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lettres de la campagne

posté le 14-01-2009 à 12:16:15

L'Eté absolu.

La poésie à la guerre.

L'oeuvre de Guillaume Apollinaire est fortement marquée par l'épreuve de la guerre (qui d'une certaine manière précipite la mort du poète). Pratiquement toutes les générations jusque dans les années 80 passèrent par cette case où se conditionne l'homme dans la folie meurtrière, l'ennui, la bêtise et une fausse fraternité d'hommes.
La guerre d'Algérie a été celle de ma génération. Fausse, complexe, contestée, pleine d'hypocrisie et de sous-entendus. Fraterniser avec le colon c'était cautionner une action que l'on désapprouvait , regarder l'arabe avec  sympathie c'était trahir et dans bien des cas s'attirer l'inimitié des cadres armés.
Nous fumes pourtant nombreux, ayant pour mission (ou vocation) d'écrire, de s'engager dans un refus du jeu proposé, et donner le ton de la contestation.
Il y aura dans les années 1955-60 de nombreuses publications et revues réunissant des textes vengeurs, des poèmes, des témoignages donnant de cette sale guerre une image moins convenue et rejetée par le pouvoir.
"Action poétique"  fut de celles qui réunirent bien des poètes engagés dans cette sereine contestation." Nuit de Garde" fut une petite contribution à cette  prise de conscience. Un roman qui ne fut jamais achevé devait amplifier le propos, lui donner corps, sous le prétexte d'une  histoire d'amour ( naturellement entre un appelé du contingent et une jeune arabe). Il ne verra le jour. Enfoui dans l'oubli. Il n'existe que la couverture qui avait été imaginée par le peintre Biaussat. C'était : "L'Eté absolu". En fait un hymne au soleil.

 


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1. Saintsonge  le 24-12-2009 à 17:59:54  (site)

Haineuse guerre
éditeur Henneuse

Ainsi ai-je confirmation de mon interrogation au sujet du masque ôté de Sorel, et des trois initiales..

 
 
 
posté le 13-01-2009 à 16:34:29

Retour à Forneret.

Comme quelques autres, plus ou  moins célèbres (mais la chose importe peu), plus ou moins reconnus (c'est plus grave), traversent ces pages, rebondissent de coin en coin dans les recoins de ce cheminement hasardeux, capricieux, qui se veut familier, chaleureux, mais aime aussi s'appuyer sur des références, visiter des territoires de la création, rencontrer des âmes ardentes. Revoici donc Xavier Forneret, découvert grâce à André Breton (ce lumineux découvreur), il y a bien longtemps, et fréquenté avec assiduité, tant l'homme (plus que l'oeuvre peut-être) est attachant dans son désarroi, sa déveine, ses foucades et sa splendide indifférence à la médiocrité qui l'entoure
On avait composé un précieux petit fascicule de ses merveilleuses sentences, décoré par des figurines de Charlotte Reine, c'était sur la presse à bras du Relais, à la Celle sous Montmirail, cet ultime village qui s'est niché au fond de la petite vallée du Petit Morin, au sud de l'Aisne. La verdure y avait ce charme des printemps qui s'attardent comme une jeune fille se fait mal à l'idée de devenir une femme. Après Forneret on s'était essayé à Dominique Fernandez, à Pierre-Albert Birot ( mon poète fétiche) à Claude Bonnefoy qui fut,  lui aussi, un dénicheur de talent.


 


 
 
posté le 13-01-2009 à 15:26:19

Une image du labyrinthe.

Un blog, plus qu'un livre contenu dans son unité matérielle, permet des digressions, des avancées dans l'inconnu, d'autant que la consultation de google lui offre les multiples sollicitations des découvertes que l'on peut y faire. De même que l'écriture est changée (métamorphosée) par l'usage de l'informatique, la construction d'un texte trouve sa liberté, et vient alors à l'esprit l'image fortifiée du labyrinthe. Toute l'excroissance verbale qui s'appuie sur le souvenir du Soleil dans la tête (première mouture du blog) se diversifie, se développe, s'amplifie dans une profusion de directions, de cheminements qui épousent ceux d'un labyrinthe. Peut-être trouvera-t-on un Minotaure au terme de la course (mais y-a-t-il un terme ?) et sans doute l'énergie voulue pour le construire, le conduire, le reconduire, se trouve-t-elle dans l'espoir de mieux connaître celui qui s'agite ainsi au cours des mots, dans leur foisonnement, leur émergence spontanée, leurs suggestions, leur tyrannie. Conduire un chemin d'écriture c'est sans doute se chercher.


 


 
 
posté le 13-01-2009 à 11:30:27

La saison du Minotaure.

La revue "Le Minotaure" fait partie de ces nombreuses publications créées ou investies par le Surréalisme qui y trouve le terrain le mieux adapté à sa démarche polarisée surtout par la littérature et la peinture ( il y aura le cinématographe, avec Bunuel et les expériences de la période héroïque, avec Man Ray).
Elle se fait luxueuse pour séduire un public de plus en plus difficile et gagné par l'avant-garde à condition qu'elle se pare des costumes seyants qui sont aussi ceux de la presse de la mode, du luxe, qui va largement puisé dans l'arsenal du surréalisme pour donner un ton original à une production autrement codifiée, sectaire et figée dans la bienséance.
Albert Skira et Tériade se mettent à la tâche bien que le climat ambiant ne soit guère favorable. Montée significative des totalitarismes après la crise de 1929 (sans doute liée à elle) et autour du concept de la revue elle-même désaccord profond de ceux devaient en prendre la direction ( Georges Bataille de André Breton). Pourtant, grâce à l'enthousiasme et la ténacité de Skira (qui est bien conscient qu'il est impossible d'isoler l'art de son pendant naturel : la poéie), le projet prend corps. Et naît le Minotaure. La couverture initiale sera conçue par Picasso qui est là en terrain familier. Peu à peu s'agrègent autour de la figure mythologique André Masson, Miro, Dali, Max Ernst, Man Ray, Marcel Duchamp et Magritte qui invente une scénographie non dénuée d'humour (à son habitude).
Le thème du Minotaure est central tant il contient d'éléments propres à dynamiser (voire fertiliser) l'élan poétique qui jaillit d'une société en profond bouleversement, crises diverses et passions enfin exprimables, l'avant garde littéraire ayant bousculé les barrières de la bienséance. Les ancêtres revendiqués en apportent la preuve. Ce seront Sade, Lautréamont, Jarry, Rimbaud, des faiseurs de modernité.

