Marcel Proust et la stratégie littéraire.
C'est dans son livre à la fois pieux et lucide que Léon Pierre Quint donne un aperçu mal connu du comportement de Proust devant l'aventure littéraire qui commence quand un livre est fini.
On connaît bien le Proust écrivant dans sa chambre (aux murs couverts de liège pour étouffer les bruits de l'extérieur) dans l'atmosphère étouffante aux parfums de fumigations, avec le rythme si singulier des sorties de nuit, des dîners  au Ritz, des visites d'amis admiratifs.
On connaît moins l'écrivain travaillant à la reconnaissance de son oeuvre.
Contrairement à l'idée que l'on se fait d'un Proust toujours entre deux crises d'asthme, on le voit ferrailler avec ardeur pour "avoir de la presse", faisant jouer ses relations, bousculant ses amis, écrivant force lettres qui n'échappant pas toujours à la flagornerie qui lui est coutumière dans l'excès de politesse, les élans  sentimentaux souvent suspects. Il va jusqu'à rédiger lui-même les communiqués qu'il fait passer dans les journaux, s'offrant au besoin de payer des "pavés" qui vantent son livre.
Il y a beaucoup de naïveté dans cette politique où on le  voit se débattre pour sortir de l'idée que public a de lui : mondain, futile, trop précieux.
On lui reconnaît une grâce exquise mais l'écriture de la "Recherche du temps perdu" est bien éloignée de celle de ses débuts. Il y a une force, une ambition, une science de l'architecture du livre qui le conduit dans le sillage des géants.
Ce qui est grandiose est mal lu, au pire critiqué, et il lui faudra attendre la reconnaissance du groupe des écrivains réunis autour de la NRF pour devenir l'écrivain tel qu'il est dans sa force si subtile qu'elle aura échappée au vulgaire, au chroniqueur d'une presse pleine de préjugés et dominée par les écrivains à la fois mondains et populaires au seuil de l'Académie, les vedettes du Boulevard.

 


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1. saintsonge  le 25-08-2010 à 20:32:02  (site)

Ai visité la maison de Tante Leonie, avec la fameuse cuisine qui lui fit écrire que "le matin, je me glissais dans la salle à manger où jusqu'à l'heure encore lointaine du déjeuner, personne n'entrerait et où je n'aurais pour compagnons, très respectueux de la lecture, que les assiettes peintes accrochées au mur...", la cuisine et la fameuse chambre où "d'un côté de son lit était une grande commode jaune en bois de citronnier et une table qui tenait à la fois de l'officine et du maître-autel....", cuisine, chambre et toute la maison où tictaquait le silence (vous pensez bien que seul, le gardien m'avait généreusement ouvert la porte, à la saison des visites autorisées terminée, j'y fus très, très heureux... ; je me promenai, seul, dans tout cet espace, le gardien m'ayant fait entière confiance... Je savourai, vous pensez bien ! Je savoure encore à ce tropisme de profonde joie ! Allant goûter ensuite à la Promenade des Aubépines, par tout Illiers-Combray, pour la puissance du texte, des deux côtés : de Guermantes, de Méséglise, Pré catelan, par la suite, et encore à l'ivresse enchanteresse, au lieu d'apprentissage de la distance texte-réel dans la totalité de mon temps loisible, je savourai comme la ligne de l'équateur, comme le pôle, comme l'Orient, les découvertes !..J'ai cru voir Gilberte rejoindre les deux bouts d'un sentier qu'elle découvrit sous une haie d'aubépines, c'était un fameux rêve éveillé !! Merci de m'en faire revivre la "stratégie" du rêve et du vécu quand mon isolement Trébouliste est aussi nécessaire à la création plus sauvage !! Point d'amis ni de soutiens sérieux, savants et authentiquement fiables, ici ! Pas un....Parfois, j'ai le bourdon, j'en recherche la "fleur" !... Vous m'y aidez, virtuellement...

 
 
 
posté le 25-08-2010 à 11:43:13

Jardins hermétiques de Salomon de Caus.

On lui doit l'invention de la vapeur, et son utilisation pour les fictions célébrées dans les jardins, Salomon de Caus étant, à titre d'architecte, responsable de la conception d'espaces verts richement ornés et sans doute marqués par un souci d'y glisser quelque message hermétique. Dans celui qu'il conçoit pour le château d'Heidelberg et qui sera détruit dans les remous des guerres qui atteignent le bâtiment dans une large part de ses somptueux développements, le rôle du message y est particulièrement important.
La Renaissance inscrit dans l'espace du jardin des pans entiers de la connaissance et tout spécialement celle qui relève de l'hermétisme et des sciences occultes. La distribution des éléments architecturaux (faux temples, grottes) propose un itinéraire codé (voire sacré) qui invite le promeneur à se pénétrer des forces intimes qui se réfèrent aux textes de l'antiquité, aux légendes. On y va de la quête du Graal aux circuits initiatiques qu'illustre si bien Le Songe de Poliphile.


