posté le 05-07-2009 à 18:07:26
Jean Rousselot au coeur des signes.
L'intérêt porté par Jean Rousselot aux arts plastiques
rejoint celui plus connu qu'il porte à la poésie jusqu'à s'en faire
(avec Robert Sabatier) l'un de ses plus sagaces historiens. Poète
lui-même, il aimait griffonnait aux marges de ses manuscrits ou dans le
rythme même de l'écriture. On avait, au Soleil dans la tête, rassemblé
ses dessins dont on aimait le caractère résolument intimiste et surtout
hors des sentiers battus, des modes et des circuits officiels. C'est à
ce stade que s'appréciait le mieux la saveur des signes, griffes,
volutes, images qui en naissaient se développaient et s'harmonisaient
sur la surface de la page.
Tout naturellement une telle pratique
du dessin (ou de la peinture) conduit au collage. Comme tant d'autres
poètes (dont Jacques Prévert, on y reviendra) firent de même. Voici ces
collages rassemblés, joliment, par les éditions Nanga et Jérôme
Feugereux (voir leurs sites).
posté le 04-07-2009 à 17:42:36
Camille Claudel, une âme de feu.
Camille Claudel, une âme de feu, un corps de cendre.
L'aventure
amoureuse de Camille Claudel et d'Auguste Rodin, est passée dans la
légende. Parce qu'elle marque le point de fusion, et de rupture entre
deux caractères aussi forts que le talent qui en résulte, donnant forme
à des élans, des passions, des appétits, qui marquent d'une manière
indélébile leur siècle, le temps de leur présence au monde quand
l'oeuvre, défiant le temps, porte haut les couleurs d'une quête
ardente. Une fusion telle que parfois il est malaisé de distinguer
l'oeuvre de l'un par rapport à l'autre et de s'interroger, sur le jeu
complexe des influences. Camille Claudel, née dans une modeste
maison de Villeneuve-sur-Fère, dans l'Aisne, va mener une carrière
d'artiste à Paris avant de sombrer dans la folie. Ses rapports amoureux
avec Rodin sont compliqués par la vie domestique de ce dernier, et les
ambitions d'un sculpteur qui va faire une carrière officielle, quand
Camille reste dans l'ombre. Paul Claudel, son frère, aura une attitude
ambiguë avec cette hypocrisie propre à certains catholiques qui veulent
ménager les apparences, d'autant que sa carrière diplomatique le met
dans une position délicate. C'est dans une totale solitude morale que
Camille Claudel doit assumer son destin. D'où la folie qui est le
résultat d'une sorte de vertige mental. Un génie brisé.
posté le 04-07-2009 à 17:29:58
Nadja, à la folie.
Nadja.
Un nom qui sonne l'exotisme et le mystère, qui
résume tout l'esprit du surréalisme, qui s'incarne en une femme,
passante considérable mais fugitive dans la vie d'André Breton qui en
fera l'héroïne d'un de ses plus beaux livres.
Rencontrée rue La
Fayette (si banale dans son étirement vers la gare du Nord), à Paris,
elle va tracer avec Breton, en quelques jours d'une passion inquiète et
envoûtante, un itinéraire que ne manquent pas de suivre les fervents
pèlerins de l'amour fou. Nadja n'est pas qu'une femme égarée dans la
ville et que l'amour d'un poète a porté à la légende. Elle est
confondue avec le tissu même de la ville comme territoire de l'aventure
amoureuse et du mystère, car tout échappe à l'ordinaire à celui qui
invente son itinéraire amoureux, construit des jalons pour ne conserver
la mémoire. Nadja est promise à la folie, et son attrait n'est pas
étranger à ce destin dévastateur, car elle annule les limites,
abolissant les frontières du raisonnable, de la mesure et de l'économie
de la pensée et des sentiments. Elle se laisse porter par une passion
qui va la briser.
posté le 04-07-2009 à 16:21:57
Un salon qui chauffe.
Un rendez vous comme on les
aimait au Soleil dans la tête. Le maître de maison est J.H. Sainmont
(haut dignitaire du Collège de Pataphysique). Il a rassemblé sous la
houlette d'Alfred Jarry ( pape en absurdie) : Léon Paul Fargue ( un
copain de débauche qui fut aussi celui du douanier Rousseau), Germain
Nouveau (quand il ne mendiait pas aux portes de églises), Jules
Laforgue (qui regardait la lune depuis sa soupente de la rue Monsieur
le Prince), Alphonse Allais (qu'on retrouvera dans un bistro près de la
gare Saint Lazare, devant une absinthe), François Laloux ( dont j'aime
bien les peintures en mouvement de la main ), Raymond Queneau (qui
bafouille des chiffres), Apollinaire ( qui est partout), Julien Torma
(avec qui l'on aura rendez vous plus tard) et Jacques Rigaut, en salon
qui chauffe.
posté le 04-07-2009 à 16:12:14
Julien Torma, une fiction ?
Nous voilà rendu en pays d'incertitude, ou de fiction pure, si bien
qu'on a pu prétendre que Julien Torma n'a pas existé, qu'il est une
fiction littéraire. Et pourquoi pas ! Un ensemble de texte témoigne
d'une vie créative. Il manquait le créateur. On vous le présente.
