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lettres de la campagne

posté le 14-09-2009 à 16:12:27

Robert de Montesquiou chez le photographe.

A ses débuts la photographie se cherchait une esthétique qui devait encore beaucoup à la peinture dont elle passait d'ailleurs pour une redoutable rivale.
On situait le sujet (le modèle) dans un décor qui était une fiction de nature. On transportait dans le studio du photographe quelques éléments propres à décliner une nature idéalisé (les bornes d'un jardin de philosophe !).
Robert de Montesquiou n'échappe pas à la manie alors répandue de demander au photographe de le poser dans ce décor et cette fiction dont le caractère artificiel restait visible. Poseur par nature (voir son célèbre portrait par Boldini qui est une véritable caricature du personnage) Montesquiou joue le jeu, soulignant, malgré lui, l'esprit même qu'il conserve devant la nature. Nullement à son esprit, et en adhésion étroite avec elle, mais comme un visiteur qui irait prendre le thé. En mondain dont il était la figure emblématique.

 


 
 
posté le 14-09-2009 à 15:25:23

L'art de le lecture, un duo.

La manière d'aborder un livre peut largement jouer sur le souvenir qu'on en aura.
Une lecture solitaire s'accommode des lieux, positions, circonstances les plus variés. Elle se déroule dans le rythme ordinaire de notre vie, ne fait que constituer une parenthèse dans nos tâches quotidiennes, et pourtant elle implique un comportement qui en dira long sur nous, sur notre mentalité et peut-être l'état moral dans lequel on est lors de cette cérémonie secrète avec l'univers des mots, de la pensée, des fictions, car chacun ira vers les mots avec ses appétits, ses ambitions, sa tournure d'esprit.
Une lecture savante demandera peut-être une position en conformité, une certaine rigueur qui fait écho à la matière même du livre consulté. Mais ne dit-on pas, de certains livres, qu'ils se lisent "de la main gauche", car ils suscitent des excitations que chacun résout à a façon.  
Des rapports du livre avec l'anatomie du lecteur il y aura toute une gamme dont la diversité en dit autant sur le contenu du livre que l'état d'esprit du lecteur.
L'enfance entraîne presqu'automatiquement une lecture au lit, dans un climat douillet, rassurant ; celle de l'adolescence se diversifie avant de devenir le reflet d'une vie qui se coule au fil de cette plongée dans l'irréalité à laquelle elle invite.
Ce "vice impuni la lecture" auquel fait allusion Valery Larbaud peut devenir une drogue qui suscite le décor le plus approprié à son déroulement.
La chambre est  d'ordinaire le lieu de sa plus intime célébration. Et si, de solitaire, elle devient prétexte à un duo, elle s'ouvre tout naturellement aux jeux de l'amour et à l'érotisme. Il y aura long à dire, (à s'interroger) en s'attardant sur le sujet.


 


 
 
posté le 14-09-2009 à 12:13:12

Robert de Montesquiou chez lui.

Tout comme celui de Raymond Roussel l'intérieur de Robert de Montesquiou témoigne moins de sa personnalité que de sa classe et de son mode de vie.
Il est conventionnel aussi bien dans le mobilier que l'usage censé en justifier la présence et jusqu'à l'agencement. Il est le décor d'une vie mondaine, strictement réglée et codée, et non celui d'une vie intime ou créative. Il fait plus étalage d'une puissance d'argent que de bon goût ce qui dans le cas de Montesquiou est pour le moins surprenant, celui-ci passant pour un "professeur de bon goût" et apportant à la création de ses demeures un soin tatillon et appuyé sur une réelle connaissance des arts décoratifs. Les duchesses lui demandaient conseil, il les accompagnait volontiers chez les antiquaires et sa réputation d'homme galant et compétent supplantait celle à laquelle il aspirait d'homme de lettres. Les frères Goncourt, ces chipoteurs de chapelle et ces concierges du Paris qui frétille, ont laissé des descriptions pointilleuses des demeures de l'auteur des "Hortensias bleus".
Il ne faut jamais oublier qu'il fut non seulement le modèle du Charlus de Proust (pour la part sexuelle) mais aussi celui du des Esseintes de Huysmans où la raffinement du cadre choisi par le héros en dit long sur son mental.

 


 
 
posté le 14-09-2009 à 11:02:34

Le complexe de Pompéi selon Pannini.

Comme Hubert Robert en France, Pannini s'est délecté des ruines qu'il trouve en abondance dans la Rome qu'il sillonne en tous sens, offrant un véritable inventaire des monuments. Mais contrairement à Piranèse il n'en fait pas le décor de saynètes pittoresques et l'affronte dans un souci archéologique qui lui attire les faveurs de ces esprits cultivés (dont ceux qui font "le grand tour") qui aiment constituer des cabinets de curiosité où les objets naturels (voire scientifiques) côtoient les peintures qui, elles-mêmes, sont des images d'architecture. Poussant à son comble le procédé, il va jusqu'à imaginer un cabinet d'amateur entièrement dévolu à des vues d'antiquités. Il rejoint l'esprit d'encyclopédie qui fait ses débuts et va totalement modifier le comportement des intellectuels de l'époque.
Cette orgie archéologique a de quoi réjouir l'esprit. Curieusement, elle comble une inquiétude mal définie qui conduit les sociétés sur leur déclin à se délecter de l'état de ruine qui signifie la chute des précédentes. une complaisance vis à vis d'un état de désastre qui devient une drogue.
On aura connu dans les années 70, en Europe, un mouvement lui aussi fortement marqué par ce goût de la ruine, et une référence parfois frénétique, à la mémoire, comme ferment de connaissance. Comme si le souvenir des désastres de la dernière guerre alimentait moins un esprit de revanche qu'une masochiste délectation. Ce sera le " Complexe de Pompéï."
De Wolf Vostell à Chrisitan Bolantski, des Poirier à Olivier Brice, d'Arman à  Adzak, de W.Gafgen à Yvon Theimer,  ce sera à celui qui offrira la plus spectaculaire suggestion de ce désastre latent. On y célèbre moins les fastes de la mort que ceux de la destruction (d'où la reprise des antiques, de la ville en ruine) et n'est-ce pas  A Speer, l'architecte d'Hitler qui avait construit le Berlin de son maître (inachevé) en se souciant de l'aspect qu'il pourrait avoir en ruine. Comme si cette perspective était fatalement contenue dans le projet, fut-il comme ici mégalomane et ostentatoire. D'ailleurs la ruine, ne serait-ce celle d'un bâtiment modeste lui donne une espèce de grandeur qu'il n'avait pas dans sa conception primitive.
Le destin collectif de l'homme serait-il de trouver sa grandeur au delà de sa disparition ?