 


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1. saintsonge  le 25-08-2010 à 11:58:46  (site)

Du pays de Caux, je retiens ma visite à Croisset, "chez" ce qui reste du Pavillon de Flaubert, et celle de la Guillette, sur Etretat, logis passager de son fils adoptif, Guy de Maupassant dont j'étais alors aficionado, et aussi, l'architecture naturelle de votre compagnon du jour, puisque les arbres sont des orgues vibrant au cadran des vents solaires !
Bon Jour le moins "hermétique" possible, toutefois...

 
 
 
posté le 24-08-2010 à 09:43:20

Passage de Serge Hutin.

D'origine lombarde de petite noblesse il rencontre Joseph de Péladan et, avec lui fonde la Rose Croix, groupuscule mystico-ésotérique, entraînant toute une génération vers un mouvement artistique qui frôle le symbolisme, parfois l'influence et fait régner les fantasmes de l'occultisme. Fort cultivé Stanisla de Guaita est le personnage type d'une propension à se retirer du monde du réel, du quotidien, pour s'enfermer dans le monde du savoir et son espace de prédilection, la bibliothèquje. "Il passait cinq mois de l'année dans un petit rez-de-chaussée de l'avenue Trudaine où il ne recevait que quelques occultistes,  il lui arrivait de ne pas sortir pendant des semaines. Il avait amassé là toute une bibliothèque étrange et précieuse, des textes latins du moyen-âge, des vieux grimoires chargés de pentacles, des parchemins enluminés de miniatures, des traités d'alchimie, les éditions les plus estimées de Van Helmont, Paracelse, Raymond Lulle, Saint-Martin, ...."
On voyait, dans les années 60, sillonnant les librairies du quartier latin, un personnage de la même famille, très largement associé à l'animation de la revue (des sciences occultes) La Tour Saint Jacques. C'était Serge Hutin.






 


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1. saintsonge  le 24-08-2010 à 14:28:55  (site)

J'ai connu des Rosicruciens pas très joyeux, qui vainement cherchèrent à m'enrôler, suis resté libre devant la question : Il existe ou pas ?...Qu'y a-t-il après la mort (questions du dernier d'Ormesson, aussi)...
Ah, je vous vois très bien en ce personnage sur l'escabeau...(en plus beau, forcément...)

2. saintsonge  le 24-08-2010 à 14:30:20  (site)

PS / Je n'ai pas reçu votre adresse mail, votre lien, pour vous donner le dessin de moi qui plaît tant à votre âme .... L'obtiendrai-je ? J'en garderai par-devers moi la référence, soyez rassuré sur ce point....

3. sorel  le 24-08-2010 à 15:01:15

Bonjour, non ce n'est pas le dessin que je souhaite (je ne veux pas vous en dessaisir), mais une photo par internet (en l'envoyant sur mon adresse mail par exemple), ça devrait marcher.
C'est curieux mais j'ai une certaine méfiance vis à vis de d'Ormesson. Je le vois trop à la télévision pour le prendre au sérieux. J'ai peut-être tord !

4. saintsonge  le 25-08-2010 à 08:20:55  (site)

J'avais bien saisi votre souhait via internet, mais (là c'est moi qui pêche par bêtise anti-matérielle) à sorel(de quel site ? Ici, je n'ai pas le lien direct, car la photo du dessin vous attend..)
Pour d' Ormesson, c'est un jeu, totalement (il m'a envoyé ses voeux, cette année, je ne les prends pas au premier degré), depuis le temps qu'il dit d'arrêter de publier, il s'en gargarise de nouveautés (via l'édition de chez sa fille, en plus - pourquoi s'en priverait-il d'ailleurs ?) Il déteste les honneurs et la gloire, publie-t-il (encore dans ce récent Fayard), c'est un peu trop facile quand on est "en place" dorée, vous ne trouvez pas (le même propos dans ma bouche passerait pour plus authentique, au vu et su de ma situation à la Walser - oh, puissé-je ne pas finir à mettre des petits pois dans les boites d'un H.P !!!! ou d'aller ramasser les feuilles mortes dans une cour d'hôpital....) Au plaisir de savoir à quelle adresse internet vous transmettre mon dessin.... Bertrand

5. sorel  le 25-08-2010 à 11:45:43  (site)

Pour le dessin ce n'est pas grave. Savoir qu'il existe peut suffire au plaisir du voir. Bonne journée