Julien Torma, né à Cambrai le 6 avril 1902, mort au Tyrol le 17 février
1933. Mort ? ou plutôt disparu dans les montagnes. Cela ajoute beaucoup
au prestige d'une vie qui a des allures de légende. Jeune orphelin, il
fait, bel adolescent, la connaissance de Max Jacob dont on connaît la
mansuétude chronique à l'égard des "jeunes" . Un autre ami, dévoué
jusqu'à la fin, assure l'édition de ses premiers textes; c'est "La
lampe obscure", ouvrage qu'il s'empresse de renier. La nuit il
travaille aux Halles, le jour fréquente les beaux esprits. Il y aura
René Crevel, Robert Desnos, le cinéaste Jean Vigo, ce qui constitue une
sorte de géographie sentimentale qui en dit long sur le personnage (
serait-il fictif). N'est ce pas le rêve de tout écrivain, de créer une
oeuvre et son auteur faisant un "tout" cohérent. Un dédoublement
de soi-même. L'histoire littéraire en connaît quelques uns. Torma
pourrait en être une manière d'exemple. A suivre.
posté le 04-07-2009 à 15:56:04
Cendrars en voyage.
Cendrars encore, dont un timbre perpétue la mémoire. Plus que tout
autre, (militaire, savant, artiste, écrivain) il est à sa place dans
cette "image" signifiant le voyage, une destinée (pour lui souvent
lointaine), un mouvement, car tout bouge à partir des mots. D'abord les
images et, au delà, les horizons qu'elles suggèrent, auxquels elles
aspirent, car inventer une image (la créer) c'est donner une clef pour
un "ailleurs". Cendrars est identifié à tous les moyens de transport
qu'il a volontiers emprunté, lui qui écrit ses poèmes à bord d'un
bateau qui traverse l'Atlantique ou dans le Transibérien pour atteindre
la féerie des clochers qui ponctuent le ciel de Moscou ( et soudain, au
halètement du train, se mêle l'envolée des cloches qui sonnent la
gloire de la prière) . Un poème qui épouse les rythmes du voyage,
croît au souffle du vent, de l'imaginaire qui s'embrase au delà du
banal et fait, de celui-ci, un ferment de rêve.
posté le 04-07-2009 à 15:46:17
Paroles d'Homère.
Découverte dans une brocante (dans l'Essonne).
Jetés,
abandonnés, oubliés parmi les succès littéraires d'aujourd'hui (si loin
de la littérature), des volumes dépareillés du magistral ouvrage de
Victor Bérard (publié chez Armand Colin en 1929). Ce sont les
"Navigations d'Ulysse". On y rencontre Pénélope Calypso et Nausicaa,
ces figures qui hantaient les jeunes élèves qui voulaient se
familiariser avec l'étude du grec ancien. Rares aujourd'hui.
Pourtant
le mythe d'Ulysse n'a rien perdu de son prestige. Et voici, au Club du
Livre (1948) l'Odyssée. On y parle souvent de l'assemblée des dieux.
Une poignée d'hommes et de femmes aux métamorphoses surprenantes, aux
attitudes si proches de celles qui nous guident. Mais les dieux ne
sont-ils pas les reflets de l'humanité ? Vaste leçon.
C'est aussi
une assemblée que, d'ordinaire, les peintres qui évoquent Homère,
imaginent autour de la figure du noble vieillard aveugle s'accompagnant
de sa lyre. A comparer avec la réunion des enfants qui entourent la
grand-mère lisant des contes. On va bientôt la rencontrer.
posté le 03-07-2009 à 18:05:25
Comment j'ai écrit (Raymond Roussel).
Roussel et une méthode littéraire.
La
singularité de l'écriture de Roussel est moins dans le sujet
(généralement très banal)) que dans la méthode. En gros : on prend une
phrase (c'est le début d'une histoire) et l'on en invente une autre,
qui lui ressemble phonétiquement mais lui est totalement étrangère,
elle évoque tout autre chose. Conclusion, on a deux propositions sans
aucun rapport. L'exercice littéraire consiste à aller de l'une à
l'autre en créant une histoire, serait-elle teintée d'absurde ou de
loufoquerie, ce qui est d'ordinaire le cas. Il y a quelque chose de la
performance, une sorte de défi mental, de jonglerie intellectuelle, et,
au delà de l'habileté dont témoigne cet exercice, qui parfois demande
de longues séances de travail, un effort inimaginable, une plongée
vertigineuse dans le vocabulaire. N'est-ce pas aussi le rôle de la
littérature de se risquer dans les méandres des mots, le texte est un
labyrinthe où parfois on cherche le Minotaure. Quand on l'a trouvé, on
doit le tuer, et l'on a gagné.
posté le 03-07-2009 à 17:55:32
Le porte plume de Raymond Roussel.
22h51 - Une histoire de Plume
-
Général
Le porte-plume de Raymond Roussel.
Parmi ses textes
les plus curieux, Roussel (dans La Vue), se plonge dans la
contemplation quasi hypnotique d'une petite vue incluse dans une boule
minuscule sertie dans la manche d'un porte plume. C'est un peu, pour
lui, ce qu'est la madeleine de Proust, une sorte d'amorce pour
l'imaginaire et la sensation.
