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lettres de la campagne

posté le 01-03-2011 à 11:24:52

La figure de l'Amour.

Disparu trop jeune, c'était un peintre dans le plein élan de son talent qui fut aventureux et lyriquement inspiré en ses débuts, quand il pratiquait une gestuelle fort libre et savoureuse, manipulant la couleur en draperies légères, avec quelque chose d'une douce et rêveuse sensualité, entre une fine suggestion des éléments et de discrètes allusions réalistes. Il passera bientôt à un tout autre registre, agrandissant, sur la toile la projection d'images empruntées aux livres scolaires et tout spécialement au Petit Larousse illustré dont il se plaisait à mêler des images empruntées et superposées en de nouvelles suggestions qui avaient toujours un caractère autobiographique et traduisaient les rêves et les fantasmes d'un esprit qui avait gardé toute la fraîcheur de son adolescence.
Mais avant, avant, quand il était encore presque un enfant. Non, un adolescent qui avait gardé quelque chose de son enfance. Je le vois encore, au Soleil dans la tête, venant me lire ses derniers poèmes. C'est alors qu'il trouve sa signature et son nom de guerre : Cheval Bertrand. Cheval, me précisait-il, en hommage au Facteur du même nom dont il aimait le Palais, ce rêve réalisé jour après jour, en faisant sa tournée et ramassant les pierres du chemin.
J'aimais et partageais avec Cheval Bertrand cet amour des marginaux qui vont jusqu'au bout de leurs rêves. C'est alors que tout en écrivant des poèmes il commence à peindre. Quoi ? Ce qu'il voit, ce qu'il a autour de lui, les gens qu'il aime. A commencer par sa toute jeune femme. J'ai tout de suite aimé ce portrait où elle est raide et digne comme une figure de Cranach. La fleur qu'elle tient à la main c'est l'offrande de l'amour. Il trône aujourd'hui dans mon atelier-grenier, et sa présence me réchauffe le coeur.

 


Commentaires

 

1. saintsonge  le 01-03-2011 à 11:48:17  (site)

Ah bah je comprends qu'il vous "réchauffe le coeur"...! J'avais déjà remarqué que vous l'appréciez , ce Bertrand-là !... Dites, je crois que vous l'avez repéré aussi :
- C'est , à Paris, en ce moment, un Hommage à Cranach (et son temps)..
Pas eu l'espace-temps pour m'y rendre.
Irez-vous goûter de la cour de Wittenberg aux paysages idylliques de ses toiles à la plasticité "végétale" ?.. Tel St Exu, je n'ai aucune qualité mondaine.
La multiplication des Vénus ferait peut-être suite à votre "figure"-ci "de l'Amour" ?.. Adam et Eve en pied au Paradis de Paris.... 1531 en plein 2011 !

2. philippine  le 01-03-2011 à 17:24:46  (site)

pour moi, le saule pleureur, et pourquoi limiter cela à la nuit ?

3. sorel  le 01-03-2011 à 23:51:47  (site)

c'est un peu court..... vous n'aimeriez pas ce jeu d'identification, dois-je croire ! La nuit est avancée, je vous la souhaite quand même heureuse.

4. philippine  le 02-03-2011 à 09:10:08  (site)

un peu court ? non, j'ai bien aimé votre jeu !
alors faisons un peu plus long : un saule pleureur donc : parce que, adolescente, il y en avait tout autour de l'immeuble où j'habitais. Les filles et les garçons se donnaient rendez-vous dessous, pour quelques baisers et caresses friponnes. Je rentrais souvent alors chez mes parents les cheveux ébouriffés, un bouton de chemisier manquant, et les joues un peu trop rouges !
Ensuite, parce que, aujourd'hui, j'aime les arbres dominateurs et rassurants qui donnent une impression de protection et sous un saule pleureur on se sent immédiatement rassuré, et parce que l'idée qu'un arbre pleure et que je puisse l'encercler de mes bras, et de mon corps, m'émeut terriblement.
votre curiosité est-elle satisfaite ?

5. philippine  le 02-03-2011 à 09:11:01  (site)

Et vous, sous quel arbre, vous asseyeriez vous ?

6. philippine  le 02-03-2011 à 12:58:58  (site)

vous séchez Monsieur Sorel ?

7. sorel  le 02-03-2011 à 16:35:46

Non, je ne sèche pas mais j'étais tout simplement sur les routes (il fait si beau aujourd'hui) et je n'osais espérer une visite de vous, déjà que je me reprochais de vous avoir peut-être forcé la main (rien que la main ?) pour développer, et j'avais raison, j'ai "adoré" votre petit croquis de votre jeunesse (j'y étais)
Alors pour l'arbre, c'est le tilleul (il y en avait dans le jardin de mes parents) et j'aimais l'odeur entêtante et la rumeur des abeilles. Sinon que je ne m'y livrais pas comme vous à des jeux éducatifs. ça doit me manquer. Mais il est trop tard.
Le tilleul, donc, mais aussi le saule pleureur (l'avoir sur sa tombe, comme Napoléon sans se prendre pour Napoléon, je déteste ce traîneur de sabre). Et puis encore (car je suis gourmand) le peuplier pour le bruit du vent dans sa ramure, et, pour la même raison, les pins. Je vais parfois au fond du jardin pour écouter ce bruit qui est comme un frisson sur tout le corps de l'arbre. Bonne et douce nuit.

8. sorel  le 02-03-2011 à 16:41:11

J'oubliais, mais rassurez vous je ne suis pas obsédé par elle, les merveilleuses évocations (sur les arbres) de Katherine Mansfield lorsqu'elle habitait quai aux Fleurs à Paris, chez son amant Francis Carco. Elle dit des choses que vous pourriez dire. Vous êtes si proche d'elle.

9. philippine  le 02-03-2011 à 17:35:47  (site)

je suis à la recherche d'un de ses livres, vous avez piqué ma curiosité.

10. philippine  le 02-03-2011 à 17:54:53  (site)

Alors voilà, je viens de commander trois livres de cette Mme Mansfield avec qui j'aurais des points communs (c'est trop d'honneur) et nous aurons alors l'occasion d'en parler encore. Vous avez bien de la chance d'avoir pu vous balader aujourd'hui. J'étais au travail et maintenant il fait un peu froid pour aller vagabonder dans la nature ! dommage.

11. Philippine  le 03-03-2011 à 08:47:55

Un petit coucou en passant pour vous souhaiter une bonne journée ! dans la campagne environnante ? pensez-à moi recluse dans mon bureau !

12. sorel  le 03-03-2011 à 09:57:00

N'allez pas imaginer que je suis un privilégié qui a ignoré les dures contraintes du travail. J'étais journaliste et en charge d'une équipe (des chroniqueurs culturels !) maintenant je dispose de mon temps pour écrire à ma façon, lentement, car j'aime rêvasser d'où un blog (non deux) pour entretenir ma main et ma tête à une petite discipline. Naturellement je penserai à vous, encore contrainte aux heures de bureau. mais à vous lire dans votre blog je vois que vous gardez l'oeil vif et l'âme fraîche, et l'appétit des sentiments (et des sensations) ce qui est notre bien commun le plus précieux. A bientôt.

 
 
 
posté le 01-03-2011 à 00:32:36

Restif de la Bretonne espion.

Piéton tenace, capable de traverser la ville en tous sens, Restif de la Bretonne sera pourtant surtout fidèle à l'Ile de la Cité et aux ruelles du quartier Saint Séverin, où il avait ses habitudes, ses repères et ses secrets. Et maints petits rendez vous dans des mansardes pour câliner des petites couturières auxquelles il apprenait l'art de la débauche.
Là où Sade, son contemporain, est pervers et hautement cérébral, lui est plus simplement fripon. Avec même, une tendance à la sentimentalité appuyée et vaguement théâtrale. Coté Fragonard, côté Greuze pour faire bonne mesure.
C'est dans ce vieux Paris, miraculeusement conservé (et rénové) que l'on peut encore trouver des maisons qui furent de celles qu'il fréquentait. Salles de jeu, repaires de fêtards, petites maisons dispensant des alcôves discrètes et des rencontres câlines.
L'homme aura une vie familiale ponctuée de naissances qui le perturbent plutôt, encore qu'il ait des rapports intimes avec sa fille.
Piéton avide de ces petits faits qui rendent la promenade attrayante, et le Paris du XVIII° avait cette qualité particulière qui veut que la vie sociale du peuple s'y déroulait sans complexe et avec une hardiesse de ton qui va nourrir la pensée révolutionnaire. Restif qui participe si pleinement de l'esprit galant du XVIII° va vivre la Révolution de l'intérieur, d'où les fameuses "nuits", alors qu'il déambule dans les rues avec son immense cape et son hibou sur la tête, ce qui sera la raison pour laquelle on le soupçonne parfois d'avoir été une sorte d'espion du pouvoir du moment.
Le galant transformé en agent de renseignements. La métamorphose est trop violente pour qu'elle paraisse crédible.


 


Commentaires

 

1. saintsonge  le 01-03-2011 à 04:06:07  (site)

OUF !....
A une qui me disait que je marchais beaucoup , je répondis : - mais ne suis pas Restif (en Bretonnitude !)...
Ne suis allé dans ce quartier des coquins espionnages....
Ai appris qu'on logeait les Français dans les "caves" dans le XIème, maintenant , tels de nouveaux rats !... Ah, on réinvente Kafka (qui écrivait dans une cave sa métamorphose) et Sue !... Des sous-plex !!! Le bon Jour très très matinal, voyez... La nuit est d'encre encore... Une glu noire qui colle à mes carreaux.... Kenavo du site !

2. PHILIPPINE  le 01-03-2011 à 10:21:06  (site)

Coucou,

je crois que je l'aurais bien aimé ce Restif de la Bretonne parce que :
- j'aime marcher, dans le silence de la nuit encore plus..
- parce que j'aime Paris, du fond de ma campagne haute-saônoise..
- parce que j'aime les hommes fripons et sentimentaux
- parce que les petites maisons aux alcôves secrétes où des femmes consentantes attendaient des libertins me font fantasmer
- parce que j'aime le XVIII et la vision un peu décadente que j'en ai, bien qu'étant trés à l'aise dans ce XXIème siécle.
- parce que j'aime le mystère, les intrigues ...
- la seule chose qui me dérange profondément sur ce Restif de la Bretonne est qu'il abusait de sa fille apparemment et cela je le condamne et le déplore haut et fort, aujourd'hui et hier !
bonne journée, je me sauve, je suis au travail !