6. saintsonge  le 25-08-2010 à 12:03:08  (site)

Certes, quoique je l'eusse voulu bien "voir" en vos pages, pour d'autres visiteurs de votre musée réflexif, aussi... Zut, dommage, pauvreté de la haute technologie, alors....
Bien à vous...de l'avoir aimé (mon dessin)

 
 
 
posté le 23-08-2010 à 21:26:21

Le Graal est dans la bibliothèque

La Bibliothèque Mazarine tient entre deux dates (comme le propose une plaque tombale) et si sa vie commence avec l'une, elle ne se termine pas avec l'autre qui marque le changement radical d'ambitions qui aura présidé à sa création.
1642 Gabriel Naudé, médecin né à Paris, est appelé par Richeleu pour constituer une bibliothèque. En moins de dix ans il aura rassemblé quarante mille volumes et c'est Mazarin qui reprend l'idée de son maître et procède à la création de la bibliothèque qui honore sa mémoire. Au début du XX° siècle un "dilettante" amateur de culture et de bonnes manières, qui n'a pas encore son oeuvre (La Recherche du temps perdu) est nommé, par privilège, conservateur du lieu, alors qu'il n'en n'a ni la compétence ni la passion. Pourtant il y a quelque chose de merveilleusement nourri de symboles dans cette aventure. Qui voit l'énergie d'un homme de savoir impulsant la réunion de volumes que l'auteur à venir n'aura pas goût excessif à "conserver", mais déjà, en puissance, apte à venir y déposer son oeuvre fleuron de la littérature de son temps.
Quel rôle peut jouer une bibliothèque dans la constitution d'une oeuvre en gestation. Des nombreux et studieux lecteurs penchés sur leur pupitre, déchiffrant parfois des ouvrages qui n'auraient pas été consultés depuis de nombreuses années, combien sont appelés à devenir à leur tour, des créateurs quand on sait, que la plupart seront des commentateurs, des analystes, des consommateurs éclairés de la chose écrite et du savoir.
La création  procède-t- elle plus de la chose vécue (du matériel humain) que du savoir ? C'est selon les tempéraments. Bien des oeuvres ne sont (?) que le prolongement, l'écho d'une oeuvre du passé (Joyce, Borgès) et sont parfois, de celles qui contribuent le plus radicalement à l'essor de la littérature, à son enrichissement.
La littérature se fait dans la vie, (amour, guerre, problèmes sociaux) mais aussi du côté de la chose écrite. De livre en livre, qui se copient, se développent, se répondent, des mythes se forment, se développent, se structurent. Le pouvoir des mots règnant sur le livre, la bibliothèque est le réservoir de toute la science humaine, d'une radicale recherche de la vérité.
C'est dans une bibliothèque que veille le Graal ?

Photo gilles kagan

 


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1. saintsonge  le 23-08-2010 à 21:42:31  (site)

S'il n'est ici, le Graal est dans la citation de Montesquieu :
"Une heure de lecture est un souverain remède contre les dégoûts de la vie..."
(je viens d'en passer ...six, de midi à dix huit, le dernier d' Ormesson....dont le titre est un vers....)
Kenavo du site...au soir ensoleillé, après une journée maussade et morose... Je resterai bien volontiers plusieurs mois dans ce "graal -ci" , enfermé, ne me nourrissant que d'échappatoires livresques..., ahoui, sans problème aucun;...ni femme nue !

 
 
 
posté le 21-08-2010 à 12:18:18

Tzara dada.

Avec la fougue d'un ogre qui brasse une immense culture (et de riches bibliographies) en y introduisant comme des virus perturbants quelques incongruités et un brin d'humour, Umberto Ecco (dans "Le pendule de Foucault" qui est une sorte de Da Vinci code pour esprits raffinés) imagine le rôle joué par une machine (informatique) dans laquelle on introduirait des mots, des phrases, des paragraphes entiers, laissant brasser ce flux torrentiel avant qu'il n'en sorte des textes nouveaux d'une incongruité propre à éveiller (quand la littérature force l'esprit et le sort de l'inertie du quotidien). On évoque aussi l'histoire du singe attelé à une machine à écrire qui tape au hasard, combien de siècle faudrait-il pour qu'il en sorte la "Recherche du temps perdu" ?
De fait, l'histoire de la poésie dada relève de la  même méthode. A en croire les historiens qui prétendent, à commencer par le nom de l'aventure dada, que le mot fut trouvé en glissant un couteau dans un dictionnaire pour le sortir et il  deviendra celui d'un baptême, affirmant encore que Tristan Tzara (l'un de ses artisans les plus fougueux et qui su lui donner une dimension internationale) sortait d'un chapeau des mots préalablement choisis et écrits sur des petits bouts de papier. Une sorte de loto poétique en somme.
Au delà du jeu, hasard heureux, force des rapprochements inattendus des mots, le poème, souvent, est d'une barbare beauté, d'une force suggestive confondante. Qu'on s'y réfère, à commencer par les titres : Mouchoirs de ,nuages, Où boivent les loups, L'arbre des voyageurs, De nos oiseaux, L'homme approximatif,
La magie des rapprochements insolites, comme si le mot se trouvait dans un champ magnétique ( André Breton en tirera le titre d'un de ses recueils). Il est entraîné dans une sorte de flux qui bouleverse son sens premier, et lui donne une force nouvelle.