Le porte-plume en question a une
charge suffisante de suggestion, serait-il sans ornement et d'une
sobriété monastique, pour que l'on s'y arrête. Porter la plume c'est
faire l'oiseau. Le porte-plume serait alors l'envol des mots, le
véhicule d'une pensée allégée de toute lourdeur ou pesanteur
contraignante et superflue. Une plume affûtée, mais aussi
agile et aérienne que l'oiseau dont elle épouse le règne et avec lequel
elle se confond, épousant sa grâce, son pouvoir unique de transcender
les lois de la pesanteur et ira se confondre avec le ciel, se noyant
d'azur comme dans une ivresse qui défie les contraintes habituelles de
l'homme attaché à la terre et à elle destiné.
La Vue, s'est arrêtée
sur un détail de ce porte-plume, et dans la transparence du cristal qui
enserre l'image, aura scruté les échos multiples d'une représentation
qui arrache le scrutateur à la pesanteur de l'instant. Regarder avec
force une image (quelle qu'elle soit) nous transporte. Nous fait voler.
Nous fait l'égal de l'oiseau. Roussel est là voisin du douanier
Rousseau. On y reviendra.
posté le 03-07-2009 à 17:31:29
Van Gogh vu par Artaud.
Placer Van Gogh sous le signe d'Artaud ("Van Gogh le suicidé de la société") c'est moins orienter l'action et la personnalité du peintre que donner le ton de sa démarche et ce par quoi elle se distingue de toutes celles qui lui sont contemporaines et avec lesquelles on est bien obligé, historiquement, de la comparer.
Loin de corriger cette vision, la connaissance de la correspondance renforce ce sentiment d'un être à la dérive parce qu'impropre à jouer le jeu social dans son hypocrisie, ses lâchetés, ses conventions, et parce que son ambition est moins d'atteindre la gloire que la compréhension de ceux avec lesquels il veut partager sa connaissance intime du monde, l'approche de son sens profond.
Il use d'une écriture sobre, simple ( comme l'est son dessin) avec cependant une force expressive, une ténacité qui est celle du prêcheur (qu'il fut). Il n'écrit et ne peint que pour "convaincre" et la folie est le refus des frontières que d'ordinaire on construit autour de soi pour paraître au mieux de soi-même. Il y aurait de l'impudeur dans son comportement, comme c'est souvent le cas chez un saint qui défiant l'opinion affiche sa foi, quitte à s'y perdre.
D'où la totale justesse de la remarque d'Artaud évoquant le suicidé "de la société".
posté le 02-07-2009 à 17:15:37
La revue des revues.
Il est du rôle de librairies attachées à la vie
littéraire, de donner leur chance de diffusion à des revues
confidentielles qui échappent aux réseaux classiques de distribution.
Le Soleil dans la tête, comme ses consoeurs le Minotaure, la Hune, Le
Pont traversé, toutes librairies de la même famille, va entretenir avec
les revues de poésie des relations étroites que scandent des
expositions qui leurs sont consacrées, des signatures des auteurs qui
l'animent, et des confrontations de tous genres qui entretiennent des
rapports de sympathie entre les écrivains et un public qui pour être
plutôt rare n'en est pas moins dynamique et si précieux pour la survie
de la littérature.
Osons donc une "revue de ces revues" sans
prétendre être exhaustif, mais en osant marquer des préférences,
afficher des complicités, énoncer des jugements.
On commencera par
l'une des plus modestes, les plus pauvres sans doute, mais qui attirait
ma sympathie parce qu'elle était tirée sur une petite presse à bras,
pas trop soucieuse de cacher ses origines artisanales. C'était
ALTERNANCES qui nous venait de Caen (41 avenue du 6 juin), animée par
Robert Delahaye, poète lui-même. Il avait, sur ma suggestion, consacré
un numéro spécial à Pierre Albert-Birot, un des mes écrivains fétiches,
et un autre à La Magie de la Plante qui faisait écho aux expositions
Propositions pour un jardin du Soleil dans la tête où l'on retrouvait
les mêmes participants.
Le sommaire en était brillant et surtout
significatif de l'état de la poésie à l'époque : Yvonne Caroutch, Roger
Toulouse, Gaston Puel, Marc Alyn, Jean Igé, Henri Rode, Pierre Garnier,
René Witold, Pierre Hahn, Jean Grosjean, Patrice Cauda, Loys Masson,
Edmond Humeau, Gabriel Paris, Pierre Chabert, Pierre Boujut, Jean
Rousselot, Serge Brindeau, André Malartre, André Miguel, Michel Manoll,
Charles Autrand, Philippe Durand, André Blanchard, Jean Laurent, Jean
l'Anselme, et naturellement Robert Delahaye
posté le 02-07-2009 à 16:38:27
Robert Ganzo, bouquiniste et poète.
Dans
ce souci de toujours aller vers l'esprit du lieu, d'en mieux connaître
l'essence profonde et par conséquent son histoire, doit-on rappeler que
le Soleil dans la tête fut, bien avant que Jean Jacques Pauvert en est
fait le centre névralgique de ses éditions "Palimugre", une bouquinerie
tenue par le poète Robert Ganzo, auteur de quelques rares mais superbes
livres dont Lespugue, Langage, Rivière, Domaine, Orénoque, illustrés
par quelques grands peintres comme Jacques Villon ou Fautrier.