3. PHILIPPINE  le 01-03-2011 à 10:24:42  (site)

j'aime énormément les arbres, je peux m'arrêter devant l'un d'entre eux et le regarder comme une femme regarde un homme -enfin presque- je peux m'installer dessous et lire ou simplement savourer ce moment de tranquillité, cela me fait mal lorsque des arbres sont abattus, eh oui j'aime aussi beaucoup les arbres centenaires parce qu'ils sont forts et qu'ils ont été témoins de tant et tant d'histoires ! mais j'aime aussi les arbres récents parce qu'ils sont fragiles et qu'ils ont besoin d'être protégés (ça c'est mon côté maman poule), j'aime la nature infiniment ! allez cette fois ci je file !

4. sorel  le 01-03-2011 à 17:01:14  (site)

Bonjour monsieur Saint Songe, parisien d'hier, breton de toujours. Oui, les caves, on y dansait bien quand Sartre trônait au Flore. J'ai connu une jeune femme (jeune à l'époque) que l'on payait pour "chauffer" la salle. Moi j'aime trop le soleil pour admettre cette formule pour mon propre usage. Je préfére les sommets, dans le vertige du ciel. Ciel bleu dans ce Loiret où je me suis réfugié, trouvant Paris trop cruel pour mes vieux jours mais le RER m'y conduit.

5. sorel  le 01-03-2011 à 17:08:59  (site)

Coucou Philippine. Vous seriez la plus charmante Restif (de la Bretonne), et je suppose que vous êtes aussi coquine qu'il le fut (coquin).
Je suis allé me promener chez vous, pour retrouver cette ambiance délicieusement féminine, dit comme ça ça a l'air nigaud, mais je ne trouve pas d'autres formules.
On parle d'arbres. Ce sont les plus fidèles compagnons.
Qu'il vous pousse plein d'arbres dans la tête quand vous dormez.

6. saintsonge  le 01-03-2011 à 19:01:36  (site)

Le Bon soir, du coup, la nuit s'apprête dans le calque lointain du ciel, êtes-vous Orléanais ? Si oui, y ai vécu trois mois, à La Source, Place de l' Indien (de là, suis allé prier à l'emplacement même où Max Jacob s'agenouilla (une dalle le mentionne), à St Benoït-sur-Loire !.. Breton d'adoption, vous savez bien. A force de naître, mourir à soi, renaître ici, redisparaître par là, revivre encore, revenu par Ys, je me crois bien universel..... Notre amie (si féminine) est "coquine", oui oui (je ne trahis pas sa pensée en vous le révélant, et je ne passerai pas pour délateur (loin de moi cette idée)... Vous deux me comprendrez donc que je participe à la "danse" , quelque esprit royal en tête... C'est juste qu'on y dansait aussi bien dans ces caves de St Germain (ai connu, en 1978, une asiatique, très jolie strip-teaseuse qui nous faisait "ça" au beau milieu des tables centrales , tout près de moi , ivre de ses effluves très parfumées (non de champagne)...Ah là là.... Vertige aussi, plus qu'à Chamonix !

7. philippine  le 01-03-2011 à 19:57:35  (site)

mais je rêve : c'est un complot !
mais ça me plait assez d'être votre amie à tous les deux !

8. saintsonge  le 02-03-2011 à 08:16:33  (site)

Une jeune femme entre deux "arbres", cela est-il "complot" ou convoitise d'assurance ? Votre choix de mot n'est pas le bon. L'épaule des écorces n'écorche aucunement votre coeur, rassurez-vous....

9. philippine  le 02-03-2011 à 09:02:15  (site)

alors deux arbres puissants et dominateurs qui, d'une main, calmeraient mes angoisses du soir !

10. saintsonge  le 02-03-2011 à 11:36:01  (site)

Akhenaton - que "force" ampleur et optimisme (pour moi du moins que le mot "dominateur" gène...), lorsque - oui- je me sens très protecteur !;;..."Voici que le semeur sortit pour semer" que ne suis-je que graine de Figuier ? ou Peuplier, lorsque je peux plier devant toute Beauté du Monde ?;;;

11. PHILIPPINE  le 02-03-2011 à 11:47:06  (site)

Joliment dit comme toujours, vous êtes un séduction, Monsieur Saint-Songe !

12. PHILIPPINE  le 02-03-2011 à 11:47:43  (site)

séducteur voulais-je dire ! et zut, vous allez encore me reprendre.

13. PHILIPPINE  le 02-03-2011 à 11:48:24  (site)

je vais apprendre à tourner ma langue dans ma bouche avant de vous répondre.

14. saintsonge  le 02-03-2011 à 12:04:06  (site)

Je sais d'hui !... depuis toujours , on me le dit, parfois à mes dépens, ça dépend..
Rien n'est plus commun que ce nom (de séduction) , mais rien n'est plus rare que la chose, non ?.

 
 
 
posté le 28-02-2011 à 10:21:41

Ben annonce le plaisir.

Il avait fait ses débuts, dans les années 1960, au coeur de l'Ecole de Nice (Arman, Martial Raysse) et se distingue alors par la diffusion (excessive et brouillonne) de maximes, phrases provocatrices, dont il ressortait toutefois qu'elles exprimaient une vérité première, une vision plutôt saine, et gaillarde de l'art plongé dans la vie et le quotidien.
Cela plaisait, et Ben deviendra, avec le temps, le pourvoyeur de phrases brèves mais propres à enchanter le consommateur branché. D'artiste d'avant garde il devient complice (?) d'une consommation de luxe, portant ses fameuses phrases sur des objets vendus très chers en des lieux très chics et pour des gens très snobs.
Dans la masse de sa "production" on trouve un lumineux "pour le plaisir" qui ne manque pas de sel quoiqu'il soit un peu paradoxal. Enoncer, annoncer, proclamer, imposer, suggérer la pratique du plaisir (ou sa découverte) comme on annonce l'arrivée du train ou la qualité d'une lessive peut donner l'impression que le plaisir est une nécessité publique, offerte à tous comme n'importe quel produit.
Il y perd beaucoup de son mystère et de sa qualité première. C'est qu'il se cache dans l'inattendu, qu'il n'est pas un produit de consommation mais une approche intime de l'être avec l'émanation  d'un autre, d'un objet électif, et qu'il se prend dans l'échange complice et non comme une obligation programmée.

 


 
 
posté le 26-02-2011 à 10:23:55

Rancillac en son palais d'enfance.

C'était du temps où il avait son atelier à Bourg-la-Reine et autant que je m'en souvienne, une pièce encombrée par une vaste échelle, à moins que ce soit un escalier de meunier qui montait vers un grenier.
On avait songé à faire un  petit film (en 8 Mm) qui ne sera jamais achevé et a été depuis perdu. Rancillac, à l'époque, était en pleine effervescence créatrice et il se cherchait.
C'était émouvant de voir cette  frémissante gestation où la part du hasard joue autant que l'audace des entreprises. Il peignait avec tout ce qu'il avait sous la main, comme ces pinces à linge qui, appliquées avec régularité, construisaient un étrange et fascinant palais.
J'ai longtemps vécu dans la familiarité de cette composition aussi singulière qu'unique dans son oeuvre, car il n'était pas de ces artistes qui exploitent une trouvaille, un genre, et font commerce de leur invention jusqu'à la saturation (ils sont nombreux aujourd'hui à pratiquer cette politique du confort intellectuel et du clin d'oeil pour se faire reconnaître), et elle m'a suivie dans mes nombreux déménagements comme une sorte de fétiche d'une amitié, peut-être un accord fondamental avec cette manière d'explorer la matière et de rester fidèle à l'idée d'une représentation qui ait ses références dans le monde du visible. Mais la moindre tache n'est-elle pas, elle aussi, à sa manière, un bout du réel réveillé par la pratique de l'art. Que l'on songe à la remarque de Leonard de Vinci par rapport à une certaine tache sur un mur et qui regardée avec insistance nous entraîne dans un monde merveilleux.

Je présageais une carrière originale à la lumière de cette vitalité créatrice qui se moquait des risques encourus, qui abordait tous les sujets sans s'y attarder.
Le lendemain ce pouvait être un portrait, un paysage presque naïf, des objets quelconques (et même de la sculpture).
Viendrait ensuite  la part du geste plus vigoureux, des débordements d'humeur partagés entre la colère et la joie, une sorte de fête de la couleur dans un déchaînement graphique. La part majeure de son oeuvre.
Moi je resterai fidèle à ses débuts tout à la fois balbutiants et frénétiques. Images d'une vitalité artistique d'une exceptionnelle saveur.




 

 


Commentaires

 

1. saintsonge  le 28-02-2011 à 00:19:53  (site)

Votre année 56 , alors ?.. et qu'évoqueraient ces zones de turbulences politico-sociales actuelles, à l'intérieur du Pays comme de l'extérieur Maghrébin ?.. Non passé rue Hallé, de retour de mes cinq jours Bougivalais/Parisiens avec de longues pensées vers vous, bien sûr... Vu l'hôtel Stella, habitat personnel d'Aragon (89/04), propriété de sa mère (c'est plus facile...) . mon ami l'architecte n'a pu trouvé un stationnement pour une halte au Flore...Ai comparé de visu les toiles mémorisées de Buffet (56 aussi !) avec les actuels Pont Saint-Martin, Concorde, Tour St Jacques, Opéra, Ile de la Cité, L'église de Saint-Germain des Près .... Une idée qui vint comme ça en passant... Je faisais le co-pilote... Conduire ne me convient pas, je ne peux rêver , mon permis rose n'a guère servi... Voilà, je fus comme j'ai dit : de passage à Paris... Ai retrouvé les giboulées douarnenistes, un corps remodelé (c'est que la Capitale vous sculpte autrement, il y aura alors, pour moi, sans doute : un avant Paris, puis un après-séjour...de quelques jours...) Ai songé à Turner et aux Impressionnistes sur Bougival, Berthe Morisot and Co...
La bonne nuit....

 
 
 
posté le 25-02-2011 à 22:29:31

Le roi danse.