 


 
 
posté le 11-09-2009 à 15:10:02

Les autoportraits de Santos Silva.

Parce qu'ils ont l'air ancien ils inspirent une espèce de respect. Ils posent une distance entre eux et le spectateur d'abord subjugué par tant d'ampleur. Celle du temps lointain supposé de leur naissance et cette sorte de panache qui n'est ni la verve flamande, ni l'opulence  espagnole, mais tient des deux, dans la tradition d'une mise en spectacle.
Ils sont les visages qui se donnent en spectacle. C'est alors qu'on apprend leur création récente. Certains sont encore frais. Et l'auteur, on s'en aperçoit alors, leur ressemble. Curieux retour des choses. C'est le peintre qui ressemble à son oeuvre plutôt que le contraire. On aura, toutefois avancé d'un cran quand on aura compris que ces portraits qui se ressemblent sont plutôt des masques que le peintre a posé sur son visage.
La véritable ressemblance du peintre avec ses autoportraits est cachée. Dans les masques qui, eux seuls, ont droit d'exister. De parader.
Certains, en si grande évidence, qu'ils ont ce blanc un peu froid des masques de théâtre japonais et qu'on porte devant son visage, en le tenant à la main par une simple baguette. Seule, cette baguette manque, le masque est posé devant le visage. Il le gonfle un peu, ou l'affine jusqu'à l'inquiétante minceur des figures cadavériques. Figées dans l'immobilité de l'éternité  qui nous regarde encore. Car tous nous regardent. Nous interrogent. Ils nous dérangent.
On aime qu'un portrait résume celui qu'il représente et étale tout le bien qu'il pense de lui. C'est l'identité sociale voulue : celle pour laquelle le modèle a vécu, vaincu des obstacles. S'est forgé un masque pour s'inscrire dans la mémoire de ses descendants. Quelques peintres ont perturbé le système, ont manqué aux usages, faisant de la peinture, au lieu d'en faire un portrait social. Et ils ont imaginé ceux qu'ils regardaient bien au delà souvent de ce qu'ils peuvent offrir. A moins que, les déshabillant jusqu'à l'indécence, le peintre n'ait définitivement fâché le modèle avec son image. C'est le gain de la peinture sur les usages, plus outrageant que brillant.
Lisa Santos Silva a peut-être regardé  de ce côté là, vers un Goya plus cruel que malin, plus sincère qu'habile, plus outrageant que brillant.
Mais nul parrainage, si évident soit-il, n'est un frein pour qui sait aller où doit le mener l'art qu'il pratique. Car s'il revient si obstinément sur un sujet, ou si exclusivement, c'est qu'il doit bien y avoir une raison essentielle, vitale.
Répéter n'est pas limiter, c'est approfondir. C'est aussi conjurer.
Extrait d'une préface pour l'exposition à la galerie Isy Brachot (Bruxelles) en février 1986.




 


 
 
posté le 11-09-2009 à 10:54:44

La sensualité du Greco.

Voir la peinture non plus avec l'oeil du connaisseur mais l'innocence et la fraîcheur de celui qui la découvre et n'a pas nécessairement toutes les clefs (dont une connaissance de l'auteur) pour moduler son jugement. D'ailleurs il s'agit moins de jugement que d'approche sensible de l'image et d'une découverte de son contenu qui fait moins appel à nos références qu'à notre instinct qui découvrira une signification sans doute plus originale, inattendue de la scène représentée.
Le Greco est bien le peintre qui se prête le mieux à cet exercice tant son style échappe à tout critère d'école et s'impose dans son originalité qui peut parfois être dérangeante. Quoi ! tout ce tumulte et ces corps en extase. Où situer le ressort de ces torsions, élongations qui leur donnent une étrange sensualité. On ne peut parler de plaisir, se risquera-t-on à évoquer la souffrance.
Des serpents entrent en scène. On nous a déjà fait le coup pour expliquer la chute du Paradis. C'est "l'oiseau de mauvais augure", celui par qui le malheur arrive. Alors pourquoi ces corps au tremblement si doux,
On est hors de la ville, (chassée d'elle ?) dans une zone peu définie où la nature gagne sur l'effort humain, alors qu'en toile de fond elle se présente avec toute la majesté de son essor et le rythme ardent de ses clochers, tours et autre signes de sa structure sociale et religieuse.
On en revient aux corps. Seuls ils comptent et s'étalent dans un déploiement qui peut être aussi celui de quelque rite secret (une orgie). On le voit l'oeuvre propose surtout des questions.

 


 
 
posté le 10-09-2009 à 11:55:06

Alfred Jarry à Essonnes.

La poussée des "gens d'esprit" vers la campagne s'accélère à la fin du XIX° siècle avec l'expansion du chemin de fer. A quoi s'ajoute la modicité des prix dans les établissements liés au tourisme qui en est encore à ses balbutiements. On peut dresser toute une cartographie des lieux choisis par peintres, écrivains, journalistes, éditeurs qui se retrouvent au vert, et en chemise, pour jouir en toute impunité, des plaisirs de la nature.
Aux bords de la Seine, ce sera la ruée des impressionnistes, plutôt en son aval (Bougival), alors que les écrivains iront plutôt à l'amont (Mallarmé à Valvins, les Nathason, la colonie de Bouron Marlotte, l'équipe de Barbizon, Daudet à Champrosay)). Corbeil, déjà ville, n'est pas négligée et Jarry en fut l'un des familiers. Faisant équipe avec Valette son éditeur et Rachilde sa confidente, il loue une maison (elle existe encore), se fait construire un "tripode" (c'est lui qui le dit) et fait du vélo, tant sur les bords de la Seine que dans les rues d'Essonnes lieu de villégiature privilégié. Il a du rencontrer ce type de personnages qui alimentent sa verve et qu'il transforme par un excès de l'imaginaire dans le superlatif des aventures qu'il imagine, des situations qu'il invente, d'un monde qu'il confectionne avec une sorte de lucidité rageuse, comme s'il avait franchi le miroir et retrouvait "l'autre", le vrai Jarry.