Des
ouvrages de bibliophilie, support d'une langue qui cherche sa
perfection formelle en marge de tout effet de modernité.
Archéologue-amateur (il est l'auteur de plusieurs ouvrages d'ordre
historique) il cisèle le mot dans la tradition instaurée par Mallarmé
et Valéry.
"Tout commence ici. Pas de routes
Mais - tiré d'un os de quel mort ?-
un chant comme premier remords,
s'élève du fond de ces soutes."
posté le 02-07-2009 à 16:24:01
Jean Couy, le lunaire.
Jean Couy une nature lunaire.
André Salmon l'avait
découvert et vanté son travail. Il vivait et travaillait à
Montparnasse, dans un atelier perché de la rue Campagne Première toute
imprégnée de l'histoire de l'art de l'entre deux guerres avec des
figures de légende comme Modigliani. Il collectionnait les petits
trains et l'imagerie de l'enfance. Comme Proust il était fasciné par la
lanterne magique et ne répugnait pas de retrouver, dans ses
compositions, la frontalité tranquille et innocente des images de
l'enfance. Peintre, graveur, il aimait la poésie et la campagne,
confectionnait lui-même ses gravures dans un petit atelier de sa
retraite nivernaise.
"On avait l'impression qu'il cherchait des
traces du Paradis perdu. Alors, d'un crayon aussi fin que précis il
inventait des itinéraires d'herbes et de buissons, de terre fraîche et
de graines fécondées, avec, parfois, comme un clin d'oeil, une
ponctuation musicale". Il avait illustré les poèmes de Jules Laforgue.
Ses oeuvres chez cyx-art.com et postershop. fr.
posté le 02-07-2009 à 16:16:12
Le collège de Pataphysique.
Multiples et de connivence, furent les rapports avec les
éminents membres du collège de pataphysique qui honoraient le Soleil
dans la tête de leur fréquentation aussi assidue que narquoise, venant
vérifier la qualité de la "production" littéraire qui y était proposée.
L'abondance de la littérature surréaliste assurant d'une bonne
direction encore qu'une volonté farouche d'indépendance se risquait
dans des choix parfois paradoxaux. Mention spécial de J.H.Sainmont,
personnage de roman (voir ce qu'en fait Henri Thomas) dont on aimait
les billets d'une écriture aussi minutieuse que délicate ( seul Bellmer
pouvait rivaliser avec lui dans le genre).
On attendait toujours
avec une vive impatience la parution des Cahiers du Collège et son
accompagnement de brochures rares et secrètes. Grâce à elle on
avait pu découvrir Julien Torma. Aujourd'hui il parait que l'on trouve
ces Cahiers à la librairie V a l'Heure, 27, rue Rodier. Heureuse
adresse.
posté le 02-07-2009 à 16:02:14
Jacques Hérold, l'Aigle mademoiselle.
Jacques Hérold l'aigle foudroyé.
Après
avoir donné une illustration à "D'où je viens", édité par PAB (voir
prologue de ce blog, page 1), Jacques Hérold était devenu un visiteur
attentif du Soleil dans la tête et participa furtivement à quelques
expositions collectives. On appréciait grandement ce peintre-poète venu
de Roumanie (il avait conservé un accent rocailleux et sonore) qu'on
allait voir, aux beaux jours, dans son repaire de Lacoste (au
château du marquis de Sade).
Il avait été un illustrateur de
quelques uns des auteurs les plus audacieux comme Georges Bataille ou
Francis Ponge, mais aussi des surréalistes et, tête de pont de cette
navigation en haute mer de la pensée flamboyante : le marquis de Sade.
Il
inventait des figures d'écorchés (ayant lui même écrit de très beaux
textes sur le problème) et tailladait des héros de l'enfer. Admirable
graveur, il faisait sortir de "l'eau forte" des fantômes de derrière
les miroirs. André Breton l'avait chaudement adopté dans son cercle
d'intime en même temps que son ami et compatriote Victor Brauner.
posté le 02-07-2009 à 12:57:11
Ecole de Rochefort un air de campagne.
La cour d'école de la poésie.
Sensible
à l'esprit des lieux on est, au Soleil dans la tête, attentif à toute
entreprise de restitution d'un itinéraire qui souligne ou explique une
oeuvre, et souvent l'illustre. René Guy Cadou a, de surcroît, le mérite
d'apporter une voix (et une voie) nouvelle à la poésie, surtout que
dans les années 5O alors que l'on apprenait la mort prématurée du poète
à Louisefert on recueillait les souvenirs et les témoignages de
tous ceux qui avaient animés l'Ecole de Rochefort ( du nom du village
où Cadou, nommé instituteur fédérait les oeuvres de ses amis Jean
Bouhier, Marcel Béalu, Jean Follain, Lucien Becker, Luc Bérimont,
Michel Manoll, Jean Rousselot).
Cécile Guivarch offfre sur son site Franco Semailles un sobre mais sensible itinéraire René Guy Cadou qui reste vendéen.