 


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1. Ooz  le 22-08-2010 à 21:12:43  (site)


Je ne suis pas assez réveillé pour faire un commentaire.
Je suis en revanche une lectrice toujours éblouie de tout ceux que vous avez racontés, et ces illustrations gracieuses ou farfelues dont vous ornez vos textes.

Je vous adresse, cher Monsieur, des souhaits d'infatigable volonté

Marte Lloyd née Feritag

2. KAFF  le 25-08-2010 à 08:55:39  (site)

J'ai bien aimé l'image du singe. Quand on pense qu'en liberté il en existe peut-être un capable de réaliser l'exploit du premier coup, ça laisse perplexe.

 
 
 
posté le 20-08-2010 à 11:30:30

Arthur Cravan critique d'art dada.

Chacun y allait de son stylo. Apollinaire avait donné l'exemple. Sont multiples les tentatives exercées par les poètes de ces années fastes (et bientôt folles) pour pénétrer le secret de la création artistique, se mêler au monde des peintres qui flirtaient volontiers avec l'écrit jusqu'à parfois y tâter non sans verdeur et vérité.
Arthur Cravan, éditant sa petite (!) revue "Maintenant", qu'il vendait (est-ce une légende, c'est Bernard Delvaille, grand connaisseur du personnage,  qui me l'avait affirmé) sur une charrette de "quatre saisons" sur le bord du trottoir, dans le voisinage pittoresque des primeurs et autres aboyeurs de la rue.
Aux poèmes (d'un si beau rythme et qui font penser à Blaise Cendrars) il ajoute des notes sur l'art et même des articles plus conséquents relatant ses visites dans les expositions comme le "fameux" article sur les Indépendants.
C'est là qu'il se distingue en portant sur les oeuvres de Marie Laurencin (tout en précisant qu'il n'a pas vu son "envoi") des propos franchement injurieux. Qu'on apprécie : "en voilà une qui aurait besoin qu'on lui relève sa jupe et qu'on lui mette une grosse... quelque part pour lui apprendre que l'art n'est pas une petite pose devant le miroir. Oh, chochotte, ta gueule.."
Préambule pourtant à une définition  qui ne manque pas de verdeur : "La peinture c'est marcher, courir, boire, manger, dormir, faire ses besoins..." N'aurait-il pas (au début du XX°siècle) prévu ce que serait l'art au XXI° siècle : une substitution de l'artiste à son oeuvre, et jusque dans l'intimité de sa vie intime.
Il procède volontiers par l'apostrophe, l'injure. En sont victimes Maurice Denis ou Charles Guerin et même Chagall ((ou Chacal dixit l'auteur) et beaucoup d'autres qui constituent le meilleur de l'Ecole de Paris.,
Robert Delaunay n'est guère ménagé qui a "une gueule de porc enflammé ou de cocher de grande maison". Le ton est donné, dans la provocation souvent vulgaire, le goût de la mystification, de constantes allusions au domaine privé, des invites de jeune voyou. C'était le mauvais côté de "dada".
Cravan rien qu'un fada ?

 


Commentaires

 

1. saintsonge  le 20-08-2010 à 12:05:35  (site)

S'il est "fada", c'est un fin "dada" !
Fat dada ?.. Ou simple fat d'aise ?
Fada, sans doute, dès qu'on touche à l'art, on l'est, plus ou moins pour ceux qui ne le "pratiquent" jamais ! Ceux qui ont plein pieds dans le réel vous trouveront (me trouvent) déjà ...trop rêveur !...Nous aurions sûrement batailler sur Chagall, que j'apprécie...
A Votre bon Vendredi - Sans Pareil (galerie d'alors), et, en Chapeau de paille...

2. saintsonge  le 20-08-2010 à 12:07:37  (site)

Lire : bataillé (me suis réveillé à quatre heures, ce jour... Je ferai une sieste, au risque de devenir "fada", que trop, que trop... Une petite sieste solitaire... Dans la bruine du jour plus gris que Juan d'acier !