 


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1. Saintsonge  le 24-12-2009 à 18:03:33  (site)

Sacrée revue
Revue des sacrés

 
 
 
posté le 10-01-2009 à 23:05:22

Un cadre de rêverie.

Comme Jean Jacques Rousseau rêvait en se promenant à Ermenonville, tout homme qui entend maîtriser les mots, trouve une source féconde en cheminant parmi les ruines. Elles sont, tout à la fois le témoignage de la grandeur humaine et de sa fragilité. Elles donnent, à ceux qui s'en imprègnent, une dimension philosophique. Une philosophie douce et à la mesure de la sensibilité qui est le meilleurs moyen d'aborder les vastes problèmes dont elle veut se prévaloir. On chemine parmi les ruines comme en sa mémoire, et surtout en celle d'une culture, d'un passé qui nous habite et qu'elle illustre à sa manière. Nonchalante et mélancolique. Suivons Saint Just dans son initiation à la vie sociale. Elle passe par ce voisinage fertilisant, et l'amour qui trouve, dans l'amour des ruines, un de ses cadres les plus significatifs.


 


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1. ribeirao  le 10-01-2009 à 23:16:25  (site)

ton blog me plait beaucoup! merci pour ces textes...

 
 
 
posté le 10-01-2009 à 15:47:02

Saint Just, le démon de la pureté.

Saint Just, comme Rimbaud, offre cette figure d'ange derrière laquelle vibrent tous les orages. Ceux d'une âme ardente, d'une fougue suicidaire, d'une ambition qui les écarte de l'ordinaire, les fait uniques. Héros. Figures de légende.
Et plus encore que Rimbaud, s'enfonçant dans l'égoïsme d'une vie clouée au sol par ses contraintes, Saint Just s'engouffre dans les remous de l'Histoire pour donner la pleine mesure de son altière ambition : refaire le monde.
Rimbaud a bouleversé le verbe, conduit la poésie à ses extrêmes limites, Saint Just a ouvert notre conscience à un monde possible mais qui exige ses martyrs, entraîne ses risques, et la purification de la société passe par le sang donné pour y parvenir.
Plus que jamais, en  une époque qui prend conscience de ses tares, comptabilise ses échecs et secoue, comme après un mauvais rêve, sa tête pouilleuse en avouant sa décadence, un Saint Just (qui porte si bien son nom ! )prend rang parmi les prophètes. Mais n'est-il pas, lui-même, victime de ses propres chimères ?
Il faut, pour le découvrir dans l'intimité, se promener dans ces paysages souriants, riches et variés entre Blérancourt et Coucy le Château et s'abandonner au charme des ruines de celui-ci. Que d'émouvantes pages d'un Saint Just amoureux dans l'exploration d'une enceinte qui fut guerrière, devenu champ de rêverie propre à l'éclosion des amours adolescentes.
Il n'y a pas de meilleur cadre pour rêver qu'une ruine.

 


 
 
posté le 10-01-2009 à 11:56:30

Voyage autour de la chambre.

Le lieu de l'écriture s'organise à partir d'un mode de vie. Celui qui voyage s'accommodera d'une chambre d'hôtel, campeur, explorateur, il sera en adhésion étroite avec la nature (le ciel est son toit), et la légende veut que les romancières anglaises affectionnent l'atmosphère tranquille de leur cuisine. L'écrivain officiel aura son "bureau", lieu sacré, interdit aux curieux, où s'élabore la construction d'une oeuvre hautaine et déjà prête pour les honneurs académiques.
Xavier de Maistre avait, au XIX° siècle, écrit un "Voyage autour de ma chambre",   le lieu de l'intimité (du quotidien) devenant matière à écriture. La diversité des espaces choisi dit bien celle des conceptions que l'on a de l'écriture.
C'est à la mesure des objets qui l'ornent (y trouvent leur place) que l'on peut mesurer et mieux aborder l'oeuvre écrite qui en sortira. C'est le "laboratoire central" qu'invoquait Max Jacob qui ne connaîtra que des lieux modestes, proches de la cellule du moine (il en avait l'aspect). Comme l'atelier du peintre (qui en dit long sur lui) l'espace de l'écriture est un miroir de l'oeuvre à moins qu'il n'en soit la matière, dans un jeu de va-et-vient, de réciprocité qui reste fascinant. L'usage de l'ordinateur le rend plus fluide, hasardeux (on peut écrire n'importe où et même dans les transports en commun). L'écriture devient un long voyage en dialogue avec la réalité en mouvement.

 


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1. Saintsonge  le 24-12-2009 à 17:24:06  (site)

S'il s'agit de la vôtre, elle est fort agréable, elle dénote l'emblème de tous les "souvenirs" de votre blog, ce côté arpenteur des lieux visités (cadres de photos) et d'illustres rencontres (par l'amoncellement de vos livres), le bois des meubles en relatant la douceur du temps d'un repos méritoire ; c'est le lieu de la matrice, en fait, la chambre, où l'écrivain rejoint l'idée de "sa mère", du ventre de sa mère où il aimerait y retourner, ce qu'il pratique, par les remous d'une écriture ; mienne chambre, je l'ai nommée : chambre-océan, flux et reflux, ressacs et mascarets, tempêtes y sont (re)vécus...