Millas
Martin, l'éditeur de bien des jeunes poètes à cette époque là, avait
édité un très précieux recueil autour de cette Ecole de Rochefort qui y
associait aussi l'énergie d'un jeune poète Michel Ragon et l'adhésion
du peintre Roger Toulouse qui restera toujours attaché à l'esprit du
groupe, et à sa mémoire.
posté le 02-07-2009 à 12:43:41
René Rougerie l'éditeur des poètes.
C'est
bien la poésie présente que René Rougerie sauve de l'ignorance et donne
à lire dans des ouvrages traités "à l'ancienne". Il faut lire
l'émouvant ouvrage qu'il a lui-même écrit pour expliquer son parcours
(voir sur google le site René Rougerie). Se situant dans la lignée des
"grands", comme GLM ou José Corti, il accuse le caractère artisanal qui
donne un charme supplémentaire à ses livres. Impossible de retracer
toute l'histoire de cinquante ans d'un activité jalonnée par la
révélation, la réhabilitation ou la sauvegarde d'oeuvres historiques
comme celles de Pierre Albert-Birot, Andrè Suarès, Joe Bousquet
et de contemporains de Jean l'Anselme à Marcel Béalu.
Il
a été aussi l'imprimeur de la revue Sens Plastique (une trentaine de
numéros dans les années 6O) . Dans le merveilleux petit village de
Mortemart il pérennise une "mission" aujourd'hui de survie face à la
déchéance culturelle victime de la mondialisation et de la bourse. Ils
sont quelques uns, artisans, qui se battent pour donner un sens aux
mots, vitaliser des élans souvent juvéniles et se faire les protecteurs
d'un patrimoine littéraire en danger. On en reparlera.
posté le 02-07-2009 à 12:38:35
Bucaille et les cris de la fée.
Max Bucaille le promeneur des rêves.
Rien
en lui, modeste professeur de mathématiques à qui j'avais rendu visite
(je crois avec le poète Jacques Boursault) dans son petit pavillon de
banlieue (à Créteil) ne pouvait laisser supposer l'étonnant
inventeur de rêves qui s'est affirmé dans l'art du collage, un peu dans
le voisinage du Max Ernst de "Rêves d'une petite fille qui voulait
entrer au Carmel".
Bucaille
avait surtout travaillé avec les poètes du groupe de La Main à Plume
qui, pendant l'occupation, a maintenu l'esprit surréaliste dans un
Paris gris et écrasé de honte. Il était le complice amusé et savant
d'un Noël Arnaud dont il sera question un jour, tant a été capitale son
intervention dans la lecture, la diffusion et la reconnaissance
d'écrivains marginaux. Et l'élaboration d'une oeuvre poétique qui
rendait son hommage à Alfred Jarry.
Max
Bucaille invente des images puisées dans les vieux magazines, les
gravures du Magasin Pittoresque, il créé ainsi un monde savoureux et
insolite, étrange et porteur de toutes les dérives imaginaires
possibles.
posté le 02-07-2009 à 12:10:36
La Tour de feu, si bien nommée.
La Tour de feu si bien nommée.
Toute l'équipe de
la Tour de feu ne répugnait pas, ayant quitté les bocages parfumés de
Jarnac, et ses eaux sinueuses, la fréquentation du Soleil dans la tête
où la revue était soigneusement mise en valeur, tant étaient séduisants
ses sommaires, et surtout parce qu'elle affichait une indépendance
d'esprit qui était dans la politique même de la librairie et surtout
parce que la Tour de feu, tout comme le soleil dans la tête, était un
peu le carrefour des esprits, plutôt portée à la polémique mais
soutenue par de vaillants guerriers de l'esprit. Comment ne pas évoquer
Adrian Miatlev, le plus combattant, portant haut et d'insolence sa
verve critique et sa parenté avec des esprits libres comme Antonin
Artaud ( il y aura d'ailleurs un numéro Artaud qui fera couler beaucoup
d'encre) et Gaston Chaissac, le plus étonnant graphomane de cette
génération, poussé par l'isolement dans lequel il s'était astreint.
Hommage à lui avec cette légendaire photographie de Robert Doisneau qui
est bien là dans une famille d'esprit.
A la barre de cette
aventure unique, le tonnelier-poète Pierre Boujut d'ailleurs grand ami
de Gaston Chaissac, affichant, comme lui, la suprématie de la province
sur un Paris trop marqué par des préjugés, des coutumes de clan.
On l'aura bien vu, à partir de la Tour de feu ( tour de guet),
c'est tout un horizon de l'esprit qui se révèle. On aimait bien monter
à son sommet.
posté le 02-07-2009 à 11:27:03
André Laude, notre poète maudit.
André Laude, notre poète maudit.
Il
en fallait un, du moins, à lire la presse qui a signalé sa mort, (en
1995), on croirait qu'elle s'enchante de saluer un homme qui a souffert
et donné sa souffrance à partager à travers la poésie. Elle en tire, il
est vrai, des accents terribles, entre cris et caresse car il y a, chez
André Laude, une sorte de confiance accordée à la nature, au réel
partagé dans l'amour.