 
 
 
posté le 19-08-2010 à 21:50:41

Renée Dunan chez "dada".

Dans le fol foisonnement des revues qui revendiquent Dada Renée Dunan avait sa place. Alors que le surréalisme (qui héritera d'une partie des membres du groupe dada) se montre plutôt sélectif dans l'établissement des sommaires des revues qu'il pilote, on est, du côté de dada, ouvert  à toutes les énergies, toutes les ambitions, toutes les foucades. Revues de tête folles, elles s'acclimatent à tous les penchants, jouant la carte de l'éclectisme du moment qu'il manifeste les forces de la contestation avec éclat, de la provocation, de la fantaisie. Au nom de la modernité.
Renée Dunan, bien qu'elle n'y fait qu'une traversée furtive, y est bien à sa place, dans l'esprit qu'elle revendique. Féministe, remuant tout et les idées les plus neuves, passant par tous les genres.
La voici voisine de Céline Arnauld, que l'on retrouve aussi un peu à tous les sommaires, de Picabia, grand prêtre de l'aventure, de Pierre de Massot, écrivain plus secret, qui ira plutôt du côté des excentriques, de Pierre Albert Birot, sorte de gourou de la modernité, de Ribemont-Dessaignes, un continent rien qu'à lui seul, de Paul Eluard et Benjamin Péret qui glisseront dans le sillon du surréalisme, d'Ezra Pound, une sorte de frère de Joyce et figure de légende de son vivant même.
C'est le ton de liberté avant tout qui séduit Renée Dunan plus qu'une appartenance quelconque avec un mouvement dont le caractère combatif et les visées littéraires ne l'intéressent pas. Son combat reste solitaire. Elle choisira des armes différentes selon les événements.

 


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1. saintsonge  le 20-08-2010 à 05:16:26  (site)

Un clin d'oeil en une heure "dada", cinq heures...13 (de l'anti-art, foire dada berlin 1930 ?...
Le Temps est du....Ribemont-Dessaignes, qui pendule...

 
 
 
posté le 19-08-2010 à 16:48:27

Valery Larbaud et son vice.

Parlant plusieurs langues, grand lecteur, Valery Larbaud sera un passeur de talents, un propagateur des lettres (on lui doit la découverte en France de James Joyce), et ce n'est pas sans une pointe d'humour qu'il place la lecture sous le signe du vice. De surcroît impuni.
Il le précise : "Une espèce de vice, en effet, la lecture. Comme toutes les habitudes auxquelles nous revenons avec un sentiment vif de plaisir, dans lesquels nous nous réfugions et nous isolons, et qui nous consolent et nous tiennent lieu de revanche dans nos petits déboires".
Aveu qui donne tout son prix à la situation de l'écrivain quand, atteint d'aphasie, il vivra tant d'années dans une sorte d'ombre sociale, pour lui qui fut un grand voyageur.
La lecture serait une médecine pour lutter contre la solitude, la banalité de la vie, les méfaits qui talonnent notre quotidien. Elle est aussi un moyen d'élargir notre horizon. Elle n'est pas qu'un vice (utile et nécessaire) elle est le tremplin de tous les voyages de l'esprit. Vivre dans sa bibliothèque n'est pas qu'un rêve de sage, elle est le territoire de tous les débordements de l'imaginaire.


 


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1. saintsonge  le 19-08-2010 à 20:19:44  (site)

L ' insomnie n'est jamais loin
quand un livre vous tient ....
J ' en connus de bien longue
Les nuits diront : blanche, oblongue
durée éternelle jusqu' au petit matin !
- j 'avais jeunesse, alors, bien sûr ;
en ces temps-ci, insomniaque écriture !
Tout change... Rien ne dure !

 
 
 
posté le 19-08-2010 à 15:48:56

Renée Dunan au Second rayon.