Le roi se devait d'être flamboyant. Aux origines, le bouclier sur lequel on hisse Huges Capet lors de son élection à Noyon,  suffit à le crédibiliser. Le temps de la bravoure militaire ne suffit plus. Il faut du panache pour se faire reconnaître. Louis XIV le comprend, applique une méthode qui va plonger la royauté dans le luxe qui va la perdre.
Splendeur et dynamisme, apparat et sens artistique concourent à la reconnaissance d'un pouvoir qui  se manifeste dans un décor théâtral. Alors le roi danse.
Niestzche l'a bien dit :  la danse c'est la vie. Le corps s'y déploie dans ses multiples ressources gestuelles.
On danse sa vie.
Louis XIV danse son pouvoir, lui donne tout le faste et l'harmonie qui doit l'assurer de se faire reconnaître, d'exister.
Ce seront de splendides spectacles à Saint Germain en Laye où la Cour réside alors que Versailles est en chantier, et à Versailles lorsque la Cour enfin s'y installe.
L'or y domine, qui est l'image du soleil. Une musique adaptée s'emploie à donner au geste la majesté qu'elle veut imposer. Ce sont les apports de Lully, Marc Antoine Charpentier, Michel de Lalande, Nicolas Campra et cette imposante génération de musiciens, disciplinés aux exigences du rituel voulu par une Cour où tout geste a sa signification, et la danse en parachève la symbolique.
Louis XIV danse, c'est la figure d'Apollon, tout le château (de Versailles) et les jardins sont placés sous son signe.


 


 
 
posté le 25-02-2011 à 15:57:00

Unica Zurn, un piège à regards.

Alice a traversé le miroir.
Appliquons sa méthode à une oeuvre d'Unica Zurn.
C'est, généralement, de l'aquarelle. La matière y est légère, et l'eau y a fait ses nappes frémissantes et moirées de toutes les merveilles qu'elle distribue du bout des doigts, qui sont de fée. Une fée inquiète cependant. Portée à dénicher des animaux insolites dans des paysages (inventés) qui ne le sont pas moins.
On y trébuchera sur des aspérités géologiques qui ne sont que de son monde, entre l'espace lunaire et d'étranges labyrinthes de nulle part.
L'important n'est pas là. On y rencontre des regards. Tous les regards qui, comme le notre, ce seront attardés. Et, tombé dans le piège, ayant traversé le miroir qu'est l'aquarelle tissée comme un léger voile flottant sous le vent , et le dessin suspendu dans l'espace du papier, nous sommes comme l'insecte piégé et précipité dans son tourbillon.
Une peinture n'aurait pas rendue possible un tel phénomène, une telle projection dans l'oeuvre. On se serait embourbé dans la matière, alors que l'apport de l'eau y joue la transparence. Elle est flottante dans l'espace, comme un léger rideau sur lequel vient s'imprimer les rêves du peintre, qui y fait couler des images, des frissons, des sensations perçues dans leur plus infime perception. C'est la mise à jour de ce que l'esprit conçoit sans même le vouloir et qui flotte en nous, en notre mémoire. L'oeil est le canal de cette magie intime et fulgurante.  
Pratiquant encore plus fréquemment le dessin, elle lui donne cette curieuse apparence de toile d'araignée et notre plongée s'y fait plus rapide encore. On passe de l'autre côté, là où s'agitent les fantasmes d'une femme fragile. C'est une Alice menacée.

 


 
 
posté le 24-02-2011 à 11:24:24

Le livre ouvert au rêve.

Il y a quelque chose d'enfantin à composer des pages où images et mots se mêlent, s'entrecroisent, se répondent dans un jeu qui épouse la mobilité de l'esprit qui chasse en liberté, et que rien d'une soit disant logique va contraindre. C'est le vent du rêve qui souffle sur la page et sème ses graines, le pollen de l'imaginaire.
Enfantin, parce que, justement, l'enfant ne connaît par encore les lois et laisse parler son instinct, ses élans les plus purs, les plus profonds.
Des poètes se sont appliqués à conserver cet  esprit  d'enfance, c'est à dire cette fraîcheur des sentiments et des émotions pour composer des albums qui ne relèvent d'aucune discipline, et de celles que l'on enseigne au nom de l'expression. Ce serait, tout au plus, un chemin détourné du collage (on colle aussi des images que l'on vole) et le parcours de l'oeil suit celui du plaisir qui a présidé à la construction de cette géographie des profondeurs de l'âme. Car c'est une âme, délivrée des censures qui se livre en jouant de fantaisie.  
Ce ne sont pas des confessions nouées d'angoisse, ni des analyses complexes qui n'intéressent que les analystes et les spécialistes du comportement (oh le recours au psychiatre pour se mieux connaître, quelle illusion !) mais des balades poétiques parce que libérées de tout modèle et de toute contrainte.
Les surréalistes qui réhabilitent toutes les méthodes employées pour faire parler la matière et distraire l'esprit, (collage, assemblage, frottage) ont aussi conçu des livres qui s'ouvrent à tous les horizons du rêve. Souvent la femme le domine. Elle est la muse, elle est aussi la vestale de notre feu intérieur.

ouvrage de Georges Hugnet.

 


 
 
posté le 23-02-2011 à 11:50:06

La recherche du bonheur avec la du Barry.

En voilà une qui regardait le temps passer, dans son alcôve et objet sexuel d'un souverain qui la couvrait d'or. La recette du bonheur ? On connaît la triste fin de la "comtesse" du Barry, bonne fille mais née pour une ère de plaisir et jetée dans celle de la Terreur.
Elle illustre les faiblesses d'une époque qui mettait toute son énergie dans la seule recherche du bonheur, croyant qu'il passait par le luxe et la vanité.
Dans le même temps, un citoyen de Genève et de mauvais caractère, inventait une Julie qui incarnait le bonheur simple. Pourquoi ne pas pencher vers celui-là.
La bonheur et la volupté au rythme des saisons, dans un accord fort et simple avec la nature, une complicité qui ne repose pas sur l'avoir mais l'être.
On quitte le monde de Fragonard (le coquin ) pour celui de Greuze. On y minaude moins qu'on y pleure (de bonheur ?). Philippine comprendra.

 


Commentaires

 

1. philippine  le 23-02-2011 à 13:16:08  (site)

c'est ce qui s'appelle mettre fin à mes fantasmes de vie oisive et à mes illusions ! Non, je crois que ce XXIème siècle correspond bien à mon tempérament et que j'aurais été une rebelle à la cour de Louis XIV mais j'aime tellement le chateau de Versailles !!

2. sorel  le 23-02-2011 à 21:47:29  (site)

Je ne voudrais pas mettre fin à vos illusions et je m'en voudrais d'un acte aussi discourtois. Et puis Versailles est l'espace de toutes les fantaisies de la promenade. Les jardins y sont frémissants comme ses visiteurs. On ne peut y errer machinalement. Le voisinage des dieux (toujours si beaux) rend beau celui qui les contemple.

3. philippine  le 23-02-2011 à 22:43:01  (site)

oui, Versailles et ses mystères ! bon, revenons sous la Vème république -y'a t'il encore des mystères ?- bonne nuit à vous aussi !

4. sorel  le 24-02-2011 à 10:20:13  (site)

Il y a encore "les mystères de Paris" . Promenons nous parmi ceux qui nous enchantent. Je vous signale qu'André Breton, dans Nadja en révèle quelques uns qui ont bien de l'attrait. Tout homme cherche sa Nadja non ?

5. philippine  le 25-02-2011 à 17:22:15  (site)

bonjour, je suis désolée, je n'ai pas lu André Breton -je suis contrite- qui était Nadja ? j'ai cherché un peu sur internet -je suis curieuse, normal !!- mais j'aimerais avoir votre version.

6. sorel  le 25-02-2011 à 22:24:00  (site)

Ne soyez pas désolée, mieux encore, je suis heureux que vous n'ayez pas lue "Nadja" d'André Breton. C'est une superbe histoire d'amour inscrite dans un Paris un peu mystérieux. Pensez à moi quand (si) vous la lisez.
Faites moi confiance. J'en profite pour vous rappeler que vous devriez aussi aborder Katherine Mansfield, (il me semble vous avoir laissé quelques messages à ce sujet) parce que votre façon de voir le quotidien, que je trouve si séduisante, rejoint celle de cette femme qui fut libre et savait si bien dire les petites choses de la vie. Elle m'a accompagné dans mon adolescence, et j'y trouvais un idéal féminin.

7. philippine  le 25-02-2011 à 23:22:23  (site)

merci de ces précisions, je vais enrichir ma liste de livres à lire ! En échange, et pour ne pas être votre débitrice, j'accepte de vous donner la si jolie photo de Florence ! bonne nuit

 
 
 
posté le 21-02-2011 à 09:42:21

Les Cabinets secrets de Rohan.

Sont-ce de menus plaisirs que ceux de ces aristocrates (et de surcroît prélats) qui vivent en galanterie comme le  premier (ou le dernier) des "roués", ces seigneurs qui nagent en eaux troubles et sont clients de prostituées au besoin, qui se cachent derrière des noms de fantaisie frôlant souvent avec ceux de la noblesse. Petites catins roulées au feu de l'ambition, qui traînassent du côté du Palais Royal, sous ses galeries où beaux seigneurs et filles faciles se croisent en brin de fleurs et mots moqueurs.
Le cardinal de Rohan sera l'un d'eux, manipulé par la finaude et vicieuse Jeanne de la Mothe Valois, une vague descendante (de la main gauche) d'Henri II et clamant son appartenance au sang royal pour escroquer, ici ou là, en rôdant dans les cabinets ministériels, de maigres pensions impropres à calmer ses goûts de luxe. Alors elle monte l'opération dite du "Collier de la Reine" qui va durement compromettre Marie Antoinette et passe pour être l'amorce de la Révolution, un de ces scandales qui la préparent.
C'est dans les petits cabinets rococos de l'hôtel de Rohan (aujourd'hui Archives Nationales) que le coquet Rohan, en surplis de cardinal, recevait en secret la Mothe Valois qui lui avait tourné la tête. Le dupant, lui faisant croire qu'intime de Marie Antoinette elle obtiendrait la grâce de ce cardinal fort mal aimé par la reine.
Une histoire de collier dont il devait assurer le financement, et qu'il voulait offrir pour gagner ses grâces sera, en fait, volé par la Jeanne fort impliqué dans une sombre histoire qui est de celles  qui fonctionnent dans les marges de la " grande Histoire" et lui donnent ce charme un peu pervers du fait-divers.