 
 
 
posté le 09-01-2009 à 12:11:46

Olivier Brice : le roi se meurt.

C'était du temps de ce qu'on avait baptisé " le complexe de Pompéi" (éditions Horay). Une réflexion sur la mémoire, l'espace de la mort, les ruines, l'art comme quête du passé. Le panorama qui en avait été fait allait d'Arman (les accumulations, les destructions) aux Poirier (maquettes de villes détruites, au Centre Pompidou), en passant par Vostell, Le Gac, Waydelich, et où circulait l'oeuvre foisonnante d'Olivier Brice aujourd'hui bien négligée et presque oubliée.
Il reconstituait une sorte de fantôme de musée avec des copies de marbres antiques (empruntés aux collections du Louvre) voilés, des images de catastrophes, un univers de désolation. Une oeuvre pleine d'emphase lyrique qui se serait bien prêtée au décor de théâtre si une mort prématurée n'avait stoppé net ses multiples projets.
Il ne manque plus à ses compositions hautaines et désolées que le verbe haut du théâtre antique, quelque mélopée clamant les fastes de règnes disparus.

 


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1. Saintsonge  le 24-12-2009 à 17:35:16  (site)

Ainsi donc vous seriez J-J L.
par ce "roi Julien", mort, Sorel,
en quelque stendhal ressuscité
par vos pages de blog bien inspiré(es) ?

 
 
 
posté le 09-01-2009 à 11:56:39

Les grandes enjambées de Lautréamont.

Kurt Seligmann participe marginalement à l'aventure surréaliste, mais suivra son chemin propre qui le conduit vers l'ésotérisme. Il est de ceux (avec Masson, Miro, Brauner, Dali) qui illustrent, pour Guy Levis Mano, l'édition d'une exceptionnelle qualité des Chants de Maldoror. Et sans doute, plus que tout autre, il sait trouver le ton, sinon le style, pour donner la meilleure idée de la fougue folle du texte, l'emportement verbal qu'il fait passer dans le dessin, d'un baroquisme inouï.
Un dessin échevelé, arrogant, avec un rien de panache désespéré.

 


 
 
posté le 08-01-2009 à 14:46:07

Le cercle des poètes disparus.

Rimbaud qui venait de faire une entrée littéraire marquée par le scandale, la provocation, vint seul poser pour le portrait de groupe qu'avait entrepris Fantin Latour dans son atelier du 8 de la rue des Beaux Arts. En dehors de Verlaine qui vivait alors sa passion désordonnée pour le poète venu de Charleville, les autres se liguent contre ce couple infernal et viennent poser ensemble, mais à part, pour mieux marquer leur solidarité. Il y a là Léon Valade, haut fonctionnaire (il traduit Henri Heine en collaboration avec Albert Mérat) ; Edmond d'Hervilly  dessinateur aux Chemins de fer puis dans la presse,  qui aborde de front poésie et romans ("Mesdames les parisiennes", "Les Parisiens bizarres") ; Camille Pelletan, archiviste-paléographe, pratique le journalisme rejoint Clemenceau à "La Justice" ; Elzear Bonnier, avocat, ami des Parnassiens, un des piliers du groupe des "Vilains Bonshommes" ; Emile Blémont, avocat, journaliste et poète à ses heures. Il possède le manuscrit des "Voyelles" de Rimbaud mais choqué par l'attitude de ce dernier prend ses distances ; Jean Aicard, s'est fait connaître par des ouvrages d'un ton délicat et familier : " Jeunes croyances",  "Poèmes de Provence", "Le livre d'Heure de l'amour", auteur également de pièces de théâtre qui connaissent un certain succès : "Pygmalion", "Maurin des Maures".
 Auteurs distingués dans ces années "fin de siècle", ils sont tombés dans l'oubli. Ils servent ici, mais par un phénomène qui n'était pas prévu, de "faire valoir" au couple Verlaine-Rimbaud, isolés dans leur dialogue de passion et de génie encore méconnu.

 


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1. Saintsonge  le 24-12-2009 à 17:43:34  (site)

Eh oui, bien sûr, le côté "poli" de la face cachée Rimbaldienne, la main sous le menton, traduisant son message subliminal :
- je vous hais (bien eu) !
(je vous ai bien mené en bateau "ivre", n'est-il pas, vieux monde parisien ?)

 
 
 
posté le 07-01-2009 à 14:33:07

La guinguette d'Arget.

Piéton d'un Paris menacé par la "modernité" incarnée par les grands travaux d'Haussman, Atget, tel un peintre, va sur le motif et enregistre des lambeaux de cette réalité qui participe étroitement à la vie quotidienne. Lieux de travail, de loisirs, de plaisir. Il retient ces petits riens qui font du réel une mine extraordinaire de rêverie. Tout cliché qu'il fixe avec une patiente d'enthomologiste est le tremplin d'une extraordinaire méditation sur la condition humaine. Il se croit (se veut) objectif, il déclenche une formidable lecture mémorielle où chacun recompose son monde, croyant l'avoir vécu à ses côtés. N'est-ce pas le comble d'ainsi créer un  monde qui devient le notre. Ce n'est pourtant que celui de son temps, de cette fin de siècle qui est celui de tous les bouleversements Le voici ciblant la solitude absolue que représente un lieu de plaisir quand celui-ci s'en est allé, sorte de scène vide dont les personnages ont suivis leur destin qui est ailleurs. Van Gogh, maître en la matière a repris le même thème (La guinguette, musée d'Orsay) .

 


 
 
posté le 05-01-2009 à 11:15:21

Lautréamont et le roman noir.