Qui est-elle sous ses nombreux noms d'emprunt ( que l'on devine codés) de Louise Dormienne, Marcelle La Pompe, M.de Steinthal, Spaddy, René Camera, Chiquito, Ethel Mac Singh, Luce Borromée, Laure Heron, A. de Sainte-Henriette ?
René Dunan a une identité floue même si on l'enferme dans les deux dates solennelles qui scellent une tombe (1892-1936). Native d'Avignon, on la voit dans le Paris des "années folles" fréquentant le milieu des dadaïstes puis du surréalisme et participant à leurs revues. Mais elle est prodigue d'articles qu'elle sème à tous vents et dans des organes de presse qui n'ont aucun rapport d'esprit ou d'orientation politique si elle affiche, de son côté, un goût pour l'anarchie, la provocation au delà du mystère qu'elle entretient. On la voit sur tous les fronts (féministe, frôlant le milieu de Sapho) multipliant les romans de gare et d'un érotisme provocant (quoique non dénué d'une certaine force d'expression et d'une qualité littéraire qui justifie qu'elle ne tombe pas dans l'oubli).
C'est le temps de "La Garçonne" de Victor Margueritte et des "Claudine" de Colette. Elle se situe dans ces zones où la vie mondaine aime s'encanailler.
L'histoire littéraire ne l'aura jusqu'alors retenue que comme une curiosité, elle-même cultivant les fausses pistes.
Le ton même des titres de ses livres la chasse des rayons respectable (?) pour la projeter dans ce "second rayon" où elle brille d'un feu pervers et sans doute naïf.
Voici, au hasard : La triple carese (son plus grand succès il aura plusieurs versions), Une heure de désir, La Flèche d'amour, L'amant trop aimé, La culotte en jersey de soie, La dernière jouissance, Les nuits voluptueuses, Entre deux caresses, Au temps des baisers, Les jeux libertins, La Chair au soleil, Dévergondages, Le plaisir d'une nuit étoilée, La jouissance de l'amant de Pamela, Les amantes du diable, Les marchands de volupté,
Puisant, non sans malice dans les coulisses de l'Histoire : L'extraordinaire aventure de la Papesse Jeanne, Le masque de fer ou l'amour prisonnier, Le sexe et le poignard ou la vie ardente de Jules César





 


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1. saintsonge  le 19-08-2010 à 16:42:45  (site)

Digne de " l'enfer " de la B.N.F, en ce cas...!

 
 
 
posté le 18-08-2010 à 17:19:48

Le Cyrano le laboratoire central.

 Du rôle du café dans la vie culturelle il y aurait long à dire d'autant qu'il change grandement avec chaque génération. Amorcée autour des philosophes du XVIII° siècle, entre le Procope rue de l'Ancienne Comédie et le café de la Régence          place du Théâtre Français, l'aventure connaît ses heures fastes avec le XIX° siècle qui entretient un véritable culte pour le café comme espace de convivialité culturelle. Il suffit de voir le rôle qu'il va jouer pour l'instauration du groupe impressionniste (la Nouvelle Athènes à Pigalle) encore qu'il peut aussi être le théâtre de la comédie humaine (Caillebotte, "l'Absinthe" de Degas) et préparer aux festivités champêtres dont les bords de la Seine sont le territoire de prédilection.
Citadin, et exclusivement, il est, avec le surréalisme, le "laboratoire central" où se font et défont les alliances, les réputations, véritable lieu de culte autour de Breton qui instaure un rite de l'amer-picon qui en est le vin de messe. Deux fois par jour
(et parce qu'il était tout proche de son domicile rue Fontaine) les membres élus se réunissent au Cyrano. La voisinage du Moulin Rouge lui donne ce qu'il faut de canaillerie pour séduire des apprentis rebelles. Il y aura le Certa (passage de l'Opéra, bien après le Promenoir de Vénus), Breton y fait la loi, y instaure des hiérarchies, y promulgue des articles rythmant la vie du groupe et cautionnant les adhésions de  nouveaux venus.
Mais le café c'est aussi l'espace de l'aventure amoureuse, de la rencontre et des lois du hasard. Breton y rencontre Jacqueline Lamba qui sera la muse de "L'amour fou".


 


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1. saintsonge  le 18-08-2010 à 18:12:51  (site)

Merci de votre visite en mon "laboratoire" Saint-songesque ; comment faire pour vous transmettre mon dessin, je vous l'enverrai très volontiers, gratuitement, si j'avais vos coordonnées, d'habitude, je retrouve sur d'autres blogs certains d'entre eux, ici, pour une fois qu'un éminent confrère trouve ce que moi j'aimais le moins (c'est vrai, il n'était pas mon préféré, cause qu'il fut né d'un violent trouble amoureux, un tourment !... Sans être "cyrano", en plus !Enfin, vous avez lu... Je l'ai là, près de moi, si je pouvais traverser l'écran, je vous l'appliquerez dare-dare...) Votre soutien me réconforte... Vraiment, comment faire pour vous l'offrir ?... L'envoyez dans tous les bureaux de poste de la Campagne Française ou en ville de votre naissance, ou chez ACR Editions Courbevoie, P.O J..J L ?... J'aimerais le savoir ainsi en votre compagnie.. Vraiment, oui vraiment, il aurait meilleure place que dans....ma chemise verte....actuelle.... Voilà que je vais le scanner, l'esprit sombre, en DZ Repro, magasin de Véronique (que j'appelle Isis, cheveux noirs, coupe égyptienne), de la ville de Douarnenez, sans aucune prétention, et...il vous plait... Je suis aux anges rapprochés, tout à coup !!..