 


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1. philippine  le 23-02-2011 à 09:08:14  (site)

coucou, je crois que j'aurais aimé vivre à cette période (du côté des riches bien sûr et cela fait toute la différence). Assurément je ne me serais pas plu dans cette cour faite de trahisons et de coups bas, mais la fille qui sommeille en moi, adore les tenues de cette époque, les égards des messieurs envers les dames, cette existence oisive où leur seul passe-temps était de regarder passer le temps !

 
 
 
posté le 20-02-2011 à 10:35:47

Menus Plaisirs dans son décor en bois.

De tradition, et parce que lié au caractère mobile de la Cour qui va de château en château, multipliant, ici et là, les fêtes données en toutes occasions (anniversaires, naissance, mariages, visites d'hôtes de marque,) et pour l'ordinaire qui est lui aussi rythmé par des bals, spectacles, et autres manifestations soulignant la majesté du souverain autour duquel toute cette vie festive s'organise, et avec la complicité d'artistes qui retrouvent là le rôle du décorateur de théâtre, on construit des baraques en bois qui sont l'écrin de décors raffinés et certaines d'entre eux (conçus par Pierre-Adrien Paris), vont resservir dans l'aménagement de la cour de l'Hôtel des Menus Plaisirs de Versailles en 1789 pour l'Assemblée des trois ordres.
Etrange destin que celui d'un décor conçu pour des fêtes et qui devient le cadre de quelques unes des plus essentielles décisions sur lesquelles nous vivons encore en donnant l'exemple.
Et c'est bien l'étrange sort donné à des décors, conçus pour la fête et ses débordements, qui entrent dans l'apparat voulu par un pouvoir qui se cherche des repères, un cadre digne de lui.
 

 


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1. philippine  le 20-02-2011 à 10:40:42  (site)

vous me souhaitiez bonne nuit, et je ne viens de lire votre com qu'à mon réveil, alors à mon tour de vous souhaiter bon dimanche ! oui, je crois que je suis en effet un peu raisonnable et un peu fantaisiste, trés intéressée par les autres, plus que par moi-même en tout cas. Dans ma vie quotidienne, j'enléve le luxe, je ne garde que le calme et la volupté !

 
 
 
posté le 20-02-2011 à 10:30:27

Les Menus plaisirs servent la Révolution.

Sont menus, les plaisirs, sous divers aspects, et l'ambiguïté de l'expression offre de multiples et savoureuses perspectives.
A son origine, et sous sa forme historique, c'est la manière de désigner les réserves de tout le matériel destiné aux festivités de la Cour. La "maison mère" est à Paris, faubourg Poissonnière (entre les rues Bergère et Richier, aujourd'hui le Conservatoire) et les Menus plaisirs, ont un autre dépôt  à Versailles. C'est là que se tint la première assemblée née de la Révolution.
Hâtivement préparée dans la fièvre en 1789, elle accueille les prémices d'une France nouvelle où s'affrontent les trois ordres de l'époque : aristocratie, clergé, tiers Etats, les futurs forces de la Nation.
Le terme de menus plaisirs perd son sens initial, l'Histoire se charge de lui donner un sens qui n'était pas prévu aux origines, jouant la futilité, le jeu, le plaisir, toutes choses qu'une révolution ne met pas en première ligne de ses motivations.
Avant de trouver les divers aspects du plaisir (fussent-ils menus) il faut avoir les coudées franches, la liberté de penser, d'agir qui n'est pas donnée à tous, et qu'il faut conquérir.
Assistons au spectacle, dans la salle improvisée pour mettre le roi en scène et que déjà les signes de sa chute marquent, en frappant le luxe de son apparat d'une sorte de faisceau de vive lumière comme la foudre. Celle-là même qu'invoquait Marat (et Robespierre après lui) : une révolution c'est comme un orage. Il y a des victimes. Les Menus plaisirs n'avaient pas prévu cette mise en scène

 


 
 
posté le 19-02-2011 à 10:57:16

Les châteaux de la subversion.

Les châteaux de la subversion.

Ils sont décoiffés (décapités ?) livrés aux vents mauvais. Ils expirent dans la douleur des chutes de pierres, des agressions des végétations sauvages, et le vandalisme quotidien des visiteurs clandestins.
A suivre l'exemple de Sade qui en fait le décor de ses "120 Journées", en voici un, dans le vertige des montagnes, inexpugnable, retiré de la société, refermé sur lui-même et cadre de toutes les abominations, les écarts, les supplices, un autre ordre, qui est celui du vice et de la mort. D'ailleurs, Sade s'inspirant des romans gothiques (romans dit "terrifiants") fort à la mode dans l'Angleterre du XVIII° siècle, n'avait pas oublié qu'il y avait toujours des cachots profonds où croupissaient d'innocentes victimes (souvent de douces jeunes filles arrachées à leur famille et sous la tutelle d'un oncle pernicieux et hors la loi).
Et Gilles de Rais (auquel Sade ne manque pas aussi de se référer) est maître en son (ses) château où il entraîne de pauvres gamins volés à leurs parents et livrés à des rites sexuels où la mort et le sang accompagnent la recherche du plaisir.
Ce sont les châteaux de la subversion. Construits par des seigneurs avides et agressifs, ils sont aussi le repaire de leurs rapines, quand terrorisant une contrée ils y font la loi et s'y retirent protégés par de puissantes murailles, de hautes tours, tout un arsenal guerrier qui ne parle que de violence et de mort.
C'est parce qu'il est en retrait de la vie du village qu'il domine, et interdit au manant, que le château suggère toute une vie qui n'est plus celle de l'homme ordinaire mais marquée par quelque orgueilleuse ambition de domination, de pouvoir.
Il est l'antre du secret.


 


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1. saintsonge  le 19-02-2011 à 14:34:17  (site)

Je leur préfère la Tour Montaignienne .
Vous envoie un éclatant soleil d'un ciel de plage, façon estival en sa fraîcheur.
Je vous sais sous une pluie peu flatteuse.

 
 
 
posté le 18-02-2011 à 22:01:18

Des mots pour le plaisir.

Peut-être le charme des vieux papiers, ceux qui craquent quand on les touche, qui ont l'odeur de leur enfermement dans une malle, au grenier, à la cave (on est dans l'univers de Bachelard), c'est aussi qu'ils nous surprennent.  Et l'on se penche sur eux pour deviner leur nature, déchiffrer les mots qui s'y pressent. Et là commence l'aventure d'une lecture rêveuse. Rêveuse parce qu'en déchiffrant on se prend à deviner ce qui entoure, explique cette présence des mots. Une errance mentale qui est comme le frisson sur la peau sous la caresse. L'esprit (comme le corps dans le plaisir) ouvert à toutes les surprises.
Des mots captés comme papillon dans le filet du chasseur. Ecrire n'est-ce pas assembler le chatoiement de ces mots pour faire une phrase, exprimer une pensée, une émotion.
Le charme des mots qui vagabondent, inventent des histoires, creusent des sillons dans la banalité du quotidien, et quand ils sont inspirés, cisèlent des pensées qui nous captent, nous troublent, nous grandissent.
La poésie c'est la maîtrise parfaite de cette folle envolée des mots qui nous encerclent, donnent sens à notre vie.

 


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1. saintsonge  le 18-02-2011 à 22:20:32  (site)

Toujours préféré la feuille à l'écran, comme vous savez, j'ai à l'instant envie d'arrêter mon blog (après ma venue sur Paris), d'autant que mon scan ne fonctionne plus ! et 1360 textes suffisent, je pense, il faut souffle garder pour autre chose, peu de visiteurs y viennent encore.... M'enfin, quand je sais que depuis 1953 on dit que la Littérature ne serd à rien...(peut-être avant ?)... Aussi, ai reçu la réponse de votre confrère J.G (je l'ai peut-être dit, je ne suis pas aller relire....) Ici , c'est l'écriture de la plume qui met le feu aux beaux feuillets, non ?.... Tempête légère, cette nuit, et la pluie, et la pluie...

 
 
 
posté le 18-02-2011 à 11:30:56

Maurice Henry et le Grand Jeu.

De ses débuts au coeur du groupe du "Grand Jeu", et parce que l'humour est aussi (et surtout) une arme contre l'angoisse existentielle, et la banalité du quotidien (il s'emploie à le "déminer"), Maurice Henry va s'emparer de la peinture comme d'une arme. Il élimine les problèmes plastiques qui sévissent autour de lui, et ne s'avise pas de s'imposer comme peintre, sachant que pour lui la peinture est un moyen et non une fin.
Il s'adonne avec une vélocité de ton dans le dessin d'humour, il offrira une étonnante galerie de portraits des écrivains de sa génération et sa peinture ne sera qu'une mise en image d'énigmes, de jeux de mots, comme une signalisation poétique. N'est-ce-pas aussi, finalement, l'objectif de Magritte.
Il n'invente pas une nouvelle formulation picturale, n'expérimente pas ses possibilités au niveau de la matière, mais en use comme d'un médium simplifié à l'extrême dans l'unique souci de lisibilité immédiate. On rejoint le principe de l'idéogramme dont il se plaît pourtant à falsifier l'énoncé comme en un jeu de guignol qui ne montre que l'évidence des faits, cachant la mécanique qui l'anime.


 


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1. saintsonge  le 18-02-2011 à 13:34:27  (site)

Une propédeutique des passions entre "Phrères simplistes" ?... Quelqu'une paryponoïan d'antithèses et de paradoxes, genre :"qui t'eût dit, ô Phrère simpliste, quand vous peigniez partout ?... Des jeux et des formules qui s'animent "avec vélocité" ?...
Grisonnant ciel à teintes micacées !
Journée profonde, recherche de vérités ....Qui sommes-nous, finalement, dans tout ce "grand jeu" ?

 
 
 
posté le 17-02-2011 à 21:19:34

Liane de Pougy sous le signe de Sapho.