Ceux
qui l'ont connu, ont partagé son quotidien, savent qu'il ne cachait pas
sa souffrance, parfois en sculptait son visage et entrait ainsi, encore
vivant, dans la légende. On le croisait au Quotidien de Paris où il
était venu rejoindre une équipe assez volontiers portée à célébrer la
poésie et respecter les poètes. Il en joua, en abusa, et avait du mal à
entrer dans la peau d'un journaliste. Il avait pourtant "une plume"
ardente, bien éloignée des banalités et du conventionnel, témoignant
ainsi qu'il est possible de concilier journalisme et littérature. Il
faut se reporter sur son oeuvre, assez bien clarifiée dans les éditions
de ses poèmes (voir sur google à André Laude). Ceux qui l'ont connu
n'oublieront pas qu'ils ont côtoyé un personnage de légende. Finalement
attendrissant au delà de ses excès.
Le peintre Nitkowski a admirablement traduit cette dualité : sauvagerie et sensualité, du poème d'André Laude
posté le 02-07-2009 à 10:01:51
Varennes au galop.
Varennes au galop.
C'est un des premiers ouvrages d'André Castelot et brillant par le ton, précis dans le détail et ouvrant déjà très largement sur l'aspect jusqu'alors un peu négligé de l'Histoire qu'on appellera la petite parce qu'elle entre dans l'intimité de ceux qui font l'événement et donnent sa particularité à l'époque où ils vivent.
"L'incident" rapporté est bien connu, c'est celui de la fuite de la famille royale du palais des Tuileries, et après une journée folle, son arrestation, dans la petite ville de Lorraine, Varennes qui y a acquit son renom.
Ce ne sont que grincements des ressorts d'une lourde berline, galop des chevaux, une comédie "bourgeoise" parmi les têtes couronnées, entre pathétique et ridicule, et l'épanchement à l'excès des sentiments comme l'époque les aimait. On est dans une comédie dont les décors auraient été dessinés par Greuze avant de l'être par quelque plume plus acérée et noire d'un de ces terribles pamphlétaires qui crachent leur venin sur une reine qui fut arrogante et futile et un roi versatile et peu à même de mener une société qui chavire vers un meilleur destin.
L'Histoire a une nature romanesque qu'il est séduisant d'exploiter, donnant chair et sang à des figures figées d'ordinaire dans la rigueur des chronologies, le développement des thèses et des spéculations arbitraires.
Ce frisson de la vie (de la mort) s'annonce chez Michelet qui donne un rythme passionné à ce qui est, avec lui, une fabuleuse aventure des hommes, une saga furieuse et superbe. On l'a suivi dans l'esprit de l'épopée et pour sa dimension "poétique", mais on y ajoutant les détails, les aspects autrement dérisoires s'ils n'entraînaient pas, dans leur sillage, notre destin collectif. Les miettes du quotidien deviennent aussi importantes que les grandes batailles, les traités entre nations.
posté le 01-07-2009 à 17:04:35
PAB photographie René Char
Pierre André Benoit.
En photographiant René Char
dans son bureau Pierre André Benoit affiche ses préférences, il donne
d'emblée le
signal : son travail éditorial se plaçait sous le signe
indiscutable, incomparable, du poète dont il édite pratiquement tous
les poèmes dans de "minuscules" tirages. René Char lui-même s'en
amusait mais il n'était pas mécontent, quand il nous rendait visite (
sa haute silhouette s'encadrait dans la porte de la librairie tandis
qu'un vent d'hiver courait dans la rue de Vaugirard), de les trouver en
bonne place dans la vitrine. De Pierre André Benoit ( PAB pour les
initiés, que l'on confond parfois avec l'autre PAB : Pierre
Albert-Birot, un autre géant de l'édition artisanale) il sera souvent
question dans ce qui est aussi l'histoire du Soleil dans la tête. Il y
était fidèle, fraternellement accueilli, et son activité éditoriale
traversait souvent celle de la librairie, dans le même jeu de
complicité avec peintres et poètes dont beaucoup étaient des familiers
et furent l'objet de manifestations, signatures, expositions,
rencontres.
Quand une librairie joue le rôle d'un club ?
posté le 01-07-2009 à 16:52:03
Man Ray chez lui, rue Férou.
Man Ray, un voisin de la rue Férou.
A
l'ombre, ou presque, de l'église Saint Sulpice, la rue Férou a des
allures d'impasse d'une ville de province. Une très discrète porte
s'ouvre dans un mur bas sur l'atelier de Man Ray. Je l'ai connu froid,
l'artiste vivant dans la plus grande pauvreté et une quasi solitude. Il
rangeait mélancoliquement ses photographies qui sont devenues,
aujourd'hui, la proie des musées. Sur les murs, dans une demi
obscurité, quelques tableaux. Man Ray avait, toute sa vie, souffert
qu'on les néglige, faisant passer le photographe en première ligne.
-
Je suis un peintre, s'obstinait-il à dire, au restaurant des
Charpentiers, tout proche, où il emmenait ses rares amis. Il m'avait
fait l'honneur d'envisager de me faire un dessin pour un recueil de
poèmes qui devait s'intituler La Chambre haute et qui ne paraîtra
jamais. En revanche, il m'avait donné un beau dessin, d'un trait ferme
et cursif, dédié à la mémoire de René Crevel que je pus utiliser lors
de la publication du numéro de la revue Temps Mêlés consacré à
l'écrivain.
Chez Posterrshop fr. une lithographie ci-contre.
posté le 01-07-2009 à 16:21:48
Alfred Jarry, un voisin.