2. saintsonge  le 18-08-2010 à 18:14:10  (site)

LIRE : l'appliquerais

3. sorel  le 19-08-2010 à 15:52:39  (site)

Non il n'est pas question d'un envoi postal, mais je pensais par mail pour que je puisse le passer moi-même sur mon blog. si je sais le faire !!!!!
Cordialement. Voir réponse sur article L'exemple de Breton.

4. saintsonge  le 19-08-2010 à 16:51:04  (site)

oui , j'y avais songé, bien sûr, mais sans votre adresse "mail", je n'y faisais ni pouvais faire - où donc est-elle ?..Laquelle est-ce bien ?... J'y joindrais le fameux dessin.... Ma fidèlité vous est acquise depuis bien longtemps.... , même en publications "papier"... J'attends donc votre mail, via le mien :
bertrandelporte@yahoo.fr
(un seul "d" entre prénom et nom accolés)

 
 
 
posté le 18-08-2010 à 15:39:26

Ernst illustre Eluard.

Compagnon des poètes, Max Ernst s'attache à orner de ses oeuvres (dessins, collages, frottages) les livres de ses amis. Paul Eluard est l'un d'eux. Outre le fait de partager sa vie (à Eaubonne) et d'orner de splendides peintures les murs de sa maison, de partager l'amour pour une même femme (Gala), Max Ernst suit fidèlement l'évolution poétique de son ami. De la période dada (mais Eluard sera un dadaiste discret) date leur collaboration. Mais Eluard, contrairement aux autres dadaistes, ne veut pas "tuer" le langage, mais lui donner un nouvel élan, partageant avec Jean Paulhan cette ambition.
Et c'est au temps des collages si novateurs et porteurs de rêves intimes, que les deux amis collaborent à des ouvrages où l'humour de Max Ernst vient se greffer sur le caractère si intimiste et déjà élégiaque d'Eluard comme pour "Répétitions".
"Dans un coin l'insecte agile
Tourne autour de la virginité d'une petite robe
Dans un coin le ciel délivré
Aux épines de l'orage laisse des boules blanches...."
A propos de Max Ernst il dira plus tard :
"Dévoré par les plumes et soumis à la mer,
Il a laissé passer son ombre dans le vol
Des oiseaux de la liberté.
Il a laissé
La rampe à ceux qui tombent sous la pluie,
Il a laissé leur toit à tous ceux qui se vérifient..."

 


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1. saintsonge  le 18-08-2010 à 18:26:58  (site)

S'il l'eût permis, je m'en serais fait un ami (je vous l'ai dit, je crois...)

 
 
 
posté le 17-08-2010 à 15:04:19

Jacqueline Lamba pas que muse.

A quoi à droit la muse, en dehors d'être belle et d'inspirer celui qui chantera sa beauté. Celles qui traversent le XIX° siècle, en particulier chez les romantiques, ne laisseront que le souvenir de cette beauté qui les distingue, les désigne à l'attention de la légende.
Tout au plus aura-t-on des  pages de souvenirs, le journal de la vie mondaine qui aura entouré le culte dont elles sont l'objet.
Leur accès au droit d'être autre chose que la fascination qu'elles suscitent passera par la peinture à en croire ce qui se passera dans le contexte du surréalisme où elles se mesurent sans complexe à l'autorité des hommes dont elles deviendront des rivales. Ce sera leur participation effective (et affective) à l'essor du féminisme qui y trouvera des éléments propres à revendiquer sa force créatrice dans l'indépendance vis à vis de "la loi du mâle".
Jacqueline Lamba sera à la fois l'exemple de cette prise de pouvoir et en est aussi la victime. Inspiratrice de "L'amour fou" d'André Breton dont elle sera un tempsla compagne, elle n'est, aux yeux de ce dernier que l'objet de sa ferveur amoureuse. Significativement il ne la cite même pas dans son Histoire de la peinture surréaliste, se montrant, là, moins généreux et et complice qu'Apollinaire appuyant la carrière de sa muse (très provisoire)  Marie Laurencin, en l'incluant d'une manière fort arbitraire dans son essai sur Les peintres cubistes.
Pourtant, Jacqueline Lamba n'aura pas été que l'ondine de la légende et du poème (quand elle rencontre Breton, elle nage, nue, dans un aquarium, dans un cabaret montmartrois). Avec une ténacité que lui reconnaissent ceux qui la considèrent comme peintre, elle va construire une oeuvre qui sera d'ailleurs de couleur surréaliste que le temps de son compagnonnage avec Breton s'étant séparé de lui elle s'engagera dans une vision personnelle, fortifiée par son installation à Simiane la Ronde, dans le midi de la France.