Comme la plupart de ses semblables (les courtisanes "fin de siècle") Liane de Pougy, (née Anne Marie Chassaigne et un temps très cours madame Henri Poupe) se donne un nom à consonance nobiliaire (comme Emilienne d'Alençon, Valtesse de la Bigne) avant de devenir une véritable princesse en épousant le prince Ghika. L'essentiel de sa vie (et la raison de sa gloire) fut sa carrière de danseuse. La scène donnant alors accès à de brillantes relations du type de celles qu'elle entretient en jouant le rôle de courtisane. L'une (avec la Belle Otero) des plus recherchées par des fils de famille, des aristocrates noceurs qui se ruinent dans son alcôve. Sur fond de galanterie tarifée (et chère) elle illustre non sans panache l'esprit et les moeurs de cette "fin de siècle" qui cherche le bonheur dans le tohu-bohu d'une époque qui avait perdue ses repères, les valeurs positives sur lesquelles se construit une société. C'était, désordonnée, l'émergence de la modernité, de l'industrialisation, et du moteur financier (le " enrichissez vous" donné comme maxime de vie). L'argent entrant dans la sillage de l'amour et celui-ci victime des attraits de l'apparence.
Elevée jeune dans une institution religieuse, elle va finir ses jours dans un climat de repentance (en 1950), non sans avolr aussi tâté de l'écriture ("L'Insaisisable", dédié à Jean Lorrain, "La Mauvaise part", "Mes Cahiers bleus" - dans le voisinage de Max Jacob-)  surtout pour raconter ses expériences saphiques (en particulier avec l'excentrique Nathalie Barney, pivot stratégique de la vie des lesbiennes de l'époque).

 


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1. saintsonge  le 18-02-2011 à 13:55:36  (site)

Il me souvient que vous évoquâtes déjà cette beauté et poésie en une seule personne , l'onanisme à Lesbos : "quand on n' a pas ce qu'on aime, il faut aimer ce que l'on a" , tout Paris au XIXème : Lesbos-sur-Seine (et sur scène avec Colette, ensuite)..jusque coulis d'après le fameux libertinage du XVIIIème ! Oh ! Je crois savoir que sous le certain Gome Guth se cachât un non moins sérieux ....Simenon !...Au Temps des belles collecctions sous le manteau ! Pauvert réhabilitant Sade, aussi... J'ai près de moi le Jean Chalon (Liane de Pougy) : "courtisane, princesse et sainte" : "elle invite Max Jacob à dejeuner...en compagnie de Jean Cocteau et de Raymond Radiguet. C'est un déjeuner catastrophe.....(ils "font déplacer les bouquets, jettent leurs cendres et leurs mégots n'importe où".. Ulcérée, Liane tire la leçon de ce ratage :" Plus de ça ! Un seul homme de lettres à la fois !" (au pavillon de Noailles) - page 192, du Poche.
Bonne Journée plus sage !

 
 
 
posté le 17-02-2011 à 14:49:14

Laurence Sterne campagnard.

Dans une de ses lettres il en vante le charme : " dorée par le soleil sur le flanc d'une colline romantique". Voilà Laurence Sterne campagnard. C'est la politique de "une chaumière et un coeur". Entre le rêve et la réalité l'écart se creuse.
Longtemps abandonnée, en voie de dépréciation, la maison (presbytère) exige de profonds remaniements. Sterne s'y emploie, avec une énergie de néophyte. Il veut jouer au gentleman-farmer. Il agrandira son jardin, procédera à des plantations d'arbres fruitiers, il achète même une ferme et s'engage dans de périlleuses exploitations qui ne sont pas de sa compétence. Voilà le clergyman homme des champs  avant que d'être écrivain. Mais, chez lui, va naître des aléas de la vie, le besoin d'écrire, et son oeuvre totalement dépendre de son quotidien, de sa mémoire.
Son activité, un peu désordonnée, victime de son inexpérience, lui attire l'animosité de son voisinage.
Son ménage ne marche pas fort également, encore que Elizabeth Lumley se soit avec dévouement, donnée toute entière aux travaux des champs. Elle a la responsabilité des "oies et de la laiterie". C'est progressivement que le couple se distant et qu'un Sterne nouveau apparaît, volage et "coureur de jupons".
 Deux filles naîtront dans ce cadre champêtre,  dont une seule, Lidya, survivra (elle sera la destinataire de l'autobiographie écrite par Sterne sans vocation d'être publiée, et qui en dit long sur son tempérament, son essor, sa mentalité, sa nature profonde).
Certains commentateurs pensent que ce sont ses avatars  d'artisan de la terre qui le conduiront à l'écriture. En somme, au risque de contredire Rimbaud, "main à plume vaut main à charrue".
Mais sans cette expérience campagnarde, et d'autant plus que Sterne appuie son oeuvre sur sa vie personnelle, le ton de Tristram Shandy n'aurait pas  atteint cette vérité, cette force de suggestion, et cette  verve née du quotidien jusque dans ses épreuves et ses douleurs.

photo flickr

 


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1. saintsonge  le 17-02-2011 à 16:23:01  (site)

Il aime la campagne , aussi, c'est votre ancien confrère des N.L que j'évoque, qui vient de répondre à mon pli de Chamonix, J.Garcin....
Juste cet aparté, sous le même ciel bleu de plage...

 
 
 
posté le 17-02-2011 à 12:12:43

James Pichette et le jazz.

C'était dans le sombre (et très bourgeois) appartement de la Place de la République (à Paris) alors que nous préparions l'ouvrage sur James Pichette, le frère du poète Henri Pichette.
 Dans le grand silence de la réflexion autour de la maquette du livre à venir, Henri passait telle une ombre, sans mot dire (maudire !) et James soulignait l'étrangeté de la situation qui voulait que sa gloire fût dépendante de celle d'Henri qui l'avait entraîné dans la formidable aventure de sa carrière poétique qui le plaçait comme le plus singulier parmi ceux qui surgirent au lendemain de la guerre. Le parrainage d'Artaud en ayant amplifié le prestige.
Et James dans cette dualité qui pouvait aussi lui faire ombre ?
Il s'en tirera avec tous les honneurs de sa propre énergie, se situant dans l'aventure picturale qui revendiquait la primauté du signe, de l'abstraction retrouvant les vertus de l'écriture, en était une manière de développement.
C'était le règne des grands : Hartung, Soulages, Schneider, Mathieu, et tout un mouvement d'ardente création qui s'appuyait assez volontiers sur la poésie, ou en soulignait les forces profondes. D'où les collaborations fréquentes entre peintre et poète qui va marquer, après celle du surréalisme, la génération des années 50.
A quoi s'ajoute, pour James Pichette, la fraternité de son travail de peintre avec le jazz. Ce fut l'aventure de l'exposition "L'âge du jazz" (au musée Galliera et à celui de la Ville de Paris) qui allait souligner l'étroite collaboration et le jeu d'influence de  la musique sur la peinture, qui d'ailleurs n'était pas nouvelle. Ne voyait-on pas dans l'exposition Mondrian, Delaunay, Miro, Henri Nouveau, Picabia, Fernand Léger ,
Comme son ami Jean Berthier, James Pichette aimait aussi peindre en public, au coeur d'un orchestre de jazz. La fusion était totale, la peinture était un "instrument" jouant de toute la magie de sa puissance d'évocation.

 


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1. saintsonge  le 17-02-2011 à 12:46:26  (site)

On y voit bien l'allure du saxophoniste très inspiré par ses improvisations, mais aussi la faucille, mais aussi le marteau, sur ce "dessin" (à dessein ?).... J'ai bien sûr lu Henri, n'ai pas suivi l'évolution de son frère.... Un Pichette en cache un autre alors ? Cela qui m'amène curieusement à Guerin qui avait cousu dans les luxueux vêtements de sa défunte mère le manuscrit .... du Temps Retrouvé !...
Très beau soleil, ce jour , dans le "bleu" d'un ciel de plage, voyez, il y a tout lieu de s'émerveiller encore au lever du soleil après une journée déplorable comme celle d'hier, ici, du moins, tout le matin !... Je relis en ce moment de Paulhan "Braque, le patron" ; vous connaissez donc, oui, vous connaissez donc...

 
 
 
posté le 16-02-2011 à 19:37:40

Laurence Sterne vagabonde à Paris.

Dans l'enclos du Temple (à Paris) le prince de Conti mène grande vie, partagée entre les raffinements des sens et ceux de l'esprit.
On y tient Salon, et le tout Paris qui pense s'y presse. C'est une étape que ne pouvait négliger Laurence Sterne lors de son voyage en 1762. On est alors à la mode de l'anglomanie. Tout homme d'esprit s'y livre avec une avidité qui dynamise les rapports entretenus entre ducs-hobereaux venus d'outre-Manche et ministres aux marges de leurs fonctions, qui se mêlent volontiers à la société.
Laurence Sterne plaît, aussi bien aux femmes, par sa grâce galante, qu'aux hommes par son esprit de répartie. On le rencontre aussi chez madame Geoffrin, ou chez la délicieuse Julie de Lespinasse, en compagnie du comte de Choiseul, d'Holbach. Il assiste aux spectacles, va applaudir la Clairon. On est là dans l'univers du peintre Watteau, et plus encore dans celui de Fragonard, entre alcôves secrètes et badinages au jardin. Diderot est de ses compagnons de virées galantes et de vagabondages intellectuels. D'ailleurs Laurece Sterne apparaît dans "Jacques le Fataliste". Les deux hommes sont faits pour s'entendre; même disposition d'esprit à l'aventure intellectuelle, même curiosité, même effronterie qui est un moteur de progrès dans une société qui prépare sa révolution et se délecte des derniers feux d'une époque condamnée, le sachant sans doute, prévoyant des jours de plus grande humanité.
On fête aussi en lui un auteur à succès. Sans doute lu avec distraction mais sa réputation l'emporte et il s'en délecte avec l'humour qui est le sien.
Sa souplesse d'esprit le conduit à profiter de toutes les rencontres, quelles qu'elles soient, aussi bien celle de la duchesse que de la fille d'auberge. Dans "le Voyage Sentimental" on aura la même disposition d'esprit à la gourmandise des rencontres, et le savoir faire d'en tirer le meilleur parti.
A travers les nombreuses lettres qu'il adresse avec régularité aux siens on retrouve sa jovialité permanente, son esprit prompt, son enthousiasme,  son insatiable curiosité.

 


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1. saintsonge  le 16-02-2011 à 21:41:25  (site)

a nous deux Paris, vais-je pouvoir bientôt dire...dès Lundi....Un faire savoir pour un savoir-faire , en quelque sorte..."voyage sentimental", aussi, mais pas de même acabit que cet auteur qui me fait donc comprendre que "mes parents n'ont pas pris garde à ce qu'ils faisaient"...ET qui il engendrèrent...!
Vilaine pluie toute la journée... valant pourtant un arc-en-ciel !