LAUTRÉAMONT.
L'héritage des "romans terrifiants".
A la suite des histoires frénétiques de l'Angleterre du XVIII° siècle, il y aura le marquis de Sade qui en reprend les recettes en forçant le trait des déviances sexuelles qui accompagnent des récits frôlant la mort, la souffrance, l'horreur et l'angoisse de l'inconnu, (voir par exemple Les 120 journées de Sodome). L'appel au sexe est moins fait pour donner du sel au récit que pour souligner une volonté de provoquer, de solliciter l'attention du lecteur, le conduisant vers une leçon philosophique qui fait son oeuvre bien plus importante qu'une simple débauche sexuelle et sa complaisante illustration. Lautréamont peut revendiquer cet héritage sinon que la vision sexuelle chez lui n'est pas placée sous le signe de la recherche du plaisir mais dans une agression excessive et forcenée du corps. Il est infiniment plus scandaleux et dérangeant que Sade, et ses excès et ses images outrancières infiniment plus fortes et inventées dans un raffinement de l'écriture, une frénésie vertigineuse. Avec, comme chez Sade, une manie de précision mathématique. Ne venait-il pas à Paris pour poursuivre des études avancées dans le domaine scientifique. L'amour des mathématiques l'a conduit à donner à ses textes, jusque dans leur débordement de vocabulaire, une rigueur inquiétante.

 


 
 
posté le 04-01-2009 à 15:40:35

Lautréamont piéton de Paris.

Comme tout apprenti écrivain Isidore Ducasse vient à Paris vers 1867.
C'est celui de la fièvre intellectuelle des Grands Boulevards, entre cafés et théâtres, sièges des journaux, et le Madeleine-Bastille qui cahote sur le macadam. Isidore Ducasse s'installe d'abord à l'hôtel 23, rue Notre Dame des Victoires. Le voilà aux marges du quartier qu'il va habiter. Ce sera au  32  de la rue du Faubourg Montmartre, face à l'entrée de ce Passage Verdeau où il aura son éditeur puis au 7 de la même rue, où il meurt le 24 novembre 1870 "dans un Paris affamé et affligé".
Le tracé des panoramas joue un rôle important dans sa vie quotidienne, il entretient ces rapports avec une réalité qu'il fait souvent basculer dans le rêve. Par nature, le "passage" parisien est un monde clos, insolite, mystérieux, tenant de l'aquarium et de la serre, retenant dans son intimité des commerces insolites, des lieux de perdition, des boutiques tenant de l'inutile, mais chargées de symboles. On pénètre dans le passage sous un porche qui affiche son identité, comme dans les poèmes de Dante dont Isidore Ducasse reprendra le principe :  toi qui franchit ce seuil, tu pénètres dans un espace dans lequel on t'abandonne à ton sort.
Pourtant l'aventure de Maldoror dépasse les frontières et s'empare de la place Vendôme, et se prolonge avec l'affolante aventure de Mervyn jusqu'au dôme du Panthéon. 


 


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1. Saintsonge  le 24-12-2009 à 16:48:30  (site)

Un 32, contour de la gare familial fut mon côté "Ducasse"... J'y élaborai des tas de plans de catacombes...

 
 
 
posté le 04-01-2009 à 12:57:08

Lautréamont le vampire

La femme n'a pas la part belle dans Les Chants de Maldoror. Et l'image de la cruauté qui en fait la trame, est endossée par l'homme dans sa désolation et comme une arme.
On a pu noter qu'Isidore Ducasse dans sa fureur de lecture s'est approché des "romans terrifiants", cette production littéraire anglaise du XVIII° siècle où domine Ann Radlciffe, qu'il n'a pourtant pas épargné. Elle est, dans Les Poésies, le "spectre toqué". Pourtant Ducasse est friand de cette prose bavarde et imagée qui met en scène l'horreur distillée avec une science exacte des effets d'épouvante.
On lui trouvera des liens encore plus étroits avec Mathurin (le compère des ténèbres), auteur de Melmoth, plusieurs fois traduit en France, en particulier par Marie de Fos, en 1867,  chez l'éditeur Lacroix à qui il confiera le soin de publier les Chants de Maldoror (qui, en fait, paraîtront en Belgique, au lendemain de sa mort, chez l'associé de Lacroix : Verboeckhoven) et dont le boutique se trouvait à l'angle du Boulevard Montmartre et de la rue Vivienne, dans le périmêtre étroit dans lequel va se dérouler la vie parisienne de Ducasse.
Des scènes de vampirisme sont dans la logique des Chants de Maldoror. (Chant I°) d'une force terrible et provocatrice. Les commentateurs de Lautréamont mettent sur le compte de son amour blessé pour Georges Dazet, connu dans sa scolarité, l'énergie dévastatrice des Chants.  Dazet devenu, dans une version ultime : " le poulpe au regard de soie, le rhinolophe les quatre pattes-nageoires de l'ours marin de l'océan Boréal, le crapaud, monarque des étangs et des marécages, l'acarus sarcopte" ,car on entre là dans l'étrange bestiaire de Ducasse, composé à partir de  notations scientifiques outrées par la verve langagière.


 


 
 
posté le 02-01-2009 à 15:27:36

Picabia plus intime.

Ce n'est qu'un dessin. La méthode la plus modeste d'expression, celle qui adhère le plus à l'instant, à la forme (l'idée) que l'on veut retenir. Quand il joue l'audace dans sa peinture, expérimente son devenir (sans le détruire, comme le fait son ami Marcel Duchamp), il sait, dans le dessin, s'attarder à des références, amorçant son oeuvre sous le signe de l'Impressionnisme et ici de Toulouse-Lautrec dont il retrouve le trait "électrique" et une sorte d'humour et d'insolence qui l'armeront pour s'engager dans l'aventure du dadaïsme où il est aux premières lignes.
Ce dessin (sans titre, et lequel lui donner, figurant un être hybride, ni homme, ni femme et tenant des deux) m'accompagne dans mes pérégrinations, se noie dans le désordre de livres qu'il voisine si bien tant l'oeuvre de Picabia participe finalement de la littérature et souvent s'en fit la complice.
Homme de mots, jouant d'eux, les provoquant pour tirer d'eux une sève nouvelle, une force vierge propre à nous bousculer, nous révéler le monde sous un jour différent, Picabia se risque à la poésie et son dessin devient celui d'un poète, dans la marge des mots ou pour les accompagner, en souligner la verve, une saveur très particulière qui en fait tout le prix.