 


 
 
posté le 09-09-2009 à 15:11:21

Poliphile une affaire d'arbre.

Dire l'importance de l'arbre dans notre vie !
Outre ses connaissance médicales qu'il mettait au service de son métier de médecin de campagne, mon père avait une vive curiosité pour la mythologie et la botanique. On parlait à la table familiale des dieux de l'antiquité comme s'il s'agissait de voisins. On avait ainsi Jupiter, Venus et Diane à portée de nos couverts. J'imagine parfois Gaston Chaissac à la table de l'Olympe. Lui, cette commère de village, inspiré, aurait fait des merveilles.
La botanique donc entrait aussi dans nos petites manies. On m'avait offert, pour m'initier un ouvrage qui s'intitulait, joliment : "Comment s'appelle donc cet arbre ?"
Je n'en n'ai pas tiré tout le profit qu'on pouvait en attendre, mais les leçons de la mythologie sont restées.
Et puis, maintenant, je pense aux énoncés inspirés de Remy de Gourmont :

Chêne, fleuve de gloire épanoui vers les dieux morts, barbare aux pieds formidables, pierre de lumière et de sang....
ou encore
Frêne aux reins nus, songe impur sorti des ronces...
Bouleau, frisson de la baigneuse dans l'océan des herbes folles.

Et ainsi toute la forêt y passe. C'est une manière bien originale d'en goûter tous les charmes. Et Poliphile n'est pas loin.

Poliphile à la recherche de Polia (et la quête de l'amour) a pour cadre un jardin merveilleux mais plein de pièges. C'est un jardin symbolique, et codé selon les références donnés au texte par l'auteur, ce mystérieux Francesco Colonna, abbé ou puissant seigneur s'adonnant aux lettres comme il était d'usage dans cette renaissance italienne qui fut celle de toutes les cultures. L'image même de l'arbre a son importance et il ne saurait être sa seule réalité. La mythologie greco-latine, dont nous sommes les héritiers, voulait que chaque arbre soit un humain ainsi statufié au terme d'histoires variées qui peuvent aller de l'affront fait aux dieux (alors c'est une punition) jusqu'à une protection contre les dangers de la vie, alors c'est une métamorphose qui peut s'inverser.
Désormais devant chaque arbre rencontré ou sous la protection duquel nous nous plaçons, disons nous qu' ll y a  peut-être une personne. Il ne faut pas l'oublier.
Dormir sous un arbre c'est peut-être dormir sous la protection d'un dieu qui irrita Jupiter et qui le transforma par punition. D'où, alors, le danger pris de se placer sous ses branches lors d'un orage.
La lecture sous l'arbre qui est une sorte de messe des mots partagés, c'est peut-être la rencontre avec quelques déesses bienveillantes.
Ainsi avec cette idée de l'arbre faisons nous de la forêt le plus passionnant cortège descendu de l'Olympe, venu des vallées caillouteuses d'une Grèce de légende. Mais on peut récréer la légende au coeur de nos forêts familières. Ne jamais y errer sans y penser. Il n'y a pas que du gibier dans les fourrés, On y rencontre aussi nos semblables. Divinisés.



 


 
 
posté le 09-09-2009 à 12:42:43

Jacques Doucet, le mécène du surréalisme.

L'auteur fut conservateur de la Biblliothèque Jacques Doucet. Ceux qui la fréquentaient n'oublieront pas ses conversations interminables au téléphone , à haute voix, perturbant notre attention d'autant qu'il y a dans le personnage une part de comédien loufoque. Une plume à la main, il témoigne d'un sérieux et d'une exigence exceptionnelles. Son étude consacrée à Jacques Doucet (ou l'art du mécénat) est une formidable incursion dans ses rapports parfois ambigus avec le monde de l'art. Un homme droit, pointilleux, qui fait sa culture sur le terrain et a besoin de s'entourer d'esprits compétents. Son immense fortune lui permet de jouer les mécènes et il aura une part importante dans l'essor de cette modernité incarnée par les poètes qui feront le noyau du surréalisme après avoir (avec la collaboration d'André Suarès), constitué une base à sa bibliothèque qui fait la part belle aux courants poétiques de la fin du XIX° siècle. Pense-t-on aux revues qui scandent la vie poétique du XX° siècle s'éveillant aux idées neuves (Nord Sud de Pierre Reverdy, les revues de Picabia, Littérature de Breton et Aragon) il y a la main généreuse de Jacques Doucet derrière. Sans lui bien des projets n'auraient jamais vus le jour. André Breton sera l'un des pilotes de cet homme à la fois touchant et irritant par une certaine prudence "bourgeoise" que bouscule par ailleurs une soif de nouveauté. N'est-ce pas lui qui est à l'origine de la présence au Louvre de "La Charmeuse de serpent" du douanier Rousseau et ne fut-il pas la possesseur heureux de cette toile charnière : "Les demoiselles d'Avignon" de Picasso.
Inattendue, la lumière que porte l'auteur sur les querelles intestines qui sous-tendent l'émergence de cette génération. Et les portraits ne sont pas toujours flatteurs (Max Jacob n'en sort pas grandi). Ce sont les "petites misères" qu'engendre la pauvreté dont presque tous sont affectés.
La vie privée de Doucet reste discrète tant on a le sentiment qu'elle se confond progressivement avec la collection qu'il constitue où peinture et poésie trouvent leur jonction essentielle. Ce qui caractérise l'époque et le flamboiement créatif qui  marque les Années folles.

 


 
 
posté le 08-09-2009 à 12:48:00

Quand l'artiste devient vedette.