 
 
 
posté le 15-02-2011 à 15:21:43

Laurence Sterne et son père.

Loin de l'image du "commandeur" qui domine Kafka enfant, et la lettre au père qui s'en suit, celle que Laurence Sterne donne (dans une intime autobiographie destinée à sa fille Lydia) de son aimable père une image cocasse et sympathique, propre à annoncer l'esprit que développe son oeuvre principale Tristram Shandy.
Le personnage s'inscrit dans une généalogie plutôt flatteuse avec en figure ancestrale un archevêque (d'York) dont la descendance s'illustre par des positions sociales pleines de gravité et de noblesse, assorties d'alliances matrimoniales, de celles qui fondent les grandes dynasties bourgeoises.
Hors, dans cette aventure familiale, Roger Sterne fait tâche. C'est le vilain petit canard. Contrairement aux autres membres de la famille bien installés dans la société, entre hauts dignitaires ecclésiastiques et riches commerçants, il se lance dans une carrière militaire qui est une caricature du genre. Ballotté de garnisons en champs de bataille, il ne parvient même pas à gravir les échelons qui conduisent aux grades élevés. Il finira sans gloire à la Jamaïque où les remous de l'Histoire l'avait conduit.
Laurence naîtra dans ce tourbillon (24 novembre 1713).  Il s'ouvre au monde dans ce tintamarre, au son des fifres et des tambours et le spectacle des uniformes chamarrés.
Tout ce monde de fumeur de pipes et de bavards oisifs en conquête vaine de gloire, va mûrir en lui pour surgir, avec une drôlerie qui lui est naturelle, dans les aventure de Tristram Shandy, avec ce goût de l'absurde, cette verve qui va se muer en galanterie. Et l'homme Sterne se profile enfin, après des études elles aussi un peu chahutées, et semble-t-il sans éclat, pasteur et galant tout à la fois, plus galant que pasteur, encore que l'époque avait inventé aussi les abbés de cours, les petits marquis et la verve des Salons qu'il fréquentera avec aisance, une espièglerie qui entre pour beaucoup dans le charme qu'il exerce, en particulier sur les femmes dont il appréciait la présence et l'audience, car c'était un aimable et beau parleur.

 


 
 
posté le 14-02-2011 à 09:59:48

L'Antiquité reconstituée

Dans le sillage de Piranèse ou à son égal on se plaît à imaginer l'Antiquité telle qu'elle pouvait être à partir de quelques lambeaux archéologiques. L'Ecole des Beaux Arts (section architecture) se plaît au genre et l'on a, en cartons, d'étonnantes reconstitutions de ce que pouvaient être des palais, des temples, des villes entières.
On est alors plutôt dans l'esprit du décor, dont celui de l'Opéra qui a largement puisé dans ce registre.
Mais une ville antique (et pas seulement dans notre imagination) pouvait être ce déploiement splendide de bâtiments aux fonctions nobles (religieuses) comme si alors la vie prenait une dimension supérieure en regard des cultes et de l'idée qu'une société se faisait de la grandeur.
On est devenu plus pragmatique, et l'architecture semble répondre plutôt à des fonctions purement utilitaires, voire domestiques.
Quand l'architecte rêve d'une ville, elle est saccagée par ses occupants. Voir les différentes tentatives qui ont été entreprises dans les banlieues. De quoi décourager la plume de l'inventeur de rêve, l'utopiste, et comme si l'homme contemporain était incapable (indigne ?) de vivre dans un cadre qui l'élève, l'entraîne vers les zones supérieures (!) de la pensée.
Le rêve reste sur le papier. Qu'il soit d'aujourd'hui ou l'écho d'un hier qui avait des ailes.

 


 
 
posté le 13-02-2011 à 10:31:30

Maurice Henry avant Christo.

Toute la carrière de Christo s'est faite sur le principe de l'enveloppement d'objets, puis de monuments (le Reichstag à Berlin, le Pont Neuf à Paris). La spéculation qui entoure aujourd'hui la création artistique aura largement développé des concepts plus ou moins plausibles autour d'un geste qui, pour être simple, entraîne des conséquences parfois étonnantes.
La démarche de Christo s'inscrivait logiquement dans la dynamique du Nouveau Réalisme instauré (et théorisé) par Pierre Restany. De surcroît elle entrait, majestueuse, dans la géographie nouvelle de l'art expérimental qui prône le simple choix d'objet (pour les rendre "signifiants") et toutes les manipulations susceptibles de lui donner un sens.
Plus naïvement, quelques artistes militant dans les rangs du surréalisme (quelle armée !) procèdent à l'enveloppement d'objets sans y voir autre chose d'un clin d'oeil malicieux, une facétie, voire la création d'une énigme. D'ailleurs Man Ray enveloppant une machine à coudre (objet cher à Lautréamont) désigne cet objet comme "l'énigme de Lautréamont"). Maurice Henry qui fait métier de l'humour qu'il pratiquera surtout dans le dessin (d'une étonnante vélocité de ton) se joue au besoin de l'objet pour lui donner un sens nouveau (ou insolite) d'où un  violon enveloppé, de ses bandelettes comme un blessé, ou un mort selon l'ancienne Egypte.
C'est sous le signe de l'humour qu'est né ce geste artistique, il est devenu un instrument de réflexion philosophique. Penser en souriant, quelle aubaine !

 


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1. saintsonge  le 13-02-2011 à 11:12:05  (site)

Article "à bout portant", si je puis dire, car oui "quelle armée !", un temps j'ai cru que vous évoqueriez le Général d'armée Saint-Cyrien éponyme !... Mais non, mais non... Heureux "phrère simpliste" de mon plat pays que ce Maurice Denis-là, on ne l'oublie que trop souvent qu'il fît pionnier surréaliste aux côtés de tous les nombreux autres (tiens, au fait, je n'ai jamais posé la question : le fûtes-vous au temps des Nouvelles L ...? Au fait aussi, y avez-vous rencontré Jérôme Garcin, qui y écrivit... Je mélange peut-être les temps , mais ils sont autant "modernes" que passés, non ?...) Donc, un "phrère simpliste", ici.... dans mes "abattoirs de sommeil" ...douarnenistes !... Grosse pluie Miniantologique, ce dimanche... Bien à vous !

2. saintsonge  le 13-02-2011 à 11:13:29  (site)

vous avez vu, j'ai même fait le lapsus, c'est évidemment Maurice Henry (et non Denis, qu'il faut lire, car le second me plut quand même davantage....)

3. sorel  le 13-02-2011 à 14:59:55

Malgré la flemme du dimanche. Maurice Henry, homme délicieux, qui habitait dans les tours de la porte de Choisy. Je l'aimais bien.
Oui j'ai côtoyé Jérôme Garcin pendant de longues années aux Nouvelles Littéraires. Il était "chef" du service des lettres et moi celui des arts.... Je lui ai fait également connaître l'éditeur qui publiait André Dhôtel pour faire des entretiens avec lui. C'est un "garçon" très simple et agréable. Mais dans ma retraite je l'ai perdu de vue.

4. Saintsonge  le 13-02-2011 à 17:23:20  (site)

Vous avez la "flemme", j'ai la flamme !... J'en ai fait même la vaisselle, et le ménage, après l'écriture, un peu de lecture (Jung)... Vous avez eu cette grande chance de cotoyer bon nombre d'influents... Je ne doutais aucunement pour J.Garcin, il se trouve que j'avais eu de sa part son numéro de téléphone privé, quand je logeais sur douarnenez, n'ai jamais osé appeler (je lui connais cette discrétion évoquée), maintenant, je ne retrouve plus son "carton"... Je lui ai écrit depuis Chamonix, chez Gallimard, je verrai bien... Voilà que la grosse pluie s'est interrompue, l'éclaircie solaire, jaunâtre, est droit devant mes yeux, en oblique, vers la fenêtre, au-dessus des toits bien mouillés... Bonne reprise de vigueur !

5. saintsonge  le 13-02-2011 à 19:14:14

Je suis en train de penser que, malgré avoir lu beaucoup d'auteurs dont vous "nous" parlez, leurs livres ne me donneront pas la chaleur humaine et l'ardeur d'un vécu que vous auriez , que vous avez pu connaître, comprenez alors mon grand manque de ce côté fort agréable du contact spirituo-littéraire et poético-pictural d'avec ces éminents personnages, sympathiques ou non, , ça oui, ellel me manquera fort cette réalité de la connaissance-là !

 
 
 
posté le 12-02-2011 à 23:02:16

Jean Cocteau et l'étoile du berger.

Qu'on le veuille ou non, et souvent avec un rien d'irritation, car il a trop joué le jeu du poète que l'on sort de sa tanière pour l'exhiber en public, (et que de soirées mondaines, vaines et indignes de sa mission), Jean Cocteau fascine.
Etonne plutôt. En cela il répond à l'injonction de Diagihlev qui lui aurait dit
 - Etonne moi.
C'est réussi, mais au prix de quelles compromissions, adhésions à des causes sans poids, des alliances avec des gens sans valeurs,  et une exploitation de son talent qui le détruit. Son dessin, si pertinent quand il le veut (et surtout dans les sujets érotiques), perd tout son sel, sa verve, sa vélocité, quand il l'étale sur de grandes surfaces pour complaire à quelques vaniteuses ambitions. Voulait-il concurrencer son ami Picasso ?
On lui reproche la diversité de ses talents (un touche-à-tout) mais quelle facilité pour en tirer toujours une facette de sa mythologie personnelle.
C'est en éliminant beaucoup dans sa large "production" que l'on tire le meilleur. D'où, par exemple, des "morceaux choisis". C'est dans la retenue que souvent un artiste donne le meilleur de lui-même. On dirait que par une propension à se faire reconnaître (mais en raison de quel complexe), Cocteau intervient sur tous les terrains de la création, jouant sur tous les tableaux, jusqu'aux pires. Si bien qu'on l'exploite sans vergogne.
Il s'est créé autour de lui (et dans son souvenir) une sorte de culte un peu surfait ralliant jusqu'à des amateurs qui reconnaissent moins son oeuvre qu'une certaine idée que l'on se fait du personnage.
A une époque où se sera substitué, peu à peu, à l'oeuvre, son créateur (le propre de la dynamique de l'art actuel), il est curieux de voir un poète qui ne l'avait pas lucidement cherché s'y trouver en position d'exemple. Une caricature du rôle joué par l'artiste aujourd'hui.
Sa signature se suffit à elle-même. Celle de Cocteau, résumée en un JEAN triomphant, pointé d'une étoile, devient comme l'étoile du berger, le signal de maintes vocations.



