16h31 - UBU Jarry, un voisin
-
Général
Alfred Jarry au coeur du labyrinthe.
Evoquant
le labyrinthe, je ne pouvais imaginer trouver meilleur Minotaure que le
fameux, farceur, prodigieux, insolite, inquiétant, pathétique,
volubile, savant enfant de Laval (il y est né an 1873). Non qu'il
faille tuer ce Minotaure là, mais s'affronter à lui "pour ne pas mourir
idiot". On le dénichait d'abord dans des trouvailles de vieilles
éditions avant que le Collège de Pataphysique dynamise les recherches
savantes ( et souvent pointilleuses) qui devaient participer à sa
réhabilitation.
Naturellement
le père UBU était dans notre placard, avec les balais (qu'il manipulait
avec une telle vélocité) mais on connaissait mal pour ne pas dire
totalement ses autres oeuvres (nombreuses). Le Soleil dans la tête se
trouvait dans un voisinage relativement proche des hauts lieux de la
virée parisienne de Jarry (rue de l'Echaudée pour le Mercure de France,
rue Cassette pour le logis coincé entre deux étages). On aimait
beaucoup jouer sur les voisinages
qui
entretiennent les bonnes relations, mêmes avec les morts. On
rencontrera ainsi en vol, Apollinaire et Man Ray, Verlaine et Jules
Laforgue.
Jarry,
donc, agitant les oripeaux d'une salubre colère contre la sottise. On
ira lui serrer la main de temps à autres et trinquer au nom de la
terrible fée verte qui a tué Verlaine avant de le jeter dans la légende.
posté le 01-07-2009 à 16:03:12
Benrath dans les nuages.
Allons dans les nuages.
A propos de Boudin qu'il voyait peindre sur les plages normandes Baudelaire saluait les merveilleux nuages.
Le
prenant aux mots, toute une génération de peintres, dans les années 60,
se livrent à une véritable investigation du ciel, ouvrant la toile aux
élans d'une main légère qui écrit les nuages, suggère la légèreté de
l'air et jusqu'à son parfum. Ce fut un formidable élan dont on suivait
de près les étapes à travers les oeuvres de visiteurs amis comme
Benrath, Duvillier, René Laubiès, Nasser Assar, Graziani, qui avaient,
pour défenseur auprès de l'opinion, le discret, subtil et énigmatique
Julien Alvard. Ca et là, à propos d'une exposition, autour de la revue
Sens Plastique qui prend leur défense et s'attache à leurs découvertes,
les peintres baptisés "nuagistes" vont influencer de plus jeunes
encore, des débutants, avec la perte inévitable en chemin de promesses
non tenues, de carrières brisées. Mais c'est une belle et tumultueuse
histoire. On en trouvera ici, des échos. Aujourd'hui tout cela est
passé dans l'Histoire, entre les mains des théoriciens. Pourquoi pas
?
posté le 01-07-2009 à 16:01:03
Benrath dans les nuages.
Benrath, le nom d'un château.
Un
jour, faisant du tourisme en Allemagne, la critique Julien Alvard
pilote un jeune peintre portant nom plutôt banal, hors il fallait lui
choisir un "nom de guerre". Passe un autobus portant sur son flanc le
nom de Benrath, haut lieu du tourisme local.
Ce sera ton nom déclare Julien Alvard et Benrath est né. Il est mort en Avril dernier, le nuagisme perdant l'un de ses fleurons.
C'était
un être fluet et délicat, aimant fouiller parmi les livres, épluchant
les poèmes pour y trouver des titres à ses tableaux ; très attiré par
le romantisme allemand il allait vers les horizons les plus angoissés,
se faisant chantre de crépuscules d'une ample et superbe théâtralité.
La peinture peut être littéraire sans rien perdre de ses lois et, au
contraire, trouver un pouvoir suggestif et prenant au delà des formes
énumérés, les ayant refusées et allant vers l'indicible, le défi du
voir sur le senti, du définitif sur l'allusif, le furtif, le fuyant.
Benrath est au coeur d'une peinture qui se cherche de nouveaux espaces,
une nouvelle définition, et cela d'autant plus précieuse que l'heure
est au renoncement de la peinture pour le simple choix, l'agression de
l'objet brut, une réalité contraignante. Il va entraîner avec lui toute
la génération des nuagistes. On y reviendra.
posté le 01-07-2009 à 15:56:57
André Blavier, un ludion belge.
André Blavier, le ludion belge.
Frappait d'abord
son allure, celle d'un ludion malicieux, sortant d'une boite et
jubilant, avec des temps de réflexion (alors il tirait sur sa pipe et
lançait un mot).
Il m'avait largement ouvert les pages de sa revue
Temps Mêlés ce qui apporta quelque baume au coeur du troufion égaré
dans la guerre d'Algérie. On avait, au Soleil dans la tête,
d'excellents et constants rapports avec le groupe agité des poètes
belges. C'est une tradition, la Belgique n'en déplaise à Baudelaire,
est un pays favorable à l'essor de la poésie (et de la peinture). On en
prenait le pouls, on en partageait l'enthousiasme et pratiquement tous
les acteurs de cette fabuleuse aventure, franchirent la porte de la
librairie.