Ou bien personne ne vous connaît, on ne s'intéresse pas à vous et à plus forte raison à ce que vous faites. Un créateur sans public, enfermé dans son univers peut l'enrichir, le sublimer ou aussi s'y perdre, se pendre à l'arbre qu'il a planté.
 Ou bien on s'attache à ce que vous faites, et cela peut aller jusqu'au culte fétichiste. Un Dali ne pouvait créer que selon un cérémonial alliant la provocation, à la mise en scène ; un Picasso ne pouvait griffonner la moindre ébauche de dessin que, déjà, on se l'arrachait et criait au génie. Quelle angoisse, pour celui qui est honnête avec lui-même, cette attention si grande que vous devez alors hésiter à vous manifester. Il y a enfin le créateur qui fait, de l'effet de sa création, d'une mise en valeur de sa propre vie, une manière d'art et il est condamné à vivre selon l'image que l'on a  de lui, soit par un système de promotion, soit par la mode qui est la pire drogue,  du type Warhol.
Dans les années 50 autour du concept de l'art lyrique on accordait à l'acte de peindre une importance qu'il n'avait jusqu'alors pas trouvé, restant secret, et dans l'intimité de l'atelier. On fait de l'acte de peindre un spectacle. Mathieu l'a porté au sommet de sa turbulence et de son panache. L'oeuvre n'existe que comme témoin d'un "moment".
On met un pas dans ce qui va se développer ensuite, la substitution du geste (du choix) à l'oeuvre elle-même. Le tout relevant du spectacle. 


 


 
 
posté le 08-09-2009 à 12:06:26

La poésie gestuelle de Pierre Albert Birot.

Du poème au cri il n'y a qu'un pas, Artaud nous l'a montré, Henri Chopin en a fait une oeuvre. Du cri au rythme, Raoul Hausmann a montré le chemin qui passe aussi par une peinture de protestation, de colère. Pierre Albert Birot avait, bien avant (au début du XX° siècle), abordé largement cet éclatement du langage qui sous tend aussi les gestes, mettant la poésie au niveau du théâtre, en sa féconde démonstration de la vie avec ses loufoqueries, ses ardeurs et ses emphases.
Mais il était un poète armé d'humour autant que de sagesse. Faisant passer par les mots "des gouttes de poésie" et dans la gestuelle qui accompagne la lecture du poème, soulignant, propulsant la force imprimée dans les mots. Ce n'est pas pour rien qu'il a été le promoteur des Mamelles de Tirésias de son ami  Apollinaire. On était là en bonne compagnie et complicité.

 


 
 
posté le 07-09-2009 à 15:06:04

Un portrait robot de Sade.

Portrait robot de Donatien de Sade.
En projection :  une fiction mettant en scène Donatien de Sade  dont l'oeuvre sulfureuse cache la réalité d'un personnage mis en condition en raison de sa détention. Il y a été amené par un fait divers dont la punition était disproportionnée et curieusement c'est dans l'enfermement qui en a été l'issue qu'il a conçu une oeuvre qui développe avec infiniment plus d'audace, de cruauté, de folie (?) ce qui n'avait été qu'une stupide partie fine d'un aristocrate se croyant tout permis.
Le lieu de ce bruissement imaginaire c'est la Bastille. Man Ray a imaginé un portrait de Sade fait des blocs mêmes de la célèbre prison qui, d'ailleurs, aura été, par la Révolution, "mise en morceau", et il n'en reste plus que des traces sur le sol. C'est dans la perspective de ma théorie des traces (il y a déjà un récit de l'aventure de Jeanne de la Motte Valois, au coeur de "l'Affaire du collier de la Reine") que j'envisage un parcours Sade, rendant l'homme dans sa réalité et ses fantasmes mais avec une projection sur le présent.
Les lieux revisités (la Bastille, Vincennes, Charenton, Lacoste) y aideront  
Portrait robot parce que, tel un robot, il ne sera ni de chair, ni de souffle, mais une machine.

 


 
 
posté le 07-09-2009 à 12:26:32

Un portait de Crevel oublié.

A l'époque où je rassemblais les textes et documents qui devaient constituer un hommage à René Crevel, j'avais ignoré l'existence du paisible et séduisant portait qu'avait fait de lui Christian Bérard et j'aurais dû mieux fouiller dans les archives. Il avait donné un dessin pour un de ses livres et la confection d'un portrait était dans la logique de l'estime dans laquelle ils devaient se tenir réciproquement.
Il est là, tout entier, tel que me le décrivait Valentine Hugo qui, elle aussi, a retenu les traits juvéniles de Crevel dans un beau portrait collectif.
Bérard manquera donc à un ensemble que j'introduisais par un texte dont je regrette aujourd'hui le ton un peu superficiel. Les surréalistes (dans la revue Bief) ne manquèrent pas de le moquer. Et ils avaient raison. C'était une vision qui occultait totalement la part tragique d'une oeuvre toute imprégnée de désespoir et d'une froide lucidité qui devait le conduire ( en toute logique) vers le suicide, alors que j'en faisais un éternel adolescent grappillant l'amour entre nostalgie (à la Fitzgerald) et provocation. Nettement plus incisif que l'image fade que j'en donnais. Ce serait à refaire, j'userais de mon expérience acquise depuis.


 


 
 
posté le 07-09-2009 à 11:58:50

Lire un jardin.

Lire un jardin.

Comme on se glisse dans un livre, comme on emprunte  les sentiers qu'un auteur a creusé dans la masse des mots, on découvre un jardin en y cheminant pour en goûter tous les détails accumulés. Le charme né de la surprise (d'où la séduction du jardin anglais contre le jardin à la française qui s'offre d'emblée). Il peut être modeste en son étendue, et dans son dessin respecter les données de la nature. Il ne fera que mettre en valeur l'imaginaire de la nature, y creuser, avec discrétion, le cheminement qui sera son apport dans la donnée du paysage proposé, comme on se prend à rêver sur une phrase au cours de la lecture d'un texte. Là encore on trouve une similitude d'approche entre le jardin et la littérature.    
Un jardin a plus de charme s'il est touffus, si la végétation y a trouvé la juste mesure de son expansion, son souffle végétal.
Je me prends à imaginer une lecture des jardins comme Gaston Bachelard entreprenait la lecture d'un texte. En y distinguant les forces concurrentes des éléments qui le composent, s'arrêtant, comme à une étape, sur des objets ajoutés (banc, statue, fontaine, rocher, élément de ruines), car le jardin est aussi un espace ouvert à toutes nos fantaisies et caprices, d'où l'usage qu'on en fait dans l'aventure amoureuse (Watteau l'avait bien compris).
Un jardin public s'efforce d'offrir toutes ces données, même s'il est contraint d'en résumer l'effet, d'en codifier la répétition, une reprise méthodique d'un manuel du parfait jardin pour le délassement du corps et l'exaltation du coeur.