 


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1. saintsonge  le 12-02-2011 à 23:11:34  (site)

Vrai, sans compter sa période peu glorieuse pendant la guerre, n'est-il pas ?.. Je crois savoir aussi que Picasso ne l'aimait pas, d'où le fait qu'il chercha à le séduire . Les lèvres épaisses de Dargelos sont la signature de Cocteau, je dirai... Son étoile première, avant Radiguet puis Marais.... la grande fille minaudière à ses côtés (lequel acteur ai vu un jour sur un quai de gare parisien ; je ne m'en suis pas approché....)

 
 
 
posté le 12-02-2011 à 09:45:01

L'art d'écrire.

L'acte d'écrire suppose tout un cérémonial. Jusque dans l'urgence qui veut que le scripteur se contente d'un modeste carnet sur lequel il consigne, à vif, une impression.
Pourtant, écrire suppose quelques aménagements dont chacun tire le meilleur résultat pour la bonne marche de son travail.
Les plus cérémonieux se constituent un bureau qui devient une sorte de laboratoire (le laboratoire central invoqué par Max Jacob) où ils procèdent à l'organisation de leur travail, depuis le position debout adoptée par Victor Hugo (pour écrire ses épopées) à la cellule monastique de Max Jacob qui mêle l'exercice de la peinture (si proche de l'écriture) à la rédaction de ses nombreuses lettres quotidiennes. Et comment ne pas évoquer le cas d'Antonin Artaud, tirant de ses poches ces modestes cahiers d'écolier sur lesquels avec une rage divinatoire il jette dans une graphie désordonnée ses pensées, ses rages et sa chute mentale.
A quoi s'ajoute, pour les privilégiés qui peuvent s'organiser dans une sorte de confort bourgeois (tout le monde ne peut écrire "Un saison en enfer" dans une grange et l'odeur du foin au coeur de l'été), le choix du support papier. Alors intervient ce qui relève d'une manie. Celle de Colette n'écrivant que sur du papier bleu.
Je gage que l'allure du verbe qu'on y déroule s'accorde à son support. Pour un langage de verroterie :  le papier de diverses couleurs, comme une fête des mots.

 


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1. saintsonge  le 12-02-2011 à 10:37:26  (site)

aH Bah , j'ai mis la même photo, il y a quelques mois sur un de mes textes, ce qui prouve ici mon (notre) bon choix !... Au retour du Mont-Blanc, je vais pour m'acheter un..... Mont-Blanc, mais le prix m'a fait reculer du "confort" de la plume, 400 euros, merci, suis revenu sans !.. Me contente de mes petits carnets, de mes cahiers d'écolier, itou, et d'un simple Bic !!... Peut-être alors, écrivé-je mal..., la plume mal-en-point(s)... Grand soleil sur la contrée, je viens de faire en dix minutes "mon" marché, les bouquinistes, absents trois semaines... Bien à votre Wik-bic ? Week-end de la plume...

 
 
 
posté le 11-02-2011 à 10:33:37

Thomas de Quincey et la psychanalyse.

D'emblée il faut l'admettre : il n'est pas à sa place. Thomas de Quincey restait pour le public l'auteur des "Confession d'un mangeur d'opium", et l'amoureux de la petite vagabonde qui traverse l'ouvrage. Il est pourtant un prodigue (presque graphomane) auteur de multiples publications relevant de divers sujets (philosophie, légendes, critiques littéraires). Après une enfance misérable il s'installe dans le voisinage des poètes qu'il admire (Coleridge, Wordsworth) et de retour à Londres collabore à de nombreuses revues.
Provocateur, il publie "L'assassinat considéré comme l'un des beaux-arts". A se demander pourtant si son ouvrage le plus important n'est pas son Autobiographie à laquelle il travaillera pendant  une quarantaine d'années, au fil de sa vie mouvementée.
Le résultat : une prose d'une nouveauté inouïe, un récit labyrinthique.
La pensée de Quincey, précisait Baudelaire qui l'admirait, est naturellement en spirale. Sa prose échappe à toute rigueur, cette perspective linéaire qui conduit le récit vers sa finalité. Il s'étend  en cours de route sur des sujets qui sont insérés dans le déroulement, musardant dans sa prose comme un promeneur emporté par une histoire que jalonnent de multiples incidentes. Une prose rêveuse, avec la logique du rêve (le rêve a sa logique: c'est errer comme dans un labyrinthe) à quoi s'ajoute des petits bijoux qui s'enchaînent dans un verbe plein de nuances, de trouvailles, de références venues de tous les horizons. Jeux de métaphores, considérations morales ou philosophiques, tout entre dans le déploiement du texte porteur comme autant de chatoiements sur la trame d'un tissu.
C'est une version du soleil noir de la mélancolie (précédent Gérard de Nerval).
Se déverse alors une prose d'une incroyable vélocité, mêlant les métaphores, scrutant les abîmes intérieurs.  Ne sont-ce pas les prémisses de la psychanalyse ?


 


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1. saintsonge  le 11-02-2011 à 10:47:01  (site)

Dix ans de psychanalyse me font vous dire que, oui, nous "goûtons" les eaux glauques de nos "abîmes intérieurs", ah c'est que j'en ai vues, des choses, mon bon monsieur, dedans moi-même, donc, de même pour ce précurseur des catacombes des synapses (ces spirales de la mémoire métaphoriques), sauf le goût macabre et mal placé pour définir l'assassin ' art, je lui dois aussi quelques approches libidineuses et sombres !) Tenez, ce temps venteux est tout pareil dans la grisaille de la matinée chagrinée et blafarde !... Douarn'en - Quincey, tout à trac ! Bons Vents du Vendredi, et des meilleurs, à vous, monsieur mon ami (à qui je dis que mes 1ère et 4ème de couverture sont bouclées, reste le corps-texte à y placer imprimé, mais comment vous prévenir de sa publication prochaine ?... Ici, avec l'adresse de l'éditeur, cela est possible ? Je n'en aurai même pas un exemplaire pour moi, c'est nouveau ça aussi, chez ces messieurs de l'édition moderne ?)

 
 
 
posté le 10-02-2011 à 16:16:42

A la recherche du temps perdu.

Le temps n'est rien qu'une machine à fabriquer de la mémoire. A preuve, les rapports si subtils, et si personnels, que l'on entretient avec les photos qui concernent notre propre passé. Voire, on peut étendre cette considération à l'attrait que peut exercer sur nous l'évocation d'une période dont nous fûmes les témoins et dont on aura oublié bien des épisodes.
On se penche (le terme a bien son sens) sur le passé. Image d'attente, où l'on scrute un lieu, un événement, comme un objet. D'après lui on se situe dans sa propre aventure, dans la dynamique de son propre destin.
Vivrions nous aussi bien le présent sans cette lecture, car on a autant besoin de mémoire que d'espoir. Et lorsque celui-ci aura disparu on se rabattra sur le passé.
Cette recherche s'étend jusqu'à la recherche (souvent frénétique) de nos antécédents, comme si la mémoire de nos ancêtres entrait dans le corps social que nous revendiquons. Serions- nous, radicalement, les enfants de ceux qui firent le  noyau d'une famille, d'une dynastie et d'autant plus armés pour affronter l'avenir que nous aurions une bonne connaissance de ce patrimoine.
Pratiquement toute la littérature s'appuie sur des souvenirs d'enfance, toute énergie s'arme de la présence (ou de l'absence) de ce passé familiale. D'où, en cas d'absence, cette folle énergie pour sortir, mieux armé, et comme initiateur d'une chaîne de destins futurs. Jeu d'équilibre.
Passé intime (parfois inavouable) passé familial (dont on tirer parti et vanité) alimentent notre propre trajectoire.

 


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1. saintsonge  le 10-02-2011 à 16:26:56  (site)

C'est tout le thème du livre de Jacqueline de Romilly : "Les révélations de la mémoire"...., des souvenirs "perdus" comme ça, qui lui reviennent.... Gros crachin breton, depuis ce midi.

 
 
 
posté le 10-02-2011 à 10:53:02

Marcel Duchamp et le fétichisme.

Une grande part de l'attrait que peut exercer sur nous une oeuvre d'art relève du fétichisme. La première conséquence tient au culte de la signature qui authentifie une oeuvre et lui donne son statut en fonction de la célébrité qu'elle illustre.
La politique de bien des collectionneurs fonctionne sur la réputation des signatures et parfois au détriment de la qualité de ce qu'elles affichent.
Tout un système marchand fonctionne sur ce prestige qui est relatif, souvent provisoire, et culbute les oeuvres dans un tourbillon financier qui n'a rien à voir avec leur qualité intrinsèque.
Au terme d'une évolution qui aura vu le renoncement progressif aux critères traditionnels de la création artistique, aura inventé de nouveaux médias, de nouvelles techniques, l'oeuvre d'art acquière son statut par la seule détermination de celui qui la signe. Marcel Duchamp a ouvert là une voie périlleuse.
En toute logique, même réduite à sa plus simple expression, une "oeuvre d'art" devient l'objet d'un "culte" qui n'est plus celui de la qualité (du savoir) mais du code qu'elle impose et que l'amateur s'efforce de décrypter.
On voit ainsi progresser un nouveau rapport entre l'amateur et l'oeuvre d'art qui échappe à tous les critères jusqu'alors respectés, mais conduit le regard (et l'admiration) vers un objet chargé, par convention, d'un prestige qui n'a de sens que dans le contexte artistique où on le place.
Le même porte-bouteille acheté au BHV n'aura de "valeur", de prestige, que dans l'aura du musée qui le présente.