 


 
 
posté le 02-01-2009 à 15:07:05

Gabrielle Buffet-Picabia en mémoire.

Trouble comme le souvenir. L'image est arrachée à un ouvrage de Gabrielle Buffet-Picabia, qu'elle m'avait offert lors de ma visite dans son atelier de la rue Chateaubriand (?). "Aires abstraites", ce qui était une manière de souligner son appartenance aux mouvements d'avant-garde des années 1910-1914 alors que se créé une véritable révolution des idées et des formes débouchant sur l'abstraction. On y rencontre tous les artisans de cette aventure qui va instaurer un tout nouveau regard. Une aventure qui ne pouvait qu'être patronnée par le bon Guillaume (Guillaume Apollinaire) leur ami (comme il le fut de Sonia et Robert Delaunay chez lesquels il logera, rue de Savoie dans le quartier de Saint Germain des Près). Il en résultera un livre d'A    pollinaire sur "Les Peintres cubistes" cette étape indispensable entre la peinture reçue en héritage et l'abstraction qui en découle tout naturellement, grâce à des artistes comme les Delaunay et Picabia. C'est à partir d'Apollinaire qu'il se créé une véritable et riche  complicité entre peintres et poètes.

 


 
 
posté le 02-01-2009 à 14:46:21

Le rire de Bryen.

Le rire de Bryen.

On le repérait de loin, rien qu'à son rire. En cascade,  tonitruant, sarcastique, Inquiétant. Il est du rire ce qu'on en donne à entendre. On s'y profile, s'y définie aussi. Bryen était petit, fragile et qu'on aurait d'un simple geste mis à terre. Ce n'était pas David, il n'y avait pas de Goliath à vaincre, mais celui dans la classe qui est le perturbateur. Il perturbera la peinture et lui donnera la force et la forme de son rire. C'était, dans les années 45-50, alors que Wols donnait les derniers feux de son lyrisme douloureux, et que la voix d'Antonin Artaud dominait la génération "montante", Bryen fédère tous ceux qui, commettent le crime de l'es-peinture réaliste. Ils cassent l'image, pensent que la peinture peut vivre de sa seule énergie et de son épanchement sans modèle, Il fallait le voir peindre avec jubilation.  C'était une sorte de danse devant la toile, pinceau pointé comme l'épée dans le duel. Et tout partait en giclures, taches et ligne affolées, constituant un territoire qui ne devait à rien de convenu, sinon le risque de se répéter, ce à quoi Bryen n'échappe pas toujours. Il peignait moins le monde ambiant, et même l'idée que l'on s'en fait, mais sa propre énergie, ses humeurs. Cela suffit-il. L'Histoire de l'art, et la place qu'elle lui donnera nous le dira.

 


 
 
posté le 02-01-2009 à 14:26:49

Camille Bryen, le diable dada.

Bryen le diable dada.

Dans l'effervescence maintenue à Saint Germain des Près par le couple Sartre-Beauvoir, Camille Bryen prolongeait l'esprit dada des années 20. Il venait de Nantes (le pays de Jacques Vaché, l'un des précurseurs du surréalisme), il avait musardé dans les zones de l'avant-garde qui recueillait à la fois l'héritage de Duchamp et la force poétique générée par les marginaux. Il s'intéresse à toute les formes d'expression. On le voit "oublier" dans la forêt des objets insolites. On est là dans l'esprit de l'errance inspirée et la quête du mystère. Il s'en prend à la lettre, veut lui arracher une nouvelle signification, il créé des alphabets nouveaux, grâce à l'utilisation de verres cannelés, aborde le collage. Et tel qu'il se voit se refait une tête à donner le tournis, celui qui le prenait quand, dans la rue, il riait de tout et voyait ce que personne d'autre voyait dans les choses. Ses dessous, la malice qui y était tapie ; c'était un merveilleux compagnon de route.

 


 
 
posté le 31-12-2008 à 11:04:52

Aragon aux Buttes Chaumont.

Le paysan de Paris aux Buttes Chaumont.

Le surréalisme a révélé des lieux chargés de mystère, d'insolite, préférés à ceux que le touriste fréquente avec des alibis culturels. L'errance est privilégiée, au détriment du parcours fléché. On se donne à l'improvisation, au hasard, aux rencontres illuminantes (selon la belle expression d'André Breton).
En s'en tenant au territoire parisien, il découvre et charge de poésie des lieux jusqu'alors négligés. Parmi eux : les Buttes Chaumons. Une création du Second Empire voulue par Napoléon III, féru de jardins depuis son séjour, alors qu'il était jeune, à Londres qui en donne l'exemple.
C'est un espace vert récupéré sur des terrains vagues, mais accidentés. On y créé une nature qui est un peu l'héritière des jardins anglais, les jardins pittoresques qui  s'opposaient au jardin à la Française jugé trop strict. On tentait de suivre la nature dans ses caprices, ses accidents, ses surprises.
Voici qu'Aragon, en compagnie d'André Breton, Marcel Noll (et je crois Max Morise) partant du domicile de Breton à Pigalle, décide de se rendre aux Buttes Chaumont (bien que la nuit s'annonce) pour y trouver l'insolite. On le suit dans son itinéraire (rue Notre Dame de Lorette, rue Lafferière sinueuse et cachée, carrefour de Chateaudun) et, abordant enfin le jardin : "abandonnant la route pour le plus ombreux des sentiers nous découvrions aux creux des feuillages noirs des figures couplées sur leurs chaises sacrées..." et la promenade décrit moins un jardin dans ses précisions qu'une descente en ses ferveurs intimes, une entrée dans un monde de sensations fortes, s'arrachant au quotidien pour se retrouver en soi-même au coeur du secret.