 


 
 
posté le 07-09-2009 à 10:41:55

Le mythe de l'enfermement.

Comment interpréter le fait qu'un monastère (le mont Athos) présente les mêmes traits spécifiques dans son architecture que le château imaginé par Sade pour ses "Cent vingt journées de Sodome". Lieu de prière ici, d'arrachement des contraintes du corps par l'élévation de l'esprit, et là, théâtre de la fange de toutes les perversions, creuset d'une exploration suicidaire du corps, pour en atteindre (et sans doute défier) les limites. Une prise de distance avec le monde du réel (la foule, la vie active, pratique, les rapports sociaux), un repli hautain.
C'est la confection d'un théâtre rigoureusement codé, que ce soit pour la prière ou la débauche. On regarde vers le ciel : pour l'atteindre, pour le défier.
L'imaginaire peut se développer sans contrainte ni règles dans cet enfermement qui condamne celui qui s'y  abandonne à en explorer tous les délires, s'ouvrant à tous les horizons dont la discipline de la vie pratique nous éloigne.
Quels cris camouflent ces formidables murailles (ne sont-ce pas aussi celles d'une prison ? ). Car la prière est un cri de l'âme quand le cri du corps donne la mesure de sa souffrance ou de sa jouissance.

 


 
 
posté le 06-09-2009 à 22:39:51

Décor de tragédie.

Pour être belle une ruine doit conserver (sinon gagner) cette dimension spectaculaire qui l'arrache aux lois du pratique pour lui donner une force suggestive propre à fouetter l'imaginaire et servir au besoin de cadre à une théâtrologie dont elle devient l'un des éléments clefs, voire déterminent pour la signification du spectacle qui y est donné. La succession d'une porte et d'un escalier compose le cadre idéal pour toute action théâtrale qui s'appuie sur des entrées et des sorties spectaculaires. Le ton est donné, c'est celui de la tragédie.

 


 
 
posté le 06-09-2009 à 16:25:13

Brassaï au café.

Pensons à la terrible figure centrale de l'Absinthe de Degas. La solitude, le théâtre du café, lieu de toutes les détresses. Exsangue, fermée sur elle-même, se pénétrant de sa souffrance, elle prend ses distances avec le regard qui s'accroche à elle, alors que Bijou, vue par Brassai, dans un décor assez semblable, (banquette et table), prend possession de l'espace avec un mélange de dédain et une coquetterie de "folle de Chaillot". Une débauche de falbalas, un air supérieur et de domination. Elle se donne en spectacle dans ce qu'elle a imaginé de mieux adapté à sa "beauté" (dans son credo), même si elle est ravagée par l'âge et la vulgarité qu'elle exprime et dont elle s'entoure. Brassai retrouve ici toute la force de synthèse qui conduit la peinture vers ses meilleurs effets. C'est quand la photographie n'est pas le simple rendu du réel, mais une recréation signifiante qu'elle atteint sa plénitude.

 


Commentaires

 

1. oups007  le 06-09-2009 à 16:51:31  (site)

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2. sorel  le 06-09-2009 à 22:42:03  (site)

merci pour le si gentil message. A quand d'autres passages aussi sympathique ? Bisous alors

 
 
 
posté le 04-09-2009 à 16:11:28

Nadja dévoilée.

Fallait-il nous la faire connaître pour ce qu'elle fut réellement quand Breton en aura fait une figure de la mythologie surréaliste, et, sans doute, une sorte de Joconde de l'amour fou. Lui donner une identité, reconnue par l'administration, n'est-ce pas la faire descendre des rêves qu'elle engendre. La folie la gomme à l'exigence de la vie réelle qu'elle n'assumait pas, au passage on égratigne André Breton qui, l'espace délirant (au sens premier du terme) qu'elle lui offre fermé, l'abandonne à son triste sort.
Lâcheté, inconscience, il néglige le modèle pour s'en tenir à l'image qu'il en donne. On sait combien le surréalisme a imposé une image de la femme porteuse de tous les rêves, de tous les fantasmes masculins. On a pu lui reprocher cette attitude machiste. Pourtant il est nourri d'un appétit d'amour qui donne vie aux femmes muses (Nusch, Gala, Nora Mitrani,Youki Desnos, Jacqueline,..)

 


 
 
posté le 04-09-2009 à 14:40:06

Apollinaire dans la tranchée.

Sensible plus que tout autre à l'entreprise d'Apollinaire, l'ayant tenté également dans le cadre de la guerre d'Algerie. Ce sera : "Les Sables solaires" (une réunion de poèmes de Marc Alyn, Jean l'Anselme, Charles Autrand, Raymond Biaussat André Blavier, Pierre Boujut, Robert Delahaye, Bernard Delvaille, J.J.Kim, Jean Laurent, Gabriel Paris, Rancillac, Jean Rousselot, Roger Toulouse, J.Weus avec un hors texte de Jacqueline Pavlowsky). Ronéoté, il est "très souvent cité par les histoires de la jeune Poésie (voir Robert Sabatier, Serge Brindeau...) et considéré comme l'une des rares manifestations poétiques sur le terrain, pendant la guerre d'Algérie".
Case d'Armons annonce l'Apollinaire qui va largement développer (dans l'intensité de sa production poétique dans les quelques années qui lui restent à vivre) l'expérience de la guerre qu'il vivra dans d'atroces conditions matérielles et des amours désolantes.

 


 
 
posté le 04-09-2009 à 14:32:41

André Breton en figure de maître.

Instauré "maître" du surréalisme par une sorte d'accord tacite de ceux qui constituaient le groupe, une propension naturelle à diriger, dominer, André Breton s'est rapidement confondu avec l'action  surréaliste, et comme un chef d'orchestre, il donne le ton. Autour de lui s'agglutinent de jeunes peintres et poètes qui se reconnaissent des affinités avec l'esprit général, la discipline même que supposait le ralliement  à un groupe actif, remuant, qui entendait instaurer un nouvel art de vivre, des motivations élevées (parfois si radicales qu'elles devenaient incompatibles avec la réalité sociale), une avancée poétique ou picturale dont ils se sentaient porteurs et portés vers de nouveaux horizons.
Il fallait, périodiquement , des expositions, des revues, des manifestes, des documents de toutes sortes pour faire le point, épurer l'actualité qui se targuait facilement d'être surréaliste, en somme faire le compte de ceux qui pouvaient légitimement en revendiquer l'appartenance.
L'exposition  de 1937 assortie d'un catalogue-"dictionnaire", marque une étape solide et constructive. On trie, classe, étiquette les divers éléments qui entrent dans ce fabuleux "laboratoire" de la pensée moderne.