 


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1. saintsonge  le 17-08-2010 à 17:00:47  (site)

Joli apport photographique, portrait possible, aquatique, de la muse - qui amuse qui s'en inspire, jusqu'à l'expir ;
il y aurait donc, par votre "lapsus" dactylographique, un double "et" en la muse... (si vous l'avez repéré, près d' Apollinaire...)
La muse et l'artiste
L ' artiste à mus(et) amusé
au musée de toutes les Muses !

 
 
 
posté le 17-08-2010 à 14:49:33

Gabriel Paris flash les poètes.

Gabriel Paris ami des poètes.

Poète lui-même, Gabriel Paris s'intéressait aux écrits des poètes qui fréquentaient le Soleil dans la tête. Il avait, en des litho-posters, largement ouvert la voie à une lecture graphique de poèmes pour lesquels il apportait sa contribution, de Raymond Queneau à Jules Laforgue en passant par Michel Leiris et ses contemporains ( René Witold). Il avait créé la couverture d'une petite collection qui tentait de réunir des poèmes des familiers du Soleil dans la tête et qu'imprimait le typographe René Rougerie. Il lui arrivait aussi d'orner de dessins originaux les ouvrages des poètes qu'il rencontrait  comme Marc Alyn. Quelque chose de la ferveur graphique qui avait du mal à résister à l'apport de la peinture, tout en lui donnant cet accent presque expressionniste, subsistait dans le croquis improvisé, souvent en marge des livres, comme le flash d'une rencontre, avec sa part d'émotion et d'intensité.

 


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1. saintsonge  le 17-08-2010 à 17:03:49  (site)

Je crois reconnaître votre nom sur la dédicace, beau trésor !!

 
 
 
posté le 16-08-2010 à 11:14:45

L'exemple d'André Breton.

On avait, au Soleil dans la tête, le souci d'organiser des vitrines qui illustrent le contenu d'un livre choisi pour en être le point d'orgue. Une sorte de mise en scène qui fasse écho à son contenu, à "son esprit".
J'avais, bien avant la création du Soleil dans la tête, longuement admiré la vitrine du Pont Traversé, la librairie de Marcel Béalu, qui, à l'époque, était au bas du boulevard Saint Michel, au chevet de l'église Saint Séverin, dans ce quartier qui avait conservé quelque chose de sa misère pittoresque du XIX° siècle et la lumière que lui avait donné J.K.Huysmans.
Béalu, jusque dans l'accumulation des ouvrages, savait traduire ses propres goûts, piquer la curiosité du passant, inscrire parmi les livres choisis le paysage de sa propre délectation.
Bien avant encore, du temps de l'adolescence et de la découverte, un peu désordonnée, de la poésie, du surréalisme, des fabuleux flambeaux de la pensée "fin de siècle", ce fut la rencontre, dans le petit livre consacré à André Breton dans la collection PA de Seghers, de la photographie d'une vitrine new yorkaise pour la présentation d'Arcane 17, ce vaste poème d'amour écrit par Breton alors qu'il venait de rencontrer celle qui devenait sa muse : Elisa.
La disposition des objets, leur dialogue subtil disait la force du poème, ouvrait à lui. Un exemple qui montrait le chemin.

 


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1. saintsonge  le 17-08-2010 à 17:09:35  (site)

Décidemment, j'ai l'impression que j'aurai loupé tous les endroits des reconnaissances luxueuses, en cette mienne vie si .... plate !... Lors de mes passages au Flore, jeune alors, je me sentis bien seul, déjà, comme au Lapin Agile, aussi, et en tout Montmartre, autiste que je fus, n'osant pas..., si je reconnaissais quelqu'influent personnage... Aurai-je osé même pousser le rayon de la porte de votre Soleil dans la tête , tout le coeur serré par une angoisse double, l'envie d'y entrer et la peur tétanisante de faire le premier pas ?... Quel gâchis, tout ce temps perdu à ne jamais oser ... Quel honteux gâchis de ma timide jeunesse, qui se propage encore...(les deux, le gâchis, et la timide "jeunesse" de ma cinquantaine....!!)

2. sorel  le 18-08-2010 à 14:18:25

Quelle amertume ? Qui n'a pas, l'âge venant, regretté des gestes manqués ! Et que de rencontres ratées, et la vie (notre destin) aurait été tout différent. C'est une erreur largement partagée. Toujours heureux de constater votre fidélité. Elle est appréciée. Codialement.

3. saintsonge  le 19-08-2010 à 20:22:21  (site)

ah, je vous pensais immunisé contre cette "amertume"-là....

 
 
 
 

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