 


 
 
posté le 28-12-2008 à 10:55:47

Rêver avec Gaston Bachelard.

Il s'arrêtait volontiers au Soleil dans la tête quand il se rendait à la Sorbonne. C'était "sur son chemin" disait-il avec cet accent rocailleux qui donnait tant de charme à son discours. Il était souvent accompagné d'une jeune élève qui avait un air protecteur devant le caractère vénérable d'un homme à la fois solide et qui, pourtant, donnait l'impression d'être si fragile. Il aimait fouiller dans les rayonnages à la recherche d'une de ces plaquette de poésie dont il faisait son miel. Pourtant tout poète qui lui faisait le service de presse de son ouvrage avait toute chance d'être "cité" dans les merveilleux ouvrages qu'il donnait chez son ami l'éditeur José Corti (un voisin). Car c'est moins la qualité du poème qui l'intéressait alors que ses références au monde élémentaire dont il analysait avec une puissance évocatrice exceptionnelle la force d'imprégnation sur notre pensée et notre sensibilité. Nous avons été toute une génération fortement marquée par cette pensée originale et d'un énoncé sans faille. Promeneur rêveur il aura été aussi un homme de "cabinet" le philosophe tel qu'on l'imagine, sous la lampe et dans l'intimité des livres.

 


Commentaires

 

1. lafianceedusoleil  le 28-12-2008 à 14:23:59  (site)

Coucou Sorel,
j'ai bien aimé ton article.
A la Sorbonne, à Paris, il y avait une salle qui s'appelait : Bachelard, sûrement qu'elle existe journée. J'y allais pour des conférences.
souhaite que ton dimanche se déroule bien. Moi, tranquillos à la maison et toujours à faire.
Demain, va faloir retourner au boulot.
Bisou
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posté le 22-12-2008 à 18:07:03

Les lettres, ligne de force d'une oeuvre.

Ce sont celles de D.H. Lawrence, ce pourrait être celles de tout autre dont on a retenu et publié l'oeuvre épistolaire. Mais si les lettres d'un écrivain sont, d'ordinaire, considérées comme une simple marge (ou complément) de son oeuvre, on pourrait aussi considérer qu'une oeuvre peut aussi se résumer à la technique de la lettre. Celle-ci contenant la totalité de ce qui sera développé dans un poème ou un roman voire un essai. La lettre, par sa nature même, son caractère intime, et une présence dans la perspective de sa conception, est chargée de bien plus de force, de suc, de sentiment, de mémoire, qu'une fiction ou une divagation poétique (divagation faisant référence à Mallarmé, expert en la matière).
Chargée de toutes les ambitions d'une oeuvre de création (et défiant toutes les techniques qu'elle peut adopter) la lettre devient le coeur central d'un élan qui s'y déverse avec infiniment plus de spontanéité que dans une construction trop élaborée et obéissant à trop de critères arbitraires. Elle s'ancre radicalement dans l'inconscient de celui qui la rédige. N'est-ce pas la rêve de l'écriture surréaliste qui refuse le roman (le tolère chez Crevel, et le snob chez Aragon), et n'est pas toujours dans la plus juste clarté dans le poèmes. Ceux de Breton ne sont pas, loin  de là, ce qu'il a laissé de mieux, mais c'est dans l'essai, souvent sur le ton confidentiel (ou la colère) que Breton donne le meilleur de ce qu'il a à dire.
La lettre, donc, comme médium essentiel et parfait dans l'ouverture qu'elle offre, l'infinité de formulation qu'elle propose et auxquelles elle se prête.
Reste à trouver un destinataire. Le mal choisir c'est se condamner à l'échec ou la déconvenue : quoi !  tant d'élan, tant d'effort pour rien, c'est un peu comme se lancer contre un  mur. Le choc est terrible, il peut être fatal.
J'avais imaginé une correspondance fictive avec des absentes (des figures mortes, des êtres de légende) mais le projet s'assèche à mesure qu'il croît.
Il me reste à trouver "Celle" qui inspirera une correspondance chargée de tant d'ambitions, de tant de ferveur non consumée.
Pour me consoler je relis les Lettres de la marquise de Sévigné, un modèle dans le genre, même s'il est encore trop marqué par une époque, un mode de vie qui n'est plus.


 


Commentaires

 

1. zac51000  le 22-12-2008 à 18:50:28  (site)

bonsoir j'espere que tu a passer un bon debut de semaine je te souhaite de passer une bonne soiree
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2. ooz  le 24-12-2008 à 03:28:58  (site)


... la correspondance fictive s'assèche ... {la lettre 'objet' -ou l'objet 'lettre'- ne circule pas, encre unicolore, écriture monotone, appliquée, laborieuse} ... faute de l'essentielle odeur de l'autre, cet ADN intraçable

 
 
 
posté le 22-12-2008 à 14:58:36

La femme surréaliste.