 


 
 
posté le 27-08-2009 à 23:16:00

Avis au visiteur.

Quand on allait rendre visite à Pierre Albert Birot, dans son antre de la rue des Saint Pères (au 73 déjà célèbre pour avoir été l'adresse de Remy de Gourmont et en quelque sorte sa cellule de travail), on trouvait sur la porte et un peu partout dans l'appartement des affiches pour notifier faits et gestes.
En voici le leçon.

Interruption de ce blog jusqu'à la mi septembre, pour cause de voyage.

 


Commentaires

 

1. minouche145  le 01-09-2009 à 10:59:47  (site)

Image hébergée par Casimages.com : votre hébergeur d images simple et gratuit

Kikou me revoilou !!!
Tout d’abord je vous remercie beaucoup
Pour tous les commentaires
Que vous m’avez laissé
Pendant ma longue absence,
Cela fait chaud au cœur
De voir que l’amitié virtuelle
Existe bel et bien et cela me fait bien plaisir
Les enfants et moi-même
Avons passé un mois de rêve à Ostende
Ma ville de vacances préférée
Ma ville de cœur
Que de souvenirs !!! A chaque coin de rue
Tous les souvenirs de ma tendre enfance
Ressurgissaient !!! le temps du bonheur
De l’insouciance aussi, tous ces bons moments
De ma maman, ma sœur
Mon frère et ma belle-sœur
Tous aujourd’hui partis pour cet autre monde
Dont on ne revient jamais…
Mais je sais qu’ils étaient là,
Tout près de moi tout au long de ce superbe mois !!!
Nous avons eut un temps splendide tout le mois
Et nous sommes tous les trois bronzés
De cette belle couleur ambrée qu’on ne trouve qu’à la côte !!!
De vrais pains d’épices lolll
Bon assez parlé de moi,
Comment vas-tu ?
J’espère que tout s’est bien passé pour toi
Durant ce mois d’Août,
Que tu as bien profité de tes congés,
Et que tu t’es ressourcée de repos,
De bonheur, et d’amour …
Toutes ces petites choses qui nous rendent heureux et nous donnent
La « pêche » pour entamer une nouvelle année de boulot
Ou d’études . Mon petit Samy reprend aujourd’hui
1er septembre, il rentre en 6ème primaire
Et Chaymaà rentre le 2 en 4ème secondaire
On est repartit pour un an …
Je te souhaite un très agréable mardi
Gros bisous et encore merci pour ta belle amitié

2. minouche145  le 01-09-2009 à 10:59:48  (site)

Image hébergée par Casimages.com : votre hébergeur d images simple et gratuit

Kikou me revoilou !!!
Tout d’abord je vous remercie beaucoup
Pour tous les commentaires
Que vous m’avez laissé
Pendant ma longue absence,
Cela fait chaud au cœur
De voir que l’amitié virtuelle
Existe bel et bien et cela me fait bien plaisir
Les enfants et moi-même
Avons passé un mois de rêve à Ostende
Ma ville de vacances préférée
Ma ville de cœur
Que de souvenirs !!! A chaque coin de rue
Tous les souvenirs de ma tendre enfance
Ressurgissaient !!! le temps du bonheur
De l’insouciance aussi, tous ces bons moments
De ma maman, ma sœur
Mon frère et ma belle-sœur
Tous aujourd’hui partis pour cet autre monde
Dont on ne revient jamais…
Mais je sais qu’ils étaient là,
Tout près de moi tout au long de ce superbe mois !!!
Nous avons eut un temps splendide tout le mois
Et nous sommes tous les trois bronzés
De cette belle couleur ambrée qu’on ne trouve qu’à la côte !!!
De vrais pains d’épices lolll
Bon assez parlé de moi,
Comment vas-tu ?
J’espère que tout s’est bien passé pour toi
Durant ce mois d’Août,
Que tu as bien profité de tes congés,
Et que tu t’es ressourcée de repos,
De bonheur, et d’amour …
Toutes ces petites choses qui nous rendent heureux et nous donnent
La « pêche » pour entamer une nouvelle année de boulot
Ou d’études . Mon petit Samy reprend aujourd’hui
1er septembre, il rentre en 6ème primaire
Et Chaymaà rentre le 2 en 4ème secondaire
On est repartit pour un an …
Je te souhaite un très agréable mardi
Gros bisous et encore merci pour ta belle amitié

 
 
 
posté le 27-08-2009 à 15:19:15

Tzara en homme d'affaires.

En forme de souvenir. Ce devait être un soir d'hiver, il pleuvait sur un Paris refroidi, rue de Lille, dans les premiers numéros, un immeuble bourgeois de bon standing, l'appartement de Tzara. Un musée ethnographique dès l'entrée, et, dans le bureau, une bibliothèque de livres précieux.
Il doit me confier des inédits de René Crevel pour un petit numéro d'hommage de la revue "Temps Mêlés". Il ouvre de grands et profonds tiroirs, admirablement rangés, en sort des dossiers comme le commissaire de police, celui d'une enquête menée à son terme. Il déborde de documents. Et voici quelques feuillets et un texte (médiocre mais le meilleur a été publié) de Crevel.
L'homme est froid, précis, et fait plutôt penser à une puissant homme d'affaires. J'ai droit en prime à un numéro de la revue "Interventions" où figure un texte de Crevel. Cela ressemble, austère, à une revue de sociologie. On en restera là.
Je pense que Dada était loin puisqu'on on en était à la phase muséale.

 


 
 
posté le 27-08-2009 à 15:15:59

Sur les pas de Jarry.

Sur les pas de Jarry.