Restons en à Blavier, l'un des plus singuliers. Cet
étonnant bibliothécaire de Verviers vivait parmi les papiers, les
livres, ce désordre sympathique du chercheur passionné et il retrouvait
au Soleil dans la tête cette "odeur du livre", comme on parle de
"l'odeur de la femme". C'était un sensuel du livre, un fou du papier et
des fous des mots, d'où son prodigieux travail sur les fous littéraires
qui l'assurent de l'éternité des amoureux des arts marginaux.
Se rapporter aux nombreux et excellents sites de référence.
posté le 01-07-2009 à 14:41:09
Les Passages parisiens (Bernard Delvaille).
Les passages parisiens
Bernard
Delvaille, piéton inspiré de Paris avait accompagné d'un texte de
circonstance (et parfois agréablement auobiographique) les
photographies de Robert Doisneau autre piéton de qualité. Cet amour des
passages poursuit la littérature depuis leur création dans la première
moitié du XIX° siècle. Gérard de Nerval les aura connus dans leur
pleine gloire encore qu'il n'en fasse pas une mention particulière dans
ses textes, quand Aragon et les surréalistes en font un éloge appuyé et
bien ratifié par l'excellence des textes qui les évoquent. Pourtant le
Paris des passages est bien celui de Nerval (celui de Louis Philippe)
et celui du photographe Atget qui n'a pas manqué de les photographier
et de les inscrire dans son répertoire d'une ville en mutation, et
pourtant, ici et là, figée dans la mémoire de son lourd et riche passé.
Lieu
de retraite autant que de déambulation, le passage est surtout un
espace d'une lumière très particulière :"ce faux jour qui naît du
conflit des lampes aux vitrines et de la clarté blafarde du plafond
permet toutes les erreurs et toutes les interprétations.." dira Aragon.
"Il reste seulement dans ces passages un peu de poésie, la poésie
de la verrière et de la vitrine, la poésie d'une serre dont l'ornement
serait fait non d'orchidées, de floxinias ou de cinéraires, mais de
jouets d'enfants, d'instruments de musique et de toutes sortes de
brillants objets qui vont de la carte postale à gratiné miroitant aux
séries vivement colorées de nos timbres coloniaux." On n'est pas loin
de Gérard de Nerval.
posté le 30-06-2009 à 16:51:51
Bernard Aubertin maître du feu.
Bernard Aubertin.
Il est de la génération de
Bernard Rancillac, et leurs débuts (dans les années 50) les faisaient
frères de combat pour un art nouveau. Rancillac va poursuivre
l'aventure de la peinture, Bernard Aubertin la fuir, après avoir
expérimenté le monochrome. Au "bleu" de Yves Klein il oppose le rouge
le plus intempestif. Modulé sur la surface, il est tout à la fois
l'émotion de peindre et la suggestion d'espaces d'aventure. Lorsqu'il
quitte la peinture de chevalet c'est pour aborder le feu. En tant
que matière, et conduit à d'innombrables variations. Imaginons une tour
d'allumettes et le feu qui court de l'une à l'autre. Un jeu. Une fête
de l'esprit. Aubertin en a, et quand il parle d'art c'est avec
l'autorité d'un théoricien et la verve d'un conteur. On le suit dans
ses expériences spatiales, ses créations d'événements d'une joyeuse et
bravardise invention. Oui la peinture en crise demande de nouveaux
moyens d'expression. Aubertin s'y employant avec ténacité. A suivre.
posté le 30-06-2009 à 16:07:32
Le Manifeste du surréalisme de Breton, un livre culte.
Livre culte.
Manifeste du surréalisme par André Breton.
C'est
un volume à la couverture saumon publié sous le sigle des éditions Kra,
56, rue Rodier, Paris dans la collection "Les documentaires". Le
catalogue des éditions Kra est franchement orienté du côté des
surréalistes et de ses épigones. On y trouve des textes de Philippe
Soupault, Robert Desnos, Benjamin Péret, Michel Leiris,
Ribemont-Dessaignes, soit la frange active du mouvement surréaliste
dans les années 2O-3O, le livre étant imprimé en 1929.
Texte
capital, fondateur, de celui qui se pose comme chef du groupe, leader
et dont l'action sera désormais confondue avec un souci de réguler
l'élan général, de donner corps à une pensée longuement éprouvée par
une vie quasiment collective à travers les réunions de café, les
"jeux", les enquêtes, une vigilance permanente et pointilleuse qui
entraîne un jeu d'adhésions et d'exclusions dont le Manifeste fait
état, portant jugement sur les acteurs du mouvement autant qu'il se
donne pour tâche d'en définir les lignes essentielles et d'en cerner
les normes.
Sorte de bible du mouvement à partir de laquelle vont se
confronter des personnalités parfois contradictoires, se souder des
enthousiasmes encore juvéniles et des ambitions poétiques qui porteront
toutes la marque indélébile de celui qui est le "pape". D'où le
caractère quasi religieux qui entoure la vie du groupe surréaliste et
son aspect passionné, radicalisant les rapports qui ne sont plus ceux
de simples écrivains mais les missionnaires d'une nouvelle foi.
Le Manifeste est suivi de Poisson soluble. Il est orné d'un frontispice de Max Ernst.
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