Sans doute, la femme domine l'univers surréaliste. Elle n'y est pas que muse (une sorte de Nadja somnambulique), elle milite, s'alliant aux engagements de ceux qui la célèbrent. S'ils sont des troubadours modernes les poètes surréalistes sont aussi des combattants. Pour un monde "autre". Ils suivent l'exemple de Rimbaud. Et la femme qui est à leurs côtés, n'est pas qu'une figure emblématique de l'amour, elle est aussi objet de désir. Jusque dans la violence qui n'est pas tabou.
Elle entre dans le "jeu" qui s'appuie sur des références poétiques où le marquis de Sade rencontre Lautréamont. C'est l'intrusion de la femme-objet. Consentante dans la douleur comme elle l'est dans l'extase qu'elle provoque ou inspire.
Elle entre dans une étrange machinerie qui n'est pas l'effet d'un sadisme primaire ni d'une misogynie active, mais dans la recherche éperdue des sensations, fussent-elles suicidaires. On voit Nora Mitranie sous l'emprise d'un Bellmer sadique dans des séances de "bondage", ou un modèle anonyme mis en scène par Oscar Dominguez.



 


 
 
posté le 22-12-2008 à 13:42:12

Les lieux de D.H.Lawrence.

D.H.Lawrence est un vagabond. D'une Angleterre natale dont il détestait l'hypocrisie bourgeoise à l'Australie, où il découvre les vastes espaces, en passant par l'Allemagne, l'Italie, et surtout le Mexique, il s'enchante d'un passé qui subsiste encore dans certaines enclaves de la population épargnée par le mythe du progrès. Il marquera une nette préférence pour Taos et son folklore indien. Il faut lire les pages enthousiastes, de son hôtesse d'alors, l'excentrique Mabel Dodge Luhan pour le retrouver familier. Il aime une vie fruste, proche de la nature. Il écrit sur ses genoux, sous l'ombre d'un arbre, fait du cheval et bientôt, contre le don d'un manuscrit à Mabel, il reçoit une cabane qu'il aménage à son goût, car il est, de surcroît, bricoleur et très habile de ses mains. Ce ne sont pas les mains d'un intellectuel détaché des "choses de ce monde" mais, bien au contraire, celle d'un homme attentif à la réalité dans ses aspects les plus simples, élémentaires, au rythme des saisons, dans une approche sensible et forte avec la nature.


 


Commentaires

 

1. ooz  le 24-12-2008 à 02:46:14  (site)


où est-elle cette cabane ? les feuilles semblent être d'arbres de climat continental européen

(ah mais je suis stupide, je vais regarder sur l'internet pour avoir ces renseignements)

Pélerin, le métier que j'aurais choisi si j'avais été un homme

 
 
 
posté le 22-12-2008 à 11:29:01

D.H.Lawrence sur le mode intime.

On l'aura dit que les découvertes littéraires de l'adolescence sont déterminantes du devenir de ceux qui s'y donnent sans mesure. Oserais-je une confidence. Alors que l'heure était à la passion pour Jules Verne ou la bibliothèque verte, il me fut donné de "découvrir" D.H. Lawrence. Ce fut d'abord moins l'oeuvre que le personnage lui même qui me fascinait. La lecture de sa biographie m'aura à ce point transporté que je le suivais par l'imaginaire dans ses pérégrinations d'Allemagne, où il rencontre le grand amour, à l'Italie où il traverse la vie des petites gens dans leur quotidien. Que d'admirables pages pour ses déambulations qui ne sont pas celles d'un touriste mais d'un pèlerin. Il aime se donner l'allure de celui qui est porté par une quête. Vers l'amour cosmique, une adhésion totale avec le monde, une approche subtile (et sans doute complexée) avec autrui, dont les femmes (Katherine Mansfiled n'est pas étrangère à la comédie qu'il se donne) et quelques autres que fascine son physique de gourou, son verbe imagé.
J'avais accroché son portrait dans ma chambre comme on épingle sur le mur un poster des Beatles ou des Rolling Stone. Il était une idole, je voulais qu'il soit un frère. Un grand frère qui me guide dans la vie, me débarrasse. des préjugés qui m'entouraient. Je lisais ses livres avec avidité, comme on lit des livres d'aventure, et souvent au mépris de ceux qu'il m'était conseillé de me référer. On choisi ses repères, ses idoles et ses exemples. Grande fut ma déception lorsque je découvris qu'André Breton (une autre idole) le méprisait, le traitait "d'imbécile". Il est parfois difficile de concilier nos admirations.

 


 
 
posté le 20-12-2008 à 16:41:25

André Masson face à Sade.

Des nombreuses références que le Surréalisme s'est donné  le marquis (sic) de Sade est la plus révolutionnaire et volontairement provocatrice. Parce qu'elle défiait le concept de la morale hérité de la société du XIX° siècle, hypocrite et se voilant la face devant les conséquences que la philosophie de Sade pouvait avoir moins dans l'état des moeurs que le regard que l'on portait sur la société.
Il ne faudrait pas voir Sade sous l'angle exclusif de la sexualité qui n'est, pour lui, qu'une arme donnée pour se dégager de la société qu'il combattait.
A travers la sexualité il préconise la liberté totale du corps, contraint par des siècles  de soumission aux lois de l'Eglise omniprésente dans la société française.
S'est  on demandé si la philosophie de Sade aurait le même pouvoir d'influence sur une société primitive ou tout simplement aux antipodes géographiques de l'Europe occidentale. Comment l'aurait-on interprétée en Polynésie ?
Sade est au coeur du surréalisme ( comme Jacques Vaché, Rimbaud, Lautréamont, Arthur Cravan, Xavier Forneret). Chacun est à la recherche de son visage, nombreux sont ceux qui étudient sa vie (Maurice Heine, Gilbert Lely) et rien de ce qui émane de lui ne peut laisser indifférent les peintres et les poètes qui abordent aussi son  oeuvre, l'illustrant moins dans l'immédiat du texte que dans une sorte de synthèse.  Tel Masson qui trouve là un  terrain favorable à l'expression d'une certaine violence. Celle même de la vie.