On connaît la célèbre photographie de Jarry sur sa bicyclette "du côté de Corbeil". Voici, déniché du côté des archives de Louise Faure-Favier (une amie d'Apollinaire), la photographie de la maison du couple Vallette-Rachilde où Jarry venait passer ses dimanches (ayant par ailleurs une manière de baraque construite sur la Seine, aux abords).
La villa de Corbeil était l'annexe du Mercure de France, et avait des allures de phalanstère. Jarry venait  y faire ses facéties, quelques unes des aventures les plus légendaires avaient Corbeil pour cadre.
Il était de l'ordre des usages bourgeois de l'époque de posséder une propriété proche de Paris mais offrant tous les avantages de la campagne. Les bords de la  Seine, célébrés par les Impressionnistes, sont en faveur (les Nathanson à la Grangette et Mallarmé, du côté de Valvins). Editeur des symbolistes, Vallette ne pouvaient échapper à cette mode.

 


 
 
posté le 26-08-2009 à 20:40:00

Brassaï le piéton du merveilleux.

Piéton de Paris, comme son ami Léon Paul Fargue dont il a laissé un étonnant portrait "nocturne", sans doute témoignage de leur complicité, Brassai est un oeil en permanence ouvert sur les singularités du réel (version dynamique de cette intrusion du rêve dans la réalité qu'évoque Gérard de Nerval et certainement aurait-il été son complice dans les errances du bon Gérard).
Brassai capte, comme le chasseur de papillons avec son grand filet, des instants sans jamais forcer sur le trait, ni composer, se donnant seulement la chance d'être là au bon moment, quand un de ces petits miracles qui enchantent notre quotidien se produit. Il est vraiment le poète des instantanés (il est aussi celui des ambiances, on en rencontrera). Il donne de la ville  (en  l'occurrence Paris) des images que l'on dirait hantées. Les êtres y sont toujours singuliers même s'ils se livrent à des tâches ordinaires, s'ils sont dans leur élément.  C'est l'art de BrassaÏ qui les fait basculer dans l'état de ce merveilleux invoqué par André Breton.

 


 
 
posté le 26-08-2009 à 12:26:11

Le voyou Rimbaud.

Il est des sujets tabous. Contester, critiquer certaines catégories sociales relève du délit. On peut nous entraîner devant les tribunaux pour quelques remarques jugées désobligeantes, voire criminelles par exemple si l'on porte un jugement sur les juifs (ayant plus d'indulgence, inexplicablement,  quand il s'agit des chrétiens ou des musulmans).
Il en est de même en littérature et curieusement vis à vis de ses figures les plus déterminantes. Sade ici, Rimbaud là (pour l'exemple).
Rimbaud donc. Sans nul doute une plongée dans la verbe que nul n'avait osé porter si loin, quitte à s'y perdre (et lui, en fuir les prestiges), une radicalisation du rôle de la poésie qui l'érige en modèle ;  peut-être en fait-on une sorte de saint et martyr comme l'église catholique a tant aimé en placer sur le calendrier des postes.
Le surréalisme à travers Breton, son mentor, aura été l'un des plus clairvoyants détecteurs de son temps et on lui doit une révision radicale de notre panthéon littéraire. On peut le suivre. Et la gloire de Rimbaud (tout comme celle de Lautréamont) lui doit beaucoup. Alors, peut-on oser émettre des réserves sans passer pour un lourdaud, un béotien, quelqu'un, justement, de cette catégorie que l'enfant génial de Charleville poursuivra de sa haine.
La traversée du verbe (comme il y a la traversée du miroir - mais n'oublions pas en retenue et sans se croire obligé d'agresser l'opinion, le rôle aussi essentiel de Mallarmé) aura conduit Rimbaud  à fuir jusqu'à la reconnaissance qu'elle entraînait. D'où ce Rimbaud double : l'enfant insolent (et parfois irritant) du Quartier Latin et des Vilains Bonshommes, et le marchand d'arme du Harrar. Un palmarès qui donne, à en croire ses biographes, les clefs pour le comprendre. Mais n'est-ce- pas là une assez complaisante et naïve manière d'excuser ses "mauvaises manières".
Le génie (?) doit-il tout excuser ?
On voudrait nous le faire admettre. Au prétexte que la réalité est horrible, mais nul n'y échappe ;  peut-on tout oser pour la contredire, quitte à y sacrifier la qualité des rapports humains. Par exemple (il y en a de multiples), l'attitude de Rimbaud vis-à-vis de Verlaine confine à la plus détestable muflerie (ne va-t-il pas jusqu'au chantage pour affaire de moeurs dont il était lui-même l'objet trop aimé) et l'on passera sur de louches trafics comme des  ventes d'armes accomplies dans la plus parfaite tradition des aventuriers les moins recommandables.
Alors on portera sur l'autel de toutes nos admirations un petit voyou qui avait tenté, par la poésie, d'outrepasser l'horreur du quotidien, d'un réel qu'il frappait de son plus total mépris. Il en résulte des poèmes d'une vertigineuse beauté. mais fallait-il pour cela se rendre odieux ?

 


 
 
posté le 25-08-2009 à 15:45:20

Jean Cocteau sous le feu de la critique.

La hargne dont témoignait Philippe Soupault contre Jean Cocteau était assez représentative de l'état d'esprit du groupe surréaliste qui voyait en lui un arriviste, toujours à l'écoute des dernières nouveautés, touche à touche futile et opportuniste.
Il y avait du vrai dans un jugement qui aura été  cependant trop radical et systématique au point de rejeter en bloc une oeuvre qui, dans tous ses aspects, révèle un prodigieux inventeur, un poète surtout (et romancier) et un dessinateur qui avec une aisance stupéfiante va accumuler des thèmes, des figures, des plongées inspirées dans les domaines les plus divers dont ceux des mythologies.
Tout chez Cocteau paraît trop facile et c'est son habileté même qui lui portera tord. Un préjugé moderne veut que la création s'accompagne de souffrance, d'une nécessité intérieure qui engage totalement l'individu dans sa recherche. Toute spéculation et sujet apparemment gratuit est condamné. Et c'est ainsi que toute une partie de la production  contemporaine va choir dans une sorte de purgatoire où la critique professionnelle avait quelque crainte à se risquer craignant les condamnations les plus intempestives.

 


 
 
posté le 25-08-2009 à 12:06:12

Apollinaire sur le chemin des dames.