 


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1. saintsonge  le 10-02-2011 à 12:22:52  (site)

Il est vrai qu'on pourrait dire en y mettant la bouteille : "L H O O Q" !...
Quand on sait qu'il a commencé avec des boîtes d'objets tous plus absurdes que poétiques, son fétichisme date de loin (1913) ! Et, à la suite, ces "neuf Moules Mâles" qui s'érotisent avec une machine, ça le confirment comme tel !.. Le Hasard se marie à l' Humour...Quand je pissais dans les tasses, je n'inondais pas de champagne doré l'art d'une possible "Fontaine" de ce normand nationalisé amerlok qui affirma qu'une "révolution formelle de l'art moderne peut se comparer à celle du Quatroccento"... On y maîtrise les explosions "de noms, d'individus, d'espace et de scène virevoltante".... En descendant nu mon escalier (immortalisé sur mon blog - l'escalier aux livres !), fais-je un semblant, une réplique lente d'un autre Duchamp'être' ?...
C'est la petite fine pluie qui nous arrose les urinoirs de la pensée douarneniste, à six degrés de plus que la Chamoniarde du jour....(12° ici ; 6° là-bas, ai-je su)

2. saintsonge  le 10-02-2011 à 12:24:25  (site)

PS/ DONC : "c'est le recycleur qui fait le tableau".. M. D (Marchel Duchamp aurait-il aussi "recyclé" les initiales de Duras, la M.D notoire ?)

 
 
 
posté le 09-02-2011 à 11:34:58

Chez Lise Deharme.

Curieusement,  les "intérieurs" de certains écrivains qui ressemblent alors à ceux des collectionneurs, ont quelque chose de suranné, tant l'accumulation y trahit plutôt le côté maniaque de celui qui l'aménage, mais il rejoint, par un effet inattendu, celui de la cocotte, dont les visées sont pourtant bien différentes.
Ici, chez le créateur, c'est l'envie compulsive de créer son propre univers, là chez la professionnelle de l'amour, c'est le besoin d'étaler sa richesse de même qu'elle se couvrira de bijoux pour "paraître".
La bizarrerie est un effet de style chez la seconde, une preuve de culture chez la première, la pratique en étant plutôt réservée aux femmes, encore qu'il arrive que l'homme sans rien perdre de sa virilité y fasse, lui aussi, assaut de singularité, de préciosité.
Lise Deharme aura été une figure singulière de  la vie littéraire des années de l'entre deux guerres. Amie (voire plus) des surréalistes elle actionne par sa personnalité troublante, le processus créateur de certains d'entre eux, dont André Breton, et c'est d'un gant oublié par elle à la Centrale surréaliste qu'est né cet objet fétiche dont les surréalistes sont si friands.

 


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1. Saintsonge  le 09-02-2011 à 11:43:50

Oui, justement, je cherche ici le fameux "gant en daim bleu pâle" qui stipule la marque de fabrique des Surréalistes et un passage de Nadja !...
Il n'y est pas.

 
 
 
posté le 09-02-2011 à 11:03:43

Piero Manzoni, l'art fétiche ?

Il avait la rondeur qui suppose la jovialité, un humour caustique et une chaleur humaine que la rigueur de ses concepts artistiques ne laissent pas deviner.
Du temps de Sens Plastique on le voyait souvent, participant avec discrétion à nos petites réunions amicales à Pierrefitte. Un jour il apporta, sur un bristol, l'empreinte de son pouce. Quelque chose qui tenait de la pratique policière mais prenait, avec lui, une forme de discrète allusion à la carte de visite que l'on déposait autrefois dans les antichambres (voir Proust), lui donnant le pouvoir de signifier un passage.
Sa carrière s'est faite dans la fulgurance des modes et des options esthétiques qui, dans les années 60, se multipliaient, se croisaient, tissant un formidable tissu d'idées fortes propres à modifier grandement le rôle de l'art dans la société.
Son rôle n'y est pas mince, même s'il reste relativement discret. De toutes manières il a pour cadre l'Italie de l'époque où la vitalité des revues, des galeries dépassait largement ce que l'on faisait à Paris.
Sans doute, son point de départ a été la pensée et l'action d'Yves Klein (dit Yves) dont Restany a coordonné l'action (sa peinture sur un un nu féminin n'est qu'une réplique de ce qu'avait fait Yves Klein dans un cérémonial qui mettait la nudité en fonction d'être "le pinceau" d'une aventure picturale). Mais, en Italie, Piero Manzoni a joué le rôle de catalyseur, de précurseur, dans l'évolution de l'Arte Povere qui a balayé toute une génération et orienté l'art vers le simple choix d'objets ordinaires (écho à l'action de Marcel Duchamp) et la culture des matériaux pauvres (d'où le titre donné au mouvement).
Manzoni, sur des bases théoriques qui vont connaître leur développement, et l'illustration de leurs limites, va cependant donner une dimension plus intériorisée à ce rapport qui semble si évident, et naturel, avec la réalité.
L'exposition d'excréments humains a suscité railleries et scepticisme (au premier degré). Sans doute le pas était franchi qui dépasse l'usage de l'art à des fins esthétiques pour pénétrer dans le domaine de la sociologie, et  par étapes, de la psychanalyse.
A quoi on peut ajouter une dimension qui est courante dans les arts primitifs (mais avec une connotation religieuse), quand l'art devient fétiche.
Au lieu de créer un objet fétiche (entrant parfois dans une pratique rituelle), Manzoni propose des objets (ou des matières) qui soulignent la part inconsciente mais irrémédiable de la nature humaine. Une prise de conscience de notre réalité jusque dans ce qu'elle peut avoir de dérisoire, voire de repoussant.

 


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1. Saintsonge  le 09-02-2011 à 11:46:46

Contre l'idée que les ex-crèments puissent être qualifiés d'oeuvres d'art, même en boîte (lui, ou un autre artiste, qui les y mit ?)... En ce cas, les trottoirs douarnenistes sont des tableaux naturels signés des races canines, il y en que trop !... La merde et l'argent, c'est Freudiennement pareil...
Un temps de chien, aujourd'hui...
Gris, froid, la pluie peut tomber, mais j'ai un rendez-vous avec un couple sur la Plage (aura-t-elle un gant de daim bleu ?)

 
 
 
posté le 08-02-2011 à 16:51:34

Miro-Eluard, la danse des mots.

En quoi l'art contemporain, surtout quand il est "activé" par la   complicité de la poésie, se distingue-t-il fondamentalement de  celui qui, juste le précède et revendique lui aussi ce rapprochement avec les mots. Soit pour les compléter, dialoguer avec eux, exalter leurs forces cachées.
La liberté d'écriture, la vivacité de ton, l'audace dans la conquête de l'espace en constituent quelques uns des traits qui l'annoncent, l'imposent et lui donnent cette vitalité que suivra une remise en question radicale de ses effets.
Comme si, à l'énergie qui commence avec le futurisme, brûle de tous ses feux avec le surréalisme et émerge, tout naturellement, sur le rôle prépondérant de l'écriture, elle-même devenue signe d'art (Olivier Debré en fera une théorie tout en optant pour d'autres figures de style), on ne pouvait que revenir à la culture de l'objet pour lui-même.
 Miro, venu de la plus exacte représentation des choses du réel ("La ferme"), va s'élancer avec plus d'enthousiasme que de réflexion (la mise en pratique d'une théorie), dans l'exploration du geste réduit à sa plus simple expression. Frôlant même, parfois, la brutalité et la suavité de l'art brut (sans culture que celle d'un rapport très personnel, et souvent obsessionnel, avec des fantasmes particuliers). encore que Miro détient la particularité d'une sorte d'élégance naturelle à économiser ses effets tout en donnant tout son sens au trait dans son premier jet.
Sensible, plus que tout autre, à cette approche "sans filet" de la surface du papier que lui même occupe avec le pouvoir des mots (il aime les calligraphier), Paul Eluard ne pouvait qu'être amené à collaborer avec lui. Ce sont alors des pages d'une étonnante fraîcheur où règne l'esprit de la lettre dans ses rythmes de danse, sa joyeuse conquête. Même les personnages qui, d'occasion, y naissent, furtivement, ont cette allure narquoise et d'une théâtralité qui tient de la culture de guignol. Alfred Jarry n'est pas loin.

 


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1. Saintsonge  le 08-02-2011 à 21:52:44

Tout ce qui paraît enfantin dans l'art ne l'est point. J'adorerai toujours Miro / Eluard / Car c'est faire la synthèse du monde autour de soi "comme point de départ, jamais comme aboutissant", et d'obtenir Miro , je joue encore aux "six patiences".... On joue, monsieur Sorel, on joue ?... Le monde est si brutal ! Et, de ne vieillir jamais... Voyez, jouer, c'est vivre mieux , avec sérénité pour point de départ ... On joue, monsieur mon ami, on joue ?

2. saintsonge  le 12-02-2011 à 07:13:33  (site)

J'ajoute en ce matin que j'avais omis de vous spécifier qu'en exergue de mon livre à paraître j'ai justement choisi un poème d'Eluard !!!

 
 
 
posté le 08-02-2011 à 10:32:25

Cendrars au mur.

Sans doute le mur est-il celui de la Prison de la Santé. Blaise Cendrars, à la fin de sa vie, habitait à son ombre (rue Jean Dolent). L'homme est saisi dans son quotidien, à l'heure de la promenade. Avec les éléments propres à sa silhouette familière : le béret, le manteau jeté sur les épaules.
Un portrait en dit long sur son modèle. Voici l'homme des grands espaces, des aventures au delà des mers, d'un quotidien brûlant, transformé en piéton de Paris à l'instant d'un temps d'arrêt, peut-être de réflexion. La rudesse du mur est le seul décor qu'il s'est choisi (à moins que ce soit le photographe à l'attente du meilleur moment) et le vide de la rue où passent de vagues silhouettes anonymes.
Cendrars aura été le poète de la fuite, du rythme frénétique de la modernité, le chantre d'un monde nouveau, avec ses contemporains Apollinaire, Fernand Léger, Robert et Sonia Delaunay, Picabia.
Au terme d'une vie agitée, l'homme devient ce piéton en symbiose avec la ville dans ses stances les plus farouches, les plus immobiles. Le choix du mur de la prison de la Santé n'est pas futile ni innocent. Il porte en lui toute une sagesse, une pensée intériorisée qui s'est alimentée de toutes les expériences humaines, des plus fabuleuses rencontres, que le sort du prisonnier ne résume pas mais illustre, la caricaturant. 


 


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1. Saintsonge  le 08-02-2011 à 21:46:11

Il a le sens "transibérien" des mots, oui.

 
 
 
 

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