 


Commentaires

 

1. ooz  le 22-12-2008 à 06:43:22  (site)


whouâ c'est gore

 
 
 
posté le 20-12-2008 à 16:08:56

Oscar Dominguez le flamboyant

Envoyé à Paris par son négocient de père (établi aux Canaries) Oscar Dominguez y découvre la peinture et la poésie. Ce sera le ralliement au surréalisme alors fort amateur de nouvelles recrues. Il en est une, pittoresque, ardente. Dominguez fait vibrer toute sa verve hispanique dans une peinture qui doit beaucoup à Picasso (il fera des faux), et devenu l'amant en titre de la fantasque Marie Laure de Noailles qui joue les mécènes et taquine le pinceau, il fait une carrière assez retentissante entre monde des salons et des ateliers où l'on accueille la poésie. Dominguez fait preuve d'une fantaisie inspirée, d'une adhésion assez orthodoxe aux préceptes du surréalisme sans se départir d'une verve qui lui est propre. Il lui donnera toute sa mesure dans la pratique de la décalcomanie sans objet préconçu (décalcomanie du désir). On frotte une feuille de papier préalablement enduite de couleur sur une feuille vierge, et on y faire surgir d'étranges continents aux ondulations suaves qui suivent les mouvements de la main, de ses pressions. Max Ernst reprendra le procédé dans quelques unes de ses compositions les plus ambitieuses.
Mesurant les limites de ses prospectives artistiques, ou victime d'un problème personnel, il se donne la mort (d'une manière spectaculaire) en 1957 (le soir du réveillon de fin d'année).


 


Commentaires

 

1. ooz  le 22-12-2008 à 06:38:19  (site)

○○○ faussaire ! ce doit être une occupation passionnante ○○○

 
 
 
posté le 20-12-2008 à 12:07:18

André Masson et les mythes antiques.

La force des mythes antiques, c'est qu'ils donnent vue sur les mystères de la création et le fonctionnement du monde. En créant une suite de figures chargées de toutes les forces de la vie et de la mort, inventant des intrigues claironnées sur la scène de la légende, on donne à voir le destin de chacun. C'est une sorte de catalogue des situations humaines et des caractères. L'art y a puisé des thèmes repris de génération en génération, renouvelés selon les époques et l'image que se fait de son destin une société, le balisage d'une culture qui se donne des références, s'appuie sur des exemples.
André Masson n'échappe pas à la fascination des mythes qu'il explore avec une indépendance d'esprit, originalité et une singularité qui renouvelle totalement la figuration des thèmes et de ses personnages. Le Minotaure est au centre de cette mécanique fantasmatique. 


 


 
 
posté le 19-12-2008 à 14:19:59

André Masson sous le signe de Bachelard.

Masson sous le signe de Bachelard.
De Bachelard on parlera à part (il venait souvent au Soleil dans la tête qui était sur son passage quand il allait à la Sorbonne). Mais de son influence sur le développement artistique de l'entre deux guerres il y aurait long à dire. Elle fut radicale et ouvrait (surtout au peintre) la porte à l'immensité de l'univers qui n'avait plus la forme et la définition réduite de la tradition mais une ampleur vibrante qui donnait libre court à un graphisme propre à confondre les éléments, assimiler l'intimité des corps avec la nature, donner sens à un regard moins cartésien que sensible. André Masson fut, plus que tout autre, sensible à cette leçon et en a  nourri sa peinture lui donnant cette force graphique qui faisait son dessin rejoindre l'énoncé de l'évidence, corps si totalement inscrit dans la souffle de la création qu'il accédait  à la dimension mythologique.  





 


Commentaires

 

1. oozmama  le 20-12-2008 à 08:01:39  (site)


un monde où n'entre que celui qui le porte en lui -- - inside out, upside down

 
 
 
posté le 15-12-2008 à 14:58:57

André Masson, inventeur du dripping

L'action painting

revendiquée par l'école américaine (peindre en projetant la couleur sur la toile, et généralement celle-ci posée sur le sol), a pour inventeur André Masson ce qu'oublient souvent les historiens promptement dévoués aux courants de l'opinion téléguidée par les décideurs de l'art (et les esclaves du marché). Le poids fantastique du marché américain occultera ainsi les prodigieuses inventions conduites dans l'entre deux-guerres par les artistes qui gravitent autour du surréalisme (en particulier, outre Masson, Max Ernst).
Le dripping (peinture projetée, ce qui donne tous son prix au geste pictural) a été pratiqué par Masson à partir de toiles préalablement enduites de colle et sur lesquelles il projetait des coulées de sable, celui ci adhérant sur la surface.
Il s'en suit une toute nouvelle appréhension de la surface picturale, une sorte de mise en spatialité de la sensation qui inspire le peintre, ce qu'est la géométrie dans l'espace par rapport à la géométrie de base qui ne conçoit la théorie que sur une surface plane. On ne peint pas ce que l'on voit mais ce que l'on ressent.
 


 
 
posté le 15-12-2008 à 14:46:52

Armel Guerne parle d'André Masson.

Parce qu'il tenait plus du "salon" où l'on  échange des idées que d'une librairie active à la vente de ses livres, le Soleil dans la tête provoquait, solidifiait, ou se faisait l'écho de rencontres dont celles qui enrichissent le développement des oeuvres de ceux qui en sont les acteurs. De ses fidèles visiteurs Armel Guerne fut sans doute le plus attentif commentateurs de l'activité artistique qu'on y prônait. Il connaissait ma passion pour André Masson qui venait d'illustrer une petite plaquette que je publiais chez PAB. On échangea maintes considérations, et grand spécialiste de la littérature romantique (jusque dans son caractère nocturne), Guerne me donnait maintes clefs pour mieux aborder l'oeuvre mutliforme d'un André Masson dont il connaissait toutes les arcanes.
Poètes des excès, André Masson donnait la démesure du rêve surréaliste qui était de conquérir les territoires inconnus du subconscient.

 


 
 
 

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