Le nom même du lieu était prédestiné pour l'aventure personnelle d'Apollinaire vivant les affres d'amours malheureuses avec plusieurs "amantes" de coeur, de Louise Coligny-Châtillon (dite Lou), à Madeleine (avec laquelle il y aura officialisation des fiançailles) et Jacqueline (la rousse) enfin, qui épousera la poète avant la fin de la guerre mais quelques mois seulement avant la mort de Guillaume.
Source pour Apollinaire d'une abondante correspondance et de poèmes, le tout entrant pour une large part dans la constitution d'une oeuvre qui en gardera le ton si particulier.
Pourtant, pour la plupart, l'évocation du Chemin des Dames est liée à l'atrocité même de cette guerre qui enterre vivant dans la boue les combattants, qui incite au "corps à corps" le plus atroce. Et c'était bien le paradoxe qu'une dénomination aussi plaisante soit confondue avec l'une des pages les plus sombres de la grande guerre.
Chemin des dames parce qu'il fut l'itinéraire emprunté par les filles de Louis XV pour aller à Reims au couronnement de leur père. Elles voulaient faire étape au domaine de Narbonne qui avait dans la vallée de l'Ailette son château,  étant de leurs relations les plus chères.
Plateau calcaire entre la ville de Laon, perchée sur son monticule, et Soissons autre lieu de l'histoire d'une France qui se créé, le Chemin des Dames offre de vastes étendues à la culture (betterave et blé) et quelques étapes de pèlerinage pour ceux qui veulent comprendre une page d'Histoire qui fut celle d'un enfer.

 


 
 
posté le 25-08-2009 à 11:01:12

Brassai roucoule.

Ca avait plutôt mal commencé. D'avoir publié dans ma petite revue Sens Plastique une reproduction d'une sculpture de Germaine Richier, sans mentionner le nom du photographe, m'attira une lettre comminatoire du "secrétariat" de Brassai qui me traitait d'assez vive façon assortie d'une demande de "droits" que j'eusse été bien incapable d'honorer. La chose en resta là et bien longtemps après je rencontre enfin Brassai en personne, dans son petit appartement du côté du boulevard Port Royal. Ce fut par une chaude et belle journée, de franche gaieté, et le déferlement d'une chronique roucoulée de cette voix propre aux roumains qui chantent quand ils parlent. Puis il y aura une exposition de ses sculptures, chez mon ami Verrière à Lyon. Un régal dans la simplicité naturelle des formes, un sens unique de la lumière qui y faisait ses caresses, jouait avec ses ombres, régalait la pierre de toutes ses facéties. Brassai était devenue une star. Les livres se succédaient qui rassemblaient ses admirables photographies selon des thèmes qui sont ceux de la poésie. Et c'est là qu'on comprenait (enfin) qu'il était bien plus qu'un bon technicien (ou un inventeur, un prospecteur, comme Man Ray) :  un poète de la photographie

 


 
 
posté le 24-08-2009 à 19:45:45

Les amours tragiques de Malraux.

Des amours tragiques de Malraux.

Il avait du panache, commençait à être célèbre, elle sortait de sa province (Beaune la Rolande, dans le Loiret). Ils se rencontrent dans les couloirs de la NRF chez Gallimard (que de rencontres dans ces couloirs), et c'est le coup de foudre pour une jeune fille qui vient de publier son premier roman. On la dit belle, elle a des ambitions romantiques. Malraux, l'objet de son culte va descendre de son perchoir pour l'entraîner dans une folle histoire d'amour qui inspire, à la jeune femme des pages d'une tendre et folle ardeur. Avec une fraîcheur qui dit bien la qualité de ses sentiments (on doute plus de ceux de Malraux).
Suzanne Chantal,  l'amie de Josette Clotis (l'héroïne de cette aventure), a recueillie après sa mort dans un terrible accident de chemin de fer, les papiers de la défunte qui était sa meilleure amie. Elle en tire un ouvrage qui vaut plus pour l'émotion qu'il traduit , l'histoire étant la banalité d'une aventure amoureuse. Semée d'embûches, encore qu'il y aura des heures heureuses et même deux garçons qui, eux-mêmes, sont tués dans un accident de voiture. Brusquement la tragédie est venue se glisser dans les frissons du coeur. Malraux épouse finalement sa belle soeur elle-même devenue veuve. Tant de rebondissement donnent à la vie de Malraux un ton d'aventure qui est bien à la mesure de son oeuvre. Ce qui ne le rend pas nécessairement plus sympathique. En revanche, on a un portrait délicieux de cette Josette Clotis qui a des réactions spontanées, entre le goût un peu naïf du luxe et l'intelligence de s'adapter à toutes les situations. Partagée entre la vie de château et la confection des confitures, elle est le portrait typé d'une femme ouverte, vive, sans préjugés ardente et qui serait aujourd'hui lectrice fidèle d'Elle et des magazines de mode.

 


 
 
posté le 24-08-2009 à 19:27:46

Tinguely dans la rue.

C'est Iris Clert qui nous avait fait découvrir ces infernales machines qui débitaient du dessin à toute allure et de quoi ruiner les spéculateurs. C'était l'intérêt de la chose, et la force du propos. Le dessin mécanique vole à celui que propose la main la priorité de l'automatisme. Tinguely en fera un mode d'action soutenue par son ami Pierre Restany. Dans la foulée du "Nouveau Réalisme"  Tinguely offrait la participation la plus évidente de la machine, son intervention relevant du mécanicien qui agence des pièces détachées à des fins de dynamiser le monstre qu'il engendre.  J'avais compris le message et voulait faire participer à ma réflexion des amis artistes qui donnèrent, pour ma revue "Sens Plastique", leur opinion. Et sans aller chercher bien loin je m'adressais au milieu qui fréquentait le Soleil dans la tête : Robert Lebel, Pierre Jacquemon, S.W.Hayter, Raymond Grandjean, Gaston Criel, Sonia Delaunay, Lapoujade, Robert Estivals, Pierre Loeb (très hostile et donnant un magnifique témoignage), John Levée, Bertholle, Camille Bryen (dialogue avec le poète Jacques Boursault).
Pour aller jusqu'au bout de l'expérience Tinguely installera sur le trottoir de la rue de Vaugirard, devant Le Soleil dans la tête, une de ces machines drôlement agitées quand elles fonctionnaient et dessinaient à toute volée. Les passants, dessin en main (les veinards), découvraient un aspect de l'art contemporain . L'un de ceux qui remettent le plus radicalement en cause le talent. Voire.
Il y aura de longs débats contradictoires et cela peut continuer

 


 
 
 

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